CLOCHARD
Je dormais sur un banc en fer forgé,
Sur une bouche de métro bien chauffée,
Au bord d'une rivière apaisée,
Dans mes guenilles, emmitouflé.
Dans une nuit froide, je grelottais.
Dans un dernier souffle saccadé,
Je revis tous ces regards se détourner
Et ma vie partir en fumée.
Je n'ai pas toujours été un indigent,
Homme de valeur et homme d'honneur
Frappé par le plus strict des malheurs,
Je connus la perte de femme et d'enfants.
Je souhaitais prendre leur place
Lorsque leur corps était de glace
Dans cette voiture accidentée,
S'est dessinée ma destinée.
Puis on m'a pris ce qu'il me restait,
Travail, maison et dignité.
J'ai parcouru la ville sur mes pieds,
Des pieds blessés, ankylosés.
Je vivais de quelques pièces jetées.
Peu de regard, peu de pitié,
Souvent du mépris et du rejet,
Non assistance à personne en danger.
Je suis même devenu une injure,
Espèce de clochard qu'ils disaient,
Tous ces enfants étaient si durs
Et leurs parents étaient trop niais.
Dans ce dernier souffle saccadé,
Je vis femme et enfants adorés,
Je les rejoins dans la lumière
Et quitte ce monde tumultuaire.
CARL PERSONNE.
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