Chapitre 12 | Relation sanglante
Désemparée, je vis sur son visage un ascenseur émotionnel terrible. La tristesse s'empara d'elle peu à peu, puis ce fut la colère, une immense colère qui rongea son visage.
- Vous allez entendre parler de moi. Promit-elle furieuse
La sonnerie retentit, aucun ne manqua de se lever rapidement pour sortir de la salle. Eliot se leva également, mais il resta à côté de notre table, afin de me laisser sortir mais également pour regarder Aurore qui semblait folle de rage. M. Warren retourna s'asseoir sur son bureau, et nous contempla tous les trois qui étions les derniers à sortir, excepté Johan qui restait à sa place comme le professeur le lui avait ordonné, silencieux. Notre amie ne se fit pas prier et quitta la pièce d'un pas déterminé. Le temps de ranger mes affaires, je voyais du coin de l'œil l'homme qui nous observait, toujours avec ce même visage qui me paraissait de plus en plus malsain. On aurait dit qu'il vivait constamment avec un sourire sur les lèvres, ce qui lui donnait cet air sadique.
Prêt à sortir, je fis signe à mon ami et nous nous dirigeâmes vers la porte, au moment où nous en franchîmes le seuil, le remplaçant nous lança un bref " Bonne chance " sur un ton moqueur. Contrarié par son attitude, je ne me retournai pas et fis mine de l'ignorer. Je ne savais absolument pas à quoi il jouait, ni ce qu'il voulait, et encore moins ce qu'il faisait dans le lycée. Je devais impérativement prévenir Gareth.
- Il a détruit mon téléphone ! Rapporta Aurore
Nous la vîmes parler à un surveillant à notre droite au bout du couloir ; elle rapportait sûrement les faits qui venaient tout juste de se dérouler avec le désincarné.
- Je veux voir le principal ! Insista-t-elle
Le surveillant lui répondit d'un ton plus calme, mais avec tous les autres élèves dans le couloir qui entraient et sortaient des salles je n'entendais pas ce qu'il disait.
- On va la voir ? Me demanda Eliot
J'acquiesçai de la tête. Le temps que nous parvenions jusqu'à elle, le surveillant partait déjà.
- Qu'est-ce qu'il t'a dit le surveillant ? Demandai-je à mon amie
Toujours dans un état de colère, elle me répondit avec une forte intonation et pleins de gestes avec ses mains qui partaient dans tous les sens.
- Il m'a dit que le principal est soit-disant absent et qu'ils peuvent pas m'aider là dessus ! J'ai insisté pour lui dire que cet abruti de remplaçant qui se présente comme un professeur d'histoire n'est autre qu'un connard de première, et que l'administration ne lui a certainement jamais accordé le droit de remplacer notre actuelle prof' d'histoire !
- Calmes-toi ! Lui dis-je, on va aller voir nous même c'est pas grave, de toute façon j'suis de ton avis et Eliot et moi on est témoins.
Elle commença à se calmer et reprit peu à peu ses esprits.
- Nan mais pour qui il se prend ? Tu l'as vu ? Le mec traîne des élèves au sol, il les menace, les traite comme des chiens et il se permet d'éclater nos portables ? Crois moi que c'est son dernier jour ici ! S'énerva-t-elle
- Je sais je sais, moi non plus j'ai jamais vu ça assurai-je, et on va s'en occuper, suis moi.
Je nous emmenai en direction du bureau du principal, je n'avais aucune envie de parler aux surveillants si c'était pour aller s'expliquer avec le désincarné qui pouvait faire je ne sais quelles bêtises encore.
Nous arrivâmes devant le dit bureau, je m'avançai et toquai.
* toc toc *
Rien. Il y avait bien le bureau de la conseillère principale d'éducation mais j'avais peur qu'elle ne me traite comme les surveillants, je connaissais le principal comme quelqu'un de juste et qui savait dissocier le faux du vrai. J'insistai en toquant à nouveau légèrement plus fort.
* toc toc to.. *
La porte s'ouvrit lentement face à mes coups. Un grincement sinistre se fit entendre quand je poussai légèrement la porte pour l'ouvrir. J'entrai en premier, mais ne vis personne. Seul un bout de papier gisait sur le bureau de la pièce, avec marqué vulgairement au marqueur noir :
" Je suis chez le CPE "
Moi qui ne voulait pas y aller, j'allait devoir finalement aller lui parler à cette conseillère principale d'éducation.
- Ok demi-tour on va chez le CPE. Annonçai-je à mes acolytes
- Pourquoi ? Demanda Eliot
- C'est là que se trouve notre homme.
Aurore soupira, elle était désespérée de la situation. Nous arrivâmes rapidement devant le bureau du CPE qui était en réalité à une dizaine de mètres de là où nous nous étions rendu.
* toc to... *
Tout comme précédemment, la porte s'ouvrit toute seule face à mes coups, mais elle n'était pas complètement fermée, juste entrouverte. J'entrai d'un air prudent afin de ne pas déranger une éventuelle conversation. Suivis par mes deux amis, je découvris bien autre chose que ce que je n'étais censé trouver.
- Ahh ! Hurla Aurore
- Oh merde ! S'exclama Eliot
J'eus un haut-le-cœur. La scène qui était devant nous était une véritable scène d'épouvante. Aurore eut un mouvement de recul et refusa de s'avancer plus qu'elle ne l'était déjà, moi j'étais devant, là, à contempler cette atrocité. Sur le bureau, le principal allongé sur le dos, les mains tombantes au sol, au dessus de lui était couchée la conseillère d'éducation principale, les deux mains placées comme pour un câlin autour du cou du principal. Tous les deux avaient les yeux fermés et la bouche grande ouverte, un bout de bois d'un important diamètre était planté dans le dos de la femme, transperçant également l'homme ainsi que le bureau. Ils gisaient tous les deux dans le sang qui tombait encore goutte par goutte sur le sol désormais rouge. Sur le côté, une chaise en bois avec un pied manquant, en observant les trois autres, je déduisis que ce dernier était celui liant de façon glauque les deux personnes au bureau.
- Il ... merde ! Oh putain ... je ... tu as vu Edwin ?! Tu .. tu as .. Bafouilla mon amie
- Oui ... oui j'ai vu .. ne regardes pas, on va fermer la porte, appelles la police ! Répondis-je paniqué
- Mais Edwin ... Murmura Eliot, tu ...
Je lui fis les gros yeux pour éviter de parler de ça. Je savais qu'il pensais que c'était sûrement l'oeuvre de Warren, mais il fallait tout de même prévenir les autorités.
- Edwin ...
- Quoi Aurore ?
- Mon téléphone ...
Elle me regarda d'un air à la fois triste et à la fois colérique. Je n'y avais même pas pensé ! Je venais de lui dire de prévenir la police mais elle venait tout juste de se faire détruire son portable.
- Bon Eliot appelles les flics.
Ce dernier sortit son téléphone qu'il avait reprit sur le bureau de la classe, et au moment de composer le numéro une main surgit de derrière pour emprisonner son poignet.
- Mieux vaut les laisser dans leurs ébats amoureux non ?
Je sursautai. Aurore sursauta à son tour et Eliot, face à nous le téléphone à la main et cette dernière empoignée nous fit les gros yeux. C'était M. Warren qui était derrière lui. D'un air sarcastique il continua.
- Je pense même qu'il faudrait fermer la porte à clé histoire de s'assurer que personne ne les dérange à l'avenir.
Il lâcha le poignet d'Eliot, s'approcha lentement de la porte et la referma dans le plus grand des calmes. Aurore restait bouche bée. Elle ne savait absolument pas à qui elle avait affaire, elle semblait totalement perdue et désorientée.
- C'est ... c'est vous ... bredouilla-t-elle
- Quoi ? Ça ? Répondit-il en pointant la porte du doigt, je n'y suis peut-être pas étranger en effet.
Il s'approcha d'elle et tendit sa main pour la toucher.
- Ne la touchez pas ! Ordonnai-je
Il s'immobilisa, et me regarda de son sourire narquois.
- Que penses-tu que je voulais faire ?
Je ne répondis pas. Je n'étais pas totalement sûr de la manière dont fonctionnait l'aspiration d'âme dont avait parlé Gareth, mais je voulais éviter à tout prix que cela n'arrive.
- Et même si je m'apprête à la toucher, que comptes-tu faire ? Demanda-t-il toujours avec le même sourire
- Vous le regretterez. Répondit froidement mon amie en claquant la main de l'homme
Il sourit de plus belle.
- Tu es bien distant mon chers Edwin, quelqu'un t'a donc parlé de moi ? Me demanda-t-il
À nouveau je me tus. Je me doutais bien qu'il faisait là allusion à Gareth, mais le ton qu'il avait employé sonnait comme une sorte de recherche d'informations.
- Ton amie ici présente me connait-elle ?
Aurore me regarda d'un air interrogateur.
- Tu connais ce fou ?! Me demanda-t-elle ébahie
- Je ... non ! Je ... on .. absolument pas ! Bégayai-je
- Ça ne fait rien. Coupa l'homme, j'ai été ravi d'avoir pu intégrer un lycée ne serait-ce le temps d'une matinée...
- Qu'est-ce que tu veux ?! Demanda mon ami qui commença à s'impatienter.
D'un air plus sérieux, l'homme s'approcha d'Eliot, pencha sa tête vers l'oreille de ce dernier, et lui chuchota de façon à ce qu'Aurore et moi entendions également :
- Tout.
Il se retourna rapidement, et parti d'un pas déterminé et disparu dans le couloir à notre gauche.
- Vous connaissiez ce ... ce tocard ? Nous demanda Aurore toujours choquée
- Aurore je ... il faut qu'on parte. Dis-je
- Pourquoi ?! Il faut prévenir la police !
Elle avait raison. Mais il était difficile pour moi de l'en dissuader, il était trop tard. Je suais comme je n'avais jamais sué ; nous venions tout juste de discuter avec le désincarné qui avait l'air tout à fait serein à l'idée d'avoir tué deux personnes, dont le principal. Ajoutons à cela le fait qu'il venait tout juste de voir qu'Eliot et moi traînions avec Aurore, ce qui la mettait dans une situation dangereuse.
- C'est un putain de ... de meurtrier ... trembla-t-elle
Elle arracha le téléphone des mains d'Eliot et composa rapidement le numéro.
- Allo ? Allo ? Oui, je vous appelle pour annoncer un meurtre !
Je lançai un regard à Eliot, il fit de même. Il ne fallait pas que nous restions là, il fallait aller prévenir Gareth avant que le désincarné ne commette d'autres actes comme celui-ci. Je n'avais pas son numéro sur moi, et Aurore utilisait le portable de mon ami, et il ne fallait surtout pas parler de cette histoire de surnaturel avec elle. Nous devions être les seuls et continuer à être les seuls à savoir. Ce qui me perturbait était le fait que l'homme ne n'agissait absolument pas de façon discrète ! Si être désincarné signifiait de devoir endosser la responsabilité de cacher l'espèce aux humains, pourquoi faisait-il cela ? Il fallait que j'arrête de me poser des questions et que j'aille chercher des réponses auprès de Gareth.
Je regardais Aurore qui ne cessait de communiquer au téléphone, et Eliot qui semblait complètement dépassé par les événements. Je lui fis un signe discret de la main pour attirer son attention.
- Je vais parler à Gareth, restes avec elle ! Chuchotai-je à mon ami
Il sembla contre l'idée de rester ici, mais il fallait que l'un d'entre nous reste avec notre amie pour parler aux forces de l'ordre, nous étions ceux qui avions découvert la scène après tout. Je m'éloignai discrètement de mes amis, et disparus dans le même couloir par lequel le désincarné était passé. Je marchai d'un pas déterminé, les mains tremblantes, le cœur battant et la respiration haletante.
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