Chapitre 15
—Lucy—
Je suivais Methyst, avançant à quatre pattes dans l'étroit tunnel, Salomé fermant la marche. Même si je savais que je ne pouvais pas le faire, je me retenais de lui sauter à la gorge pour lui arracher le visage.
Je me sentais mal, dans cet étroit couloir. Je n'aimais pas me sentir aussi enfermée. Ça me ramenait à des mauvais souvenirs, auxquels je n'avais pas pensé depuis très longtemps. Je luttais pour essayer de garder un contact avec la réalité, pour ne pas me laisser emporter par mes pensées, accrochant mon esprit à la douleur de mon épaule et aux bruits que nous faisions jusqu'en direction de la sortie. J'entendis la voix de Descole nous dire qu'il venait d'arriver à la sortie et qu'il n'y avait rien d'inquiétant de l'autre côté pour le moment.
Je soupirais, anticipant le soulagement que j'éprouverai une fois sortie de cet affreux endroit. Bientôt, Methyst sortit du tunnel, et dès que mes yeux quittèrent l'obscurité pour se faire attaquer par la lumière du soleil, je ne pus retenir un fin sourire de contentement. Je détestais le soleil, d'ordinaire, mais pour une fois, sentir la chaleur de ses rayons contre mon visage me rassurait.
-Tout le monde va bien, demanda le professeur après avoir aidé Salomé à sortir ?
Nous acquiesçâmes tous tandis que nous vîmes Descole partir en courant à ma droite. Je lançais un rapide regard aux autres avant de me lancer à sa poursuite, bien qu'ignorant les raisons l'ayant poussé à s'enfuir. J'entendis des bruits de course derrière moi, me prouvant que les autres me suivaient.
Nous finîmes par déboucher sur un terrain que j'identifiais comme le site de fouille de Methyst, mentionné plus tôt. Descole avait sorti son épée et semblait regarder dans toutes les directions.
-Plus un geste !
Nous vîmes un groupe d'hommes portant le même uniforme nous pointer avec des armes à feux, des lunettes de soleil masquant leurs yeux. Mais la femme qui les commandait était Melody. Descole s'apprêtait à leur foncer dessus mais fut retenu par Layton, ce qui le fit protester :
-Lâche-moi Layton ! Je dois terminer ce que j'ai commencé !
-Enfin, ouvre les yeux ! Si tu tentes de les attaquer tu ne pourras pas y survivre ! C'est du suicide !
-Qu'importe, rétorqua mon complice en dégageant son bras !!
Comment ça "qu'importe" ? COMMENT ÇA "QU'IMPORTE" ?! J'avais perdu Maman, je n'avais ni ami ni même un semblant de connaissance amicale, et la seule personne qui avait montré de l'intérêt et un semblant d'amitié pour moi n'en avait rien à faire de la possibilité de rester en vie ou non ?! Je m'en contrefiche, si je parais égoïste, il est hors de question que je sois seule de nouveau !!
-P-professeur, balbutia le gamin d'un air effrayé...
Je me rendis compte que je recommençais à m'énerver. La fumée noire m'enveloppait, et ma colère commençait à me transformer aux yeux des êtres qui m'entouraient.
Je vis les hommes armés trembler et reculer tandis que j'avançais, n'obéissant à aucun des commandements de Melody :
-Arrêtez bande d'abrutis !!! Elle est seule, désarmée et blessée !! Vous êtes plus nombreux et mieux équipés, et vous avez l'intention de fuir devant cette idiote ?!? Dépêchez-vous de tirer avant que je ne m'énerve !!!
-Trop tard, murmurais-je avec un sourire machiavélique.
Je continuais de m'avancer vers eux, et bien que certains tentaient tant bien que mal de maintenir leurs arme dans ma direction, la plupart s'étaient enfuis, sous les protestations de leur cheffe, qui tentait tant bien que mal de me viser. Malgré son sang froid apparent, je pouvais discerner une terreur familière dans ses yeux.
-Dégagez d'ici, lançais-je d'une voix forte !! Cette terre est maudite !! Maudite par les cendres impures des sorcières s'étant mêlées à la terre et au sang des innocents !! Si vous ne vous enfuyez pas sur l'heure, vous pouvez être surs que la malédiction vous poursuivra jusqu'à votre dernier souffle !! Vous vivrez les pires malheurs que l'humanité ait connu en l'espace d'une vie !!!
Ces paroles achevèrent de créer la panique au sein de la petite milice et les fit tous partir. Je poussais un rire sadique. Couards qu'ils étaient, c'était évident qu'ils n'oseraient pas revenir ici avant au moins quelques heures, le temps que Melody réussisse à réunir sa troupe et à les convaincre de la facticité de mon mensonge.
Descole en profita pour charger sur eux, cependant la seule à lui faire face fut Melody, qui lui tira dessus. Il esquiva la balle en plongeant sur le côté, mais se releva rapidement et réussit à atteindre la jeune femme avant qu'elle ne le vise à nouveau. Il passa la lame de son épée sous sa gorge et marmonna quelque chose. Elle hocha fébrilement la tête de haut en bas pour signifier son accord.
Je tentais de me calmer, ramenant mes ombres à moi, et vis le professeur s'approcher de Descole :
-Qu'est-ce-que tu comptes lui faire ?
-Rien de plus que ce qu'elle ne nous a déjà fait, répondit mon complice. Nous avons un otage. Si ces imbéciles tentent de nouveau de nous attaquer, nous n'aurons pas à faire usage des armes. Du moins, pas dans l'immédiat. Layton, j'aurais un marché à te proposer quand nous l'aurons maitrisée.
-J-je vais voir si j'ai de la corde, lança Methyst en partant en courant !
Je regardais successivement le professeur, puis Descole. J'avais envie de m'expliquer avec lui, mais les présences de Melody et Salomé me mettaient tout sauf à l'aise. Surtout cette dernière, qui me fixait avec insistance alors que j'esquivais volontairement son regard. Je ne voulais pas reperdre le contrôle de moi-même maintenant. Bien sûr, je n'avais pas l'intention d'oublier la vengeance que j'avais promis à Maman, mais j'étais consciente que ce n'était pas le moment.
Lorsqu'enfin, Methyst revint, il attacha les mains de Melody entre elles, et Descole la confia, à lui et à sa mère, avec pour consigne de ne pas la laisser s'échapper, qu'importe ce qu'elle pourrait dire. Luke leur proposa son aide. Quant à moi, je me suis assise au sol, non loin de mon complice et du professeur, le regard volontairement dans le vide pour leur faire croire que je n'écouterai pas.
-Quelle était ta proposition, Descole ?
-J'accepte d'abandonner cette découverte à toi et ton petit protégé, si tu acceptes les deux conditions suivantes : ne cherche pas à me suivre, et laisse-moi m'occuper du cas de cette femme. Dans le cas contraire, je serais contraint de récupérer la découverte qui me revient et je risque de devoir forcer mon départ.
Layton sembla considérer la proposition pendant quelques minutes :
-Je refuse.
-Vraiment ? Dommage Layton. Tu es plus sage, d'ordinaire.
-Tu n'es pas obligé de poursuivre ta vengeance, Descole. As-tu conscience de ce que tu es devenu à cause d'elle ? As-tu conscience que cette obsession t'a menée à la folie ? Tu vaux mieux que cela !
-Tu n'as pas l'air de comprendre. Tu penses sincèrement que je compte laisser ceux qui ont détruit nos vies, qui ont détruit les vies de nos parents, s'en sortir indemnes ?! J'ai les capacités et la possibilité de les détruire et de les empêcher de nuire à nouveau, croies bien que je n'ai pas l'intention de laisser tout cela s'échapper !!
Je tiltais en entendant le discours de Descole. Comment ça "leurs" parents ? Ils sont frères ? Je me retins de les interroger du regard et continuais d'écouter leur conversation.
-Descole, reprit Layton d'un ton calme. Je veux bien admettre que tu pars du principe que tu n'as plus rien à vivre ou à perdre, mais qu'en est-il de Lucy ? Regarde-la. Elle a à peine atteint l'âge adulte, c'est encore une adolescente. Elle a toute la vie devant elle. Elle a encore beaucoup de choses à voir, à vivre, et tu as vraiment l'intention de lui faire suivre la même voie que toi ? Tu comptes vraiment la conforter dans l'idée que la vengeance est le seul moyen pour elle de pouvoir vivre à nouveau ? Tu sais aussi bien que moi que c'est faux.
-C'est ce que tu croies, rétorqua Descole. Elle a perdu tout ce qu'elle avait. Il est normal qu'elle exige réparation.
Layton soupira :
-Tu sais que tu as tort. Se venger ne vous rapportera pas ce qui vous a été enlevé, à elle comme à toi. Et même si cela vous apaise, qu'est-ce-que cela vous aura apporté ? Vous aurez gâché une bonne partie de vos vies seulement pour pouvoir voir celle de quelques personnes détruites, et vous y aurez également sacrifié quelque chose que vous ne reverrez pas : votre humanité. Vos intégrités mentales valent-elles la peine de voir les vies de personnes que vous haïssez détruites ?
Descole ne répondit pas, se contentant de le fixer dans les yeux, avant de répondre :
-C'est trop tard pour moi, et tu le sais.
-Mais ce n'est pas trop tard pour elle.
-Tu ne me feras pas changer d'avis.
-Est-ce vrai ou est-ce que tu essaies de te convaincre que c'est vrai ?
-Tu connais déjà la réponse, rétorqua mon complice.
Il se retourna et s'avança vers moi, s'accroupissant juste devant moi :
-Comment va ton épaule ?
-Pas trop mal.
-Vraiment ? Et si je fais ça ?
Il appuya légèrement mon épaule, mais j'avais l'impression qu'il avait donné un grand coup de poing dedans, qui me fit pousser un petit cri ridicule. Il soupira :
-Tu es une stupide jeune fille bornée.
-Oui mais sans moi vous ne vous seriez pas débarrassés de cette bande de types armés, rétorquais-je avec un petit sourire.
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