-9- « Laisses-moi partir. »
PDV Norah
Je claque des doigts tout en fermant les yeux, alors que je les rouvre immédiatement. Nous ne sommes plus dans l'Éternel mais dans un vieil bâtiment abandonné, de la Nouvelle Orléans.
Je soupire tout en m'avançant vers le canapé. Je pousse les jambes de Kira qui lève les yeux au ciel, alors que je m'allonge de tout mon long.
-Alors, c'était comment ? Me demande Kira.
Je tourne la tête vers elle et l'observe attentivement, tout en m'installant confortablement. Kira est une jeune femme, aux traits asiatiques, portant des cheveux lisses d'un beau noir ébène ainsi que des yeux de la même couleur.
-La routine, j'ai sauvé les fesses de tout le monde et je suis partit.
Kira souffle et se tourne complètement vers moi, alors qu'elle fait attention de ne pas bouger mes jambes.
-Je veux dire, tu as retrouvé tes amis ?
Je hoche la tête sans comprendre où elle veut en venir.
-Qu'est ce que tu as ressenti ?
Je fronce les sourcils et ne dis rien pendant plusieurs secondes. Qu'est ce que j'ai ressenti ? Même moi je ne saurais le dire. J'ai ressenti quelque chose, oui, mais je ne sais pas ce que c'était.
Peut être de la joie ? Du bonheur ? De la colère ? Je ne sais pas.
Je ferme les yeux et laisse échapper un soupire de ma gorge. Depuis que je suis revenu du voile et que j'ai endormi mon humanité, je n'arrive plus à distinguer mes sentiments.
Par moment, il m'arrive de ressentir des émotions, mais je ne saurais les décrire.
-Rien.
-Rien ? Répète Kira.
Je rouvre les yeux.
-Non, rien.
Elle me regarde quelques secondes avant de finalement se lever du canapé. Je soupire et me ré-installe correctement.
Cela fait deux semaines que nous sommes installés dans cet ancien bâtiment abandonné. Quelques sans-abris vivent dans le bâtiment et la cohabitation se passe plutôt bien entre nous tous.
Je tourne la tête, vers le salon, alors qu'un beau papier peint florale se trouve sur un mur, tandis que les autres sont peints d'un blanc immaculé. Des tableaux sont accrochés à ces murs.
Les fenêtres sont lumineuses et laissent entrer une lumière naturelle, qui éclaire toute la pièce. Des plantes vertes, pleines de vie, se trouvent en dessous de ses grandes fenêtres, se nourrissant de la luminosité qu'offrent ces dernières.
Je suis assise sur un canapé en cuir noir, alors que des fauteuils se trouvent en face de moi, seulement espacés par une table basse en verre, installée au dessus d'un tapis à poils blanc.
Oui, je sais, cette description ne ressemble pas à celle d'un bâtiment abandonné. C'est normal, ce n'est pas la réalité.
A notre arrivée, nous nous sommes unis pour créer à l'aide d'un sort, une illusion permanente. Alors oui, ce n'est pas réel, mais c'est beaucoup mieux que la réalité.
Car sans ce sort, je serais assise sur un canapé miteux, alors que les murs seraient recouverts de moisissure.
Même si c'est le cas, l'illusion nous empêche de grimacer à chaque fois que nous rentrons dans la pièce.
Ce n'est pas le meilleur quartier général qui existe mais c'est le nôtre et nous nous y sentons bien, enfin presque tout le monde.
La porte d'entrée s'ouvre alors que je me tourne vers cette dernière. Deux garçons rentrent dans notre humble demeure.
-Ah tu es revenu.
Marcus me sourit tout en me saluant. Je fais de même alors que je le vois poser des sacs de course sur la table du salon. Je me tourne vers le deuxième garçon, Vincent, alors que ce dernier me regarde sans rien dire.
Je soupire et lève les yeux au ciel.
Je me lève finalement de mon fauteuil et m'approche d'eux alors que j'attrape un des sacs, je regarde rapidement l'intérieur. Je sors un paquet de chips et me tourne vers les deux garçons.
-Sérieusement ? Vous en avez pas marre de vous nourrir essentiellement de ça ?
-Moi ça me va très bien.
Vincent me prend le paquet des mains et l'ouvre directement. Il en prend une grosse poignée et fourre le tout dans sa boche. Il me tend ensuite le paquet.
-Non merci, j'ai pas faim.
-Norah, tu devrais manger un peu. Me dit Marcus.
Je me tourne vers Marcus. Marcus est un jeune homme à la peau métisse, et aux beaux yeux verts. Depuis que je le connais, j'ai apprit à le découvrir chaque jour un peu plus. C'est un garçon d'une empathie incroyable, prêt à aider le premier dans le besoin.
J'ai été étonné lorsqu'il a accepté de rejoindre ma cause, mais je ne suis pas peu fière de l'avoir dans mon équipe.
-C'est quand la dernière fois que tu as mangé ? Continue-t-il.
-Écoutes, j'ai pas faim. Je viens juste de mourir, il y a quelques minutes. Et comme d'habitude, à chaque fois que je reviens du voile, il va me falloir quelques jours avant de nouveau ressentir les choses, dont la faim.
Je soupire et prends la première chaise venu.
-Et comment tu es morte, cette fois-ci ?
-Vincent. Le reprend Marcus. C'est pas une phrase à dire lorsque quelqu'un revient des morts.
-Oh, si on peut plus rien dire.
Vincent quitte la pièce et rejoint sa chambre, alors que je me retrouve seule avec Marcus.
-Excuses-le. Dit Marcus.
-Je déteste les enchanteurs, et leur caractère de merde.
-C'est pas les seuls à avoir de fort caractère.
Marcus me regarde en souriant doucement alors que je lève les yeux au ciel.
-Tu dis ça en te basant sur la seule nécromancienne que tu connais ou tu as fait des recherches approfondies ?
-Ça fait plusieurs semaines qu'on s'est rencontré, je me base sur des faits réels.
Je souris.
-Bien, je te laisse ranger vos courses. J'ai besoin de me reposer.
-C'est toujours dur après être revenu, hein ?
Je hoche la tête.
-On ne dirait pas comme ça, mais revenir du voile, c'est assez fatiguant.
Marcus sourit alors que je me lève de ma chaise. Je me dirige vers ce qui me sert de chambre. Une pièce, qui contrairement au reste de l'illusion de l'appartement, est assez sombre, alors que seul un lit se trouve à l'intérieur.
Je m'installe sur ce dernier et soupire, fermant les yeux.
Mes souvenirs de mon passage dans le voile me reviennent en mémoire, alors que je sens mon pouls s'accélérer à cette pensée.
Lorsque je meurs, je ne fais pas qu'attendre que les esprits me ramènent, je peux en profiter pour communiquer avec eux.
Je pourrais utiliser un sort pour leur parler, mais le plus simple, est d'accéder directement au voile. C'est pour ça que quand Reggie m'a demandé combien de fois, j'étais morte, je lui ai répondu une douzaine de fois.
Certaines morts n'étaient pas voulu, comme la première fois où j'ai ramené un chat à la vie. Mon overdose de magie a fait fondre mes organes de l'intérieur, et je suis morte, au milieu d'une ferme, en pleine nuit.
Mais lors de mes principales morts, mon but unique était de parler avec les esprits. Alors, pour mourir rapidement et sans douleur, je suis allé jusqu'à sauter d'un immeuble, me poignarder ou encore avaler une boite entière d'aspirine.
Je rouvre soudainement les yeux en entendant des bruits dans le salon. Je soupire, sachant qu'il s'agit de ma troupe de colocataire, qui se dispute pour la énième fois de la journée, pour je-ne-sais-quel prétexte.
Je me relève finalement de mon lit et sors de la chambre. Les cris cessent alors que les têtes se tournent vers moi.
-Je ne sais pas ce qu'il se passe ici et je veux pas savoir. Je vais sortir faire un tour, et si quand je reviens, je vois que c'est toujours l'anarchie, je vous ferais avaler votre propre langue.
Je décide de sortir, n'en pouvant plus de leurs comportements enfantins. Nous avons une importante mission à accomplir, nous ne sommes pas là pour nous amuser.
Les esprits comptent sur moi et je ne peux pas les décevoir, qui sait ce qu'ils pourraient faire si c'était le cas ?
Je serre ma veste contre mon corps en sentant le vent s'infiltrer sous mes vêtements. Je marche quelques minutes, jusqu'à croiser plusieurs individus. Je me cache derrière un mur et ferme les yeux.
-Inuisibilitas.
Maintenant que je suis complètement invisible, je me permet de reprendre ma balade sans ennuies.
J'ai toujours aimé la Nouvelle Orléans, et devoir me cacher pour être en paix, entraîne chez moi un sentiment plus que désagréable.
Je marche sans savoir où je vais, suivant seulement la direction que me donne mes pieds. C'est seulement au bout de quelques minutes de marche, que je reconnais l'endroit. Je m'arrête devant l'Éternel alors que je soupire.
Même si j'ai fait taire une grande partie de mon humanité, la partie encore présente persiste à vouloir reprendre le contrôle.
Mon humanité veut retrouver mes proches. Elle veut retrouver mon frère, Morgan, Éléonore et même Reggie.
Mon regard est attiré par une lumière qui s'allume à l'étage, je lève les yeux et reconnais mon ancienne chambre, qui est maintenant celle de Reggie. Ma curiosité est piquée à vif, alors que j'avance vers le club.
Je le contourne et décide de passer par la porte de derrière, que j'ouvre à l'aide d'un simple sort. Je rentre à l'intérieur et avance en essayant de faire le moins de bruit possible.
Morgan et Éléonore sont des vampires, le moindre son pourrait les avertir de ma présence.
Je traverse discrètement le couloir et arrive devant la porte de la chambre de Reggie, je répète mon sort et la porte s'ouvre lentement à son tour.
J'aperçois directement la silhouette de Reggie qui observe dans ma direction alors que je retiens mon souffle pour ne pas me faire repérer.
D'un geste de la main, je crée un courant d'air qui va jusqu'à lui alors qu'il frisonne. Mon but est de ne pas me faire repérer et de faire croire que la porte s'est ouverte par la simple puissance du vent.
Je rentre dans la chambre alors que Reggie ferme la porte derrière moi. Je m'adosse à un mur, dans un coin de la pièce et observe seulement la scène.
-Et merde !
Soudain, Reggie attrape les coussins dans le lit et les jette au sol. Il se tourne ensuite vers la table de chevet et la balaye à l'aide de ses bras.
Je vois la lampe tomber au sol et hésite, avant de finalement tendre ma main vers elle.
Reggie se met à froncer les sourcils tout en observant la lampe en lévitation, à seulement quelques centimètres du sol. Je fais jouer mes doigts et la ramène sans difficultés sur le meuble d'origine.
Reggie tourne sur lui-même, regardant partout, dans chaque recoin.
-Norah ?
Je ne réponds pas et me contente de l'observer.
-Je sais que c'est toi.
Je laisse le silence planer pendant quelques secondes dans la pièce, tout en réfléchissant à mes prochaines actions.
Je m'approche de lui alors qu'il tourne la tête dans ma direction, entendant mes bruits de pas. Je le contourne et est maintenant dans son dos. Je m'approche de sa nuque.
-Laisses-moi partir. Murmurais-je.
Mon souffle s'écrase dans son cou alors que je le vois se figer, il tourne la tête vers moi, sans se retourner complètement.
-Je peux pas.
Il finit par me faire complètement face alors que je lève le sort d'invisibilité qui pèse sur moi. Reggie ancre son regard dans le mien, alors que sa main se lève pour caresser ma joue.
Il s'apprête à dire quelque chose mais je pose mon pouce sur sa bouche, lui demandant silencieusement de ne pas gâcher ce moment.
Je ne sais pas ce qu'il me prend. Ce n'est pas moi, ou en tout cas, pas la nouvelle moi.
La nouvelle moi n'a pas le temps de se laisser aller à ses sentiments ou ses envies, elle doit simplement faire ce qui doit être fait.
Mais je sens au plus profond de moi, que mon humanité reprend petit à petit possession de moi.
Lorsque j'ai décidé de laisser une partie d'elle vivante, à l'intérieur de moi, je pensais que cela serait une bonne idée, et qu'elle m'empêcherait d'aller trop loin. Mais la vérité est qu'elle m'empêche d'avancer.
-Pourquoi tu ne veux pas me laisser partir ? Demandais-je finalement.
Je retire mon pouce de ses lèvres, tout en laissant ma main sur son visage. Je vois Reggie déglutir, alors qu'il essaye de fuir mon regard, mais je l'en empêche en attrapant son menton.
Je le force à affronter mes prunelles sombres tandis que Reggie ouvre finalement la bouche.
-Parce que je suis amoureux de toi, Norah.
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Vous avez aimé ?
Enfin un point de vue selon Norah ?
On rencontre les autres membres de la bande ?
Marcus ? Vincent et Kira ?
Norah qui ne sait plus ce qu'elle ressent ?
Sa visite à Reggie ?
Reggie amoureux de Norah ?
Des théories pour la suite ?
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