19. Enceinte
Après un temps propice à ce qu'une idée si insidieuse qu'elle l'a presque rendue pale ait pu se développer dans son esprit, Kylian parvient à articuler dans un phrasé plus que basique :
— Qui est enceinte ? Toi et... Léa ?
Sans quitter le garçon du regard, Julia acquiesce avant de rajouter :
— Les autres aussi.
Rattrapé par cette confidence dont les conséquences le frappent tel un coup porté en plein sternum, Kylian ne peut s'empêcher de tourner la tête en direction du groupe de prisonniers à moitié constitué de filles.
Constatant l'ampleur du problème, il dévisage à nouveau la rouquine et la questionne alors pensant que, comme à son habitude, elle aura réponse à tout :
— Comment ?
— Je... Je ne sais pas, lui dit l'autre.
— Tu en es sûre, renchérit Kylian.
Ce à quoi Julia réagit par une moue que le garçon interprète comme étant un désaveu des plus terribles.
Alors que les deux amis se regardent intensément, et sans que personne dans la cellule n'y soit préparé, y compris ceux du groupe de captifs qui s'y nourrissent encore, les mangeoires de métal se rétractent dans le mur.
Après quoi, le drone et sa lumière qui surveillaient jusqu'à présent les lieux disparaissent pour laisser place à l'obscurité la plus totale. L'événement est suivi quasi immédiatement par une violente rotation de la cellule qui fait basculer tout un chacun vers l'une des faces de l'espace exigu.
Malgré la confusion et l'impossibilité de voir clairement, Enzo, sans plus attendre, qui a bien compris que la boîte qui les retient tous prisonniers vient de quitter son emplacement pour commencer à se déplacer, se rapproche à tâtons de Kylian et Julia. Enjambant et parfois en bousculant ses congénères pour se frayer un chemin, il arrive enfin à leur niveau. Enzo lance alors au jeune noir une injonction qui ne laisse aucune équivoque possible :
— Frappe-moi ! Frappe-moi aussi fort que tu peux !
— Quoi ? Non ! Pourquoi ? lui répond Kylian qui, malgré la pénombre, parvient à distinguer les yeux bleus du métis qui scintillent.
— Ça va me prendre trop de temps de créer un passage dans l'une de ces cloisons, il faut faire diversion ! Qu'un drone apparaisse et qu'avec lui, l'un de ces putains de murs s'ouvre ! C'est notre dernière chance de sortir d'ici vivants, alors frappe-moi.
Sans trop comprendre pourquoi Kylian hésite encore à agir, Enzo lui décroche une droite qui le fait vaciller. Ce premier coup est suivi quasi immédiatement par un second qui propulse le garçon contre la cloison la plus près de lui.
— Je suis désolé, crache Enzo à Kylian, mais on n'a plus le temps de discuter.
Après une fraction de seconde durant laquelle il reprend du poil de la bête, aussi surpris qu'énervé, Kylian s'élance et se rue, tête la première, sur son agresseur. En le plaquant comme au rugby, les deux adolescents ainsi imbriqués traversent tout l'espace avant de percuter violemment un groupe de prisonniers.
S'étalant sur le sol métallique dont les alvéoles éraflent leurs coudes et leurs genoux, Kylian et Enzo y poursuivent leur bagarre en échangeant de furieux coups de poing. Alors que chacun dans la pièce a pris soin de s'éloigner de la rixe, la sempiternelle voix-robot ne tarde pas à se faire entendre :
— Stop ! Vous, stop !
Ces mots sont à peine crachés dans un crépitement de haut-parleur, qu'ils sont suivis par l'apparition d'un drone et sa lumière. S'extirpant d'un passage tout juste créé dans l'une des cloisons et qui reste ouvert, l'engin lévite jusqu'aux deux combattants. Les éclairants de son phare, il répète :
— Stop. Vous, stop. Sinon. Vous, mourir.
Engagé dans une lutte à laquelle les deux prisonniers semblent ne plus vouloir mettre fin, le poing de Kylian s'abat sur le visage d'Enzo et entaille son arcade. Fou de rage, alors que du sang gicle et aveugle son œil, le métis rend coup pour coup et, frappant, ouvre la lèvre supérieure du jeune noir.
Julia, qui se tient à bonne distance de l'échauffourée, comprend vite qu'elle aussi doit participer au « plan ». Fixant sur le drone son regard, elle voit s'extirper de son ventre deux tiges métalliques entre lesquelles apparaît un arc électrique. Alertée par le danger qui va frapper ses amis, la rouquine se jette à corps perdu sur la menace.
Surprenant totalement l'engin volant, Julia le saisit de ses deux mains comme elle le ferait pour stopper un tir de ballon de foot. Maintenant suspendue à la machine qui accuse le coup de son poids, l'adolescente est entraînée vers la paroi où l'ouverture aussi grande qu'une tête humaine a été créée. Essayant tant bien que mal de la rallier pour fuir, le drone, qui n'y parvient pas, répète de sa voix robot devenue ridicule :
— Stop. Vous, stop. Lâcher. Sinon. Vous, mourir.
Julia, qui n'en a cure, tient bon. Ses pieds ne touchent plus terre lorsqu'elle remarque le passage.
— Kylian, Enzo ! Vite ! crie-t-elle à pleins poumons.
Stoppant immédiatement leur combat pourtant si réel, les deux garçons se relèvent en s'entraidant. Se précipitant vers l'endroit où se trouve Julia, ils saisissent de leurs mains ouvertes les bordures de la maigre percée apparue dans le mur et, forçant dessus de tous leurs muscles, parviennent à en agrandir le diamètre.
Julia, qui est toujours aux prises avec le drone, réussit quant à elle dans un effort qui lui arrache un râle à le propulser contre l'une des parois de la pièce. Sous l'effet du choc contre le métal, l'œil de l'engin volant se brise et sa lumière s'éteint, plongeant à nouveau l'endroit dans l'obscurité.
Mais la menace, qui n'a pas dit son dernier mot, continue à léviter de façon maladroite dans l'espace exigu. Comme s'il avait été rendu ivre et après avoir manqué de percuter à plusieurs reprises les autres prisonniers, le drone termine sa course dans l'un des murs. S'y écrasant, il laisse échapper de sa carcasse ouverte de fines giclées étincelantes avant de venir mourir sur le sol.
-
J'espère que vous avez toutes et tous passé un excellent et merveilleux Noël. Encore une fois, merci beaucoup d'avoir lu ce nouveau chapitre jusqu'au bout. N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé et à cliquer sur la petite étoile pour voter :) Je vais continuer de publier la suite au rythme d'un chapitre par semaine tous les dimanches matin vers 10 heures. Bises.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro