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Chapitre 12

Les jours passent et se ressemblent. Ils ne sont pas mornes et peu stimulants comme lorsque nous étions au refuge. Bien au contraire.
Mes journées sont rythmées de telle manière que je n'arrête pas une minute. Entre les corvées qui incombent à chacun des membres de la communauté, les différents entraînements qui s'enchaînent, les longues heures que je passe à lire, je suis fatigué. Je tiens à peine debout passé vingt et une heure.
Bien évidemment, Snow se moque constamment de moi. Marley aussi de temps en temps. Je ne la vois que peu. Elle m'évite la plupart du temps. À moins que ce soit moi. Je ne parviens pas à m'approcher de ses enfants. De n'importe quel enfant du sanctuaire, je dois le reconnaître. C'est trop dur. Je sais bien qu'elle comprend mais il y a une différence entre l'appréhender et l'accepter. Je lui fais de la peine. J'ai essayé de me faire violence, en vain. À chaque fois que je me retrouve en présence d'un enfant, mon cœur s'affole, j'ai des frissons, la respiration courte. Alors je fuis. Je m'isole le temps de me sentir mieux. Bien sûr, je devrais arriver à passer par dessus tout ça. À ne pas penser à Ada à chaque fois que je les entends rire. Mais c'est plus fort que moi.

J'ai fini le livre d'Eli. Eolas avait raison. Ce texte est obscur. Et pourtant j'ai l'impression d'avoir compris de nombreuses choses grâce à lui.
Il m'a éclairé sur ma nouvelle condition. Sur le processus de sa survenue.
Il m'a permis d'accepter un peu plus. De ne pas avoir peur de ce « don ». Je ne suis toujours pas persuadé que c'en soit un.
Le vieil homme m'a donné un autre livre en me disant qu'il était tout aussi important que celui d'Eli. Mais pour le moment, je ne le comprends pas. Ses mots m'échappent. Ils ne font pas sens. Il est question du Protecteur. Le nom que tout le monde ici me donne. Mais aussi de la Mère et de la Main Armée. De leurs compagnons de passage. Le détracteur, le traître, l'érudit.
J'en ai parlé avec Eolas et il m'a juste rétorqué que le jour où tout sera clair n'est plus très loin. J'en ai assez de nager en plein brouillard. Il se remet à parler par énigmes et j'ai envie de l'étrangler tous les jours un peu plus.
D'autant plus qu'il me parle comme à un enfant de cinq ans pendant les entraînements que j'ai avec lui.
Malgré tout, je dois avouer que c'est un excellent professeur.
J'arrive maintenant à invoquer mon don sans qu'il soit déclenché par mes émotions. Ça a été dur. Extrêmement dur. Surtout sous le regard acéré de mon « mentor ».
Il m'a appris le pouvoir du verbe. Ces mots qui aident à canaliser ce que ma pensée imagine ou veut réaliser. Ces mots précieux et infinis qui extériorisent de façon exponentielle ce que je souhaite créer. Car la magie crée ou détruit. Elle fait le bien et le mal. Elle ne choisit pas. Elle est neutre. C'est son détenteur qui va décider de son application.
Les mots sont précieux et infinis. Et le premier que j'ai appris, je le connaissais depuis toujours. Je l'ai utilisé pendant plus de cinq ans, chaque jour.
J'ai appris le nom de l'eau dans cette langue étrange. Étrangère à ma vie jusqu'à ces derniers jours.
« Ada »
Je ne savais pas qu'il y avait une signification à ce prénom. Je m'étais juste dit qu'il sonnait bien. Et Abby l'avait immédiatement aimé.
Quelque part, j'y vois un signe. Elle est toujours avec moi. Comme si la sphère parfaite qui suit les mouvements de mes doigts, qui ondule lorsque je lui demande pouvait être l'âme de mon enfant perdue.
Je sais bien que c'est ridicule, mais si cela me réchauffe le cœur, est-ce mal ? Je ne le pense pas. J'y mets même plus de cœur à l'ouvrage.
J'ai appris à résister aux attaques, à les retourner contre mon agresseur. Sans dire un mot ou en lançant des sorts à mon tour. Au fil des jours qui passent, je vois qu'Eolas arrive moins bien à tenir le coup. J'exulte. Bien sûr, c'est encore le plus fort. Mais combien d'années d'entraînement a-t-il ? Combien de combats a-t-il menés ? Combien d'élèves a-t-il formés ?
À chaque fois que je lui pose la question, il l'élude. Comme s'il ne voulait pas voir son âge en face. Comme s'il ne voulait pas vieillir. C'est malheureusement inévitable.

Nous sommes une fois de plus en train de travailler ce sort qui me donne du fil à retordre. Celui qui consiste à noyer un adversaire de l'intérieur, gorger ses poumons d'eau. Dans l'optique de lui donner la mort.
« Hel moera »
Deux petits mots si innocents en apparence. Mais faire du mal aux autres n'est pas pour moi. Je suis médecin, je suis fait pour sauver des vies. Pas pour les prendre. Pas pour les détruire.

—    Alors tu mourras.
—    Tant pis. Je ne donnerai pas la mort.
—    Même si c'est pour protéger la vie ? Même si c'est pour une cause plus grande que tes petits tracas d'humain pathétique ?
—    Allez vous faire foutre !
—    Non. Je resterai. Je te pourrirai la vie jusqu'à ce que tu acceptes que le monde dans lequel tu vis est mort, que tu acceptes comme n'importe lequel des habitants du sanctuaire que ta vie a changé et que tu es comme chacun de nous ici. Tu tueras pour la cause.
—    Non. Jamais. Je ne suis pas comme vous.
—    Si.
—    Non.

Mes yeux lui lancent des éclairs avant que je tourne les talons et commence à quitter la pièce. Je sens sa colère dans mon dos sans en faire cas.
Personne ici ne le contredit. Personne. Pas ouvertement du moins car il est évident qu'il déteste cela. Il règne en maître sur ses ouailles mais je ne suis pas l'une d'elle. Et je sais parfaitement que s'il n'avait pas besoin de moi, cela ferait longtemps qu'il m'aurait jeté dehors.
Peut-être devrais-je partir ? Quitter cet endroit ? Je pourrais demander à Snow de me suivre, je sais qu'il le ferait. Il est comme moi dans le fond. Nous ne sommes pas à notre place ici.
J'entrouvre la porte quand sa voix parvient à mes oreilles.

—    Hel moera !

Un poids s'abat sur ma poitrine me forçant à mettre un genou à terre. Je peine à respirer. Je suffoque. Au prix d'un effort considérable qui me prive certainement de mes dernières forces, je me relève et lui fais face.
Je reste là, à le dévisager. Fier et droit. Digne. Pas de lui. Je le vois. Il voudrait que je me défende mais je n'en fais rien.
Les secondes s'égrènent toutes plus lentement les unes que les autres. J'ai mal. La douleur devient insupportable pourtant je ne flanche pas.

—    Défends-toi.

Ma voix est rauque, hachée quand je lui réponds.

—    Non. Vous... Vous essayez de... De me soumettre. Vous n'y arriverez... Pas. Je ne suis pas comme vous.

Je ne suis pas comme lui. Je ne détruis pas. Mais je ne me laisserai pas faire pour autant. En fait, il a raison, je dois me défendre. Seulement, je ne le ferai pas comme il l'attend. Une idée s'insinue en moi. Il faut que j'essaie.
Je plaque la main sur ma poitrine et murmure.

—    Ada daalje.

« Que l'eau sorte ».
Je me concentre pour doser mon incantation. Pour ne pas aspirer l'eau de mon corps et me suicider par erreur. Petit à petit, les gouttes d'eau s'échappent de mon corps et se condensent à l'intérieur de ma paume. En sphère parfaite.
Je respire mieux. Enfin.
Ma main libre saisit la poignée de la porte de la salle d'entraînement et d'une démarche mal assurée, je quitte la pièce. Me défendre m'a épuisé. Je traverse le village à la lenteur d'un escargot.
J'entends les pas d'Eolas dans mon dos. Il me hèle. Mais je ne me retourne pas.

—    Nous n'avons pas fini. Reviens ici.

Je continue mon chemin. Nous croisons quelques habitants qui me dévisagent sans comprendre. Et finalement, c'est Snow qui m'arrête.

—    Joran, ça va ?
—    Ça ira mieux quand je me serai reposé.

J'essaie de garder mon calme et de ne pas en rajouter une couche devant notre « chef ».

—    Que s'est-il passé ?
—    Demande-lui.

Je m'apprête à repartir quand d'un geste, il me stoppe dans mon élan. Son regard, avenant il y a quelques secondes, a changé. Ses yeux ont pris les couleurs de l'orage et je jurerais que le vent s'est levé. J'essaie de me dégager, en vain. Sa poigne est trop forte. Il me force à me tourner vers mon mentor.

—    Écoutez-moi bien tous les deux. Oui, oui, même vous, Eolas. Pas la peine de me regarder avec ce regard courroucé. J'en ai marre. Tout le monde en a marre. Vous êtes incapables de vous supporter. Chacun de vos entraînements, chacune de vos prises de bec se finissent de la même manière. Ce n'est plus possible. On dirait deux gosses alors que ça fait longtemps que vous avez passé l'âge. Surtout vous Eolas. Acceptez une bonne fois pour toutes que vous n'en ferez rien. C'est écrit partout. Expliquez-lui parce que si vous ne le faites pas, je le ferai. Même si je sais que je ne dois pas. Que ça pourrait changer le cours de l'histoire ou je ne sais quoi encore.
—    C'est trop tôt.
—    Non. Ça fait des semaines que vous dites ça.

Ça m'amuserait presque de les voir se disputer mais la main de Snow qui enserre mon bras me dissuade de prendre tout ceci à la légère.

—    Et toi, Joran. Tu devrais mettre tes ressentiments de côté. On a tous beaucoup à apprendre et Eolas est le plus expérimenté d'entre nous.
—    Mais...
—    Il n'y a pas de « mais ». Je suis d'accord avec toi sur la plupart des points qui t'opposent à lui. Malheureusement, on doit parfois se faire tout petit.
Donc maintenant, on ne bouge pas tant que vous ne faites pas amende honorable. Toi, Joran, en la mettant en veilleuse et vous, Eolas, en lui expliquant tout ce que l'on sait et en vous mettant à sa place. Il ne veut pas tuer. Arrêtez de le forcer. C'est moi la Main Armée de toute façon.

Ses derniers mots m'interpellent. J'ouvre la bouche mais Eolas me fait taire d'un geste. J'obéis pour montrer ma bonne foi à mon ami.

—    D'accord. Allons ailleurs. Rester ici dans le froid va juste réussir à nous faire tomber malades.

Nous le suivons en silence jusqu'à la bibliothèque. Il s'installe à une table et nous fait signe de prendre place face à lui. Ses yeux se perdent un instant dans le vide.

—    J'ai appelé Marley. Nous allons avoir besoin d'elle.

Comment ? Mon regard interrogatif ne leur échappe, ni à l'un, ni à l'autre. Mais aucun ne me donne de précisions. Snow se contente de hocher la tête. Il se renferme sur lui-même. Sur ses traits se fige un air grave que je ne lui connais pas. Comme si le poids du monde allait reposer sur ses épaules. Comme s'il n'était pas prêt à entendre ce qui va suivre alors que c'est lui qui l'a demandé.
Je devrais peut-être prendre les devants et poser des questions mais je n'ai aucune idée de ce qui va se jouer quand mon amie nous aura rejoints.
Il ne faut à Marley que quelques minutes pour arriver. Quelques minutes qui se sont passées dans un silence lourd et pesant.

—    Que se passe-t-il ?

L'angoisse dans sa voix me tord le ventre. J'ai l'impression de l'avoir déjà entendue sans pour autant me souvenir du jour précis où son timbre ressemblait trait pour trait à celui-là.
On dirait qu'Eolas et Snow ne l'ont même pas remarqué. Je ne peux même pas leur reprocher. Ils sont trop absorbés par leurs pensées pour se rendre compte de quoi que ce soit.

—    Pourquoi m'avez-vous appelée ? Comme ça ?

Elle appuie tellement sur ces deux derniers mots qu'ils lèvent enfin la tête et réalisent sa présence.

—    Assied-toi, s'il te plaît.

Elle s'exécute sans répliquer tant la voix de son chef s'est fait caressante. Comme à chaque fois qu'il s'adresse à elle. Comme un père à son enfant. Avec tendresse et amour. Il ne parle comme cela qu'à elle et elle seule. Peut-être la considère-t-il comme sa fille, même si je sais qu'ils ne partagent aucun lien génétique. J'ai connu les parents de mon amie. Ils étaient comme elle. Humains. Bons. Généreux. Toujours prêts à aider les autres. Avec le même caractère de cochon aussi. Des gens vrais. Je les estimais beaucoup. Beaucoup.

—    Snow m'a mis aujourd'hui devant un dilemme...

Marley foudroie le prénommé du regard. On ne contredit pas son chef. On ne lui tient pas tête. Elle me l'a déjà dit des centaines de fois.

—    Et avant que tu l'invectives, il a eu raison. Il est temps que Joran en apprenne plus. Tu devais être présente.
—    Le moment est venu alors ?
—    Oui. Tu es prête ? Tu assumeras ton rôle ?
—    Oui.
—    Et toi, Snow ?
—    Même si j'en crève de dire oui, vous savez que je ne me soustrairai pas à mes responsabilités.
—    Il faut que tu le dises.
—    Oui, j'assumerai mon rôle.
—    Très bien.

Il s'arrête un instant et prend une grande inspiration avant de se tourner vers moi.

—    Tu as lu le livre d'Eli. Je t'en ai également donné un autre mais tu n'en as pas saisi le sens, n'est-ce pas ?
—    Effectivement.
—    C'est normal. Les mots qu'il contient sont trop importants pour être dévoilés au premier venu. Personne évidemment que tu n'es pas. Mais normalement, le livre devient limpide au moment opportun. C'est pour cela que je t'ai assuré que tout deviendrait clair. Sauf que les jours passent et qu'il ne se passe rien.
—    Qu'y a-t-il dans ce livre de si important ?
—    L'avenir. Les voies qui s'offrent à nous et à nos ennemis. Car nous sommes tous liés. Elles sont toutes explorées. Les unes après les autres. En fonction de nos décisions. C'est pour cela que j'ai demandé à Snow et Marley s'ils assureront leur rôle.
—    Quels rôles ? Quel avenir ? Comment peut-on le prédire ? Comment tout peut être écrit ? N'avons-nous pas notre libre arbitre ?
—    Ça fait beaucoup de questions...
—    Répondez à celle que vous voulez en premier. Ça ne me dérange pas.
—    Nous avons notre libre arbitre. La révélation du don change un peu la donne mais nous restons maîtres de nous-mêmes. De nos pensées et de la plupart de nos actions. Certaines sont cependant conditionnées par la magie. C'est elle qui trace une frontière entre l'avant et l'après. Depuis que son existence a été rapportée, que ce soit oralement ou sur les premiers écrits, nos études ont établi que certains événements avaient été prédits à l'avance. Des sorciers se sont entièrement consacrés à la prédiction de l'avenir. Et l'une d'elle concerne notre temps.
—    Comment le savez-vous ?
—    Il s'est passé des choses abondant dans ce sens.
—    Lesquelles ?
—    La première s'est produite il y a déjà presque vingt ans. Un génocide a eu lieu un peu partout sur la planète. Une extermination silencieuse, méthodique, précise. Qui est passée inaperçue car les membres de la communauté qui a été décimée ne vivaient plus ensemble depuis des années. Elle se savait menacée et a décidé de s'éparpiller à travers le globe pour avoir plus de chances de survivre. Marley en faisait partie. Elle et, à travers son sang, ses enfants sont les derniers membres vivants.

Je dévisage mon amie avec stupeur. Je n'étais pas au courant de tout cela. Pourquoi ? Pourquoi me l'a-t-elle caché ? Sa voix tremblante qui déchire l'espace me donne l'impression qu'elle a lu dans mes pensées.

—    Je ne pouvais pas. Si je t'en avais parlé, ils t'auraient tué aussi. Je venais de perdre mes parents, je ne voulais pas perdre mon seul ami. Ces gens ne font jamais de quartier. Tu n'étais même pas là quand c'est arrivé. C'était au moment des vacances d'été. Tu étais parti au bord de l'océan comme chaque année.

Je me souviens. Je me souviens des embruns sur ma peau. Du sel qui la tiraillait le soir quand je rentrais chez cette tante éloignée qui faisait mes quatre volontés. Elle m'aimait. Elle aimait que je vienne passer l'été chez elle. Elle me répétait sans cesse que j'étais promis à de grandes choses. Elle n'arrêtait pas de vanter mes qualités auprès de ses amies. Que j'étais un nageur hors pair, que j'étais toujours le premier de ma classe, que j'étais cet enfant parfait qu'elle aurait voulu avoir. Rien n'était vrai hormis le dernier point sauf que je n'ai jamais été parfait. Cela est impossible. Mais elle n'avait pas d'enfant. Et comme mon oncle était marin, elle était seule le plus clair du temps. Alors je la laissais dire. Ça lui faisait du bien.
Je me souviens aussi de cet appel de ma mère. Qui m'avait dit que nos voisins avaient eu un accident. Qu'ils n'avaient pas survécu en dehors de mon amie. Que ce n'était pas la peine que je rentre, que Marley ne le souhaitait pas. Ils m'avaient menti. Peut-être leur avait-on menti à eux aussi...
Mes souvenirs déferlent comme les vagues qui venaient lécher mon corps quand je ne faisais qu'un avec l'océan. Ils m'envahissent. Me caressent et l'instant d'après me transpercent comme ces lames de fond qui rayent tout sur leur passage.
Et soudain, une pensée se fait plus ténue que les autres.

—    S'ils ne font pas de quartier, comment... ? Comment se peut-il que tu sois encore envie ?
—    La magie m'a sauvée. Ils m'ont violée, battue et torturée devant mon père après avoir fait la même chose avec ma mère. Puis ils lui ont tranché la gorge. Ses yeux n'ont pas quitté le cadavre de ma mère qui ne ressemblait plus qu'à un pantin désarticulé pendant qu'ils exécutaient leur sentence. Ils n'ont pas quitté le mien. Je n'étais plus que ça. Un corps presque sans vie. Mon pouls était trop faible pour qu'ils le sentent quand ils ont vérifié qu'ils nous avaient bien réglé notre compte. Ils sont partis. Comme ils étaient venus. Sans bruit. Spectres invisibles qui se confondaient avec le noir de la nuit.

Mon corps est cloué sur ma chaise à l'écoute du récit du calvaire de Marley. Le cœur au bord de mes lèvres, je prends délicatement la main de cette fille, cette femme qui, d'aussi loin que je me souvienne, a toujours été dans ma vie. Je la serre en y mettant tout ce que je ressens pour elle. Même si ces derniers temps, je n'ai pas vraiment été à la hauteur. Même si une part de moi lui en veut de ne pas m'en avoir parlé, de ne pas m'avoir fait confiance.
Ma voix est rocailleuse quand je reprends la parole.

—    Quel est ton don ?
—    La vie. Je guéris plus vite, je suis en connexion avec les autres êtres vivants, je peux soigner aussi. Je n'ai pas choisi d'être infirmière pour rien. Mais cette partie-là de mes capacités est difficilement contrôlable et extrêmement dangereuse.
—    Ça veut dire que tu aurais pu sauver tous ces gens qui sont passés entre nos mains ? Que tu aurais pu sauver Soraya ? Que tu aurais pu sauver Abby et Ada ?
—    Non. Elles devaient mourir.

Elle sait évidemment que sa réponse ne me plaît pas. Elle anticipe même ma réaction en fuyant mon regard.
Je m'emporte. J'explose. Ma chaise vole à travers la pièce, bientôt rejointe par les objets que j'attrape et jette en hurlant. Je les vois bien du coin de l'œil qui me dévisagent. Ils se demandent certainement lequel va se dévouer pour tenter de me refaire retrouver la raison.

—    C'était écrit, Joran. Aller à l'encontre de l'avenir aurait eu des répercussions beaucoup plus grandes. L'humanité se serait éteinte à l'heure qu'il est.

La voix posée de Snow me permet de retrouver mon calme. Un calme seulement apparent. Mon timbre est dur et tranchant quand je leur réponds. En les regardant dans les yeux. Bien fixement. Sans ciller une seule fois.

—    Il aurait peut-être mieux valu.

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