Chapitre I
-« Comment ose-t-il se permettre de contrôler toute ma vie ?! ».
Furieux, Kim Jong In jeta au sol la plupart des affaires qui se trouvait sur son bureau d'un grand coup de bras, puis il abattit avec violence ses deux paumes de mains sur ce dernier. Il entendit les pas précipités de sa secrétaire qui fuyait la pièce, mais il ne s'y intéressa guère davantage et jura à plusieurs reprises. Le jeune homme de vingt-cinq ans n'en revenait pas : comment son père avait-il pu prendre une telle décision sans lui en parler ? Passant une main dans ses cheveux épais pour les rabattre en arrière, il ramassa le dossier que venait de lui apporter son employée, et s'assit dans son grand fauteuil afin de le relire une nouvelle fois. Il parcourut rapidement des yeux ces quelques feuilles avant de soupirer. C'était tout simplement incompréhensible... Et totalement stupide.
La famille Kim avait fait fortune depuis plusieurs générations dans le monde de la mode, sa notoriété n'était plus à faire en Corée du Sud et ses ventes s'exportaient à travers le monde entier. De nombreuses personnes étaient prêtes à dépenser des sommes faramineuses pour s'exhiber avec les dernières créations de la marque « Heya » et cette dernière était présente lors de tous les défilés les plus prestigieux. Jong In avait été bercé dans ce monde surréaliste, mais au combien cruel, depuis sa plus tendre enfance : il était habitué à commander des employés, à prendre des décisions importantes, à faire des sacrifices pour le bien de l'entreprise, à se montrer dans les soirées mondées, à séduire les journalistes, et à cacher sa vie privée. Dès son plus jeune âgé, on lui avait inculqué une éducation stricte, des manières de la haute bourgeoisie, ainsi que la pression et l'envie d'être toujours meilleur que les autres. Mais comme toutes les familles fortunées, la sienne était déchirée et notre garçon n'avait jamais vraiment connu la chaleur d'un foyer. Ses parents avaient divorcé quand il avait douze ans, son géniteur s'était remarié avec une femme beaucoup plus jeune, et la seule personne qui lui avait réellement donné de l'affection avait été sa gouvernante jusqu'à ses dix-huit ans. Cette vieille femme n'habitait plus dans la grande demeure des Kim puisqu'elle était désormais à la retraite, mais cela n'empêchait pas Jong In de prendre régulièrement de ces nouvelles et d'aller lui rende visite dès que son emploi du temps le lui permettait.
Bref... Que dire de plus ? Il avait suivi une scolarité dans les établissements les plus cotés du pays, avait toujours été parmi les mecs les plus populaires du bahut et n'avait jamais perdu une occasion de faire la fête, jusqu'à l'obtention de son diplôme du fin d'études. Après cela, son père l'avait envoyé deux ans en France pour qu'il continue à s'instruire dans le monde de la mode; puis à son retour, il s'était retrouvé à la tête de toute la gestion de la partie chaussures pour hommes, femmes et enfants. Aujourd'hui, après cinq ans d'expérience, il était à l'aise dans ce rôle qu'on lui avait confié et les bénéfices continuaient d'être en hausse.
Alors pourquoi lui faire ça maintenant ? Il avait besoin de réponses.
Il sortit de son bureau en grandes pompes, traversa l'un des nombreux couloirs de l'énorme tour où une partie de l'entreprise avait élu domicile et il appuya sur le bouton de l'ascenseur. Il se rendit au dernier étage du bâtiment, fit à peine attention aux personnes qui le saluèrent et s'approcha de l'antre de son paternel.
-« Monsieur Kim, vous ne pouvez pas entrer !, s'exclama le secrétaire en lui barrant la route. Le directeur est en réunion avec plusieurs de vos actionnaires, je vais vous demander de bien vouloir attendre quelques minutes s'il vous plaît.
-Je ne peux pas attendre. J'ai quelque chose d'important à voir avec lui, alors poussez-vous !, rétorqua le plus jeune en essayant d'atteindre la poignée de porte.
-Monsieur, soyez raisonnable s'il vous plaît ! Ne m'obligez pas à employer la force ».
Étonné de la menace, Jong In haussa un sourcil avant de s'excuser mentalement.
Tant pis pour lui...
Il devrait savoir que Kim Jong In a horreur d'être contrarié. D'une surprenante rapidité, il lui saisit le bras droit, se plaça dos à lui, puis poussa sur ses jambes pour faire passer ce type par-dessus sa tête. Le choc de sa chute résonna dans l'air ambiant mais le cadet se contenta de se redresser, d'épousseter son costume et d'entrer dans le bureau de son père. Aussitôt, cinq paires d'yeux se tournèrent dans sa direction et le jeune homme n'en oublia pas ses bonnes manières en s'inclinant poliment.
-« Sors d'ici ! Tu vois bien que je suis occupé, non ? Où est mon secrétaire ? Je lui avais pourtant bien dit de ne laisser entrer personne ! ».
Certainement entrain de recompter ces os... Bon sang, ce vieux grincheux semblait d'une humeur exécrable, comme à son habitude.
-« Il faut qu'on parle.
-Et bien ça attendra. Je n'en ai que faire de tes caprices.
-Un caprice ?!, s'exclama le fils en serrant les poings. Tu me propulses à la tête de tout notre secteur maroquinerie sans me consulter, et tu appelles ça un caprice ?! ».
Les deux hommes se dévisagèrent, soutenant sans fléchir le regard de l'autre, et les pauvres actionnaires sentirent rapidement la tension qui grandissait dans la pièce. Finalement, le chef de famille s'excusa auprès d'eux et leur fit signe de quitter la pièce avant de claquer la porte derrière le dernier.
-« Je ne vois pas en quoi cette nouvelle te mets dans un tel état ! C'est plutôt une magnifique opportunité.
-Papa, tu sais mieux que personne la somme de travail astronomique que cela représente; j'aurais aimé avoir un peu de temps pour m'y préparer !
-Je commence à me faire vieux, il en va de même pour mes idées, alors je dois penser à l'avenir de notre entreprise. Tu es jeune, tu connais le monde actuel et tous tes choix ont été judicieux jusqu'ici. Il est temps pour toi de continuer à graver les échelons, à chercher une femme, à...
-Une femme ?!, s'étrangla le plus jeune. Oh papa, s'il te plaît ! On en a déjà parlé et tu sais pertinemment que ce n'est pas ma priorité !
-Parce que tu comptes finir seul ?! Certes, à la tête d'une fortune inestimable, mais seul ?!
-Comment veux-tu que je construise une famille alors que je n'en ai jamais eu une ?! ».
Voilà, c'était dit; mais Jong In n'avait pu se retenir. C'était la principale chose, voire peut être l'unique, qu'il reprochait à son paternel mais elle n'en était pas des moindres : l'amour, la tendresse, l'affection; c'était des mots qu'il ne connaissait pas, des sentiments qu'il n'avait jamais expérimenté, et ça le rendait horriblement amer. Dès qu'il en avait l'occasion, il en faisait le reproche et il savait que c'était le meilleur moyen de pression sur le chef de famille. En effet, même si ce dernier avait un cœur de pierre, il avait pleinement conscience qu'il n'avait pas été assez présent dans la vie de son fils unique.
-« Mais tu excelles dans tout ce que tu entreprends et ça ne fera qu'augmenter ta notoriété ! Fais au moins un essai, et voyons ce que ça donne avec notre collection hiver, d'accord ?
-... Tu parviens toujours à tes fins, n'est-ce pas ?
-Comment crois-tu que j'arrive à diriger ce business sinon ? ».
Cette réponse ne fit absolument pas sourire Jong In et il ne laissa même pas son père s'approcher davantage de lui, préférant prendre congé.
Il croisa le pauvre employé qui l'avait sous-estimé et celui-ci se cacha immédiatement derrière l'écran de son ordinateur jusqu'à ce que le fils de son patron ait disparu derrière les portes de l'ascenseur. Une fois seul à l'intérieur du petit habitacle, notre jeune adulte s'appuya nonchalamment contre l'une des parois et il se mordilla la lèvre inférieure.
Fichu tic nerveux...
Le travail qui attendait son équipe et lui-même s'annonçait colossaleet il n'osait même pas penser au nombre d'heures supplémentaires qu'ils allaient devoir fournir pour tout boucler à temps. Mais c'était la réaction du public qui l'inquiétait le plus. Serait-il à la hauteur de leurs espérances ? Les résultats de leurs productions avaient toujours été une immense source d'anxiété pour lui mais pour l'instant, et il touchait du bois (ou du singe), chaque nouvelle collection avait été un franc succès.
Extirpant son téléphone portable d'une des poches de son pantalon, il envoya un message à son meilleur ami, puis retourna à son propre bureau. « 19 heures à la salle, tu es partant ? ». Voilà enfin une idée qui le réjouissait et il avait hâte de se vider l'esprit en allant taper dans un sac de boxe. Ce n'était pas pour rien s'il avait envoyé aussi facilement au tapis le secrétaire de son paternel : depuis son adolescence, il avait pratiqué différents sports, et principalement des sports de combat mais depuis qu'il avait prit son haut poste, il y allait uniquement pour se défouler et il devait l'avouer, ça devenait de plus en plus rare.
Jong In leva les yeux au ciel en constatant la pagaille que son excès de colère passager avait engendré dans son bureau et il entreprit de tout remettre à sa place. Ordinateur, papiers, crayons,... Rien ne lui avait échappé. Une fois que tout fut rangé, il s'installa tranquillement et téléchargea les derniers catalogues de maroquinerie que la marque avait créé. Il allait devoir les étudier avec intérêt s'il ne voulait pas ressortir les mêmes modèles que les années précédentes. Il envoya un mail à toute son équipe pour les prévenir d'une réunion d'exception le lendemain matin, puis il commença à découvrir les premiers modèles, prenant des notes dès que nécessaire. Cette tâche allait lui prendre des jours mais d'ici demain, il devrait avoir une vue d'ensemble sur toutes les créations des dix dernières années. Il faudrait aussi qu'il jette un coup d'œil aux autres marques concurrentes et qu'il s'occupe de sa collection de chaussures.
Ok, il distribuerait les rôles demain...
Vers dix-huit heures trente, il quitta enfin le bâtiment et se dirigea directement vers le parking privatisé par l'entreprise. Il récupéra son gros sac de sport dans le coffre de sa voiture et se rendit à pieds jusqu'à la salle. Cette dernière ne se situait qu'à une dizaine de minutes de son lieu de travail mais le garçon savait qu'aucun paparazzi ne le dérangerait ici : elle se situait au sous-sol d'un vieux bâtiment, lui-même placé dans une ruelle mal éclairée la nuit, et aucune publicité n'en vantait les mérites. Elle était tenue par un ancien boxeur professionnel qui fichait la trouille aux plus peureux et, même si des bagarres avaient déjà éclaté, Jong In aimait y venir pour être tranquille. Il salua l'un des seuls types payés pour surveiller l'entrée et il partit se changer dans les vestiaires. Il troqua son costume pour une tenue plus légère composée d'un débardeur gris, d'un jogging noir et d'une paire de baskets.
-« Te voilà enfin !, s'exclama un jeune homme aux oreilles de Yoda en passant un bras autour de ces épaules.
-Salut Chan Yeol. Enfin ? Il est pile dix-neuf heures ! On y va ? ».
Son ami hocha la tête de haut en bas et Jong In sentit sa joie communicative le gagner car ses lèvres s'étirèrent en un léger sourire. Grand et athlétique, Park Chan Yeol était lui aussi issu d'une famille aisée et les deux garçons s'étaient rencontrés au début de leur première année de collège pour rapidement devenir des meilleurs amis. Jong In avait une énorme confiance en ce géant gamin qui pouvait se montrer d'une énorme gentillesse, comme s'il pouvait tout aussi bien être capable d'inventer les coups les plus tordus. Ils avaient fait beaucoup de bêtises à deux, mais ils avaient également traversé la difficile et étrange période de la puberté ensemble. Cependant, le clan Park s'était montré beaucoup plus clément avec leur fils puisque ces parents lui avaient offert la possibilité de décider de son avenir, et le jeune homme s'était donc lancé dans la photographie. Il avait déjà d'ailleurs ouvert plusieurs galeries qui fonctionnaient merveilleusement bien.
-« Au fait, pourquoi cette soudaine envie de te défouler ?, demanda le plus grand en enroulant ses propres bandes de protection autour de ses mains. Je ne suis pas contre cette idée, loin de là; mais d'habitude, tu me préviens un peu plus tôt.
-Hum... Disons que j'ai eu une promotion... Mon père a eu la brillanté idée de me léguer tout le secteur maroquinerie en plus des chaussures, et sans m'en parler.
-Tu plaisantes ?! Il en a le droit au moins ?!
-C'est lui le chef alors je n'ai pas vraiment le choix, rappela Jong In en commençant à s'échauffer. Mais assez discuté, j'ai besoin de taper dans quelque chose ».
Les deux hommes avaient leurs petites habitudes dans cet endroit et coup de chance pour eux, il n'y avait pas grand monde ce soir. Ils contournèrent le ring de boxe placé au centre et se dirigèrent vers le fond de la salle, là où étaient suspendus les énormes sacs. Notre Jong In enfila sa paire de gants, vérifia que ses protèges tibias étaient bien attachés, puis il commença à frapper.
Une droite, une gauche, un coup de pieds,...
Ses mouvements étaient rapides, souples, mais ils manquaient de puissance. De plus, la fatigue accumulée de ces derniers jours de boulot le fit assez vite trembler et il dut serrer les dents pour continuer. Il sentait son corps s'alourdir, ainsi que la sueur qui coulait de sa nuque mais déjà, il savait que son esprit ne se concentrait plus sur ses principaux soucis.
Il frappa ainsi pendant plus d'une vingtaine de minutes avant de se laisser tomber assis sur un des bancs, épuisé et le souffle court. Il accepta ensuite volontiers la bouteille d'eau que lui tendit son ami et il en but de longues gorgées.
Mais ce fut alors qu'il le vit pour la première fois.
Ses yeux se posèrent sur ce type et il sentit sa gorge se nouer. Bon Dieu... Cet inconnu portait uniquement un jogging gris et il dégageait une telle prestance que Jong In ne pouvait détacher son regard de lui. Sa musculature était impressionnante, magnifique, sans être dans l'excès; sa ceinture abdominale se contractait à chacune de ses respirations et il semblait se déplacer avec la grâce d'un félin. Dans la faible luminosité de la pièce, notre jeune homme ne pouvait pas bien distinguer son visage, alors il se contenta de le regarder monter sur le ring et lorsque la cloche résonna, ses dernières armes tombèrent. Cet homme ne faisait que s'entraîner avec l'un des coachs, mais Jong In n'aurait pas souhaité être son adversaire. Ces coups étaient monstrueusement puissants, sa garde était impénétrable et son équilibre était irréprochable.
-« Tu le connais ?, chuchota notre jeune homme à l'intention de son ami ».
L'interpellé tourna la tête dans la direction indiquée par notre directeur et il fronça les sourcils.
-« Juste par le biais de rumeurs, ouais. Il s'appelle Kim Jong Hyun et il a 27 ans, mais à part ça... Certains racontent qu'il fait partie de la mafia sud-coréenne, d'autres disent qu'il est le chef d'un gang très influent dans notre pays. Bref, il traînerait dans des histoires pas très nettes mais il ne parle beaucoup et ne dévoile rien sur sa vie privée.
-... Ok.
-Comment ça ok ? Attends, attends; il te plaît ? Jong In sérieux... Même si tes parents venaient à accepter ton homosexualité, ce type c'est... Il n'est pas du même monde que nous. Tu es le jour, il est la nuit... Fais-moi plaisir, passe à autre chose ».
Levant les yeux au ciel, notre jeune chef d'entreprise donna un léger coup de poing dans l'épaule de son ami pour le taquiner, mais ce fut à ce moment-là qu'il croisa son regard. Des yeux profonds, froids mais incroyablement expressifs qui le firent frissonner de la tête aux pieds. Ce contact visuel ne dura que quelque secondes, puisque cet inconnu reporta rapidement son attention sur son entraînement, mais cela suffit pour que le cœur de Jong In se mette à battre avec frénésie à l'intérieur de sa poitrine. Pour la toute première fois de sa vie, il se sentit tout petit face à un homme, autre que son père, et cette constatation le déstabilisa. Devait-il en avoir peur ? Devait-il l'attirer dans ses filets pour le compter parmi ses amis, plutôt que dans ses ennemis ? Ou tout simplement l'ignorer ?
Mais comment ignorer un tel charisme...
Le lendemain matin, Kim Jong In se leva aux aurores, bien décidé à préparer la réunion qui avait lieu un peu plus tard. Cependant, son sommeil n'avait pas été très réparateur et ce fut donc d'un pas traînant qu'il se glissa dans sa douche. Il l'avait rêvé à plusieurs reprises du regard pénétrant de ce Jong Hyun et le bruit que ces coups produisaient dans les gants de son coach ne semblaient pas vouloir quitter son esprit. En fait, il espérait sincèrement que la masse de travail qui l'attendait lui permettrait de l'oublier, au moins quelques heures. Il se leva rapidement, enfila un costume marron, puis se rendit dans l'entreprise familiale.
-« Monsieur Kim !, s'exclama sa secrétaire en lui apportant un café dès sa sortie de l'ascenseur. J'ai déposé tous les papiers que vous m'aviez demandé sur votre bureau et tous les membres de votre équipe ont confirmé qu'ils seront présents en salle de réunion dans une heure. Euh... Votre belle-mère a également appelé et... Elle vous attend dans votre bureau... ».
En entendant cette nouvelle, Jong In s'étrangla avec sa boisson chaude et il s'empressa d'essuyer les quelques gouttes qui étaient tombées sur sa cravate.
-« Je suis désolé, s'empressa d'ajouter la jeune femme. J'ai essayé de l'arrêter mais vous savez comment elle est...
Ce n'est pas de votre faute, la rassura-t-il en lui souriant. C'est une femme qui a toujours besoin de se mettre en avant et qui aime faire peur aux gens. Mais vous savez quoi ? On va la faire patienter encore un peu. Allez chercher ces documents dans mon bureau, sans lui adresser un seul mot, et apportez-les moi directement en salle de réunion; je vais aller m'installer là-bas ».
Il lui adressa un clin d'œil complice qui la fit rougir et il fit demi-tour. Que pouvait bien lui vouloir cette sale fouine ? Il n'était pas du genre à détester les gens, mais cette femme était le diable incarné. Elle était capable du pire pour gagner encore plus d'argent et, si son père semblait être aveugle à ces manigances, ce n'était pas le cas de notre jeune homme. Depuis que le chef des Kim avait décidé de léguer peu à peu son royaume à son fils unique pour pouvoir partir en retraite, cette vipère s'était mis en tête de faire ami-ami avec Jong In.
Dommage pour elle, il avait beaucoup mieux à faire.
Il s'essaya donc à la chaise qui présidait la grande table réservée aux réunions, alluma son ordinateur et remercia une nouvelle fois son employée quand elle lui apporta les dossiers manquants. Il se mit ensuite immédiatement au boulot et commença à griffonner quelques idées. Malheureusement, son cerveau lui rappela bien vite l'image de l'inconnu qu'il avait vu la veille et sa curiosité l'emporta sur tout le reste : il tapa son nom dans son moteur de recherche. Ses yeux s'écarquillèrent quand il s'aperçut qu'il n'y avait aucune trace existante de ce type et son sang se glaça. Comment était-ce possible ? Il y avait bien des articles sur des Kim Jong Hyun mais aucun ne correspondait à l'homme de la salle de sport.
Rien de rien.
Comme s'il n'avait jamais existé; pourtant, notre garçon ne l'avait pas imaginé. Il soupira tout bas, ferma la page Internet afin de se concentrer sur autre chose, mais il sursauta en entendant la porte s'ouvrir derrière lui.
Il s'en était fallu de peu...
-« Bonjour patron !, s'exclama joyeusement l'un de ses dessinateurs ».
Jong In se leva pour saluer chaque personne de l'équipe et il les observa s'installer tranquillement. Heureusement qu'ils avaient pu tous venir car ils avaient vraiment du pain sur la planche. Ces gens travaillaient à ses côtés depuis son arrivée, certains présents depuis déjà de nombreuses années, et ils ne l'avaient jamais déçu, tout en lui apportant leurs propres expériences.
-« Vous n'êtes peut être pas encore au courant de la nouvelle mais à partir d'aujourd'hui, notre statut s'agrandit puisque le directeur a décidé de nous confier tout le secteur de la maroquinerie, annonça-t-il d'une voix calme qui ne trahissait en rien son anxiété. Pour nous, cela signifie deux choses : que notre formidable travail est enfin reconnu et apprécié à sa juste valeur, mais aussi qu'il va falloir se donner davantage pour relever ce nouveau défi. Je suis bien conscient que cette décision vous prend au dépourvus, et je peux vous assurer qu'il en a été de même pour moi, mais je crois en notre équipe ».
Ces paroles eurent le don de réveiller pour de bon les hommes et les femmes présents dans cette salle, mais également de les motiver car ils ne tardèrent pas à se pencher sur la recherche de différents concepts qui pourraient convenir. Leur employeur leur distribua à chacun un exemplaire des notes qu'il avait prit sur les précédents collections, puis ils se mirent tous au travail. Jong In était fier de les voir ainsi impliqué dans ce qu'il leur demandait et il mesura à quel point toutes ces personnes étaient importantes pour la prospérité de Heya.
-« Nous pourrions peut être combiner le futur concept de nos deux secteurs, proposa un des stylistes. Accorder son sac ou sa ceinture à ses chaussures permet de compléter plus facilement une tenue pour de nombreuses personnes.
-Et pourquoi ne pas partir sur un concept sportif ?, ajouta une femme. Ça fait longtemps que la marque ne s'est pas intéressée à ce pourcentage de la population qui ne cesse d'augmenter. Le sport devient un vrai phénomène de société qui regroupe tous les types d'âge. Qu'en pensez-vous monsieur Kim ?
-C'est une excellente idée ! Il est temps de montrer à tout le monde que Heya est capable de s'adapter à son époque. Je vais être honnête avec vous : j'étais terrifié à l'idée de penser à cette nouvelle responsabilité, mais c'était stupide puisque vous êtes géniaux ».
A l'heure du déjeuner, le jeune homme prit enfin la direction de son bureau. Il avait l'impression d'être plus léger depuis cet entretien avec ses employés et il était aussi rassuré. Les premiers croquis proposés lui plaisaient et il suffirait peut être simplement de changer quelques détails avant de penser aux différents matériaux dont ils auraient besoin. Il fallait également que Jong In commence à réfléchir aux mannequins qui représenteraient au mieux le résultat de leur labeur. Mais une chose à la fois; pour le moment, il lui affalait encore affronter un monstre.
Dès qu'il passa la porte de la pièce qui lui était réservé, sa belle-mère se planta devant lui avec les poings sur les hanches. Âgée d'une trentaine d'années et lui arrivant à peine aux épaules, c'était le genre de personnes à ne se soucier que de son apparence physique, avec ses cheveux teints en blond et son maquillage hors de prix, et Jong In ne s'était jamais retenu de lui montrer qu'il ne l'appréciait pas. Elle semblait furieuse et, même si il en était la principale raison, il ne s'excusera pas. Il lui adressa un regard blasé, la contourna et déposa la salade qu'il venait de s'acheter sur la petit table du salon aménagé.
-« Que me vaut le plaisir de ta visite ?, demanda-t-il en déchirant l'emballage de ses couverts en plastique. Fais vite, je n'aie pas beaucoup de temps à te consacrer.
-Pour qui te prends-tu ?! Tu me fais attendre pendant des heures et en plus, tu te permets de me tutoyer ?!, vociféra-t-elle. Tu serais tellement moins arrogant sans l'argent de ton père. Tu as beau être au sommet de l'échelle sociale, une mauvaise décision, un faux pas ou une mauvaise rencontre et hop ! Tu redeviens un misérable être humain ».
Était-ce une menace ?
-« Tic tac, tic tac. Dépêche-toi, les minutes filent et j'aimerais manger tranquillement.
-Espèce de... Très bien. Je t'ai organisé un rendez-vous arrangé demain après-midi, selon les directives de mon mari. C'est une jeune fille polie, intelligente et de bonne famille ».
La stupéfaction, mélangée à un brin de colère, s'empara brutalement de Jong In, à tel point qu'il n'entendit même pas tomber au sol le couteau qu'il venait de lâcher.
-« De quel droit te permets-tu d'agir ainsi sale folle ?!, s'emporta-t-il en se levant. Dépenser l'argent de mon père ne te suffit plus ? Apprends déjà où se situe ta place et à devenir quelqu'un de respectable avant de te préoccuper des autres ! ».
Ses cris avaient réussit à inquiéter quelques employés dans le bâtiment et deux agents ne tardèrent pas à faire irruption dans le bureau.
-« Il y a un souci monsieur Kim ?, demanda l'un d'eux.
-Raccompagnez cette femme jusqu'à la sortie et assurez-vous qu'elle ne puisse plus mettre les pieds ici sans avoir une autorisation spéciale du PDG ».
Les deux colosses s'inclinèrent devant leur patron, puis saisirent chacun un bras de l'intruse et la tirèrent à leur suite, malgré ses protestations.
A nouveau seul, notre jeune homme se laissa choir sur un fauteuil et il enfouit son visage entre ses doigts. La journée n'avait pourtant pas si mal commencé... Mais voilà qu'on venait l'ennuyer avec cette histoire de mariage. La nécessité d'avouer son attirance pour les hommes devenait urgente; malheureusement, cette confession allait certainement lui coûter son job. Son père ne se permettrait pas de laisser un gay, même s'il s'agit de son fils, prendre les rênes de l'entreprise, et il serait même capable de le faire disparaître du livret de famille.
L'avenir risquait d'être tumultueux...
A la tombée de la nuit, Jong In quitta le bâtiment mais sa bonne humeur n'était toujours pas à l'horizon. Il décida donc de rentrer chez lui à pieds, en espérant que l'air frais de ce mois de décembre l'aiderait à se détendre, et il ordonna donc à son chauffeur personnel de ramener sa voiture à la demeure familiale.
-« Si je puis me permettre monsieur, ce n'est pas une très bonne idée. Les rues ne sont pas vraiment sûres en ce moment.
-Ne vous en faîtes pas pour moi, je sais me défendre ».
L'homme âgé n'insista pas, ayant remarqué la tristesse dans les yeux de son boss, et il mit le moteur en route. Jong In observa le véhicule s'éloigner, puis il se mit à son tour en marche. Le froid ne tarda pas à lui faire rougir les pommettes, ainsi que le bout du nez, tandis qu'à chacune des ses expirations, son souffle se transformait en condensation. Il glissa ses mains dans les poches de son manteau et accéléra un peu le pas. A cette heure-ci, les rues étaient peu peuplées et il ne croisa pratiquement personne. Les dernières étudiants rentraient chez eux, les commerçants vérifiaient leurs stocks pour le lendemain et les employés de la ville terminaient de mettre en place les décorations qui serviraient à embellir Séoul pendant les fêtes de fin d'année. Nöel... Cette fête n'avait jamais eu une grande signification à ces yeux.
Le jeune homme tourna dans une petite ruelle qui lui permettrait de gagner un peu de temps mais il fronça les sourcils en apercevant deux hommes qui fumaient à la sortie du petit passage. Il voulut faire demi-tour mais cette idée s'envola quand il vit un autre type se tenant à quelques mètres devant lui.
Merde... Il était coincé.
-« Ce n'est pas prudent de se balader seul alors qu'il fait déjà si sombre, lança l'un d'eux en jetant son mégot parterre ».
Les paroles de mise en garde de son chauffeur lui revinrent en tête et il fit rapidement l'inventaire de ses possibilités. Sa poche droite contenait son trousseau de clefs et il était assez doué en combat rapproché... Mais à trois contre un, ce n'était pas vraiment équitable. Il ne résista pas lorsque l'homme dans son dos le força à avancer mais il grimaça quand un autre lui souffla la fumée de sa cigarette en pleine figure. Qu'est-ce qu'il pouvait détester ce genre de pourritures.
-« fouille-le ! Vu ces fringues, il doit avoir pas mal de frics sur lui.
-Tu as entendu mon pote ? Allez, lève les mains en l'air et tiens -toi tranquille ».
C'était maintenant ou jamais.
Il attendit qu'un des larbins s'approche un peu plus et il passa à l'offensive : agrippant ses clefs avec force, il les enfonça dans l'épaule droite de son adversaire, ne s'arrêtant que lorsque les os craquèrent, et lui déboîta le genou gauche d'un coup de pied. S'il avait été plus fort, il aurait pu lui casser; mais ces dégâts suffiraient à le tenir hors jeux quelques temps. Cependant, il n'eut pas le temps de se réjouir beaucoup de cette petite victoire car un autre assaillant lui bondit sur le dos. Cette manœuvre le déséquilibra, lui faisant lâcher son arme improvisée, et il tomba à genoux. La panique le submergea complètement tandis qu'il essayait de se débarrasser de ce type et elle lui fit perdre le reste de ses repères. Un coup le frappa de plein fouet à la tempe et il s'effondra au sol, sur le flanc gauche. Comment avait-il pu baisser sa garde aussi facilement ? Son sang battait à tout rompre à l'intérieur de ses veines, mais il n'arrivait pas à bouger et sa vision était floue. Que se passait-il ? Il sentit les mains de ces enfoirés le palper pour lui faire les poches et un élan de dégoût lui remua l'estomac.
-« Prenez-lui tout son argent, ça nous fera un petit bonus ».
Il essaya de se débattre mais un nouveau coup dans les côtes lui fit cracher du sang et il se sentit partir dans un état de semi-conscience.
-« Laissons-le ici et tirons-nous avant que quelqu'un débarque.
-... C'est un peu tard pour ça les gars ».
De là où il était et dans son état précaire, Jong In ne put apercevoir que des paires de chaussures. Combien y avait-il de nouveaux venus ? Deux ? Trois ? Peu importe, si ces types venaient l'aider alors il voulait bien leur laisser sa vie entre leurs mains;
De toute façon...
Il ferma les yeux pour utiliser uniquement son ouïe et constata qu'il commençait à avoir froid. A quel point était-il blessé ? Il entendit des coups être échangés ainsi que des cris être poussés. Des injures et des menaces étaient également de la partie mais au bout de quelques minutes, alors que notre jeune homme s'était mis à claquer des dents, le silence retomba. Il perçut tout de même des bruits de pas se rapprocher et il dut se faire violence pour soulever légèrement les paupières. Malheureusement, sa vue n'était pas revenue à la normale et il ne réussit qu'à distinguer les contours d'un visage penché au-dessus de lui. Il frissonna lorsque des doigts lui caressèrent le front ainsi que les joues et il tenta de parler, mais il ne parvînt à émettre qu'un pitoyable gargouillement.
-« N'essaie pas de dire quelque chose et garde tes forces. Tu l'as prévenu ?
-Ouais ouais, je l'ai appelé et il nous attend. Il s'occupera de lui dès qu'on arrivera.
-Alors allons-y ».
Un bras se glissa sous ses épaules, un autre sous ses cuisses, et Jong In se sentit soulever dans les airs avant d'être plaqué contre un torse puissant. Aussitôt, la chaleur qui émanait de ce corps le saisit et il se sentit partir un peu plus. La douleur se fit plus muette et il eut l'impression de n'être que dans un mauvais rêve. Venait-ce de ce soudain sentiment de sécurité ? Mais où l'emmenaient-ils ?
Le blessé s'en moquait, il voulait juste dormir...
-« Tu crois qu'il va finir par se réveiller hyung ?
-Bien sûr. Son cœur bat normalement et sa respiration est régulières; il a juste besoin d'un peu de temps ».
Aïe... Sa tête lui faisait tellement mal...
Mais il pouvait entendre des gens parler, il ne devait donc pas être bien loin de la surface.
Allez, encore un petit effort. Ouvre les yeux.
Grimaçant légèrement, Jong In entrouvrit les paupières et la première chose qu'il vit, malgré la lumière qui ravivait sa douleur, fut un plafond en bois orné de quelques fissures façonnées par le temps. Il tenta de s'asseoir mais la douleur amplifia avec violence et il pressa une main sur son flanc droit. Il remarqua alors que, sous un fin drap en coton, il était vêtu uniquement d'un caleçon et qu'un long bandage entourait une bonne partie de son buste. Un autre lui recouvrait le haut du crâne et il se sentait nauséeux. Quelle quantité de sang avait-il perdu au juste ?
-« Il est réveillé hyung !
-Arrête donc un peu de crier gamin, il a besoin de repos... ».
Instinctivement, Jong In tourna la tête en direction des deux autres occupants de la pièce mais tout ce qui se trouvait autour de lui se mit à tanguer et il lâcha un faible grognement pour témoigner de son mécontentement.
-« Va lui chercher un verre d'eau veux-tu ? ».
Notre jeune homme entendit le dénommé « gamin » marmonner des paroles incompréhensibles avant de s'éloigner, mais il dut attendre quelques secondes pour que tout arrête de bouger. Ensuite, il put enfin détailler l'un de ses sauveurs et il remarqua que celui-ci devait être guère plus âgé que lui mais que son visage était beaucoup plus efféminé tandis que ces yeux pétillaient de malice. Il était vêtu d'un vieux jean troué et d'un sweat-shirt orange mais un bosse au niveau de sa hanche droite attira le regard du blessé et il fronça les sourcils.
Ce type portait une arme...
Dans quel intérêt ? Et où avait-il atterrit finalement ? Il repensa subitement à son travail et tenta une nouvelle fois de se lever. Malheureusement, ses genoux se dérobèrent aussitôt sous lui et si cet inconnu ne l'avait pas rattrapé, il se serait retrouvé allongé au sol.
-« Hé ! Doucement mon mignon !, s'étonna l'aîné en levant les deux mains en l'air. Personne ne va te faire de mal ici ».
Jong In l'avait repoussé dès que leur peau étaient entrées en contact et dorénavant, il se tenait assis contre la tête de lit, recroquevillé sur lui-même. Son éducation le poussait à se montrer sur ses gardes puisqu'il ne savait pas ce que ces hommes lui voulaient, mais il avait surtout peur. Et il mourrait de faim.
-« Je m'appelle Key et c'est moi qui t'ai soigné lorsque mes amis t'ont ramené chez nous, expliqua le plus vieux. Et l'autre garçon que tu as vu s'appelle Tae Min, c'est notre macknae ».
Key... Ça ressemblait plutôt à un surnom.
-« Et toi, quel est ton nom ?
-Kim Jong In, lança un nouvel inconnu dont l'expression fit frissonner notre jeune homme. Un des types le plus riche de notre pays et dont le paternel dirige la marque « Heya ». Tu as eu beaucoup de chance qu'on te trouve avant que ces hommes ne te fassent vraiment la peau. Tu comptais vraiment te débarrasser d'eux avec une simple paire de clefs ? On était loin d'être dans un film et ils ne plaisantaient pas.
-Min Ho... Tu pourrais être un peu plus gentil avec notre invité, rétorqua Key ».
L'interpellé haussa les épaules, jeta le porte-feuille aux pieds de son propriétaire et s'installa à califourchon sur un chaise pour l'observer. Cette inspection visuelle embarrassa Jong In, lui rappelant qu'il était à moitié nu, et il tira la couverture sur son corps. Avait-il atterri chez les fous ? Le fameux Min Ho était grand et indéniablement athlétique, mais incroyablement beau. D'ailleurs, s'ils faisaient vraiment parti d'un clan, la beauté était-elle un des critères de recrutement ? Parce que ces deux hommes étaient bien au-dessus de la moyenne générale. Mais ils étaient aussi armés, c'était un détail à ne surtout pas oublier.
Toutefois, son attention fut attirée par une odeur qu'il reconnaîtrait n'importe où et il se redressa en voyant le dénommé Tae Min revenir avec un plateau-repas; Cette réaction fit sourire le gamin et il déposa sur ce qu'il avait dans les mains sur les genoux du blessé. Celui-ci ne demanda pas son reste et il s'empressa de commencer à manger. Dieu que ça faisait du bien... L'eau fraîche calma le feu qui brûlait dans sa gorge, la viande fondait en bouche et il ne put empêcher un soupir de satisfaction de franchir ses lèvres.
-« On dirait que la cuisine d'Onew te plaît, remarqua Key.
-... C'est délicieux.
-Tu as certainement des dizaines et des dizaines de questions à nous poser mais pour le moment, tu as meilleur temps de terminer ton repas et de te reposer encore un peu. Je reviendrai plus tard pour changer tes bandages. Allez les garçons, laissons-le tranquille ».
Jong In les suivit des yeux jusqu'à ce que la porte de la chambre se renferme derrière eux, puis il se détendit. Il se hâta de finir son repas, devant bien avouer que la nature était véritablement bonne, et fit un rapide état des lieux : il se trouvait dans une petite chambre meublée d'une façon tout à fait classique avec des meubles simples mais amplement suffisants, et la pièce était propre. Il fit une nouvelle tentative pour se mettre debout et esquissa un petit sourire lorsque ses jambes se décidèrent enfin à le porter. Il tituba lors des premiers pas, mais retrouva facilement son équilibre et s'approcha de la fenêtre. Il faisait nuit noire à l'extérieur et il devait se trouver au troisième ou quatrième étage d'un immeuble mais mis à part ces deux indices, rien d'autre ne l'aidait à se repérer. Impossible de savoir où il était, ni quel jour on était.
Ne s'était-il évanouit que quelques heures uniquement ?
-« Merde, mes employés..., grommela-t-il ».
D'un rapide coup d'œil autour de lui, il trouva ses vêtements roulés en boule dans un coin de la pièce mais son inquiétude augmenta quand il s'aperçut que son téléphone portable manquait à l'appel. Bon sang, il devait absolument partir d'ici avant que son père n'avertisse la police, car il ne voulait pas causer d'ennuis à ses sauveurs, et il avait encore tellement de choses à faire. Il s'habilla, non sans grimacer et lâcher quelques injures, et sortit de la chambre silencieusement. Heureusement qu'elle n'avait pas été verrouillée... Il se retrouva dans un long et sombre couloir, et il tendit l'oreille : aucun bruit ne lui parvînt. Par où aller maintenant ? Sur la pointe des pieds, il s'avança dans ce lieu inconnu en s'appuyant sur le mur pour se guider car sa vision était considérablement réduite mais son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine, seul bruit qui venait perturber cette étrange tranquillité. Il avait rencontré trois des occupants de cet endroit mais ils avaient parlé d'un certain Onew, donc ils étaient au minimum quatre. Jong In devait également avoir trouvé la sortie avant que Key ne revienne pour le soigner et découvre qu'il s'était sauvé. Le jeune chef d'entreprise continua donc d'avancer mais bien vite, il commença à claquer des dents et la sueur perla sur son front. Génial, il était fiévreux...
-« Jong In ? Je peux savoir ce que tu fais debout ? ».
Cette voix... Il l'avait déjà entendu quelque part... Mais plus gros problème : ses espoir de fuir venaient d'être réduits à néant. Toutefois, quand il pensait à l'état dans lequel il était, il n'avait aucun doute à avoir sur le fait qu'il n'aurait pas pu aller très loin une fois dehors. Il se retourna donc lentement pour faire face à son interlocuteur mais son cœur rata un battement lorsqu'il découvrit son identité.
Kim Jong hyun...
En face de lui, et d'une beauté à vous couper le souffle. Il avait troqué son jogging dans lequel Jong In l'avait vu pour la première fois contre un pantalon noir moulant et une chemise blanche impeccable. Mais de quelle planète venait-il ? Il ne pouvait définitivement pas être humain.
-« Je t'ai posé une question il me semble ».
Notre jeune homme l'observa s'approcher, réduire la distance qui les séparait; et une nouvelle fois, il ne put que constater la grâce avec laquelle il se déplaçait. A chaque mouvement, ces muscles roulaient sous sa peau, tirant sur le textile de ces vêtements, et son regard était incroyablement pénétrant. Jong In avait l'impression qu'il essayait de lire en lui, qu'il le scannait jusqu'au fin fond de son âme et inconsciemment, il se mit à mordiller sa lèvre inférieure. Il ne pouvait pas bouger, comme si la présence de ce type le paralysait, mais il frissonna lorsque ce dernier caressa sa lèvre inférieure du bout des doigts.
Un premier contact si intime...
-« Mon travail... Mes employés... Il faut que je rentre, réussit-il à dire en détournant le regard.
-Ça fait une semaine que tu es ici et personne n'a encore signalé ta disparition ».
Pardon ?
Le cadet écarquilla les yeux en apprenant cette nouvelle et il fit maladroitement un pas en arrière.
Comment ça ? Personne ne s'était mis à sa recherche ?
Sept jours...
Mais qu'attendait son père pour agir ? D'ordinaire, une disparition était prise au sérieux au bout de quarante-huit heures par les forces de l'ordre mais là, ça faisait apparemment cent soixante-huit heures qu'il n'avait pas donné signe de vie et personne ne semblait s'en inquiéter. Était-ce le début d'une mauvaise blague ? Où était la caméra cachée ? Malheureusement, l'expression de Jong Hyun était beaucoup trop sérieuse pour que ce ne soit qu'une simple et stupide plaisanterie... A cet instant, de nombreux scénarios se bousculèrent dans sa tête et il plaqua ses mains de chaque côté de sa tête quand le plus plausible s'imposa à son esprit : tout ce cirque avait été soigneusement orchestré.
-« Qui êtes vous ?, s'indigna-t-il alors que son corps tremblait de plus en plus. Pourquoi... Pourquoi me faîtes-vous cela ? Qui vous paie ?
-Nous payer ? On a simplement... Jong In !!! ».
Était-ce dut à une énorme poussée de fièvre ou à la ré-ouverture de certaines de ses blessures, mais le jeune homme fut prit d'une violente quinte de toux et il jura en essuyant un filet de sang au coin de ses lèvres, avant de s'évanouir à nouveau.
Il revint doucement à lui quelques heures plus tard et ses yeux tombèrent sur le visage de Jong Hyun. Celui-ci remplaça la serviette humide qui recouvrait son front par une autre beaucoup plus fraîche et il réajusta la fine couverture qui reposait sur le corps du blessé.
-« Ne t'avise pas de bouger cette fois-ci, le prévînt-il. Key a du refaire certains de tes points de suture et ta fièvre est tenace ».
Jong In ne répondit pas à ce qui ressemblait étrangement à un ordre et il se contenta de détourner le regard en soupirant tout bas. Ces hommes ne le connaissaient pas mais ils venaient de lui sauver la vie pour la deuxième fois consécutive. Il leur devait énormément... Obligé de rester allongé, le chef d'entreprise préféra réfléchir à ce qui lui arrivait, même si la présence de son aîné le déstabilisait; Il aurait mieux apprécié se réveiller seul, ou du moins pas avec ce type qui le chamboulait tellement. Bon, mis à part cela, cela faisait donc sept jours qu'il ne s'était pas rendu au travail, mais personne ne semblait s'en soucier.
Mais qui avait tout intérêt à le voir disparaître ?
A sa connaissance, il ne comptait aucun ennemi parmi ses employés donc cette piste n'était pas vraiment plausible; quand à son père, il tenait trop à lui pour le remplacer et partir tranquillement à la retraite. Alors qui ? Sa belle-mère ? Elle avait largement les moyens financiers nécessaires afin de faire appel aux services de ces types qui l'avaient agressé. Mais son père aurait forcément lancé des recherche...
-« As-tu une idée de la raison qui a pu pousser ces salops à s'en prendre à toi ?, demanda tout à coup le plus âgé. Ils ne t'auraient pas mit dans un tel état si c'était uniquement pour te faire les poches; et puis, ils n'était même pas masqués donc ta survie n'a pas été envisagée une seule seconde.
-Je... ».
Alors qu'il était sur le point de lui révéler ses pensées, le blessé changea soudainement d'avis et il choisit de se taire. Il ne savait pas s'il pouvait lui faire confiance et rien ne lui garantissait que les garçons qui vivaient ici n'étaient pas de mèche avec ses agresseurs. Bon sang, c'était une véritable prise de tête et Jong In détestait se retrouver ainsi pris au piège; Il voyait bien qu'il ne contrôlait plus rien et il avait la sensation de chuter, d'être perdu.
-« ... Que comptes-tu faire ? ».
Énervé face à une telle réalité, le jeune homme serra les poings avant d'ancrer son regard dans celui de Jong Hyun.
Il avait besoin de se raccrocher à quelqu'un... A quelque chose... A un infime espoir...
-« Je vais leur montrer qu'on ne se débarrasse pas de moi aussi facilement mais pour ça, il faut que tu m'apprennes à me battre. Je t'ai vu à la salle de sport l'autre jour, alors je sais de quoi tu es capable ».
La lueur de détermination qui flamboyait dans ses yeux dut plaire à l'aîné car celui-ci lui adressa un sourire remplit de promesses.
A suivre...
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro