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Chapitre 17

Mon regard se perd à l'extérieur et ce que j'y vois me coupe le souffle.
Je n'avais pas vu l'océan depuis si longtemps. Et le voilà qui s'étend, en face de moi, à l'infini. Dès que Snow s'arrête et coupe le moteur, je me précipite à l'extérieur.
À la va-vite, je me débarrasse de mes chaussures. Sentir la caresse du sable sous mes pieds, l'odeur si caractéristique des embruns me ramène en arrière. Me replonge dans mon enfance. Je me souviens de mes vacances chez ma tante. Je revois ses mèches qui volaient avec le vent. J'aurais rêvé de pouvoir un jour glisser les mèches folles d'Abby derrière ses oreilles et de l'embrasser au coucher de soleil. Un visage aux yeux verts bien trop grands se superpose à l'image d'Abby. À qui appartient-il ? Pourquoi ai-je l'impression de connaître cette femme ?
Immobile face à l'immensité qui me fait face, je respire profondément, essayant de trouver la solution à l'énigme qui se pose à moi. Tentant également de lutter contre l'appel de l'eau.
Mes amis m'ont rejoint.

— C'est magnifique.

Répondre n'est pas utile. Souligner l'évidence n'apportera rien au moment que nous partageons.
Combien de temps restons-nous, silencieux, à observer les vagues s'écraser sur la plage ? Je ne saurais le dire.
Mais bientôt, je n'y tiens plus. L'appel est trop fort.

— Vous venez ?
— Où ?
— Dans l'eau. Ça semble évident non ?

Leurs moues renfrognées me prouvent le contraire.

— Allez, s'il vous plaît...

Mon regard implorant a raison de leur réticence. Ils finissent par me suivre. Une fois au bord de l'eau, nous nous déshabillons le plus vite possible, gardant juste nous sous-vêtements.
Ils sont à peine en train de risquer un orteil dans l'eau que j'y suis déjà. Je ne devrais pas oublier que c'est mon terrain de jeu et pas le leur.
Je leur donne le temps de me rejoindre à leur rythme et me concentre uniquement sur mes sensations. La caresse de l'eau, son goût salé. Son appel. Toutes les tensions qui m'habitaient disparaissent aussitôt. Diluées dans cet élément qui a toujours été pour moi un refuge.
Je fais quelques brasses, plonge et remonte à la surface. Un soupir d'aise s'échappe de mes lèvres. Je me laisse dériver au gré des courants pendant quelques minutes. Sourd au monde qui m'entoure.
Bientôt des cris me sortent de ma transe.

— Espèce d'abruti ! Tu vas me le payer !

Marley est maintenant mouillée des pieds à la tête tandis que Snow rit à côté d'elle, tout en continuant de l'éclabousser.
Peut-être que je ne devrais pas mais je souris. Je souris devant ce moment d'insouciance que nous partageons.
Pour en rajouter une couche, je matérialise la sphère d'eau et la fais grossir pendant que je regagne le rivage. Une fois suffisamment près de Marley, je lui ordonne de se placer au-dessus de mon amie et la lâche. C'est puéril et pas très fair-play mais je m'en fiche. Je vais bien. Et je veux profiter de l'instant.
Sa réaction est immédiate. Elle se rue sur moi et tente de me renverser mais je suis bien trop fort pour elle. Il me suffit juste de me décaler de quelques centimètres et la voilà qui plonge la tête la première dans l'eau.
Snow est pris d'un fou rire.

— Vous me le paierez. Vous le regretterez... Mais qui m'a donné deux idiots pareils ?
— Une prophétie débile.
— Je n'attendais pas de réponse.
— Et nous, on adore t'en donner une.

Nous jouons dans les vagues pendant une bonne heure. Ce moment de détente, à ne penser à rien, nous fait du bien.
Snow est le premier à sortir. Suivi de près par Marley.
Ils sèchent au soleil, l'un à côté de l'autre. La peau d'ébène de mon amie contrastant avec la pâleur de celle de la Main Armée. Son corps tout en courbes adoucissant les lignes acérées de celui de l'ancien soldat. La féminité contre la force. Qui m'apparaissent soudain si parfaitement en accord.
Je quitte l'eau à regrets et les rejoins. Je m'allonge de l'autre côté de Marley.

— C'est quoi cet endroit, Snow ? Pourquoi tu nous as amenés ici ?
— Nous devons rencontrer quelqu'un. Elma est avec cette personne.
— C'est qui ?
— Je ne sais pas. Mais nous avons rendez-vous à un kilomètre de là en fin d'après-midi. J'ai préféré nous arrêter ici pour qu'on puisse mettre au point un plan. On ne sait jamais. Et j'irai repérer les lieux pour être sûr qu'on ne tombe pas dans une embuscade.

Bien sûr, il a raison. Mais l'idée de nous séparer ne me dit rien qui vaille.

— Je n'aime pas l'idée que tu partes seul.
— Nous n'avons pas vraiment le choix. Et je suis un grand garçon.

Nous nous mettons d'accord sur la marche à suivre. Une fois que nous avons tourné chacune de nos options dans tous les sens, essayé d'imaginer le pire juste au cas où, nous décidons de prendre un peu de repos. De manger. De penser à autre chose.
Pour une fois, voir Snow se préparer pour sa séance de méditation me donne envie de la faire avec lui. Je m'installe à ses côtés et suis chacun de ses gestes.
Un léger sourire effleure ses lèvres quand il me voit tenter de le copier tant bien que mal. De sa voix posée, ilse met à parler. Doucement. Les pieds campés dans le sol, les bras ouverts vers le ciel, la tête rejetée en arrière, il m'explique ce que je dois ressentir.L'union de la terre et du ciel à travers nos corps. Il me fait entendre cette musique qui n'est que dans sa tête. Nous enchaînons les postures et petit à petit, je ressens un changement en moi. J'atteins un niveau de conscience que je ne soupçonnais pas.
C'est comme si chacun de mes sens était exacerbé. Tout est plus fort. La caresse du vent sur ma peau. Le parfum des embruns. Le grain du sable sous mes pieds nus.
La magie qui coule en moi. Elle me prend la main et m'entraîne plus loin encore. Là où elle prend sa source. Sur les rives du flux. Cette rivière tissée de millions de fils, chacun représentant un sorcier, un pouvoir, une énergie. Certains de ces fils s'entremêlent, d'autres semblent se repousser, d'autres encore s'évanouissent et s'envolent tels des grains de poussière. Je comprends qu'un sorcier a dû mourir. Que sa vie, en touchant à sa fin, s'éteignait aussi dans le flux. Je lui adresse une prière silencieuse avant de reprendre mon observation de la source de mon pouvoir et de remarquer la présence de Snow à mes côtés. Je n'imagine même pas ce que serait d'être dans les flots avec la sphère.

— Je t'avais dit qu'il fallait que tu médites avec moi.

Il n'attend pas de réponse. Debout à ses côtés, je réalise que je ne pourrai plus me passer de méditer avec ou sans lui. Le sentiment de plénitude, de bien-être qui m'a envahi est bien trop grand.
Soudain, je remarque la silhouette de Marley assise sur la rive, les pieds trempant dans la rivière.

— Qu'est-ce qu'elle fait là ?
— Tu veux dire, pourquoi nous avons besoin de méditer pour être ici et pas elle ?
— Oui.
— Je pense que c'est dû à son pouvoir. Il est lié à la Vie elle-même.
— Elle nous voit ?
— Je ne crois pas. Je pense qu'elle ne se rend même pas compte qu'elle est là. Et à quel point elle est forte. Elle nous tient dans le creux de sa main, tu sais.
— Je sais.
— Quand j'ai quitté la forêt et que je t'ai laissé, Eolas m'attendait. Il m'a rabattu les oreilles avec le livre d'Eli et les prophéties. Avec mon rôle, le tien et celui de Marley. Je ne l'avais pas encore rencontrée. Elle était en mission, je ne sais où. Eolas me répétait chaque jour les mêmes choses. Et honnêtement, j'avais envie de lui faire avaler chaque page de chaque bouquin qu'il me faisait lire. J'étais prêt à t'abandonner alors que je savais que nos destins étaient liés. Mon seul moment de répit était ma séance de méditation quotidienne et à chaque fois, il y avait cette femme, les pieds dans l'eau. Un matin, j'ai fait mes bagages. Il me tapait trop sur le système avec ses airs de grand seigneur. J'allais sortir de la planque quand elle est entrée. La fille de la magie comme je l'appelais. J'ai rebroussé chemin parce que j'ai su tout de suite qui elle était. Je t'aurais abandonné. Je l'aurais fait, Joran. Mais Marley... Marley, je ne pouvais pas.

Son air coupable m'arrache un sourire. Jamais, je ne pourrai lui en vouloir. Il ne devrait pas en douter. Mais pour l'instant, j'ai envie de le titiller.

— Content de l'apprendre. Je m'en souviendrai en temps voulu.

Mon ton ironique ne lui échappe pas.Mais il ne répond rien.

— C'est la meilleure d'entre nous. Et elle a de la chance que tu sois là pour veiller sur elle.
— Je suis votre Main Armée à tous les deux.
— Je ne parlais pas de cette protection-là. Un jour, tu devras lui dire.

Encore une fois, il reste muet. Il me fait seulement comprendre qu'il est temps pour nous de quitter la rivière. De revenir dans le monde réel.
À peine avons-nous repris possession de nos corps que nous entendons Marley qui nous houspille. Elle est furieuse. D'un air entendu, nous ne relevons aucune de ses remarques. Nous la laissons s'égosiller seule et bientôt, elle se lasse.
Snow profite du retour au calme pour se préparer. Il revêt ses vêtements noirs, ses armes. Une à une. Il en prend encore plus que d'habitude. Ses deux revolvers sont rejoints par un troisième. Ses couteaux par un sabre dont l'étui aussi noir que la nuit prend place sur son dos. Il enfile sur ses mains des entrelacs d'anneaux à pointes qui me révulsent rien que de les voir. Il range dans l'une des multiples poches de son pantalon un filin en métal si fin que je doute un moment de ce que j'ai vu.
Et pendant qu'il s'équipe minutieusement et qu'il relève son foulard devant sa bouche, Marley ne le quitte pas des yeux.
Une fois prêt, il part sans nous regarder. Seules ses paroles nous parviennent.

— On se rejoint à mi-chemin dans deux heures.
— Fais attention à toi.

L'angoisse m'étreint dès qu'il disparaît de mon champ de vision. Pour m'occuper l'esprit, je mets de l'ordre dans nos affaires. Alors que ce n'était pas nécessaire. Absolument pas nécessaire.
Et Marley me regarde faire sans rien dire. Les yeux dans le vide.
Et finalement, le moment de nous préparer à notre tour arrive enfin.
Marley revêt une combinaison noire si près du corps qu'on dirait une seconde peau. Elle ne prend aucune arme. Et même si je ne veux pas imaginer pourquoi, je devine que, vu que son pouvoir est lié à la vie, elle peut très certainement la prendre aussi facilement qu'elle arrive à créer.
Bientôt, nous remontons nos foulards sur nos bouches comme l'a fait Snow il n'y a pas si longtemps.

— À quoi servent-ils ?
— Les foulards ?
— Oui.
— À nous empêcher de nous faire repérer. Nous exhalons de la magie par tous les pores de notre peau mais surtout par notre bouche. Ces foulards sont spéciaux, ils ne laissent passer que l'air que nous expulsons.
— Merci.
— De ?
— D'avoir éclairé ma lanterne.

Elle sourit en prenant le chemin que Snow nous a indiqué. Nous marchons côte à côte sans un mot. Et soudain, sa main se glisse dans la mienne. Son corps se rapproche du mien. Chassant mes démons, certainement autant que les siens.
Quand nous arrivons au point de rendez-vous, Snow est déjà là, assis nonchalamment sur une pierre. Dès qu'elle l'aperçoit, Marley lâche ma main et part se planter devant lui, l'air sévère.

— Tout est sécurisé ?
— Oui. J'ai refait le tour quatre fois. Le lieu de rencontre est un trou noir dans le flux. Nous ne pourrons, ni les uns ni les autres, nous servir de la magie.

Je ne savais même pas que des endroits comme ceux-là existaient. Je m'aperçois à quel point ma formation a été limitée. Très limitée et que des années seraient nécessaires pour combler chacune de mes lacunes.
Nous repassons encore une fois les détails de notre plan au cas où quoi que ce soit tourne mal et nous mettons en route.
Nous sommes les premiers à arriver à destination. Comme nous sommes seuls, je prends le temps de détailler le paysage. La vue est magnifique. La corniche sur laquelle nous nous trouvons surplombe l'océan. Le soleil de la fin d'hiver commence à décliner à l'horizon, prenant des teintes rouges et orangées.
C'est un endroit paisible. Un peu trop même. Sentir la magie et ne pas pouvoir l'atteindre est aussi reposant qu'inquiétant. Mais il n'y a pas de raison que quelque chose se passe mal. On doit juste nous confier Elma.
Recueillir cette petite fille que j'ai mise au monde me terrifie. Je n'ai pas approché un seul enfant depuis la mort d'Ada. Et si je ne restais pas pour mes amis, pour la confier à la seule mère en laquelle j'ai confiance, je serais déjà loin.
L'attente n'arrange rien. Plus d'une heure a passé sans le moindre signe de vie.
D'un commun accord, nous décidons de refaire le tour du périmètre que Snow a quadrillé pour vérifier que quelqu'un ne nous ait pas doublés.
Peut-être prenons-nous un risque. Mais rester ici ne sert à rien s'ils ne viennent pas.
La vue est assez dégagée et personne n'est visible à l'horizon. En descendant sur la plage sous la corniche, je sens un changement en moi. Un coup d'œil à Snow et Marley me confirme que nous sommes sortis de la relative protection du trou noir.
Nous faisons quelques pas sur la plage. À la recherche d'indices, de traces de pas. Mais il n'y a rien. Et tout à coup, des ombres passent dans mon champ de vision et se matérialisent autour de nous sans que nous ne puissions rien faire.
Nous sommes encerclés.
Une quinzaine d'hommes nous tiennent en joug.
Osant un coup d'œil vers Snow, je vois les remords et la douleur à travers ses yeux, son attitude, la culpabilité. Alors qu'il n'y est pour rien.
Le calme et la sérénité qui font sa force fondent devant moi. La panique prend possession de son visage et je ne comprends pas pourquoi parce que nous avions étudié toutes les options, même les pièges qu'on pourrait nous tendre.
Je voudrais qu'il se ressaisisse, qu'il n'abandonne pas maintenant. Nous avons besoin de la Main Armée. De l'homme à l'espoir. De notre ami. Mais son visage abattu ne m'inspire rien de bon.
Un homme à la silhouette haute et filiforme s'avance vers nous. Il toise le déserteur. Le regarde avec dégoût.

— Bonjour Snow. Quel plaisir de te revoir après toutes ces années.

Les inflexions dans sa voix font baisser les yeux de mon ami. Il courbe l'échine. Il plie.
Croit-il que ce qui arrive est sa faute ? Qu'il nous a trahis ? Mais comment aurait-il pu savoir qu'on nous tendrait un piège ?

— Si j'avais su que c'était toi que je devais rencontrer, je ne me serais pas donné tout ce mal. Tu ne vaux rien au combat.

Snow semble réagir à ces mots. D'une voix mal assurée, il demande.

— Où est la gamine ? Où est Elma ?
— Pas ici. Quand la nouvelle voie a été choisie, son père a vite compris qu'il pouvait agir à sa guise. Il a fait assassiner la personne qui devait vous l'amener aujourd'hui après lui avoir soutiré l'emplacement du rendez-vous et m'a envoyé à sa place.

Alors nous avons perdu. À cause de moi, il n'y a plus de règles. À cause de moi, le mal qui pouvait être contenu peut se libérer. À cause de moi, mes amis sont en danger, le monde est en danger. Je plie à mon tour.

— Déposez vos armes à terre.

La voix de cet homme qui connaît Snow est implacable. Impérieuse. Sûre de son ascendant sur nous. Si bien que nous n'avons d'autre choix que de nous exécuter.
Marley et moi en avons vite fini. C'est un peu plus long pour notre ami. Une à une, avec une lenteur exagérée, il ôte ses armes. Au début, je pense que c'est parce qu'il s'en sépare à contre-cœur. Mais à chacun de ses instruments de mort qui se retrouve au sol, il se redresse. Nos ennemis ne remarquent pas le changement dans son attitude. Mais pour Marley et moi, il est évident. Il se tient plus droit, ses yeux soumis il y a quelques minutes luisent maintenant de défi. Un instant, je me demande pourquoi, celui d'après, je me souviens qu'il déteste ses armes. Il en est à présent libéré.
Un sourire apparaît sur ses lèvres. Un sourire mauvais.

— Tu peux nous priver de nos armes, Tahar, ça ne changera rien.

Il a raison évidemment. Des pistolets et des couteaux ne sont que peu de choses face à nos pouvoirs.
Concentré sur nos ennemis, je ne remarque pas tout de suite que le vent s'est levé. Il enfle petit à petit. S'agite. M'appelle. Je lui réponds. Il est étrange de nous servir en conditions réelles de ces sorts que nous avons répétés lors de nos entraînements. J'avais secrètement gardé l'espoir que jamais ils ne me seraient utiles.
Alors que Snow nous rend invisibles aux hommes concentrés autour de nous, je matérialise la sphère dans ma main. J'appelle la pluie et nous lançons conjointement des trombes d'eau et des bourrasques sur nos ennemis. Des tornades. Certains d'entre eux, n'étant pas suffisamment sur leurs gardes, tombent sous l'impact sans avoir le temps de riposter. Les autres nous attaquent, lançant leurs sorts à l'aveuglette. Ils s'aperçoivent bien trop vite à mon goût que leurs attaques ne servent à rien s'ils ne nous voient pas. Tout à coup, d'une voix claire et forte, ils déclament une formule magique. Leurs pouvoirs à chacun différents font voler en éclats le voile qui nous entourait. Ils se brise en milliers d'éclats que Snow, Marley et moi sommes les seuls à voir.
À partir de ce moment-là, le chaos règne de toutes parts. Je me défends comme je peux, attaque dès que je vois une ouverture, me refusant à tuer. Peut-être que je devrais mais je préfère engluer mes ennemis dans le sable mouillé, en faisant remonter le niveau de l'eau sous leurs pieds. Ou lier les mains de ceux à qui les gestes semblent indispensables.
Marley, à mes côtés, les plonge dans le sommeil ou les force à désarmer leurs camarades en jouant sur leurs muscles.
Snow est le moins clément de nous trois. En combat rapproché, ses coups atteignent ses adversaire à chaque fois. Il en reçoit aussi mais ils ne font pas le poids. Il est plus rapide, plus précis, plus réfléchi. La Main Armée prend tout son sens. Surtout quand son pouvoir prend à la gorge nos assaillants et les étouffe.

Je ne sais depuis combien de temps nous nous battons mais je commence à m'épuiser. Je vois bien que je ne suis pas le seul. Mes compagnons comme nos ennemis respirent plus difficilement. Nos gestes sont plus lents, moins précis. Nous continuons quand même à nous battre.
Je saigne à plusieurs endroits. Aucune de mes blessures ne semblent grave cependant. Marley peine à tenir debout. Je me tourne vers Snow et la fatigue qui tire ses traits m'alerte tout autant que ce que je vois autour de moi. La peur. La désolation. La haine. La destruction. La plage sur laquelle nous nous trouvons ressemble à un champ truffé de mines qui auraient toutes explosé.
Je me perds dans ma contemplation, exténué.
Et soudain, un cri déchirant me percute de plein fouet. Quelqu'un a mal. Atrocement mal juste là, derrière moi.
Tout, autour de moi, s'est arrêté. Amis ou ennemis, d'un seul bloc, nous tournons vers la voix.
Je me fige alors qu'un sourire naît sur les lèvres de nos assaillants. Le fameux Tahar tient un couteau contre la gorge de Marley. Sur son cou, un mince filet de sang coule.
Pourquoi n'ai-je rien vu ? Pourquoi ne l'ai-je pas protégée ? Et d'où sort cette autre femme, agenouillée devant elle, le visage tordu par la douleur ?
Les mains de la Mère posées sur son front. Aux larmes qui coulent le long de les joues de mon amie, à la bouche de Tahar qui susurre à son oreille, je comprends ce qui est en train de se passer.
Il la force, l'oblige à torturer l'autre femme.

— Rendez-vous ou je l'oblige à la tuer. Je le peux, n'en doutez pas.
— Non... Je vous en supplie... Non...

Ensemble, elles ont parlé. Ensemble, leurs voix m'ont touché. Celle de Marley, son timbre grave chargé de haine et de peur. Et celui de l'autre femme. Un peu cassé mais si doux malgré la peur et la douleur. Il me semble que je l'ai déjà entendu. Des mots, des confidences affleurent à la lisière de ma mémoire. Je voudrais voir ses yeux, son visage. Peut-être me rappelleraient-ils quelque chose. Un détail de plus que des bouts de phrases me semblant sans queue ni tête.
Comme si elle m'avait entendu, elle redresse la tête et plonge ses yeux dans les miens.
La douleur qui les traverse me happe. M'attire. M'appelle.
Je reconnais la fille de mes rêves sans que rien d'autre ne me revienne. Je fouille ma mémoire à la recherche d'indices qui m'échappent. J'enrage de ne pas trouver. Je sens que c'est important. Mentalement, j'invoque la sphère. Je lui demande de rester cachée, je l'implore de m'aider.
Elle m'envoie des images. Mes souvenirs reviennent d'un coup. Ils m'assaillent. Il y a la maison où nous nous sommes reposés. Les bois. Des clochettes bleues et blanches. Les Gaalanta. Une silhouette à la voix cassée qui pleure dans mes bras et me murmure qu'elle m'aime. Nos yeux qui se cherchent. Une étreinte. Et mon cœur et mon corps apaisés pour la première fois depuis des mois.
Je t'aime, Joran.
Et soudain, tout redevient clair. La voie non validée que j'ai décidée de suivre pour ne pas l'oublier. Pour avoir droit au bonheur. Cette décision qui m'a permis de me sentir bien. En phase avec la nature.
Une autre décision m'apparaît. Et encore une fois, elle m'apaise et apaise la magie en moi. Même si je vais mettre nos vies en danger.
Je relève la tête vers nos ennemis, vers Tahar.
Je suis prêt.
Si, pour qu'elle ait la vie sauve, je dois me soumettre, je le ferai.
Si, pour que Marley ne soit pas brisée, je dois me soumettre, je le ferai.
Si, pour les protéger, je dois me soumettre, je le ferai.
Je jette un coup d'œil à Snow et lui fais comprendre que nous devons abandonner. Pour le moment.

— On se rend.
— Sage résolution.
— Relâchez-les.
— Pas tant que je ne serai pas certain que vous ne serez plus capables d'agir.

D'un geste de la tête, il ordonne à deux de ses hommes encore debout de nous passer des menottes.
À peine sont-elles autour de mes poignets que je comprends qu'elles ne sont pas ordinaires. Je ne sens plus Ada. Mon accès à la magie est coupé. Snow a l'air aussi perdu que moi. Nous ne sommes plus rien sans elle. Nous ne sommes plus rien. Des coquilles vides.
Marley, elle aussi, se retrouve menottée. À peine les a-t-elle à ses poignets qu'elle regarde tout autour d'elle et semble ne rien voir et ne rien entendre. Comme si elle était devenue aveugle et sourde. Elle ne sent plus la Vie.
Tahar redresse Uhane sans ménagement par les cheveux et la pousse vers nous.
Elle tombe à mes pieds. Je lui tends mes mains liées pour l'aider à se relever.
Elle me dévisage, ouvre la bouche et la referme plusieurs fois d'affilée, hésitant à parler.Je décide de lui faciliter la tâche en lui murmurant pour qu'elle soit la seule à entendre mes mots.

— Je me souviens de toi.
— C... comment ?
— Les fleurs. Elles stimulent la mémoire.
— Pourquoi ?
— Je ne voulais pas t'oublier. Je ne pouvais pas. La voie non validée, c'était toi, Uhane. C'est toi que j'ai choisie. 

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