tw : mention de meurtre sur des créatures magiques, mention de mort

La nature l'avait dominée, ce lieu était pratiquement dépourvu de traces humaines. Seules les ruines d'un château pouvaient être aperçues en été lorsque les feuilles mortes ne les recouvraient pas, poussées par le vent. Ce château avait autrefois été somptueux, des hommes et femmes y avaient habité, fait la fête, mangé. Seulement, aujourd'hui il n'était plus en capacité de recevoir qui que ce soit. Les grands murs décorés de tapisseries d'antan n'était plus que ruine ne dépassant pas un mètre de haut.
En fait, il accueillait encore quelqu'un, ce petit homme qui vivait loin d'autrui.
Il lui arrivait de venir s'asseoir sur une pierre, il regardait la mer au loin ou alors par des temps plus sombres, il pleurait.
Ce petit homme ressemblait en tout point à un humain, seules ses oreilles pointues s'apparentent à celles des elfes et cette branche sortant de sa cage thoracique montrait qu'il ne l'était pas vraiment. Trop humain pour le monde des créatures magiques et trop magique pour le monde des humains, il restait le plus souvent seul. Quelques fois il se rendait au village des elfes, là où sa mère et tous les autres résidaient. Il avait vite compris que cet endroit n'était pas pour lui. Trop ressemblant ou trop différent, il savait qu'il n'avait sa place nulle part.

La forêt, là, était sa place. Il adorait pouvoir entendre les oiseaux chanter, voir le soleil traverser le feuillage de ses rayons. Il aimait écouter le bruit que faisait le vent lorsqu'il se glissait entre les arbres. Il y avait établi sa maison, ce n'était pas grand chose, juste une petite structure en terre dure. Il y avait passé tout un été, aidé de sa mère. Il avait été heureux de pouvoir quitter le village, ne supportant pas sa différence qui créait cette barrière entre lui et les autres.

Comme une fois par mois sa mère venait lui rendre visite. Elle arrivait à l'aube et partait au crépuscule. Elle n'était pas un demi-sang comme lui, née dans le village elle ressemblait aux autres. Cheveux verts ou quelques feuilles de lierres poussaient au rythme des saisons. Une peau douce, au teint hâlé, de jolis yeux jaunes en amandes et des oreilles pointues. Elle était magnifique sa mère, elle semblait ne jamais vieillir. Il n'était pas étonné qu'elle eût plût à l'humain qui fut son père.

— C'est bientôt l'automne, tu comptes commencer à faire des provisions ? l'interrogea-t-elle.

Il lui répondit d'un hochement de tête avant de poursuivre de vive voix : — Je vais commencer par le bois, même si l'automne n'arrive pas avant plus d'un mois et demi, il faut que je fasse ma réserve, je ne veux pas me retrouver avec des branches humides.

Les propos avancés à sa mère furent tenus le lendemain. Armé d'un morceau de cuir, il commença à ramasser des branches plutôt moyennes qui serviraient à alimenter un petit feu. Quand vint le moment des bûches, il passa plus de temps à les couper qu'à les porter jusqu'à sa maison. En fin d'après-midi, lorsqu'il effectuait son dernier aller-retour, il se sentit observer. D'abord inquiet, il s'arrêta afin de guetter le moindre bruit suspect. Les animaux ne venaient pas si près de chez lui, ils sentaient la magie et ne s'approchaient donc pas. Ce n'était pas une créature magique, il aurait sentit son pouvoir. Nan…ça ne pouvait pas être humain. Aucun d'eux ne venait si loin dans la forêt et encore moins à cette heure-ci. Seulement, sur le moment il ne voyait pas autre chose. Il abandonna finalement cette idée, ne sentant plus de présence, et retourna chez lui ranger sa dernière tournée de bois.

Les jours qui suivirent le petit homme les passa pratiquement tout le temps dehors. Le temps clément de l'été lui permit de faire les quelques travaux ou aménagements pour passer l'automne et l'hiver. Si les deux premières fois il essayait de se dire que la présence qu'il ressentait n'était que dans sa tête, c'est le troisième jour qu'il vit une touffe de cheveux mal cachée derrière un arbre. En automne il n'y aurait sans doute pas fait attention tant la chevelure était d'un orange flamboyant. Les boucles de l'inconnu.e volaient dans tous les sens à cause de la petite brise, le rendant encore plus visible. Le demi-sang sourit amusé qu'un humain s'amuse à le fixer mais revient bien vite à la réalité en se rappelant que justement cette personne était humaine et donc nuisible pour les créatures magiques.

Il se souvint d'une légende que lui racontait sa mère, petit.《C'est l'histoire d'un jeune elfe qui est passionné par les humains. Il veut les découvrir de plus près, les comprendre. Alors il va au village le plus prêt, pensant y être bien accueilli, il fut pris de terreur lorsque qu'une femme cria. – Un démon ! Un démon dans le village ! En seulement quelques minutes le jeune elfe fut emmené et par la suite brûlé par les hommes. Depuis, il était interdit de s'approcher des humains.》
Il se souvint lui avoir demandé pourquoi, elle, l'avait fait, s'approcher des hommes, mais la suite de son souvenir se coupa lorsqu'une branche craqua. Il lâcha ce qu'il tenait dans la main et de celle-ci sortit une hache faite de lierre. Peu sûr de lui il lui cria : — Tu n'as rien à faire sur la terre des créatures magiques humain. Retourne chez les tiens.

Par manque de chance pour lui, la personne sortit de sa cachette. Sous le stress de la situation, le demi-sang lui envoya une boule de feuilles, aussi dure que la pierre sur le front. L'humain qui reçut le projectile s'évanouit sous l'impact. Encore plus paniqué, il s'approcha de ce qui semblait être un homme. Du bout d'une branche il toucha le corps du garçon, voyant que ce dernier ne réagissait pas il créa un coussin de feuille qui lui permit de porter l'étranger jusqu'en dans sa maison. Il ne voulait pas de cet humain chez lui mais il savait qu'il y avait de grandes chances qu'il se fasse manger par une bête s'il le laissait dehors et il ne voulait pas laisser aux bêtes l'occasion de venir sur son territoire.

Quelques jours passèrent sans que l'humain aux cheveux oranges ne se réveille. Allongé sur la banquette en bois et entouré de lierre il lui était impossible de bouger tant ses dernières l'empêchaient de faire le moindre mouvement. L'elfe était parti tôt ce matin, il n'avait pas peur de laisser le garçon seul, même s'il se réveillait il ne pourrait rien bouger mise à part le cou. Alors il s'était assis sur les ruines du château à contempler la mer. Le bruit des vagues et du vent lui firent du bien. Ces derniers jours avaient été beaucoup trop stressants pour le demi-sang. Les yeux fermés, il chanta la seule chanson qu'il connaissait par cœur. Il l'avait apprise de sa mère, elle l'a chantait souvent lorsqu'il était enfant.

— C'est pas parce que tu fermes les yeux que je ne sais pas que tu es réveillé. indiqua la créature magique.

L'humain surpris de s'être fait prendre, sursauta. Il ne s'attendait pas à ce que l'elfe ne découvre sa supercherie. Décidément les créatures magiques étaient passionnantes. Le garçon s'était pris de passion pour ses créatures comptées dans leurs légendes et contes. Il avait toujours rêvé d'en voir, alors dominé par son envie il avait couru vers la forêt à son arrivée. Il ne pensait vraiment pas tomber sur une créature dès son premier jour ici - même tout court - il n'en revenait toujours pas. Surtout que celle-ci ne ressemblait pas vraiment à ceux que les contes décrivaient.

— Tu vas me tuer ? demanda le garçon avec la voix tremblante.

— On ne tue pas d'humains. Toi par contre, qu'est-ce que tu veux ? le demi-sang s'était montré froid mais en même temps il se retrouvait face à ceux qu'ils appelaient ennemis.

— Rien…il fit une pause, cherchant ses mots. Il ne savait pas comment formuler ce qu'il cherchait à dire et surtout il avait peur de la réaction de l'autre. — En fait tu me fascines et je voulais juste t'observer. admit-il en chuchotant presque.

Le demi-sang était surpris de cette réponse, il s'attendait à quelque chose d'autre.
Celle-ci passée il enchaîna : — La prochaine fois fais le plus discrètement, je t'ai découvert rapidement. Un sourire se dessina sur les lèvres de l'étranger, avant qu'il ne redevienne tout gêné au bruit de son ventre.

L'autre se demanda ce qu'était ce bruit avant de voir le garçon regarder avec intérêt sa corbeille de fruits et il comprit. L'humain avait faim. Il se fit la réflexion que la faim se manifestait de façon bizarre chez les hommes.

— Pourquoi persistes-tu à venir chaque jour ? dit-il en soupirant.

— Je te l'ai dis tu me fascines !

— Et c'est une raison pour me fixer ?

— S'en ai une depuis que tu m'as mis à la porte de chez toi !

— T'étais vivant alors, j'allais pas te garder. l'humain souffla et gonfla ses joues, boudant du comportement de la créature magique.

— T'es même pas drôle.

— Je t'entends humain.

L'elfe continua ce qu'il était entrain de faire ne se préoccupant plus du garçon aux cheveux oranges. Ce fut ainsi pendant un mois. Chaque jour le non magique revenait et essayait de discuter avec l'autre. S'était sans compter sur la créature qui ne répondait que pour lui demander de 《se la fermer et d'arrêter d'épuiser sa salive pour rien.》

— Un jour tu me diras comment tu t'appelles ?

— Sans doute le jour où tu me le demanderas.

— Ok, alors comment tu t'appelles ? l'interrogé le regarda avec un air blasé, épuisé par le comportement de celui qu'il avait appris être son cadet.

— Seungmin.

— C'est joli Seungmin. Et moi tu me demandes pas comment je m'appelle ?

— Non. Je n'ai pas besoin de connaître ton prénom pour savoir que tu m'énerves.

— T'es pas gentil hyung. Ça aussi ça énervait le demi-sang. Le langage humain auquel il ne comprenait rien.

Les dernières semaines d'été arrivaient, rafraîchissant considérablement le temps. Le cadet venait toujours rendre visite à Seungmin malgré que ce dernier ne l'envoie constamment sur les roses. Il acceptait tout de même sa présence, le faisant rentrer chez lui lorsque la pluie s'invitait.

— Hyung si j'étais une créature magique tu m'aurais accepté ?

— Sûrement oui, mais tu ne l'es pas alors la question ne se pose pas.

— Qu'est-ce qui te pose problème chez les humains ? Seungmin soupira. Il s'attendait à une question de ce genre un jour. Il avait longuement médité sur le sujet, à la réponse qu'il pourrait donner, à sa façon de la formuler, d'une tournure qui ne blesserait pas l'humain.
Malgré les apparences qui prouvaient le contraire, le plus âgé s'était beaucoup attaché à ce garçon qui venait tous les jours le voir.

— Les histoires qu'on nous a enseigné. Elles disaient toutes que les humains étaient des êtres impitoyables qui n'hésitaient pas à nous tuer. Alors il est normal que je pense la même chose. Après tout j'ai été élevé avec ses valeurs et sans jamais voir d'humain jusqu'à toi. Je ne sais pas si ils sont tous comme toi, ce qui doit être fatiguant n'empêche mais si c'est le cas alors je pense que je pourrais donner ma confiance plus facilement.

— Ça veut dire que tu me fais confiance ?

— Je te fais confiance. il s'arrêta voulant prononcer le prénom de son cadet mais ne le connaissant pas il laissa un blanc planer.

— Jeongin. Mon prénom c'est Jeongin.

— Je te fais confiance Jeongin.

Les jours étaient beaucoup plus agréables depuis cette discussion. Le demi-sang avait accepté d'apprendre à connaître l'humain, faisant que lorsque celui-ci l'apprit il cria de joie.
L'automne s'était enfin installé pour le plaisir de Seungmin qui adorait regarder les feuilles devenir orangées et tombées sur le sol afin d'en faire un tapis. Avant que le grand froid ne s'installe et rende les sorties dehors moins agréables, il profitait des ruines du château. Aujourd'hui il était accompagné par Jeongin à qui il faisait découvrir cet endroit.

— Je me demandais hyung, les autres elfes ils sont comme toi ?

— Je dois le prendre comment ? demanda-t-il un sourire en coin dessiné sur son visage.

— Physiquement ! Est-ce qu'ils sont comme toi physiquement ? paniqué à l'idée d'avoir fait sortir le démon intérieur de Seungmin il s'agita.

— Pas vraiment…je suis un demi-sang.

– Un demi-sang ?

– Oui, en fait ma mère est une elfe mais mon père est un humain alors j'ai des particularités d'elfes qui font de moi une créature magique mais j'ai aussi des caractéristiques humaines.

— Tu peux me dire ce qui fait de toi un elfe ? chuchota le cadet, comme s'il ne voulait pas briser la bulle qu'ils avaient créée. Et toujours friand d'en apprendre plus sur les créatures magiques qui le fascinait tant.

— J'ai leurs oreilles comme tu peux voir. ils rigolèrent, se rappelant que Jeongin avait avoué que c'était la première chose qu'il avait remarqué chez Seungmin. J'ai la même magie aussi  et d'ailleurs tu vois cette branche qui sort de mon cœur ? Jeongin hocha la tête. Les autres ne l'ont pas, eux elles se trouvent dans leurs cheveux. Quand j'étais petit et que je ne contrôlait pas mon pouvoir j'ai libéré une trop grosse quantité de magie et cette branche est sortie. il pouffa à ce souvenir. Mes yeux sont marrons mais quand une émotion trop forte me domine ils deviennent jaunes alors que les autres elfes naissent avec les yeux jaunes. Mes cheveux sont châtains et verts, les leurs sont seulement verts. Il continua à décrire ses différences et ressemblances avec les créatures magiques mais sa voix se faisait de plus en plus faible, triste de ne pas appartenir à cent pour cent à une espèce. Jeongin finit par le couper, presque agacé par son hyung.

— Tu m'agaces hyung, tu ne vois même pas la chance que tu as d'être si singulier. Les elfes se ressemblent tous, les humains aussi mais toi par ta mixité tu es unique. Alors ne sois pas triste de n'appartenir à aucune espèce à cent pour cent. Tu es beau hyung, je n'ai jamais vu une créature magique aussi jolie que toi.

— Jeongin, tu n'as jamais vu de créature magique mis à part moi.

— Ce n'est pas le sujet ! Accepte mon compliment ! Les joues rouges, le plus jeune se releva et partit en direction de la maison de l'elfe. De là où il était, Seungmin riait, le plus jeune ressemblait à un nain en colère.

Les jours se ressemblaient beaucoup. Jeongin venait chaque jour sauf quand la mère du plus âgé venait lui rendre visite. D'ailleurs cette dernière était avec lui autour de la table à boire son bol de soupe.

— Maman je voulais te dire quelque chose.

— Je t'écoute mon elfe des bois. il leva les yeux au ciel face au surnom.

— Je crois que je suis amoureux.

— Ah oui ? Qui est-ce ? Le regard sur le côté, elle fit mine de pas savoir de qu'il s'agissait. En vérité elle était venue une fois où Jeongin était là, ils ne l'avaient pas remarqué mais elle avait compris à leurs regards qu'ils étaient amoureux.

— Il s'appelle Jeongin, il est humain.

— Je vois. Toujours le regard sur le côté elle sourit et Seungmin ne mis pas longtemps à comprendre qu'elle savait.

— Tu le savais n'est-ce pas ?

— Je suis ta mère, je te connais bien et tes yeux ne trompent pas.

Il voulut lui demander ce qu'elle voulait dire par là mais il ne le fit pas. Sachant que sa mère ne lui répondrait pas, elle était quelqu'un qui parlait peu.

Le lendemain de la discussion qu'avait eu Seungmin avec sa mère, Jeongin trouva le plus âgé allongé comme un rat mort dans son lit. D'abord inquiet, il comprit vite que le demi-sang était en pleine réflexion. Alors il le laissa et vaqua à des occupations, habitué à aider l'elfe dans ses tâches quotidiennes.
De bien meilleure humeur lorsqu'il se leva enfin de son lit, la créature magique décrocha un sourire au roux.

— Que me vaut un si grand sourire dès le matin ?

— Rien, je suis juste de bonne humeur.

– Qui êtes-vous !? Qu'avez-vous fait de mon Seungmin hyung !? Presque paniqué, il attrapa son visage et écrasa ses joues.

— Jeongin. Le cadet se calma à l'entente de son prénom et regarda le plus âgé avec interrogation. Seulement aucune réponse de vive voix ne vint mais le plus jeune comprit.

Par leurs yeux ils communiquèrent.
Ce fut magique, un peu comme leur relation.