Chap. 7
Élémenta
Télékinésie
Télépathie
- Tinuviel – Saison 1, Mois 4 – J-130
- Je vais énoncer les binômes. Toute négociation sera inutile. Mettons plutôt cette heure à profit pour travailler efficacement.
Les cours de langues extra-Territoriales se faisaient en effectifs restreints. Les deux paires de jumeaux étaient réunies. F'ritz, M'eta et Adel'heid étudiaient dans une pièce voisine.
La plupart des élèves opinèrent du chef. Mon frère et moi y compris.
- Le karma se prépare à frapper grande-sœur.
- Je suis surprise que tu connaisses ce mot en A.D.
Le professeur annonçait les duos de sa voix grave et ferme.
- P'aul et Maj'a.
Elendil cherchait des yeux sa partenaire, tandis que je guettais du regard quels étaient les autres solitaires.
- J'ochim et E'milie.
Le karma renvoyé en pleine figure.
- Tu savais ?
Il s'esclaffa :
- Ne sois pas bête, comment j'aurais pu ?
Le professeur rangea la tablette dans le mur qui l'avala comme par magie. Il s'éclaircit la voix. Je crois que cela faisait également office de recharge.
D'une nature vraisemblablement autoritaire, il ne prit pas la peine de guetter de potentielles réclamations.
- Je vous laisse faire rapidement les changements de place nécessaires.
L'œil vif et nos reflexes ne demandant qu'à être utilisés, aucun d'entre nous ne se levait. Un jeu tacite entre Elendil et moi. Surprendre le moindre indice de mouvement de l'autre pour l'en empêcher et le devancer.
Les pas et les déplacements de chaises me parvenaient en arrière fond. La présence de J'ochim elle, était omniprésente.
- Ne soyez pas si pressés.
Il était devant nous, ainsi que Maj'a. Les deux sursautèrent quand nous nous levâmes d'une seule impulsion. Quelle égalité injuste.
Mon frère céda sa place à J'ochim et remercia sa partenaire pour le déplacement avant de la raccompagner à sa place.
Alors qu'il s'installait, ce qu'il m'avait dit à l'oreille me revint comme une gigantesque vague. « Si tu continues à sourire comme ça, je ne vais pas pouvoir résister encore longtemps ».
Il suffisait donc de garder les commissures de mes lèvres immobiles. J'étais bien plus vieille et plus sage que lui, je devrais y arriver.
- La tablette devant vous contient un texte en A.G. A la fin se trouve un dialogue. Si vous traduisez correctement la première partie, vous serez à même de saisir les subtilités de l'échange final entre les deux personnages.
Le professeur n'avait pas menti, le début du texte était rempli de détails sur le contexte. Je devrais y arriver, avec ou sans l'aide de mon nouveau voisin. Et pourquoi pas plus rapidement que mon frère ?
- Au plus tu voudras aller vite, au plus je ferai en sorte de nous ralentir.
- Tu es sûr de ne pas lire dans les pensées ?
- C'est vraiment ce à quoi tu pensais ? D'autant plus que le cours a une durée limitée.
Tout comme mon passage sur ce Territoire.
- En quelque sorte. Mais je pensais à mon frère, pas à toi. J'aimerais traduire avant lui.
J'ochim croisa les bras et sourit en regardant Elendil. Il venait d'avoir une idée et semblait très serein quant à cette dernière. Il redirigea son attention sur moi. On ne pouvait y échapper, car cet Évolué ne faisait pas qu'être là, il existait et il était impossible de ne pas le voir.
- Je reviens sur ce que j'ai dit. J'accepte de t'aider, mais tu me seras redevable.
- Je pense pouvoir m'en sortir seule, ne t'embête pas.
Comme si toutes mes répliques faisaient partie de son plan, il enchaîna :
- Rappelle-toi que c'est un travail à faire à deux. Dans une si petite classe, un inactif se verra vite.
Il n'avait pas tort. Nous perdions déjà du temps bêtement, autant commencer.
- Tu as raison, on divise la première partie pour tout mettre en commun ensuite ?
- Je crois que tu oublies de parler du service que tu me devras.
- Qui est ?
- De ne plus te retenir de sourire.
Jamais je n'aurais cru qu'il referait si facilement référence à cette requête déjà faite au New York.
Le texte sur lequel nous allions devoir bûcher parlait vraisemblablement de deux jeunes adultes et de leur avenir respectif. L'un se destinait à suivre les traces de ses parents, et l'autre choisissait sa passion. Il me tardait de lire leurs échanges.
- J'ai bientôt terminé ma partie. Qu'en penses-tu ?
- Tu es rapide J'ochim.
- Ça, tu ne m'as pas laissé l'opportunité de te le prouver ou non. Je parlais des deux personnages.
Son allusion sexuelle me renvoya à la rapidité de l'amant d'Adel'heid et de cette obsession de performance qu'avaient les hommes à ce sujet.
- Les deux me plaisent. Ils sont un peu plus jeunes que nous, alors les juger serait injuste. L'un veut se démarquer d'un modèle imposé alors que l'autre s'y complaît.
- Je suis moins clément que toi. Envers eux et envers l'auteur. On parle de deux garçons, banaux, milieu correct, pas d'expériences difficiles vécues. Un choix facile en somme, on peut facilement s'identifier si l'envie nous vient.
- Il y a des nuances de gris, mais crois le ou non, le noir et blanc tranchés existent aussi. Si tu devais en choisir un, auquel tu te rallierais ?
- Aucun.
- Trop facile. En décidant de ne pas choisir, tu valides ma théorie des couleurs.
Mon frère nous surveillait de loin, de même que la moitié des filles de la classe. Coutumier et serein quant à cette attention, J'ochim accompagna mon regard vers ses prétendantes, comme un parent aux côtés de son enfant lors d'une toute première expérience.
Hormis que l'expérience en question n'avait rien de nouveau. A chaque Assemblée Élémentaliste, toutes les têtes étaient tournées dans une seule et même direction : celle de mes parents, mon frère et moi.
- Elles me croient incompris. Un cœur d'or à dévoiler. Alors que je suis aussi limpide que ce devoir d'A.G.
- Un jeune homme qui doit choisir entre deux voies ?
Il sourit alors que c'était le rôle qui m'avait été attribué.
- Non, un bâtard.
Il était sans nul doute beaucoup de choses, mais certainement pas ce mot-là. Il était si persuadé de ce qu'il disait que je n'allais pas le contredire.
- Prêt à passer aux dialogues ? On relira l'ensemble une fois le texte traduit en entier.
- Puisque tu sembles si sûre de toi.
- J'ai surtout très envie de battre mon frère.
Elendil discutait aussi avec Maj'a. Une très jolie rousse aux cheveux aussi raides que sa peau était blanche. E'gon faisait paire avec un élève dont je ne connaissais pas le nom. Tout bavardage entre eux était relégué au second plan.
- Tu sais E'milie. Je ne te croirais pas, même si tu me disais que la nuit est sombre et le jour, clair.
Je sentais sa sincérité fissurer les défenses que j'avais mis des années à parfaire.
- Je ne te savais pas si poétique.
- A croire que nous sommes comme les deux jeunes de cette histoire, deux ignorants.
Finalement, j'allais tâcher de me servir de l'exemple d'E'gon et appliquer le même silence. L'exercice fini, il suffisait de l'envoyer au professeur qui saisit l'occasion pour annoncer qu'il serait bientôt remplacé. Sa femme accoucherait bientôt, il tenait à être près d'elle. Je ne le reverrai donc sûrement jamais.
Avant de ranger notre tablette, j'avais pris le soin de bien regarder l'heure pour fanfaronner devant mon frère le cas échéant.
Il nous restait une unique heure avant de terminer notre journée.
Le couloir grouillait déjà d'élèves en transition, mais je sentais M'eta arriver à toute allure. D'autres étaient déjà derrière moi, si je m'arrêtais pour éviter M'eta, tous me rentreraient dedans. A choisir entre elle et une bousculade de plusieurs Évolués, je choisissais le contact d'une seule.
J'avais légèrement ralenti pour limiter le choc. Quand M'eta vit que c'était moi qu'elle avait heurtée son visage prit une teinte de crainte. Durant un court instant, j'aurais juré qu'elle savait, mais avant que ses inquiétudes ne m'atteignent, elle revêtit sa joie habituelle.
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