IX - THOMAS
Quand on est dans une mauvaise phase, on se dit toujours que ça ne peut pas être pire. Qu'à un moment, on attendra un palier infranchissable. Et si je pensais l'avoir largement dépassé lorsqu'Isa a tenté de partir pour la première fois, j'ai fait la plus grosse erreur de mon existence.
Je pensais que si elle ne m'avait pas quitté, c'est qu'elle ne devait pas le faire. Qu'elle était destinée à rester à mes côtés jusqu'à la fin. Qu'elle s'était rendue compte qu'elle avait une chance.
J'avais tout faux, sur toute la ligne.
J'ai eu une belle vie comparée à celle d'Hope. Je n'avais pas des parents très aimants mais j'ai passé mon enfance avec la plus amusante des femmes du monde qui m'a élevé comme ma mère. Je n'avais pas un quotidien très excitant mais malgré cela, j'avais Isa. Elle réhaussait tout, et dès que je la voyais, mon cœur faisait un bond dans ma poitrine et la situation passait de "ennuyante" à "exaltante".
Il me suffisait de l'apercevoir pour qu'elle égaye tout et me fasse sourire à m'en bloquer la mâchoire. Et c'est pour cela que quand elle a commencé à aller mal, mon bonheur m'a filé entre les doigts. Littéralement.
À présent, quand tu entrais dans une pièce, je remerciais Dieu que tu sois encore en vie et que tu n'aies pas cherché à repartir. Je remerciais le monde entier que tu me fasses don de ta présence, ne serait-ce qu'on jour de plus, et j'espérais que tu serais toujours là le lendemain.
Tu avais effacé toutes mes inquiétudes avant de les faire revenir au galop.
Alors j'ai voulu te retenir. Trouver un moyen de te raccrocher définitivement à cette Terre même quand au plus profond de mon être je savais que c'était impossible.
Je t'ai demandé en mariage.
Et encore aujourd'hui, je ne le regrette pas. Parce que je sais que si je ne l'avais pas fait, même si nous n'avons pas pu nous marier, je regretterais aujourd'hui de ne pas avoir utilisé tous les moyens en ma possession pour te sauver.
Et même si nous n'avons été fiancés que quelques semaines, j'ai eu un aperçu de ce qu'aurait pu être une vie à tes côtés. Ta présence me suffisait, même si elle était devenue bien moins rayonnante qu'avant. Je t'aimais de tout mon cœur et je refusais de te lâcher.
Alors quand la demande en mariage n'a pas suffi, j'ai sombré.
J'ai sombré, à tes côtés.
Je crois que c'est ça qui a été le déclic pour toi. Qui t'a fait faire ton choix de partir définitivement. Qui t'a fait renoncer pour de bon à la vie.
Parce que tu avais beau être au fond du gouffre, tu restais la personne la plus généreuse que j'ai jamais rencontré. La personne la plus humble et la plus fondamentalement gentille.
Peut-être que ça qui t'a perdu au final. Le fait d'être trop gentil. Parce que s'il y a quelque chose que j'ai découvert avec les années, c'est que la vie, c'est une putain de guerre.
Des batailles qui s'enchainent. Certains disent que c'est un cadeau et c'est vrai, mais c'est un cadeau qu'il faut mériter, en se battant avec toute notre âme et toutes nos tripes.
Et même si on ne dirait pas, seuls les plus forts en réchappent.
Tu étais forte, Isabella, n'en doute pas. Mais peut-être simplement pas assez pour toutes les épreuves que la vie t'a balancées à la gueule.
Mais tu as su les affronter de la plus belle des manières possibles. Même quand tu te savais en train de dépérir et de sombrer, tu continuais à me réconforter, à m'aimer, à penser à moi. Et c'est ainsi que tu as fait le choix de partir. Le choix de cesser de lutter contre ton destin.
Pour moi.
Quand on y repense, c'est fou ce qu'on peut faire par amour, non ?
On dit qu'on peut déplacer des montagnes. Tu as fait tellement plus.
Tu as choisi de sacrifier tes dernières semaines à vivre sur Terre pour que j'en ai plus. Et je pense qu'au fond de toi, tu savais. Tu savais que tu ne pouvais pas être sauvée, comme tu me l'as si bien dit une fois. Et tu savais que si j'essayais, je n'allais pas en réchapper.
Alors tu as fait ce choix. Et j'appelle cela un choix car je sais que tu aurais aimé que je dise cela. Que je rappelle que tu t'es battue jusqu'à la fin de tes jours et que tu n'as jamais abandonné. Que tu n'as pas cédé.
Certes, tu es partie. Mais ça a été et restera ta décision.
Et je pense que rien que ça montre le courage dont tu as fait preuve.
Tu t'es sacrifiée, pour me permettre de vivre.
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