Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Chapitre 6

Je saisis une bouteille d'un liquide bleu. Le récipient est plus petit que ceux dont j'ai l'habitude. Sur le côté, l'inscription vingt centilitres. De l'eau, colorée en bleu pour éviter que les Déshydratés l'utilisent pour acheter quoi que ce soit à l'extérieur. Tout ce qu'ils peuvent posséder se trouve ici, au Centre de Distribution de la zone Nord.

J'évolue dans la foule compacte et grise. À force de venir ici tous les matins depuis deux semaines, je commence à connaître l'emplacement des étagères, remplies de vivres par des bénévoles Déshydratés. C'est fou comme, en une quinzaine de jours, on peut prendre des habitudes. Je commence toujours par l'eau. J'attrape ensuite deux rations au hasard. De toute façon, elles sont toutes infectes.

Je passe devant le panneau de Eau-emploi. Une masse de Déshydratés se pressent déjà devant. Je suis petite, et il m'est facile de me frayer un chemin. Une annonce d'une société de production qui cherche des figurants à moindre coûts pour un reportage destiné à être diffusé dans les écoles – pour que les enfants ne finissent pas comme nous, pour entretenir la peur. Le fait que l'on ait besoin de figurants me sidère. Ils pourraient simplement planter leurs caméras ici. Ils trouvent que la situation des Déshydratés n'est pas assez dissuasive, ils veulent la rendre encore plus horrible ? C'est ridicule. Le tournage est l'affaire d'une journée, le salaire est de trois litres. Trois vrais litres, d'une eau transparente, d'une eau avec laquelle je pourrais acheter ce que je veux au-dehors. Une eau d'Hydraté. Je me dirige vers le guichet de dépôt des candidatures, un pan entier de mur, vitré, derrière lequel sont disposés des box. Lorsque arrive mon tour, je passe mon bras dans un trou prévu à cet effet. Derrière, une femme gantée scanne ma puce de géolocalisation, avant de faire coulisser une petite fenêtre.

— Vous venez pour la figuration ? On demande une photo.

Sans plus de formalités, elle brandit un appareil à la hauteur de mon visage et un flash m'éblouis. Elle referme la vitre d'un coup sec.

J'erre un instant entre les palettes et les étagères presque vides à présent. Des hommes en uniforme blanc du traitement des Déshydratés vérifient que je n'ai emporté que ce à quoi j'ai droit quotidiennement dans ma situation – adolescente, sans emploi, comme le proclame l'écran qui scanne ma puce à la sortie –. Vingt centilitres, deux rations et demi. J'ai aussi le droit à des vêtements et à divers objets, dans la mesure du raisonnable. Je frissonne en voyant les pistolets attachés à leurs ceintures. Un ultime portique vérifie que je n'ai rien caché sur moi, et je sors enfin du CD. Parfois, j'ai vraiment l'impression d'être dans un supermarché gratuit et ultra-contrôlé.

Jenna m'attend à l'extérieur. D'un geste du menton, elle désigne le bâtiment.

— Tu t'es inscrite pour le truc des figurants ?

— Oui.

— Tu n'as aucune chance.

— Peut-être que si.

— Non. Je suis sûre qu'ils ne prendront que les personnes les plus moches. Et tu es loin d'être laide.

Je reste plantée devant elle, perplexe. Je suppose que c'est un compliment, mais je ne parviens pas à m'en réjouir. Nous reprenons le chemin vers le Phare.

Jenna soupire. Je l'interroge du regard.

— Honnêtement, je ne sais pas d'où vient tout ce qui est entreposé ici. Le gouvernement fabriquerait gracieusement tout cela, pour des Déshydratés ? Ils nous offrent de l'eau ! De l'eau.

Je ne réponds pas. Oui, ils nous offrent de l'eau. Ils n'ont pas le choix.

— Il y a forcément un piège derrière, insiste-elle. Tu ne penses pas que l'eau pourrait être empoisonnée ?

— Ils ne peuvent pas nous laisser mourir non plus.

— Et pourquoi pas ?

— Ça serait un crime.

Je n'aime pas ça. Je n'aime pas ça du tout. Qu'est-ce qu'elle insinue ?

— Ils ont besoin de nous pour faire les boulots dont personne ne veut. Sauf que pour travailler, ils font que l'on soit en vie.

— On ne vit pas, Shimizu, on survit.

Nous pénétrons dans l'appartement. Il est encore tôt, mais je n'ai rien à faire, alors je suis Jenna jusqu'au salon. Elle allume la télévision, mais il n'y a pas de courant. Léna et Soleil entre dans le salon, leurs mains entrelacées, sans même nous dire bonjour.

— On survit, répète la chef d'étage. Et jusqu'où serais-tu prête à aller pour survivre ?

Je fronce les sourcils.

— Je... je ne sais pas. Loin, sans doute.

— Tu vois, c'est pour ça que je m'inquiète. Comme nous, ils ne savent pas jusqu'où nous sommes capables d'aller. Ils ont peur des Déshydratés, et nous sommes de plus en plus nombreux. Alors, crois-moi, rien ne les empêche de nous empoisonner avec l'eau qu'ils nous donnent. Peut-être pas toutes les bouteilles, mais juste quelques-unes. Une mort lente, insoupçonnable.

— C'est n'importe quoi.

— Non. Tu as vu les noms barrés sur ta porte ?

— Oui.

— Comment s'appelait le dernier ?

Sa voix se brise. Je fouille dans ma mémoire.

— Dean.

— Dean, oui. Tu sais pourquoi il est... pourquoi il n'est plus là ?

Je secoue la tête.

— Il est mort, du jour au lendemain. Sans raison, chuchote-elle tandis que son regard s'assombrit.

— Il était peut-être déshydraté. Avec un « d » minuscule.

— Non, Shim. Il avait bu de l'eau. Il avait bu mon eau, celle qui m'était destinée. Des membres du service de traitement des Déshydratés sont venus à la sortie du CD, ils m'ont dit qu'il y avait un problème avec ma bouteille et que je devais attendre cinq minutes. Ils m'ont pris ma bouteille, sont rentrés à l'intérieur, et m'en ont offerte une neuve. Une soi-disant neuve. Il me restait encore de l'eau, Dean avait raté la distribution, alors je lui ai donné la bouteille. Il est mort quelques heures plus tard.

— Ça n'a aucun sens. Pourquoi vouloir t'empoisonner ?

Elle hausse les épaules avant de se lever.

Je chasse de mes pensées ses paroles. C'est impossible, c'est juste une coïncidence. Mais si elle avait raison ? Je ne peux pas m'empêcher de songer que lorsqu'on a peur de quelque chose d'invisible, on préfère ne pas croire à son existence.

L'électricité revient, et je regarde les informations défiler à la télévision sans vraiment les voir. Je finis par quitter la pièce pour gagner ma chambre. J'allume mon téléphone, guettant un improbable message. Je triture mon bracelet, tente de sentir ma puce de géolocalisation sous mon avant-bras. Je m'ennuie. Je tente de commencer le roman que j'avais apporté, mais j'arrête lorsque je réalise que j'ai lu cinq fois la même phrase. Je m'allonge. Je dors jusqu'à midi. Je me traîne jusqu'à la cuisine, et fait chauffer une de mes rations au micro-ondes. Hormis Gabriel, un ancien professeur d'une cinquantaine d'année qui est là depuis six mois et qui n'a toujours pas réussi à trouver du travail, l'appartement est désert. Quelques-uns travaillent, et j'ignore où sont les autres, sans doute en ville.

Je mastique mon repas. J'ai soif, mais je n'ose pas boire à cause de ma conversation avec Jenna. Je déchiffre les mots riz aux légumes sur l'emballage. Je n'aurais jamais deviné. Je donnerai n'importe quoi pour un bol de ramens en compagnie d'Everest. Ou même sans elle. Juste des ramens. Les réminiscences de notre dernière discussion me revienne, et je manque de fondre en larmes.

Je dors encore, je fixe la télévision d'un air absent. N'y tenant plus, je sors dehors. La chaleur est étouffante.

J'erre dans le quartier jusqu'à la nuit tombée. En regagnant le Phare, je fais la liste des personnes que j'ai croisées. Un vieillard qui promenait son chien. Un couple qui s'enlaçait devant une fontaine asséchée. Une bande de jeunes de mon âge, qui discutait devant le CD. Des dizaines de personnes solitaires qui vagabondaient sans but dans les ruelles. Une enfant qui courait vers sa mère. Un autre petit qui...

Quelqu'un m'agrippe l'épaule et m'entraîne brutalement en arrière. Je hurle, mais une main se plaque sur ma bouche. Mon souffle s'accélère. Le sang bat à mes oreilles, si fort qu'il me semble que tout autre son à été effacé de l'univers. Je tente de me dégager. Je n'arrive plus à respirer. J'essaie de frapper derrière moi, mais mon agresseur parvient à emprisonner mes poignets dans sa main.

Une autre silhouette s'avance vers moi. Je gémis. Ils sont deux. La peur palpite dans mon ventre.

— Si tu cries, tu meures. Compris ?

Je ne comprends pas, je ne comprends plus rien, mais je hoche la tête. La main qui me bâillonne me libère. Pour venir doucement apposer un pistolet contre ma tempe. Mes mains sont délivrées elles aussi, et le bras qui les tenait est passé autour de ma taille, me coupant le souffle.

— Je... je n'ai pas d'eau sur moi...

— On s'en fiche, de l'eau.

Je tremble au rythme de mon cœur affolé. Je ne parviens même plus à réfléchir. L'homme devant moi se rapproche. Il est cagoulé, et je ne vois pas son visage.

— Qu'est-ce que vous préparez ?

Je secoue la tête.

— Je ne comprends pas.

Les mots ont à peine franchi mes lèvres que la crosse du pistolet heurte le haut de ma tête. Je hurle, si fort que j'ai l'impression que mes cordes vocales vont céder.

— Ferme-la ! Qu'est-ce que Jenna prépare ? Dis-le nous !

Jenna ? Ses paroles de ce matin me reviennent en mémoire. Un filet de sang glisse jusqu'à mes lèvres. Un sanglot secoue ma poitrine, je suis au bord de l'évanouissement.

— Qu'est-ce que Jenna prépare ?

— Je ne...

Une gifle propulse ma tête contre le canon de l'arme. Je manque de tomber, rattrapée de justesse par la personne derrière moi. Des larmes coulent maintenant à flots de mes yeux.

— Je te laisse dix secondes pour nous le dire. Après, il tire. Un. Deux. Trois.

J'ai beau respirer, l'air semble privé d'oxygène. Je gémis encore. Une pluie de coups s'abat sur moi. Je crie. Le monde n'est plus qu'un nœud de souffrance. Je hurle. Je vais mourir. Mes jambes se dérobent, mais le bras autour de mon ventre m'empêche de me soustraire aux frappes.

— Quatre.

— Je vous jure que je ne sais rien, je ne comprends pas, je ne sais pas de quoi vous parlez !

— Cinq.

— Arrêtez ! Je vous en supplie !

— Six.

Une douleur lancinante me vrille la tête.

— Je ne sais rien ! Je vous en supplie ne me...

— Sept.

— ... ne me tuez pas...

— Huit. Tu ne sais toujours rien ?

J'acquiesce frénétiquement. Je vais mourir.

— Neuf... Hé, mec, qu'est-ce que tu fous ?

Je réalise à peine que l'arme s'est décollée de mon front et que l'homme qui me tenait m'a lâché. Il ne répond pas. Je ferme les yeux une poignée de secondes. Je ne vais peut-être pas mourir finalement. Toujours silencieux, il me fait pivoter jusqu'à ce que je sois face à lui. Lui aussi est masqué. Je vois son poing fuser vers moi, puis il y a un choc sur mon crâne. Je vois le sol se rapprocher de moi, je sens des mains m'attraper.

Et plus rien.

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro