Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Chapitre 6

Lorsqu'il put enfin se coucher, la musique battait encore dans son crâne. Il avait apprécié la performance malgré lui. La musique avait été primitive et le chant avait été pur, comme arraché à vif. Il avait été si immergé dedans qu'il en avait oublié sa faim. Il s'effondra sur la couche de fortune qui avait été installée pour lui sur le sofa du petit salon. Il avait été soulagé de savoir qu'il n'aurait pas à dormir par terre.

Ce fut un coup de pied dans les côtes qui le réveilla. Skuti se tenait au-dessus de lui, les mains sur les hanches.

- Debout, chien. Tu dois aller chercher le petit-déjeuner de Sa Seigneurie.

Vestar ne put retenir un sifflement de douleur lorsque tous ses muscles se mirent en mouvement. Il s'obligea à pousser, suivant Skuti jusque dans les tréfonds du château. Les cuisines étaient logées au premier sous-sol, à l'écart des feux des étages supérieurs. Juste avant de passer les portes, le couloir était si frais que la chair de poule couvrait la peau de Vestar. Une fois les portes passées, la chaleur fut étouffante.

- Tu es en retard, Skuti, l'apostropha le cuisinier.

- Va dire ça au chien, répliqua le concerné. J'ai dû aller le réveiller.

L'énorme cuisinier laissa exploser un rire tonitruant qui ne perturba que Vestar. D'une main de la taille d'un plateau à thé, il désigna un comptoir. Dessus, un petit-déjeuner copieux était servi. Des pâtisseries encore fumantes offraient une odeur sucrée alléchante. À côté de l'assiette, un verre de lait, un second verre vide et une carafe.

- Qu'est-ce que tu attends ? lui cria Skuti. Dépêche-toi !

Vestar soupira mais obtempéra. Avoir autant de délicieuse nourriture sous le nez ne l'aida pas. Devoir remonter jusqu'aux quartiers princiers non plus. Au bout de la seconde volée de marches, il dut se rattraper à la rambarde, pris du vertige violent. Il sut, par un quelconque miracle, maintenir le plateau. Une seule goutte de lait tomba sur l'argent.

- Qu'est-ce que tu fous ?

Vestar inspira profondément avant de rattraper le serviteur. Skuti lui ouvrit la porte et le laissa entrer dans le petit salon encore plongé dans le noir. Comment il avait réussi à sortir de là sans se heurter à un meuble, il l'ignorait. L'instinct, sûrement.

Skuti alla ouvrir les rideaux, laissant entrer une lumière blafarde et violente. Vestar posa le plateau sur la table du petit salon et observa Skuti aller ouvrir les rideaux de la chambre. Il ressortit aussitôt et venir attendre près de lui, les mains dans le giron. Vestar garda sa position habituelle, le dos droit et les bras croisés.

Alrek paraissait frais comme la rosée en sortant de sa chambre. Il alla s'asseoir dans le siège face à la table et Skuti poussa Vestar. Du menton, il lui fit signe de le rejoindre. Vestar ferma brièvement les yeux avant de se résigner à aller s'agenouiller à côté du prince. Ce dernier fit un vague geste de la main vers Skuti pour le congédier. Le serviteur sortit sans faire le moindre bruit.

Vestar ne lâcha pas l'assiette de pâtisserie du regard. La faim le tenaillait. Il enfonça ses poings dans son ventre pour le faire taire. Il lui restait encore assez de fierté pour ne pas laisser savoir au prince qu'il était affamé. Toutefois, le léger mouvement de ses mains attira l'œil d'Alrek qui s'attarda sur lui.

- Sers-moi un verre d'eau.

Vestar cilla avant de se hisser sur ses jambes, vacillant légèrement, et d'obéir en serrant les dents. Il retrouva sa place à la droite du prince, à terre, manquant de s'effondrer dans la descente. Il fallait qu'il mange quelque chose. Il n'avait pas eu assez de nourriture depuis son départ de Northedge. Il avait vécu par rations plusieurs mois auparavant pour habituer son corps au manque de nourriture mais rien n'aurait pu le préparer à un tel régime. Il n'avait pas eu un seul repas correct depuis sa capture. Il avait manqué plus de repas qu'il ne pouvait en compter. Maintenant qu'il avait pu dormir son compte, ça lui tombait dessus et l'affaiblissait.

Il observa le prince arracher un morceau à un petit gâteau à l'air moelleux. Il ignora le regard gris posé sur lui, ne pouvant lâcher le gâteau du regard. Pour la première fois de sa vie, il se sentait prêt à supplier pour des miettes tant il avait faim.

Toute fierté disparut lorsque le prince avança le morceau de gâteau près de ses lèvres. Il ouvrit la bouche et laissa Alrek d'Isstad le nourrir. Il savoura chaque bouchée comme si c'était la dernière. Durant tout le temps que dura le petit-déjeuner, il ignora le monde autour d'eux. Il n'y avait que cette main qui le nourrissait avec une lenteur frustrante, la nourriture et lui. Rien d'autre.

Lorsque le verre d'eau atterrit entre ses doigts, il l'avala d'un trait, sentant ses muscles se relâcher. Ce verre était le signal que le repas était terminé. Seulement alors, Vestar réalisa ce qui venait de se passer. Toutefois, son esprit ne s'attarda pas sur le fait que son ennemi lui ait donné la becquée. Il préféra relever le fait que ,au milieu de tout cela, Alrek d'Isstad n'avait rien mangé. Tout ce qu'il avait consommé du plateau, c'était le verre de lait.

- Merci, murmura-t-il. Seigneur, ajouta-t-il.

Le terme glissa sur sa langue, moins amer que d'ordinaire. Il n'avait pas envie de jouer et de se rebeller. Il était honnêtement reconnaissant et il savait que c'était la meilleure manière de le traduire.

Le prince se leva après s'être essuyé les mains et la bouche, sans répondre mais en reconnaissant sa gratitude d'un signe de tête. Vestar se hissa sur ses jambes et le suivit dans la chambre après avoir vu le geste d'invite. Lorsqu'il lui tourna le dos, Vestar devina ce qu'il attendait de lui. Il dénoua les lacets de sa chemise qui commença à glisser sur ses épaules. Aussitôt, il fut congédié dans le petit salon. Il se resservit un verre d'eau agréablement fraîche.

Le prince ne tarda pas à réapparaître, changé. Pour une fois, pas le moindre lacet à nouer pour Vestar. Tous étaient devant et Alrek les avait noués lui-même.

- Aujourd'hui, tu vas rester avec Skuti, lui dit Alrek. Il va t'apprendre ton rôle. Essaie de retenir un maximum de choses. Je ne tiens pas à ce que ton entraînement dure une éternité.

- Bien.

Le prince ouvrit la porte et Skuti apparut dans le couloir. Il s'inclina face à son prince.

- Tu lui apprends tout ce qu'il doit savoir, lui ordonna Alrek. Et recoiffe-le. Je déteste ces tresses.

- Oui, Seigneur.

Alrek sortit de ses quartiers et disparut dans le couloir. Vestar se retrouva obligé de faire face à Skuti. L'air écœuré et méprisant du serviteur ne lui échappa nullement mais il préféra l'ignorer. Il ne se donnerait pas la peine d'alimenter son moulin.

- Je ne comprends pas pourquoi il a choisi un tel chien, cracha Skuti. Je doute que tu parviennes à faire quoi que ce soit de correct. Mais puisque ce sont les désirs de Sa Seigneurie, je vais faire ce que je peux. Ce n'est pas un barbare dans ton genre qui me fera tomber en disgrâce.

- Si je le veux, je peux, répliqua simplement Vestar.

- Je doute que ça soit ce que tu veux. Personne ne veut d'un barbare comme toi près de Sa Seigneurie.

- Ils ne disaient pas la même chose, hier, durant le dîner.

Skuti serra les poings et se détourna, laissant la victoire à Vestar.

- Commençons par la base. Tu dois toujours te lever avant Sa Seigneurie. Toujours. Tu dois aller chercher son petit-déjeuner et seulement ensuite, ouvrir les rideaux. Pendant qu'il mange, tu prépares son bain. La plupart du temps, il se prépare lui-même. Tu as ce court laps de temps pour débarrasser le plateau de petit-déjeuner et revenir pour voir s'il a besoin de toi pour nouer d'éventuels lacets.

Jusque là, c'était vraiment simple. La seule difficulté serait de se lever à l'heure. Il faudrait qu'il retrouve son horloge interne, celle que l'armée lui avait inculquée. Le voyage l'avait tellement fatigué qu'il avait dormi comme une bûche mais il savait d'avance que ça n'arriverait plus. Il serait levé à l'aube.

- Ensuite, tous les deux jours, tu devras t'occuper de ses cheveux. Il porte toujours la même coiffure. Il te demandera de défaire ses tresses la veille et, le lendemain, tu devras les refaire lorsqu'il se sera lavé les cheveux.

Plus Skuti parlait, plus Vestar avait l'impression que la vie d'Alrek d'Isstad était réglée comme du papier à musique. Tel jour, à telle heure, telle tâche. Il ne comprenait pas comment on pouvait vivre ainsi. Il détestait la routine, c'était l'une des choses que la vie militaire lui avait apprise. Lorsqu'il n'était pas en mission, devoir chaque jour répéter les mêmes gestes au même moment que la veille avait de quoi le rendre fou.

Or, il semblerait que le prince ait une vie si bien rangée que Vestar sentait que ses nerfs allaient vite lâcher. Il avait besoin d'action, de voir son emploi du temps bouleversé sans cesse, de ne jamais savoir de quoi le lendemain serait fait.

- Suis-moi. Je vais t'apprendre à coiffer Sa Seigneurie sans lui arracher la moitié de la tête et sans le faire ressembler à un épouvantail.

Skuti le mena jusque dans les quartiers des serviteurs. Une vaste salon desservait une dizaine de portes. Un jeune garçon était assis sur l'un des sofas et lisait un livre. Il leva les yeux vers eux lorsqu'ils entrèrent. Il posa son livre sur la table basse.

- Voici Kerry. C'est lui que tu vas devoir coiffer.

- C'est toi, le barbare ? lâcha Kerry avant de rougir en se rendant compte de ce qu'il venait de dire.

Vestar se sentit sourire malgré lui. Kerry ne devait pas avoir plus de douze ans. Ses cheveux blonds descendaient jusqu'au milieu de son dos, frisés et épais. Ils encadraient un visage délicat et juvénile, deux yeux verts pétillants d'enthousiasme et de joie, un sourire lumineux.

- Il semblerait bien que ça soit moi, répondit-il, amusé. Et il semblerait aussi que je doive te coiffer.

- Trop bien ! Je t'ai amené une brosse ! C'est vrai que tu vas me coiffer comme le prince ?

- D'après Grincheux, oui.

Kerry se mit à rire contrairement à Skuti qui n'apprécia pas le surnom plus que ça.

- On s'y met ! J'ai autre chose à faire que de materner un clébard.

Vestar haussa les épaules en soufflant « Grincheux » à Kerry qui se remit à rire. Le jeune garçon s'installa sur un tabouret et lui tendit la brosse par-dessus son épaule.

S'ensuivit de longues heures à brosser, tresser, défaire, refaire, recommencer. Encore et encore. Arriva un moment où la pulpe des doigts de Vestar lui parut à vif, ses épaules raides et crispées. Kerry perdit son enthousiasme. Il avait beau faire attention, le crâne du gamin devait lui faire atrocement mal après autant de temps à se faire tirer et tortiller les cheveux.

Pour le déjeuner, une femme entra avec un plateau couvert de pains et de fromages. Kerry se jeta dessus et offrit ce qu'il prépara à son nouvel ami.

- Je t'entends lui crier dessus depuis tout à l'heure, dit la femme à Skuti, mais je vois qu'il s'en sort très bien !

Elle tourna son regard vers Vestar et lui sourit.

- Ne te laisse pas faire par ce tyran. Il croit savoir ce que le prince veut mieux que lui !

- Ne parle pas de ce que tu ne sais pas ! siffla Skuti avec froideur.

La femme haussa les épaules et repartit. Le serviteur mordit rageusement dans son pain, ses yeux lançant des éclairs vers les murs. Vestar regarda les tresses qui ornaient la tête de Kerry et ne vit pas quel problème Skuti pouvait leur trouver. Elles étaient régulières, bien définies et propres. Il avait répliqué la coiffure habituelle d'Alrek à l'identique.

- Je vais les garder, décida Kerry. Au moins jusqu'à ce que je doive me laver les cheveux et que ma sœur m'en fasse de nouvelles.

- Il faut qu'il s'entraîne, argua Skuti.

- Trouve-toi quelqu'un d'autre. T'es pas mon maître et j'étais libre que jusqu'au déjeuner, je te rappelle.

Voir le gamin répondre au taciturne Skuti avec autant de naturel et de désinvolture le fit rire. Absolument personne ne prenait Skuti au sérieux. Il agissait comme s'il régnait sur les servants alors qu'aucun d'entre eux n'avait le moindre respect pour lui. Aux yeux de Vestar, c'était hilarant.

Ils terminèrent de manger et Vestar se retrouva obligé de supporter Skuti pendant qu'il le recoiffait. Il fut évident que l'autre se faisait un devoir de lui tirer sur les cheveux pour lui faire mal. Vestar serra les poings et fit de son mieux pour garder sa douleur pour lui et pour repousser la colère qui commençait à monter.

- Je comprends mieux pourquoi le prince te remplace, dit-il calmement. S'il doit supporter d'être coiffé par toi tous les deux jours, ça n'a plus rien d'un mystère. C'est même un miracle qu'il n'ait pas choisi de te remplacer plus tôt.

- Ferme-la. Tu ne sais pas de quoi tu parles, chien.

- Ah non ? Tu es sûr de ça ?

- Ça n'a rien à voir avec moi, s'il me remplace ! Compris ?! C'est parce que son père l'oblige à prendre un knähund ! Sans cela, tu aurais crevé sous son épée comme le chien que tu es !

Ce fut plus fort que lui, Vestar se mit à rire. La certitude de Skuti, portée par sa colère et sa frustration, était juste improbable. Il était évident qu'il s'était entiché du prince. Ce qui n'était pas réciproque, à l'évidence.

- Je ne pense pas, non. Après tout, si c'était vraiment ça, aurait-il mis aussi longtemps à céder ?

Skuti tira sèchement sur ses cheveux en serrant les mèches de cheveux contre son crâne. Vestar inspira par le nez avec un sifflement irrépressible.

- Tu n'es rien, cracha Skuti. Rien d'autre qu'un barbare. Tu ne dureras pas à ses côtés.

- Nous ne sommes pas comparables, répliqua simplement Vestar. Ce n'est pas parce que tu n'as pas duré que ça sera pareil pour moi.

Cette fois, Skuti tira si fort sur ses cheveux que Vestar tomba du tabouret. Tout l'air fut chassé de ses poumons lorsque son dos heurta le sol.

- On dirait que la vérité blesse, ricana-t-il.

Skuti lui assena un coup de pied en plein visage avant de partir en claquant la porte derrière lui. Vestar toussa un rire en se redressant. Une douleur explosa dans sa pommette et il s'arrêta. Ça n'allait pas être joli à voir.

La porte se rouvrit sur la femme qui leur avait amené le déjeuner.

- Que s'est-il passé ? Est-ce que ça va ?

Elle l'aida à se relever et il tenta un sourire. La douleur était présente dans tout le côté gauche de son visage, désormais.

- Assis-toi là, je reviens !

Sans le laisser réagir, elle disparut aussi vite qu'elle était apparue. Vestar se laissa tomber dans le sofa avec un soupir. Il espérait vraiment que cet abruti ne lui avait pas cassé un os.

La femme revint, un lourd torchon dans les mains. Elle le posa sur son visage et il sentit la glace qu'il contenait. Malgré lui, il soupira de bien-être et ferma les yeux.

- Ça va ? demanda-t-elle.

- Bien mieux, merci.

Il la regarda et elle sourit.

- Rosana.

- Merci beaucoup, Rosana.

Elle rosit légèrement en rejetant la longue tresse qui pendait sur son épaule. Si elle avait eu quelques années de moins, elle aurait pu lui plaire. Cependant, il était à peu près certain qu'elle devait déjà avoir plusieurs bambins à charge.

Il tressaillit lorsque la porte s'ouvrit à nouveau. Il leva les yeux et fut surpris de voir Alrek pénétrer dans la pièce, l'air plus fermé et glacial que jamais. Rosana bondit sur ses pieds et s'inclina ; il s'obligea à faire de même.

- Que s'est-il passé ? Pourquoi m'a-t-on fait quérir pendant une réunion à cause de toi ?

Rosana éloigna le torchon de son visage et il sentit que son visage était humide et engourdi là où elle avait appliqué la glace. Alrek s'approcha et observa son visage.

- Allez chercher Skuti.

Aussitôt, Rosana disparut hors de la pièce. Vestar poussa sa chance et osa croiser le regard d'orage du prince.

- Puis-je savoir comment cela est arrivé ?

- Je crois qu'il n'a pas aimé que je lui réponde.

- Je veux une réponse complète, pas un sarcasme.

- Il n'a pas cessé de m'insulter durant toute la journée. Lorsqu'il m'a attaqué en disant que j'aurais dû mourir plutôt que d'atterrir à votre service, que je ne durerais pas, je lui ai dit que ce n'était pas parce que lui a été remercié que ça serait mon cas. Voilà le résultat.

Alrek demeura silencieux, considérant sa réponse. Ils restèrent ainsi, face à face, jusqu'à ce que Rosana et Skudi réapparaissent. Elle poussa Skudi en avant.

- Seigneur, dit-il calmement, comme s'il n'était pas en tort. Rosana m'a dit que vous me cherchiez.

La gifle qu'il reçut fit si violente qui s'échoua sur le flanc, un filet de sang coulant hors de sa bouche.

- Comment pourrais-je ne pas chercher celui qui a osé abîmer mon knähund ?

- S-Seigneur, je...

Le prince leva une main et la voix de Skudi s'étouffa dans sa gorge.

- Je ne veux pas entendre d'excuses. Tenter de me mentir ne te tirera pas d'affaires.

- Il ment ! hurla le serviteur malgré tout.

- Vraiment ? Parce que j'en doute.

- Tais-toi, Skudi, souffla Rosana. Pour une fois, tais-toi.

Skudi se redressa sur un coude, haletant.

- Oui. Ce barbare m'a menacé ! Je n'ai fait que me défendre !

Vestar serra les poings, la fureur commençant à emplir son sang. Cette vermine osait tenter de le blâmer !

- Lève-toi.

Skudi obtempéra, faisant face à son prince, gardant les yeux baissés. Vestar vit dans sa posture qu'il pensait obtenir gain de cause.

Jusqu'à ce que Alrek lui assène une nouvelle gifle, encore plus violente que la précédente.

- Je déteste qu'on me mente, Skudi. Et je sais que tu me mens. Ce barbare, comme tu dis, est un soldat. S'il avait réellement voulu s'en prendre à toi, tu serais mort. Or, tu m'as l'air bien vivant et plutôt intact.

Le visage de Skudi devint rouge et Vestar sentit la satisfaction étouffer la colère. Le prince n'était pas tombé pour le mensonge de son ancien serviteur. Qu'il le défende aussi ouvertement été surprenant, toutefois. Il ne s'était pas attendu à une telle réaction. Il aurait cru que Skudi ne recevrait qu'une tape sur la main. À croire que les knähund étaient placés plus haut dans l'échelle alimentaire qu'il ne le croyait.

- Disparais.

Skudi se releva et sortit à toute vitesse. Seulement alors Vestar remarqua la disparition de Rosana. Elle était partie sans qu'il ne s'en rende compte. Alrek se tourna vers lui l'observa de pied en cap. Il s'attarda sur sa coiffure bâclée et loin d'être terminée.

- Il faut vraiment faire quelque chose pour tes cheveux. Pour aujourd'hui, enlève ce qu'il a fait et coiffe-toi un peu mieux. Ça devra suffire.

Vestar obtempéra. Pas une seule seconde le regard princier ne le quitta. Jamais auparavant il n'avait eu une telle conscience de son corps, de ses mouvements, de la présence d'une autre personne à quelques mètres de lui. Il passa une main dans ses cheveux pour les secouer et les laisser se placer d'eux-mêmes sur son crâne. Ne plus les avoir entortillés et plaqués sur son crâne faisait un bien fou.

- Suis-moi.

Deux gardes patientaient hors de la pièce et prirent place derrière eux lorsqu'ils sortirent. Vestar avait envie de savoir où ils allaient. Cependant, il ne posa pas de question. Il se contenta de suivre le mouvement jusqu'à ce que le prince pénètre dans une pièce. Il s'agissait d'une immense bibliothèque. Encore plus vaste que la bibliothèque royale de Northedge.

Sur tous les murs, des rangées de livres s'étalaient. Des échelles étaient disséminées dans la pièce pour permettre l'accès aux livres situés les plus en hauteur. Des escaliers en colimaçon montaient vers les deux étages bordés par une rambarde fine et dorée. Au rez-de-chaussée, l'espace était divisé en trois parties. Dans le fond, hors de la lumière crue des chandeliers, sous la mezzanine du premier étage, un coin était installé avec des coussins, des sofas, un petit guéridon. Une seconde partie consistait en une longue table usée et brillante entourée de chaises confortables. La troisième était une forme de hall d'entrée, un large espace pour bouger et atteindre l'escalier.

La pièce sentait le cuir, l'encre et la poussière. Alrek s'arrêta brusquement et Vestar faillit percuter son dos. Il ne vit pas la gifle arriver. Il tituba sur plusieurs pas mais ne s'écrasa pas au sol, au moins.

- Ce genre de scène n'a plus intérêt à se reproduire, suis-je clair ? Je fais preuve de clémence parce que je sais très bien que Skudi l'a cherché mais si cela se reproduit, tu devras assumer les conséquences de ton antagonisme. Est-ce clair ?

- Je suppose que cela signifie que, si l'on m'attaque, je n'ai pas le droit de répondre ? Que je dois attendre l'autorisation de répliquer ?

- Cela signifie que, si on t'attaque, tu dois mieux gérer la situation. Tu n'as pas besoin de prouver que tu es un barbare. Tout le monde le sait déjà.

Les poings de Vestar se serrèrent contre ses hanches.

- Si vous voulez tout savoir, je n'ai rien demandé. Ce crétin est si entiché de vous qu'il n'aurait pas su garder ses poings dans ses poches pour sauver sa vie !

Le bref éclat de surprise qui traversa les prunelles princières provoqua une onde de satisfaction qui donna à Vestar l'audace de relever le menton. L'expression ne dura pas, ravalée par la froideur habituelle d'Alrek.

- Je ne veux pas entendre d'excuses. Peu importe les circonstances, tu n'échapperas pas à la moindre punition, la prochaine fois. Est-ce clair ?

- Très.

Une nouvelle gifle le cueillit, moins violente.

- Est-ce clair ?

- Très, Seigneur.

- Rejoins mes quartiers. Je ne veux plus te voir pour le restant de la journée.

Sans attendre, il partit. Vestar inspira profondément pour se calmer. Lorsqu'il sortit, un garde l'attendait pour l'escorter jusqu'aux quartiers princiers et l'y garder prisonnier.

_________________________

NdlA : Si vous voulez avoir une petite idée de la musique isstadienne, voilà la chanson qui m'a inspirée :

https://youtu.be/pqnMkUcTmys

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro