Chapitre 5 : Le mur
Elfman fut brutalement réveillé par les appels des soldats. Il soupira. Le soleil était à peine levé qu'ils devaient se mettre en marche. Sa vie serait maintenant plus difficile qu'il ne l'aurait imaginé, mais en tant que vrai homme, et pour protéger le royaume et sa sœur, il devrait s'y faire. À ses côtés, il vit Evergreen se réveiller, un air marabout au visage. Quant à l'homme de l'autre côté, il lui jeta un regard noir.
Ignorant ses alentours, il fit comme demandé et sortit de la tente, entamant de ramasser le campement. Du moins, il essayait du mieux qu'il pouvait, n'étant pas encore habitué à sa nouvelle force. Puis ils se remirent en marche. Étrangement, il ne put s'empêcher de chercher du regard la jeune femme. Peut-être était-ce due au fait que, malgré son impressionnant caractère, c'était la seule personne qu'il connaissait au moins de nom ? Le jeune homme ne se posa toutefois pas d'autres questions et ralenti le pas, une fois qu'il l'eut repérée derrière lui, de sorte à ce qu'ils soient côtes à côtes.
- Quoi ? Demanda-t-elle après un moment.
- Tu ne m'as toujours pas dit depuis quand tu as ton anneau.
- Je t'ai dit que ce n'était pas de tes affaires !
- Moi ça fait seulement quelques jours, poursuivit-il sans se soucier de sa réponse.
À ces paroles, la jeune femme releva un sourcil, surprise.
- T'es mal chanceux alors, conclut-elle. Quelques jours plus tard et tu ne serais pas ici.
- Quelques jours de plus et ma sœur serait ici à ma place, dit-il, se rattachant à l'idée que ce malheur n'était pas en vain.
- Ta sœur est aussi porteuse ? Demanda Evergreen, son air s'adoucissant tout de même face aux dernières paroles du jeune homme.
- Depuis plusieurs années, confirma-t-il après avoir jeté un œil aux alentours, s'assurant que personne n'entende.
- Au fond, ce n'est pas surprenant que des membres de la même famille soient porteurs.
- Ton frère est surement porteur aussi, conclut Elfman.
- Ça n'a rien à voir, idiot, s'exaspéra Evergreen. J'ai été adoptée... Mais oui, nous sommes tous les deux porteurs, moi depuis cinq ans, dévoila-t-elle enfin.
Les yeux d'Elfman s'agrandirent, indiquant qu'il avait compris. Cela n'eut d'effet que de déclencher un soupir d'exaspération de la part de la jeune femme.
- T'es vraiment un cas désespéré, dit-elle sans toutefois s'éloigner de lui.
Ils se contentèrent simplement de marcher côtes à côtes à travers les nombreux kilomètres qu'ils devaient, une fois de plus, parcourir durant la journée. Puis, quelques heures plus tard, ils s'assirent pour leur repas du diner. Un bol contenant une espèce ce ragout qui n'inspirait rien de bon leur fut donné. Après avoir gouté avec hésitation au repas, la jeune femme grimaça : c'était encore pire au gout que ce que ça en avait l'air.
- Beurk ! Ils osent nous servir quelque chose d'aussi mauvais, se plaint-elle.
- Hen ?
Elfman leva ses yeux sur la jeune femme, ne semblant pas comprendre ce qu'était le problème, son propre bol déjà vide.
- Ne me dis pas que tu aimes vraiment ça ? Se surprit Evergreen avec dégout.
Ce dernier haussa les épaules, ignorant pourquoi elle se plaignait.
- Les vrais hommes doivent manger ! Se contenta-t-il de répondre au plus grand agacement de la jeune femme.
- Et bien, ça tombe bien, je ne suis pas un homme. Conclut-elle en lui tendant son bol pratiquement plein.
- Tu vas avoir fin ! Réplica Elfman, surpris qu'elle refuse un repas, repoussant le plat qu'elle lui tendait malgré le fait qu'il ne soit pas complètement rassasié.
- Puisque je te dis que je n'en veux pas...
Devant son insistance, il ne se fit pas prier et accepta le bol tendu qu'il vida en quelques bouchées. Puis il fut temps de repartir de nouveau. Après quelques heures de trajet de plus, Evergreen sentit son estomac se nouer. Elle avait faim. La jeune femme savait bien sûr que ça allait se produire tôt ou tard, mais elle espérait se rendre un peu plus près de l'heure du souper pour ça. Se résignant, tentant d'ignorer son ventre qui se plaignait, elle continua de progresser à contrecœur.
Le mouvement de quelque chose de gigantesque sautant près d'elle la fit sursauter, ramenant toute son attention à sa droite. Il ne lui fallut pas longtemps pour réaliser que c'était Elfman qui venait de se propulser dans les airs, atterrissant avec fracas près d'elle.
- Mais c'est quoi ton problème ? S'emporta-t-elle. Tu as bien failli me faire faire une crise cardiaque tellement j'ai eu peur...
Elle s'arrêta net en voyant qu'il tenait dans ses mains une branche qu'il venait d'arracher à un cerisier. Ce dernier lui tendit ladite branche, semblant ignorer son nouvel excès de colère.
- Arrête de chialer, dit-il. Je sais que tu as faim, dit-il en pointant son ventre duquel il avait sans aucun doute entendu les grondements.
La jeune femme s'agrippa le ventre rapidement, le rouge teintant ses joues, puis prit la branche pleine de cerises qu'il lui tendait. Elles avaient vraiment l'air délicieuses.
- Merci, dit-elle avec hésitation.
- Pas de problème ! Un homme ne peut pas laisser sa partenaire mourir de faim.
Elle fut tentée de le réprimander une fois de plus pour son agaçante manie de toujours dire « homme », mais elle n'en fit rien. Ce fut plutôt la manière dont il l'avait désignée qui la marqua.
- Partenaire ? Répéta-t-elle surprise.
- Bien sûr ! On va protéger le royaume ensemble, dit-il avant que ses traits se durcissent. Je n'en ai pas vraiment envie et j'ai peur de ce qui nous attends, mais avoir une partenaire aussi féroce que toi c'est encourageant.
- Qui traites tu de féroce ? Tu me fais passer pour une espèce d'amazone ! Tenta de s'emporter Evergreen malgré le rouge qui marquait maintenant bel et bien ses joues, nuisant à sa crédibilité.
Comment un grand gaillard comme lui pouvait-il parler aussi ouvertement de ses craintes ? Il disait tout simplement ce qui lui passait par la tête, ne se préoccupant pas le moins du monde de ce que les autres en pensait.
Puis elle se mit à manger les cerises en silence. La route était encore longue et, alors que le soleil changeait de couleur, indiquant le crépuscule, Evergreen se demanda pourquoi ils n'avaient toujours pas établi de campement. Elle vit alors apparaitre un énorme mur à travers les arbres. Ils y étaient presque ! Cette réalisation l'emplit de soulagement. Cependant, cette consolation de mettre fin à son long trajet fut vite remplacé par de la crainte. Ce mur allait être, jusqu'à nouvel ordre, sa nouvelle demeure, son nouveau mode de vie.
Autour d'elle, elle pouvait lire la même tension chez les autres recrues de l'EDD. Ses jambes semblant avoir moins de tonus que quelques minutes auparavant, elle franchit tout de même la distance les séparant de la mureille. Il était énorme et constitué de pierres. Evergreen avait bien sûr déjà entendu des rumeurs à son sujet, mais jamais ne s'était-elle doutée qu'il serait si imposant. La partie du mur se tenant devant eux était d'ailleurs très profonde et équipée de deux grandes portes. Il n'en fallut pas plus à la jeune femme pour comprendre que cette partie élargie du mur servait de base à l'EDD et que c'était là qu'ils se dirigeaient.
Suite à un signe du commandent, les portes s'ouvrirent et le groupe poursuivi son trajet. La première chose qui la marqua fut le manque de lumière. L'ambiance était tout simplement lugubre et lui glaçait le sang malgré l'importance de son organisation.
Ils entrèrent dans une grande salle où deux autres groupes semblables au leur se tenait. Probablement des porteurs provenant d'autres villages, pensa-t-elle. Apparemment, ils étaient les derniers arrivés puisque dès que les portes de la salle furent refermées, celui qui semblait être un des hauts dirigeants prit la parole, leur laissant à peine le temps de s'adapter ou de souffler un peu.
- Bienvenue, chers porteurs, au sein du mur. Mon nom est capitaine Thompson, responsable de l'intégration des nouvelles recrues dans notre organisations. Sachez avant tout que votre présence ici est essentielle à la survie du royaume et qu'elle est plus qu'appréciée.
Il sourit à l'assemblée puis laissa la parole à un autre homme qui tenait dans ses mains une liste.
- Ceux qui seront nommés seront les premiers à se voir attitrer leurs appartements et devront me suivre.
Il se mit donc à énumérer une série de noms jusqu'à prononcer celui d'Evergreen. Elfman attendit un peu plus, espérant entendre aussi le sien. Après sa séparation de sa sœur, à peine deux jours plus tôt, il espérait intérieurement rester près de la jolie jeune femme aux cheveux bruns, et ce, malgré les nombreuses fois où il l'avait trouvée effrayante dans le passé. Mais son propre nom ne fut pas prononcé et, après lui avoir jeté un regard inquiet, Evergreen se dirigea vers la scène où elle attendit les autres gens nommés avant de disparaitre derrière la porte, suivant le représentant.
Un sentiment de solitude l'envahit de nouveau. Il eut même l'impression de reconnaitre sa sœur parmi les autres porteurs. Le jeune homme secoua la tête. Était-ce la situation qui le perturbait au point d'imaginer la présence de Mira ? Non, malgré les ressemblances frappantes dont ses cheveux blancs, ses grands yeux bleus ou la forme de son visage, elle était plus jeune et se tenait différemment de sa sœur. Comme si elle avait senti son regard sur elle, cette dernière s'approcha de lui, un air inquiet au visage et une main portée à son front.
- Hey ! Est-ce que ça va, demanda Elfman alors qu'elle fut près de lui.
- Ton amie, dit-elle. Elle... elle ne devrait pas y aller...
- Quoi ? Mais de quoi tu parles ? Dit le jeune homme. Comment...
- J'ai des prémonitions, annonça-t-elle en pointant son anneau. Ce ne sont que des sentiments, mais ce que j'ai ressenti en voyant le groupe s'en aller n'augure rien de bon.
Le jeune homme hocha la tête, regardant avec inquiétude la porte qui venait de se fermer sur Evergreen.
- Tu veux qu'on explore un peu ? Reprit la jeune femme d'un clin d'œil. On pourrait se promener et, par « hasard », tomber sur elle.
Le jeune homme lui sourit. Peut-être était-ce à cause de sa ressemblance avec Mira, mais il apprécia tout de suite cette petite. Réprimant sa crainte de se faire surprendre par les gardes, tous deux parvinrent à se faufiler alors que le groupe restant fut mené à ce qui semblait être un dortoir.
- Au fait, chuchota-t-elle en se tournant vers lui. Mon nom est Lisanna. Heureuse de te rencontrer !
Avouez que vous avez cru que j'avais négligé Lisanna dans cette histoire Mouhahaha! En tout cas, j'espère que vous y avez cru ;) Je me doute aussi que vous avez de nombreuses questions et, soyez sans crainte, vous aurez des réponses plus loin dans l'histoire :) N'oubliez pas de me laisser un petit commentaire pour me dire ce que vous en pensez :D
Bonne journée !
Lily xx
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro