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Chapitre 19

On dirait qu'il attend une réponse qui ne vient pas. Semblant se lasser, il reprend.

—    Nous sommes tous liés. Et je suis ravi que nous soyons enfin réunis. Je sens que nous allons bien nous amuser.

Nous amuser ? Est-il fou ? Sa bonne humeur est-elle réelle ou n'est-elle qu'une feinte pour nous amadouer ? J'avoue ne pas savoir choisir entre les deux solutions.
Je voudrais que cette conversation finisse mais apparemment, il en a décidé autrement.

—    En tout cas, vous êtes ici chez vous.

Je grogne. J'aurai tout entendu...

—    Chez nous ? Menottés ? Vous croyez sérieusement que nous allons vous croire ?
—    Je me doutais que vous réagiriez comme cela.

Il s'approche de Snow et malgré le mouvement de recul de mon ami, lui ôte ses menottes.

—    Pour preuve de ma bonne foi.

Avant de déverrouiller les miennes. Le contact de ses doigts sur mes poignets me révulse mais je ne laisse rien paraître. D'autant que ce dégoût est vite occulté par les sensations qui me traversent. Mon pouvoir se fond en moi. Il envahit chacune de mes cellules. Sans que je le veuille vraiment, la sphère se matérialise dans ma paume avant d'aller se poster devant Uhane. Elle enfle, prend mes traits et tend une main désincarnée vers le prophète. Leurs paumes se touchent, leurs lèvres récitent un salut vieux comme le monde.
Lorsque le contact se rompt, la sphère se dirige vers Snow. Elle joue avec le vent. Ils dansent ensemble. Ballet impromptu et merveilleux qui se fige devant Marley.
Devant la Mère, ils s'inclinent. Puis retrouvent leur place.
Aucun des humains présents n'a manqué le spectacle qu'Ada et le vent nous ont offert.
Certains ont pâli. D'autres murmurent entre eux, leur mécontentement se lisant sur leurs visages. Mais un seul homme peut décider de notre sort à cet instant.
Et il a l'air impressionné par la petite démonstration de la sphère.

—    Je regrette de ne pas avoir été salué. Mais il faut croire qu'elle ne m'aime pas. Peut-être que cela viendra. Dans tous les cas, et même si certains de mes hommes ne sont pas d'accord avec moi, aucun mal ne vous sera fait. Ni aux uns, ni aux autres. Vous avez le droit de circuler librement dans l'enceinte du château. Si vous souhaitez sortir, il vous faudra alors une escorte et les menottes. Vous comprendrez que je ne peux pas prendre de risque.

Quel risque ? Celui de nous enfuir ? Même si ce n'est pas l'envie qui me manque, je sais parfaitement que cela ne servirait à rien.
Il nous invite à le suivre, ordonnant aux soldats de porter nos affaires.
Je ne m'attarde pas sur la configuration des lieux, je sens que j'aurai le temps de m'y intéresser plus tard.
Nous traversons tout un tas de couloirs, montons d'innombrables escaliers. Il s'arrête enfin devant une porte en bois toute simple.

—    Voici vos appartements. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas à sonner. Quelqu'un viendra. Prenez le temps de vous reposer, nous viendrons vous chercher pour le dîner.

Après nous avoir salué, il disparaît, suivi de ses hommes, nous laissant seuls.
Cette fois-ci, personne ne scelle la porte derrière nous.
Nous faisons le tour des pièces. Il semble que tout un étage nous soit réservé. Le couloir dans lequel nous nous trouvons dessert un salon de taille impressionnante au centre duquel crépite un feu magique. Une bibliothèque se cache derrière deux vastes tentures. Ses rayonnages montent jusqu'au plafond. Il y a bien longtemps que je n'ai pas vu autant de livres. Je fais courir mes doigts sur les couvertures à ma portée, appréciant la texture du papier ou du cuir sous la pulpe de mes doigts.
De l'autre côté du couloir, des chambres immenses, chacune équipée d'une salle de bains, nous accueillent. Nous ne nous battons pas pour les choisir, elles sont toutes identiques et nos affaires ont déjà été posées à l'intérieur.
La voix de Marley nous parvient de la sienne.

—    Il y a de l'eau chaude. Vous entendez ça !

Nous ne devrions pas être contents d'être ici. Mais pour un moment, je me dis que nous pouvons profiter du confort que nous offre les lieux.
Je me fais couler un bain et m'immerge entièrement dans l'eau brûlante. Pendant un moment, j'oublie tout. L'endroit où je suis, qui je suis. J'oublie la guerre, l'horreur, le vide, l'absence. Je ne fais qu'un avec l'eau. Me repaissant de sa caresse sur ma peau. J'écoute sa voix qui me parle. Qui me dit que je lui ai manqué, qu'elle était seule sans moi, sans mon sale caractère et mes innombrables questions. Je l'écoute me parler de la Nature, du vent. Elle l'aime le vent. Même s'il l'assèche et la repousse au loin.
Je me perds dans les images qu'elle me montre. Des images belles et douces qui apaisent mon âme quand la noirceur tente de reprendre sa place.
Je me noie dans son étreinte...

Des coups frappés à ma porte me ramènent à la réalité. C'est difficile d'y reprendre pieds. La lumière est trop vive, les sons trop forts.
Petit à petit, tout revient à la normale.

—    Joran ?

Entendre la voix de Snow ne m'étonne pas. Seul lui pouvait donner des coups aussi forts.

—    Quoi ?
—    Mais bordel, ça fait cinq minutes que je tambourine contre la porte... Tu fais quoi ?
—    Je... je méditais.

Je ne trouve pas de meilleure explication. Et je sais que c'est la seule qui m'évitera trop de questions. D'ailleurs, il ne rajoute rien. J'attends qu'il se remette à parler mais rien ne vient. Je romps le silence.

—    J'arrive.

C'est forcément pour cela qu'il est venu. Je l'entends tourner les talons et sortir de ma chambre. Je me frotte vigoureusement et sors de l'eau. Tout le bien-être que j'ai ressenti quand j'étais immergé s'envole.
Je me regarde pour la première fois depuis ce qu'il me semble une éternité dans le miroir de la salle de bains. Mes cheveux ont encore un peu poussés. Ma barbe aussi. J'entreprends de la tailler un peu sans pour autant la raser. Je ne suis plus l'homme qui n'en avait pas.Mes gestes sont fébriles. Une tension froide et perverse vient me nouer les entrailles au fil des minutes qui passe.
Elle ne disparaît pas alors que je passe des vêtements propres.
Je rejoins mes amis dans le salon et à la manière dont ils se tiennent, je devine qu'eux aussi sont stressés.

—    Désolé.
—    Y'a pas de mal. Les filles s'inquiétaient...
—    Tu sais ce qu'elles te disent les filles ?

Marley continue à l'invectiver pendant quelques minutes et je dois avouer que ça me détend de les voir se prendre le bec. J'en profite pour les détailler. Snow est comme d'habitude habillé en noir des pieds à la tête. Mes vêtements sont identiques aux siens. Marley et Uhane, elles, ont revêtu des robes bien trop élégantes pour les avoir eues dans leurs affaires.
Je n'ai pas vu mon amie en robe depuis des années. Nous devions être adolescents la dernière fois. C'est étrange de la voir ainsi. Ses dreadlocks sont arrangées dans une coiffure sophistiquée et dégagent sa nuque révélant son port de reine. Elle est belle. Magnifique même.
Tout autant que sa voisine.Uhane a revêtu une robe du même vert que ses yeux. Elle souligne sa peau pâle. Le galbe de sa poitrine menue, sa minceur. Des mèches de cheveux s'échappent de son chignon.
Je ne peux m'empêcher d'en remettre une derrière son oreille. Elle me sourit timidement. Mes doigts s'attardent sur sa joue, mes lèvres se posent sur sa tempe. Elle frissonne sous mon baiser.
J'ai envie de la serrer contre moi mais je me retiens. Marley et Snow ont fini de se disputer et nous dévisagent avec un sourire moqueur.
Celui-ci disparaît quand on frappe à la porte. Nous entendons la porte s'ouvrir, des pas résonnent sur le parquet du couloir et une femme entre dans le salon.

—    Veuillez m'excuser mais je suis venue vous prévenir que le repas sera servi dans une demi-heure.
—    Où devrons-nous nous rendre ?
—    Je reviendrai vous chercher.
—    Merci.

Elle quitte la pièce et nos appartements sans ajouter un mot. La perspective du repas nous plonge dans un profond silence. Finalement, je le brise. Il y a des choses que nous avons besoin de savoir avant de rejoindre mon pire ennemi.

—    Snow, qui est Aaron ?
—    Un des généraux de l'armée à laquelle j'appartenais. C'était mon supérieur avant que je ne déserte.

Comment un chef militaire a pu se retrouver sur le terrain ? Comment a-t-il pu participer au viol des femmes du village de Soraya ? Comment a-t-il pu tuer ma femme et ma fille ?
Mes questions se bousculent. Elles doivent se lire sur mon visage car Snow répond sans que j'ai besoin de les poser.

—    Il a toujours aimé être au plus proche des combats. Il y a gagné chacun de ses galons. Grâce à détermination, ses capacités tactiques, son exigence envers ses hommes et j'en passe. C'est un homme de terrain respecté, un soldat hors pair.
—    On dirait que tu l'admires.

Le reproche dans ma voix ne lui échappe pas.

—    Ça a été le cas à une époque. C'était un modèle pour tous d'où je viens. Une figure. Mais on ne nous montrait que ses exploits. Pas le revers de la médaille. Et je m'en suis aperçu. Vous savez tous que c'est en partie pour cela que j'ai déserté. Tous les soldats ici, ces hommes et ces femmes étaient mes camarades. Certains étaient mes amis. Tahar l'était...

Nous réalisons tous la portée de ce qu'il vient de nous dire.

—    Il ne faut pas vous inquiéter pour moi. C'était ma vie d'avant, je n'en suis pas fier. Et tous les jours, je chercherai ma rédemption. Jamais je ne reviendrai en arrière. Jamais je ne retournerai avec eux. Tout ce qui m'est arrivé de bien, c'est grâce à vous et à la magie. Je n'oublierai jamais ce qu'ils m'ont fait faire. Ce qu'il m'a fait faire. La plupart d'entre nous étaient des gens bien. Qui pensaient s'enrôler pour une noble cause. Pour un idéal. Je n'oublierai jamais tout ça. Ce qu'il leur a fait. Comme il les a transformés en êtres ignobles incapables de réfléchir, de distinguer une bonne action d'une mauvaise. Non, je ne l'oublierai pas...

Son regard se perd loin de nous. Et nous restons chacun muets face à son discours. Peu habitués à tant de gravité. Tant de douleur. Il les cache si bien en temps normal.
La main de Marley se pose sur la sienne et la presse. Sa voix brise le silence.

—    Peut-être que nous devrions nous changer Uhane et moi, pour ne pas rentrer dans le jeu qu'il nous impose.

Non. Non. Il ne faut pas. Au contraire.

—    Non. Autant lui faire croire qu'il réussit à nous endormir avec tout ce qu'il nous offre.

Je crois à peine les mots qui sortent de ma bouche. Alors que je ne rêve que de le faire souffrir autant qu'il l'a fait avec moi, je propose tout le contraire.

—    C'est un jeu dangereux, Joran. Il est doué. Très doué.
—    Peut-être. Mais nous aussi. On t'a, toi. Qui le connaît. Qui connaît tous les gens ici. On a Uhane et sa magie. Marley doit pouvoir s'occuper d'Elma sans craindre pour sa vie. Et je suis le Protecteur. Je ne laisserai personne vous faire du mal. Même si pour cela, je dois reléguer mes envies de meurtre loin de moi à chaque seconde qui passe.

Mes derniers mots sont ponctués de trois coups tapés contre la porte. Comme un seul homme, nous nous levons.

—    Allons nous jeter dans la fosse aux lions.

Ma remarque tombe à plat.

Nous arrivons devant une salle à manger immense.
De petits groupes de personnes sont éparpillés à travers la pièce. Un brouhaha, qui me rappelle les quelques soirées mondaines auxquelles j'avais participé dans ce qui me semble une autre vie, emplit l'espace.
Notre entrée ne passe malheureusement pas inaperçue. Les conversations cessent et notre hôte s'avance vers nous. Il a troqué ses vêtements écarlates pour un costume d'un blanc immaculé. Choix étrange qui contraste avec le noir de nos tenues à Snow et moi. Le bien contre le mal. Mais où est-il dans le cas présent ?
Grand seigneur, il salue avec respect Marley et Uhane, les complimente sur les tenues et engage la conversation avec elles.
Leurs réponses sont courtes et évasives mais il ne semble pas s'en formaliser et continue de leur parler sur un ton badin, ponctuant ses phrases de sourires charmeurs.
Snow et moi nous tenons à distance respectueuse. Pour faire semblant de ne pas les déranger mais également pour surveiller les autres.
Vu la tête de certains, ils ne sont pas d'accord avec la façon dont leur chef nous traite. Tahar nous lance des regards mauvais de l'autre bout de la pièce.

—    Si on doit se battre, il est pour moi.

Je dévisage mon ami avant de sourire à sa remarque.

—    Avec plaisir. Je n'ai pas aimé la façon dont il t'a parlé.
—    Et encore c'était rien. Il est capable de pire.
—    Charmant.
—    Tu n'imagines pas à quel point. On se connaît depuis toujours. Et on s'est enrôlés ensemble dans l'armée. J'étais meilleur que lui. Il n'a pas vraiment apprécié.
—    Mais pourquoi a-t-il sous-entendu le contraire ?
—    Par jalousie. Et aussi parce qu'il y a trouvé sa place alors que moi non. Je ne voulais pas obéir aux ordres aveuglément. Je n'y arrivais pas. Je devais comprendre pourquoi on nous faisait faire ceci ou cela.
—    Ça ne cadre pas avec la mentalité militaire ça...
—    Non. Pas du tout.

Un sourire naît sur ses lèvres. Il l'adresse à son ancien ami qui semble hésiter entre l'étriper sur le champ ou sourire lui aussi. Il finit par ne choisir aucune des options et détourne les yeux.
Je reporte mon attention sur Marley et Uhane qui sont toujours en grande conversation avec Aaron. Elles nous lancent des regards implorants et nous décidons sans même nous consulter d'aller les rejoindre.
Je dois prendre sur moi pour ne cacher l'aversion que je ressens.

—    On vous dérange peut-être ?
—    Absolument pas. Je venais de dire à mes invitées que nous allions passer à table. Suivez-moi.

Nous le suivons alors qu'il se dirige vers l'immense table qui se trouve au fond de la pièce. En bon gentleman, il tire les chaises de Marley et Uhane et ne s'assoit qu'après que nous soyons tous installés. Il préside évidemment.
Une valse ininterrompue de plats commence. Il y en a pour tous les goûts. Des rôtis, du poisson, des légumes cuisinés de façons que je ne connaissais même pas.
J'ai beau mourir de faim, je ne fais pas honneur au repas. Rien ne passe. Faire la conversation me demande trop d'énergie.

—    Quelle était votre spécialité, Docteur ?
—    Je suis obstétricien. Mais vous le saviez déjà, n'est-ce pas ?
—    C'est exact.
—    Alors pourquoi perdre votre temps à me poser la question ?
—    Il n'y a pas de perte de temps. J'apprends de chacune de vos paroles. Tenez par exemple, vous venez de dire que vous êtes obstétricien. Pas que vous l'étiez. La nuance est importante.
—    Je suis et resterai médecin toute ma vie. Quoi qu'il puisse s'y passer. Soigner et donner la vie sont des causes nobles.

Bien évidemment, je sous-entends que faire la guerre n'en est pas une et il le comprend très bien. Son visage se crispe une seconde.

—    Je suis parfaitement d'accord avec vous. Je vous remercie d'ailleurs d'avoir mis ma fille au monde.

Le visage de Soraya flotte devant mes yeux. Je la revois me raconter son histoire. Son refus d'être mère. Ses cris de douleur. Et quand elle est morte entre mes mains.
Une colère sourde m'envahit. Je ne tiendrai jamais. Je n'arriverai jamais à garder mon calme.
D'une voix bien trop tranchante, je lui réponds.

—    Si tant est que ce soit bien vous, vous lui avez seulement donné la moitié de vos gênes. Être père, ce n'est pas ça. Vous avez d'autres enfants ?

Un silence de mort accueille ma réplique. Plus un bruit ne vient perturber la scène. Même les respirations semblent s'être arrêtées.
Chaque personne présente à table est suspendue aux lèvres du général.

—    Non.
—    Vous en êtes vous seulement occupé depuis qu'elle est ici ?
—    Non.
—    L'avez-vous, ne serait-ce qu'une seule fois, tenue dans vos bras ?
—    Non.
—    Alors, vous n'êtes pas son père.

Il me dévisage et pas une émotion ne vient trahir ce qu'il pourrait penser. Son calme est olympien. Tandis que je bous de l'intérieur. Il reprend une bouchée de viande dégoulinante de sauce et la mâche comme si cette conversation n'avait jamais eu lieu. Les conversations qui s'étaient tues fusent à nouveau et c'en est trop pour moi.
Je pose ma serviette nerveusement, sors de table sans dire un mot et quitte la pièce. Je sens son sourire dans mon dos alors que je m'éloigne.
Une fois à l'extérieur, je respire enfin. J'avale de grandes goulées d'air nocturne. L'océan n'est pas loin. Je le sens au vent qui charrie les embruns. J'aimerais pouvoir le voir, le toucher. Me fondre en lui. Mais je ne peux pas. Je suis prisonnier de ces murs. À la merci du bon vouloir d'un homme abject.
Je fais les cent pas dans la cour. Perdu dans mes pensées, je ne sens qu'au dernier moment, la main qui se pose sur mon bras.
Je n'ai pas besoin de regarder la personne à laquelle elle appartient pour reconnaître son propriétaire. Je suis apaisé. Et il n'y a qu'un seul être ici capable de le faire aussi bien. Sa voix qui me plaît tant brise le silence de la nuit.

—    Tu devrais rentrer.

Je me tourne vers elle et l'enlace après avoir vérifié que personne ne nous observait.
Sentir son corps frêle contre le mien calme ma respiration.

—    A quoi ça sert tout ça ? Comment tenir alors que je voudrais le voir mort ?
—    Tu y arriveras. Tu es plus fort que lui.
—    Non.
—    Si, Joran. Je connais ce genre d'hommes. Ils se croient meilleurs que les autres. Au-dessus d'eux. Ils ont toujours une réponse toute faite. Des mots bien sentis pour chaque occasion qui peut se présenter à eux. Mais là, il n'avait rien à te dire. Parce que tu as raison. Et il le sait.
—    Mais...
—    Il n'y a pas de mais. Tu es plus fort parce que tu es humain. Tu es humaniste. Tu es conscient de tes faiblesses, tu écoutes les autres, tu te remets en question. Il est incapable de faire ça. Il règne en maître tout puissant sur le petit royaume qu'il s'est créé. Et il n'a pas l'habitude qu'on le contredise.
—    Comment sais-tu tout ça ?
—    J'ai déjà vécu avec lui. Avant de délivrer le message du prophète et de m'effacer de ses souvenirs. N'oublie pas également que je sais tout de toi ou presque...

Je souris à sa remarque. Elle se serre un peu plus contre moi avant de quitter la chaleur de mes bras. Elle fait quelques pas en arrière et me fait signe de la suivre.
Ses yeux ne toléreraient pas que je refuse. Je marche donc dans ses pas. J'ai peur un instant qu'elle me force à y retourner mais elle se dirige vers nos quartiers.
Nous pénétrons à l'étage qui nous a été attribué et je suis soulagé d'entendre les voix de Marley et Snow se disputer dans le salon.
Ils se taisent dès que nous entrons.

—    Ne vous arrêtez pas pour nous...

Marley me foudroie du regard avant de sortir de la pièce. Nous entendons claquer la porte de sa chambre. Je m'apprête à demander à Snow ce qu'il se passe quand il quitte les lieux à son tour. Nous nous retrouvons seuls, sans comprendre ce qu'il vient de se passer.

—    Tu devrais aller les voir.
—    Mouais...
—    Si Joran, ils ont besoin de leur ami.

Je préférerais rester avec elle, mais je dois reconnaître qu'elle a raison. Rien ne se passe comme prévu aujourd'hui.
J'hésite entre les deux portes, ne sachant pas qui aller voir en premier et finis par frapper à la chambre de Snow. Cela me semble plus simple que d'affronter mon amie.
J'entre avant qu'il m'en donne la permission.
Il ne remarque même pas ma présence. À genoux par terre, la tête entre les mains, il est entouré d'un écran créé grâce au vent. Je sais que je ne pourrai le franchir. Il se protège.
Que faire ? Que faire pour l'aider ? Pour le sortir de sa torpeur ? De ses tourments ? Je tourne et tourne en rond. Et finalement, décide d'aller voir Marley.
Je ne prends pas la peine de m'annoncer.
Elle est là, assise sur un fauteuil, les genoux repliés sur sa poitrine. Des larmes coulant le long de ses joues.
Comme Snow, elle ne me voit pas approcher. Je m'accroupis en face d'elle et d'un geste, efface ses pleurs. Elle se jette dans mes bras. Je nous relève lentement et nous assois sur le canapé. Je la garde contre moi tant qu'elle ne se calme pas.
Combien de temps restons-nous ainsi ?
Sa respiration devient plus régulière. Plus posée.

—    Ça fait quoi Joran ?
—    De détester quelqu'un et de le côtoyer chaque jour ou de s'attacher à une personne qui n'est pascelle avec qui tu pensais passer ta vie ?
—    De s'attacher...
—    C'est étrange. Parfois j'ai l'impression de trahir Abby en ayant des sentiments pour Uhane. Mais quand je suis avec elle, je me sens bien. Je me sens entier. Je ne suis plus seulement une coquille vide.
—    C'est ce que ça me fait aussi. Et ça me fait encore plus mal. Alors je fuis...
—    Je sais. Mais je suis sûr que Dean préférerait te savoir heureuse. Autant qu'on peut l'être en ce moment. Tes enfants aussi d'ailleurs.
—    Snow, tu crois qu'il m'en veut ?
—    Je ne sais pas. Je crois qu'être ici est encore plus difficile pour lui que pour nous et qu'il a du mal à le gérer. Je crois qu'il a besoin d'aide. Qu'il a besoin de toi et que ça lui fait peur. Parce qu'il sait où nous sommes et qu'il ne veut pas t'exposer au danger. Je crois qu'il a peur de ne pas pouvoir veiller sur toi. De ne pas pouvoir te protéger.

Marley semble réfléchir à ce que je viens de dire. Elle reste là, contre moi, comme quand nous étions adolescents et qu'elle me racontait ses chagrins d'amour. Comme quand la vie était simple et que nous jouions devant chez nos parents. Elle était toujours dans mes bras. Et puis, du jour au lendemain, elle avait arrêté. Elle me disait que ça la gênait, que nous avions grandi, changé. Que c'était mal.

—    Pourquoi ça fait si longtemps que tu n'es pas venue dans mes bras ?
—    J'avais peur. Peur que tout ait changé entre nous. À cause de mon pouvoir. Je voyais ton aura et je ne savais pas comment la comprendre. Elle était trop différente de celle des autres. J'avais peur de gâcher notre amitié en l'interprétant de la mauvaise façon.
—    Comment est-elle ?
—    Comme le flux. Elle tisse des liens multicolores autour de toi. Et plus le temps passe, plus elle s'intensifie.Elle était unique et ça me perturbait. Et j'ai rencontré Snow. Vos auras sont identiques ou presque. Quand vous êtes ensemble, c'est beau.
—    Mais tu préfères nous houspiller plutôt que nous le dire.
—    Oui.

Elle rit. Et entendre son rire réchauffe mon cœur, brisé de la voir triste.

—    Va le voir, Marley. Dis lui ce que tu m'as dit. La vie est trop courte pour ne pas profiter. Et toi aussi, tu as droit au bonheur. Certainement même plus que moi.

Je l'embrasse sur le front et sors de la pièce. Je regagne le salon mais Uhane n'y est plus. Sans bruit, je file dans ma chambre, me déshabille et me couche, espérant au plus profond de mon être que mes amis se parlent, qu'ils acceptent leurs sentiments, qu'ils aillent mieux.

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