Épilogue #1
Je tourne et retourne la carte, mais je n'arrive pas à me situer dans cette ville qui m'est inconnue. Les New-Yorkais manquent de temps et aucun n'accepte de me renseigner. Je sors mon téléphone et active mon GPS. Peut-être qu'ainsi, je trouverai. Je suis venue ici passer une semaine de vacances. Cela fait six mois que Seattle m'étouffe. J'ai l'impression que chaque endroit qui m'était familier m'est devenu insupportable. Un homme a emménagé dans l'appartement vide depuis bientôt quatre ans et même cela m'agace. Pourtant je suis habituellement de nature enjouée, mais je n'y arrive plus. J'ai l'impression que tout m'attriste. J'ai consulté une psy qui m'a dit que je retenais peut-être un traumatisme bien ancré. Elle a supposé que cela venait de mon abandon. Elle a probablement raison.
Je suis soulagée en trouvant enfin la bonne avenue. Malcolm m'a indiqué qu'un très bon disquaire s'y trouvait et, en grande fan des années quatre-vingt, je ne pouvais qu'y aller. Je pousse la porte de la boutique et sourit, satisfaite en entendant grésiller dans le haut-parleur Missing you de John Waite.
— Bonjour, me salue l'homme derrière le comptoir.
— Bonjour, réponds-je timidement.
Il retourne à son occupation et je parcours les bacs à la recherche de petits trésors oubliés. À chaque découverte, je pousse un petit cri enthousiaste. Je les parcours chacun et je me retrouve vite avec une pile d'une dizaine de disques. Pas sûre que ça passe dans ma valise.
— Vous êtes une fan des années 80 ? me demande le disquaire en arrivant à mes côtés.
— Oui et vous ?
Ses sourcils se froncent suite à ma question. Oui, c'est stupide, il ne tiendrait pas un magasin spécialisé autrement.
— Oui, mais c'est une passion récente.
J'opine du chef sans pouvoir détacher mon regard du sien. Cet homme est vraiment beau comme un dieu. Il s'éloigne, le dos droit, et je ne peux empêcher mon regard de glisser plus au sud. Pas mal, se pâme ma cheerleader. Je confirme.
Mes emplettes faites, je me dirige vers le comptoir et y dépose mes trésors. Il les récupère et les scanne avant de les fourrer dans un sac qu'il me tend. Je le récupère et dépose mes billets devant moi. En attendant ma monnaie, je contemple mes vinyles dans le sac.
— Tenez, m'annonce la voix de l'homme.
Je relève le nez et lui sourit en tendant ma main. Les pièces viennent s'échouer dans le creux de celle-ci et, avec ma maladresse légendaire, j'en fais tomber une que je rattrape au même moment que lui. Un étrange frisson m'envahit, suivi d'un étrange sentiment. Une douleur intense à la poitrine survient. J'ai mal, très mal, et je jurerais que je pourrais m'effondrer tout de suite.
— Vous vous appelez comment ? me demande-t-il visiblement troublé.
— Charleen, annoncé-je la voix cassée par l'émotion que je n'identifie pas.
— Bonne journée, Charleen.
Je lui souris, troublée, puis m'éloigne. J'ouvre la porte et m'extirpe de la boutique. Mon cœur cavale et j'ai l'impression de manquer de souffle. Je traverse la rue puis risque un dernier coup d'œil vers le magasin. La devanture est très colorée, et le nom de la boutique me fait étrangement sourire : Chez Eli.
La pression dans ma poitrine s'accentue à chaque pas que je fais. Je commande à mes larmes qui s'agglutinent de ne pas couler. Mon état ne me surprend pas, c'est ainsi qu'est ma vie depuis six mois. Comme si mon cœur avait été broyé. Je suis déçue, parce que je pensais que quitter Seattle me ferait du bien.
Allez ma cocotte, on va pas se laisser aller, me motive ma cheerleader aux petits soins depuis que j'ai l'impression de survivre plus que je ne vis. J'inspire et expire profondément avant de reprendre ma route.
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