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10 ans plus tard...

Le soleil est levé depuis quelques heures sur les rues de la grosse pomme. Déjà, elles fourmillent de passants pressés. Sortant de son immeuble, Charles est comme tous les jours, tiré à quatre épingles dans son costume pour aller travailler. Le très jeune homme a bien grandi. Ses cheveux sont courts, la barbe de quelques jours taillée précisément et l'habit repassé. 10 années ont passées depuis le départ d'Any et il pense à elle très régulièrement. Lorsqu'il entend une chanson des années 80, voit dans la vitrine d'une librairie un ouvrage de Jane Austen ou même à chaque fois qu'il se fait couper les cheveux et qu'il repense à la longueur qu'il abordait adolescent. Les choses ont bien changé depuis. Il a terminé ses études et a trouvé un emploi dans la publicité. Il s'est marié avec son amour de fac et ils ont fondé une famille ensemble. Un petit garçon est né il y a 6 ans pour le plus grand plaisir de Charles. Il n'a jamais quitté New York, mais s'est rapproché de Manhattan.


Charles tient un petit sac dans une main et accompagne un petit garçon de l'autre jusqu'à un taxi. Une femme les précède. Tandis que l'homme aide l'enfant à grimper à l'intérieur du véhicule, la jeune femme monte par l'autre porte. Il embrasse l'enfant et referme la portière. À la fenêtre, la femme lui envoie un baiser.

Elen - À ce soir chéri.

Charles - Je vais essayer de ne pas rentrer trop tard. Bonne journée.

Le véhicule s'éloigne dans la rue, laissant l'homme costumé sur le trottoir. Il reste un long moment à regarder le taxi s'éloigner et disparaître au fond de l'horizon. Allez savoir pourquoi, mais ce matin, Charles n'a pas une grande motivation à aller travailler. Sans doute est-ce à cause de la montagne de travail et tout le stress associé qui l'attend à son bureau. Pourtant, il adore son job. Il a réussi à devenir ce qu'il avait toujours eu envie d'être. D'avoir ce qu'il avait toujours rêvé d'avoir. Mais d'où vient alors ce vide qui le tracasse de plus en plus souvent ces derniers temps. Il a la nette sensation qu'il y a un manque dans sa vie.

Pour se changer les idées, il décide de marcher un peu pour aller à son travail et de rejoindre à pied, par la 14ème, la station de métro d'Union Square. Il fait si beau et il n'est pas pressé d'aller s'enfermer dans son bureau. En passant à proximité du Jackson Square, son regard est attiré par des acclamations qui viennent de l'autre côté de la rue. Un attroupement de personnes devant un fleuriste a l'air de fêter quelque chose. L'exaltation de leur joie lui tire un sourire en coin. Il les regarde une dernière fois avant de traverser. Le groupe s'écarte, laissant apparaître la jeune femme qui est au centre des attentions. Sa chevelure, courte et rousse flamboyante, dénote au milieu des autres. Puis son regard descend sur le visage de la femme. Il le connaît. Il l'a vu tellement de fois.

C'est elle !

Any !

Il est tellement perturbé par cette vision qu'il ne voit pas l'homme arrêté devant lui et le bouscule. Il se complète en excuse et relève la tête vers la devanture du magasin. Elle n'est plus là ! Non, ce n'est pas possible. A-t-il rêvé ? Était-ce bien elle ? Il en est certain, il pourrait la reconnaître entre cent. Il observe l'ensemble de la rue en tournant sur lui-même et en regardant partout mais elle semble vraiment avoir disparue.

Encore sous le choc de cette apparition, Charly continu malgré tout son chemin vers son bureau. Inconsciemment, il y pense toute la journée durant. Le soir venu, il repasse exprès par ce croisement mais aucune trace d'Any. Il est pourtant certain que c'était réel. Il veut la revoir. Il veut savoir pourquoi elle a soudainement disparu il y a 10 ans. Il a besoin de la voir. Elle devient son obsession. Chaque jour qui suit, Charly prend le même itinéraire dans l'espoir de la voir. Et il la voit, plusieurs fois. En montant dans son métro, à travers la vitre du train, alors qu'elle vient de descendre de la même rame. Monter dans un taxi devant le même fleuriste que la première fois. Toujours au même endroit, affublée d'un tablier et parlant avec des gens alors qu'il est dans un taxi... À chaque fois, l'occasion de lui parler ne se présente pas. Il semble avoir compris qu'elle travaille dans ce magasin. Alors, il ira voir et se renseigner dès le lendemain.

Le soir même, Charly reçoit un appel de sa mère.

Mère de Charles - Bonjour mon grand.

Charles - Salut maman ! Comment ça va ?

Mère de Charles - Très bien mon grand. Papa te passe le bonjour. Il est parti au jardin.

Charles - Tu lui repasseras. Et tu lui diras d'y aller mollo sur la taille de la haie. La dernière fois, il a tellement voulu couper court que les voisins avaient une vue plongeante sur le salon.

Mère de Charles - Tu connais ton père, quand il a décidé quelque chose... bon et comment va mon petit-fils adoré ?

Charles - Il va bien. Ils sont partis il y a quelques jours avec Elen chez ses parents.

Mère de Charles - Tu es tranquille pour travailler comme ça.

Charles - Oui. On peut dire ça.

Mère de Charles - Tu es sûr que ça va ?

Charles - Maman, tu te souviens d'Any ?

Mère de Charles - Any ? Betty tu veux dire ? Évidemment que je m'en souviens.

Charles - Oui, Betty. Je l'ai retrouvé. Elle travaille à Manhattan.

Mère de Charles - Ah oui ? Mais comment l'as-tu retrouvé ?

Charles - Je l'ai croisée par hasard. L'autre matin, en allant travailler.

Mère de Charles - Et bien, le monde est petit.

Charles - C'est tout ce que ça te fait ? Je retrouve notre meilleure amie des années après qu'elle ait mystérieusement disparu de chez nous et tout ce que tu trouves à me dire c'est que le monde est petit. Il n'y a que moi qui m'inquiète pour elle ou quoi ? J'avais déjà trouvé bizarre la façon dont vous aviez si rapidement tourné la page après sa fugue.

Mère de Charles - Mais non Charles, nous aussi nous étions inquiets.

Charles - Tu rigoles j'espère. À peine 1 mois après sa fuite, vous avez tout bonnement arrêté de parler d'elle. Comme si elle n'avait jamais existé. J'étais le seul à la chercher.

Mère de Charles - Ce n'est pas ça mon grand.

Charles - C'est quoi alors ?

Mère de Charles - En fait, on savait où elle était. Betty nous a rapidement contacté après son départ.

Charles - De quoi ?

Mère de Charles - Elle était majeure et elle avait le droit de partir. Nous ne pouvions pas la retenir contre son gré. On savait qu'elle était en sécurité, c'était ce qui nous importait le plus.

Charles - Et vous ne me l'avez jamais dit ? Si Elisa savait ça !

Un blanc se fait dans la conversation téléphonique.

Charles - Elle le sait ?

Mère de Charles - Elles n'ont pas arrêté d'être en contact toutes ces années. Je sais qu'elles se voient encore de temps en temps.

Charles - Je suis le seul à ne pas être au courant en clair.

Mère de Charles - C'était sa condition pour garder contact. Nous ne devions pas te parler d'elle et ne pas lui parler de toi en retour.

Charles - Mais pourquoi ?

Mère de Charles - Je ne sais pas tout. Peut-être que ta sœur en sait plus. Mais on était si inquiets pour elle qu'on a accepté et ça nous a permis de nous assurer qu'elle allait bien et de pouvoir l'aider si besoin.

Charles - Je crois rêver... Elle a demandé qu'on ne me dise rien ? Jamais ?

Mère de Charles - Je suis navré mon chéri. Je sais que tu tenais à elle.

Charles - Je comprends rien ! Pourquoi est-ce qu'elle ne voulait pas que je sois au courant ? C'est fou quand même. Ça fait des années que je m'inquiète pour elle à me demander où elle est, ce qu'elle fait, comment elle va. Et en fait, vous vous êtes tous foutu de ma gueule. Vachement sympa !

Mère de Charles - Chéri, comprends-nous.

Charles - Non, c'est bon ! À cette heure-là, je n'ai rien envie de comprendre. Salut maman !

Il raccroche violemment le combiné, puis saisit l'ensemble du téléphone et l'envoi voler à travers la pièce. Il déborde de colère et de questions. Pourquoi ? Pourquoi Any ne voulait-elle plus de nouvelle de sa part ? Et, pourquoi avait-elle demandé qu'on ne lui dise rien ?

Il a beaucoup de mal à trouver le sommeil cette nuit-là. Il en veut à sa famille de l'avoir mis de côté. Et il pense beaucoup à Any. Il se dit qu'il ne doit pas aller directement vers elle, elle pourrait prendre peur et se sauver de nouveau. Il pourrait peut-être déjà récolter quelques infos sur elle. Savoir comment elle va, ce qu'elle fait.

Le lendemain matin, il arrive comme tous les jours à Jackson Square. La boutique est ouverte mais vide. Un employé s'affaire à installer les bouquets de fleurs en devanture. Nonchalamment, il prend une composition et discute avec le vendeur avant de payer. L'employé est très chaleureux qui parle facilement de tout et de rien. C'est un jeune afro-américain dont le badge affiche le prénom Rudolph.

Alors Charly décide d'entreprendre ce petit manège plusieurs jours d'affilée. En sortant du travail, il s'arrête acheter un bouquet et discute avec l'homme. Ainsi, subtilement, au bout de quelques jours, il arrive à glaner des informations sur Any.

Rudolph - Et pour qui sont toutes ces fleurs que vous achetez chaque jour ?

Charly hésite puis montre sa main gauche pour montrer son alliance.

Rudolph - Gentille attention.

Charles - C'est vraiment une très jolie boutique en tout cas.

Rudolph - Oh merci ! Mais on ne vous a jamais vu avant, ici.

Charles - J'avoue. Je ne connaissais pas. Je vous ai trouvé par hasard, en allant au travail un matin. En fait, ce qui a attiré mon regard, c'était l'attroupement qu'il y avait devant.

Rudolph - Ah ah ah. Y'a souvent du monde ici ! Grâce, la propriétaire, en a fait un point névralgique du quartier. Tout le monde vient ici boire un café ou juste papoter.

Charles - Je crois que quelque chose était fêté, une femme était félicitée. Une certaine Betty ?

Rudolph - Betty ? Connais pas.

Charles - Ce n'est pas une des employées ?

Rudolph - On n'a personne de ce nom ici.

Charles - Une rousse, cheveux courts.

Rudolph - Ahhh, elle ? C'est Any, pas Betty.

Any ? Elle avait donc cessé de se faire appeler Betty.

Charles - J'ai dû mal entendre.

Rudolph - C'était sa fête ce jour-là ! Mais finalement c'était pour fêter quelque chose qui m'attriste. D'ici quelques jours, on ne la verra plus à la boutique.

Charles - Ah bon ? Pourquoi ?

Rudolph - À cause de son nouveau taf. Ce que l'on fêtait l'autre matin, c'était sa promotion. Elle a décroché un vrai poste de chroniqueuse dans un journal. Madame va avoir sa propre rubrique toutes les semaines dans le New York Paper !

Charles - Le New York Paper ? Wahoo... C'est super génial !

Elle a réussi à réaliser son rêve. Elle est journaliste. Enfin, chroniqueuse. Il se souvient des lettres qu'ils s'écrivaient à l'époque. C'était kitch, mais finalement il avait pris goût à lui envoyer régulièrement des nouvelles. Après le départ d'Any, il avait récupéré toutes les lettres qu'elle avait laissées au milieu de sa chambre et les avait précieusement conservées. Charly est de plus en plus désireux de la revoir. Il se décide enfin à lui parler. Ça lui fait un peu peur, mais ça devient vital tellement il pense à elle.

Charles - Tiens, préparez-moi un deuxième bouquet. Je voudrais lui offrir pour la féliciter aussi.

Rudolph - Ah oui ?

Charles - Ce n'est pas grand-chose.

Rudolph - C'est vrai, mais vous ne la connaissez même pas. C'est très gentil de votre part.

Charles - Je suppose qu'elle ne repassera pas à la boutique ce soir.

Rudolph - Non, en effet.

Charles - Vous pourriez peut-être me donner son adresse, j'irai lui déposer en rentrant.

Rudolph - C'est gentil mais non. Je ne vous connais pas assez pour vous dire où elle habite.

Charles - Oui, je comprends.

Rudolph - Mais je dois aller la voir ce soir, je peux lui déposer si vous voulez.

Charles - C'est vrai ? Ce serait vraiment sympa.

Rudolph - Oui, y'a pas de problème.

Charles - Vous lui expliquerez qui lui envoie ?

Rudolph - Vous n'avez qu'à faire une carte à mettre avec.

Charles - Bonne idée.

Charles attrape un carton du présentoir et dépose rapidement quelques mots dessus. Un message qu'elle seule pourra comprendre. Il glisse le carton dans une enveloppe et la tend à Rudolph pour qu'il l'accroche au bouquet. Charles règle les bouquets et prend congé de son hôte. Il lui vient une idée. Il veut absolument voir Any. Rudolph n'a pas voulu lui donner son adresse, ce n'est pas bien grave ! Il va le suivre jusque chez elle. Charly se poste discrètement à proximité du magasin et attend tranquillement que l'employé quitte son poste. Au bout d'un long moment, l'homme et le bouquet sont enfin de sortie. En gardant une bonne distance, Charly le suit dans Greenwich Village jusqu'à un vieil immeuble rouge. Il se cache derrière un arbre et observe l'homme appuyer sur la sonnette.

Voix à l'interphone - Oui ?

Rudolph - Bonjour, je suis bien chez la talentueuse chroniqueuse Any Darling ?

Voix à l'interphone - Rah ! Allez, monte nigaud.

La porte s'ouvre dans la foulée et Rudolph et le bouquet disparaissent à l'intérieur de la bâtisse.

Any ouvre la porte avant même que son ami ne soit arrivé devant sa porte et la laisse entrouverte. Le jeune homme n'a plus qu'à entrer directement quand il arrive. Elle habite un petit appartement au dernier étage de l'immeuble. Une seule pièce qui tient lieu de salon, chambre et bureau, un couloir qui fait office de dressing, une cuisine et une salle de bain. Juste ce qu'il faut pour qu'elle se sente bien chez elle. Elle avait eu le coup de cœur en le visitant. C'était à croire qu'il l'attendait tellement il ressemblait à l'appartement de son héroïne, Carrie.

En attendant que son invité arrive, elle entreprend d'ouvrir une bouteille de vin. La porte s'ouvre brusquement.

Rudolph - Surprise !!!!!!

La tête de son invité est cachée par l'énorme bouquet de fleurs. Betty est ébahie devant la beauté de la pièce.

Bethany - Mais qu'est-ce que c'est que ça ?

Rudolph - C'est pour toi !

Elle lui prend le bouquet des mains pour le renifler.

Bethany - Il est magnifique ! Merci beaucoup, mais il ne fallait pas.

Rudolph - Ah non, mais ce n'est pas moi.

Elle lève un sourcil vers le jeune homme pendant qu'il ôte sa veste et son écharpe et les accroche au porte manteau.

Bethany - C'est pas toi ? Ben, c'est qui alors ?

Rudolph - Un admirateur secret.

Betty dépose le bouquet sur la table du salon et retourne à sa bouteille de vin qu'elle sert allégrement dans deux verres à pied.

Bethany - J'ai un admirateur secret ?

Rudolph - Hum hum.

Elle lui tend un verre et trinque avec lui.

Rudolph - Tu te souviens de ce beau mec dont je t'ai déjà parlé et qui vient souvent à la boutique ces derniers temps ?

Elle avale une gorgée.

Bethany- Vu tout ce que tu m'as dit sur lui, j'ai déjà l'impression de déjà le connaître.

Rudolph - Et bien, figures toi qu'il est venu ce soir. Il m'a posé des questions sur toi et quand je lui ai dit que tu quittais la boutique parce que tu avais décroché un poste au New York Paper, il a eu l'air super content pour toi. Il a voulu t'emmener un bouquet mais je lui ai proposé de te le livrer moi-même. Il a même fait une carte.

Bethany- C'est fou ça ! Mais c'est qui ce mec ?

Rudolph - Je sais pas du tout. J'ai essayé de récupérer des infos sur lui en le questionnant, mais il est secret, le chenapan. Je peux malgré tout te donner un nouveau truc sur lui.

Assis sur le fauteuil et lui tournant le dos, l'homme se retourne à genoux vers elle.

Rudolph - Bon alors, on sait déjà qu'il est grand, brun, avec de grands yeux bleus magnifiques, une trentaine d'années, une barbe de quelques jours et habitant New York. Ah et il porte une alliance.

Bethany - Tu m'as déjà dit ça.

Rudolph - Et bien, j'ai remarqué tout à l'heure qu'il avait un TIC !

Bethany - Un TIC ? Quel genre de TIC ?

Rudolph - Il n'arrête pas de passer sa langue sur ses lèvres, comme ça.

Any fait volte-face vers le jeune homme qui imite la façon de faire de Charles.

Rudolph - J'ai même cru qu'il me faisait du gringue au début. C'est tellement... Sexy... Mais je ne sais pas pourquoi, j'ai la nette sensation que ce n'est pas à moi qu'il s'intéresse.

La femme pose son verre sur le petit comptoir de la cuisine et se rue sur le bouquet de fleurs que son collègue lui a apporté. Elle détache rapidement la carte.

Rudolph - Qu'est-ce que j'ai dit ?

Any lit lentement les quelques mots écrits sur le morceau de carton « Félicitations Dear Any, votre Cher Aly ». Elle n'en croit pas ses yeux. Comment est-ce possible ?

Bethany - Il t'a dit comment il s'appelait ?

Rudolph - Évidemment que non, sinon je te l'aurais dit.

Elle ne lâche pas la carte des yeux. Mille choses se bousculent dans sa tête. Honnêtement, elle n'avait jamais pensé que Charles reviendrait dans sa vie.

Rudolph - Ça n'a pas l'air d'aller.

Bethany - Je suis désolée, je suis un peu...

La jeune femme ne termine pas sa phrase et se dirige vers la petite bibliothèque. Elle prend un livre qu'elle ouvre et en sort quelques documents. Ce sont des photos et photomatons. Elle en saisit une et la tend à Rudolph.

Bethany - Est ce que c'est lui ?

Le cliché représente un portrait de Charles, adolescent, en compagnie de sa sœur, Elisa.

Rudolph - Oui !!! Avec quelques années de plus, mais c'est bien lui. Hummmm quel bel homme... Mais tu le connais ?

Bethany - Il s'appelle Charles. Nous étions amis. Il y a très longtemps.

Rudolph - Amis ? Tu es sûre ? Ta façon de regarder cette photo me dit le contraire.

Elle s'assoie, songeuse devant la petite photo. Le jeune homme se place juste à ses côtés.

Bethany - Disons que, pour lui, j'étais son amie.

Rudolph - Mais pas pour toi...

Bethany - Je n'avais d'yeux que pour lui. Il n'y avait que lui et mon cœur n'a jamais autant battu pour un autre que lui. Il était mon nord et mon sud, mon tout et son contraire. Tout avait une saveur particulière avec lui.

Rudolph - Et que s'est-il passé ?

Bethany - Lorsque j'ai appris qu'il était amoureux d'une autre, je suis partie. Je ne l'ai jamais revu depuis.

Rudolph - Jamais ?

Bethany - Jamais ! Ça fait 10 ans !

Rudolph - Il n'a pas l'air de t'avoir oublié.

Bethany - C'est bien dommage. Parce que moi, je suis passé à autre chose.

Elle retourne reposer les photos dans le livre et le range à la hâte à son emplacement.

Bethany - De toute façon, je n'ai aucune inquiétude à avoir de le revoir. Demain, c'est mon dernier jour à la boutique. Tu ne lui as pas dit où j'habitais j'espère.

Rudolph - Je suis peut-être bavarde, mais je ne suis pas complètement idiote. C'est pour ça que c'est moi qui t'ai amené son bouquet.

Bethany - C'est très bien alors.

Rudolph - Et d'ailleurs, en parlant de dernier jour de travail. Vendredi, on sort fêter ça !

Bethany - Oh non !!!

Rudolph - Si !!! On se fait belles comme Carrie et on file écumer les pistes de danse. Ce n'est pas tous les jours que l'on peut fêter un nouveau job. Chroniqueuse à temps plein au New York Paper !!! Enfin, je veux dire... On ne peut pas ne pas fêter ça !!!

Bethany - OK ! OK !! On va aller fêter ça.

Rudolph - Ne me fais pas de coups foireux. De toute façon, je serai chez toi assez tôt pour qu'on se pomponne. On ira d'abord manger un bout en ville, puis petit verre en terrasse et ensuite... À nous la nuit des grands soirs.

Bethany - Tu sais que ça ne veut rien dire.

Rudolph - L'important, c'est que tu aies compris.

L'homme se lève pour enfiler sa veste.

Rudolph - Bon aller, je file. C'est moi qui fais l'ouverture demain.

Il embrasse fortement la jeune femme et s'en va tout en faisant des grands gestes très maniérés d'au revoir. Any aime ce côté exubérant de son ami. Ça a d'ailleurs très rapidement matché amicalement entre eux. Elle travaillait déjà dans cette boutique quand elle a vu arriver, un beau jour, cet homme, grand et mal à l'aise dans son costume. Ça se voyait très bien que ce n'était pas ce qu'il portait en temps normal. La propriétaire de la boutique, une femme d'un certain âge, très bohème, l'avait accueilli pour un entretien et avait su le mettre à l'aise pour que Rudolph lui montre sa vraie personnalité. "Les fleurs ne mentent pas" aime-t-elle répéter pour pousser les gens à être eux même. C'est comme ça que pour son premier jour de travail, l'homme était arrivé dans des vêtements colorés et maquillé. Et depuis, une grande amitié est née entre les deux jeunes gens.

Toujours positionné derrière son arbre, Charly attend patiemment que Rudolph quitte l'immeuble d'Any. Il a eu le temps d'aller jeter un coup d'œil à l'interphone et a trouvé tout en bas de la liste une Any Darling. Plus de doute quant à son identité. Elle a juste changé son prénom. Sans doute pour plus facilement brouiller les pistes. Après tout, il n'y avait que lui qui l'appelait comme ça. Enfin, le jeune homme haut en couleur sort du bâtiment. C'est le moment pour Charly de tenter sa chance. Il s'approche de la porte. Son cœur se sert. Il est un peu stressé. Il se dit que c'est étrange que ça lui fasse cette sensation. Après tout, n'a-t-il pas espéré la retrouver depuis un bon bout de temps ? Au moment où il s'apprête à partir, une vieille femme accompagnée d'un petit chien ouvre la porte. Il lui fait un grand sourire et profite de cette opportunité pour entrer dans l'immeuble. Il cherche rapidement sur les boîtes aux lettres le numéro d'appartement d'Any. 2D. Il ne lui reste plus qu'à le trouver. Il monte rapidement les étages, jusqu'au dernier. Sa porte est juste là... Il prend une grande respiration tandis que son cœur bat la chamade. Il a un peu chaud et ses mains sont moites. Il les essuie sur son pantalon avant de lever le point vers la porte.

Quelques coups sont brièvement frappés. La jeune femme se dirige vers son entrée et remarque une écharpe qui ne lui appartient pas. Rudolph a dû l'oublier et revient la chercher. Elle ouvre avec entrain la porte.

Bethany - La petite tête que tu...

Elle se stoppe net en découvrant son interlocuteur. Tout de suite, elle le reconnaît. Plus mince, légèrement marqué par le temps, guindé dans son costume, mais toujours avec le même regard perçant.

Bethany - Charly ?

L'homme la regarde. Il ne peut s'empêcher de la dévisager et de détailler les moindres contours de son visage. Elle n'a pas beaucoup changé en 10 ans, juste perdu quelques traits enfantins qu'elle avait gardés à la fin de son adolescence. Les années lui ont aussi dessiné de jolies formes féminines. Charly se surprend à penser qu'il la trouve encore plus charmante que dans son souvenir. D'abord surprise, le visage d'Any se referme rapidement.

Bethany - Qu'est-ce que tu fais ici ?

Il n'arrive toujours pas à prononcer un seul mot. Il voudrait la prendre dans ses bras et lui dire qu'elle lui a tellement manqué. Il voudrait de nouveau sentir son étreinte comme quand il aimait s'y réfugier plus jeune. Il souhaiterait lui dire qu'il est tant rassuré de la revoir et de la savoir en pleine santé. Que, malgré les secrets, il ne lui en veut pas. Sa chère Any.

Bethany - Charly !

Charles - Heu... Salut Any.

Bethany - Qu'est-ce que tu veux Charly ?

Charles - Je... Tu as l'air d'aller bien.

Bethany - Oui, ça va. Merci. Alors ?

Le grand brun commence à s'avancer vers elle.

Charles - Any, je...

La jeune femme recule et s'enfonce dans le petit appartement.

Bethany - Pourquoi es-tu là ?

Charles - Il fallait que je te voie.

L'homme entre à son tour dans l'appartement en fermant la porte derrière lui.

Bethany - Charly, ça fait 10 ans qu'on ne s'est pas vu. Je ne sais même pas comment tu as fait pour me retrouver.

Charles - Je t'ai croisé dans la rue il y a quelques semaines. Par hasard... Tu ne te rends pas compte, j'ai cru être fou quand je t'ai aperçu... Mais où étais-tu pendant tout ce temps ?

De longues minutes passent, mais la jeune femme ne répond pas. L'homme s'agace devant ses réponses mystérieuses et ses silences.

Charles - Any ! J'étais mort d'inquiétude. Je me suis littéralement rongé les sangs toutes ces années. Et en plus, j'apprends que papa et maman ont eu de tes nouvelles pendant tout ce temps. Et qu'Elisa aussi. Mais que chacun avait la consigne de ne rien me dire.

Bethany - Oui, c'était mieux comme ça.

Charles - Tu te fous de moi ?

Bethany - Charly, c'était nécessaire que je parte. Crois-moi !

Charles - Comme ça ? Sur un coup de tête ? En t'enfuyant par la fenêtre de ta chambre ? Qu'est-ce qu'il t'est passé par la tête ?

Bethany - Il vaudrait mieux que tu partes maintenant.

Charles - Non. Pas maintenant que je t'ai retrouvé. J'ai besoin de réponses.

La jeune femme s'assoie sur la banquette devant la fenêtre de la pièce à vivre. Charly s'agenouille devant elle et remarque ses yeux remplis de larmes.

Charles, doucement - Any. Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Pourquoi es-tu parti ?

Une larme glisse sur la joue de la femme. Elle le regarde dans les yeux. Ils ont toujours cette jolie couleur, ce bleu-gris qu'elle aimait tant. Si Charly a pris quelques années, ses yeux, eux, n'ont absolument pas changés. Dans un murmure, elle lâche un seul mot qui stop le cœur du jeune homme.

Bethany - Toi.

Elle se lève, bousculant et laissant le trentenaire sur place, accroupi et stoïque, pour se diriger vers sa petite cuisine terminer son verre de vin. Il se relève doucement et se tourne vers elle.

Charles - Je ? Quoi ?

Bethany - C'est à cause de toi que je suis partie.

Charles - Mais qu'est-ce que j'ai fait ? Je ne me souviens pas qu'il se soit passé quelque chose de particulier...

Bethany - C'est rien, laisse tomber.

Charles - Mais non, expliques-moi.

Bethany - Je vais te raccompagner.

Charles - Qu'est-ce que tu ne me dis pas ?

Bethany - J'avais oublié que tu étais têtu...

Elle se resserre un large verre.

Charles - Any, tu ne peux pas me lâcher que tu es parti à cause de moi et ne pas me donner d'explication. Ça fait 10 ans, 10 ans que j'attends pour comprendre.

La jeune femme repose son verre, vidé rapidement.

Bethany - Elen.

Charles - Elen ? Mais qu'est-ce qu'elle a à voir là-dedans ?

Elle retourne s'asseoir devant la fenêtre et regarde négligemment à l'extérieur. Sans qu'elle s'en rende vraiment compte, elle accompagne ses paroles par des gestes explicatifs.

Bethany - Tu venais de te couper tes cheveux. J'avais trouvé ça triste, parce que ça t'allait si bien les cheveux longs.

Charles - Tu es parti à cause de ma coupe de cheveux ?

Bethany - On était assis dans la cuisine. Toi, ta mère et moi. Tu me taquinais, comme tu le faisais tout le temps. Et juste après, tu as commencé à parler d'une fille.

Charles - Elen ?

Bethany - Que tu étais amoureux d'elle et que tu te voyais faire ta vie avec.

Charles - Mais c'est quoi le rapport ?

Bethany - Que c'était... l'amour de ta vie.

Charles - Je ne me souviens même pas de cette discussion.

Bethany - Ta mère semblait ravie pour toi. Et moi, j'écoutais, silencieuse, car bizarrement je n'avais jamais entendu parler d'elle. Ni dans une lettre, ni de vive voix. Et pourtant, il semblait que ça durait depuis un bon moment entre elle et toi.

Charly est en train d'assembler dans sa tête les différentes pièces du puzzle.

Bethany - En quelques secondes, j'ai vu mon univers s'effondrer. J'ai gardé au fond de moi ce que j'avais de plus précieux, chaque instant passé ensemble, les attentions que tu me portais, la façon dont tu me regardais... Mais qui ne voulaient finalement rien dire. Parce que ce n'était pas réciproque. Parce que tu ne m'aimais pas... Pas comme moi je t'aimais. Parce que oui, putain, qu'est-ce que je t'aimais.

La jeune femme n'arrive plus à retenir ses pleurs. Un trop plein d'émotions la submerge tandis qu'elle continue de raconter son histoire.

Bethany - Je ne pouvais pas rester. C'était au-dessus de mes forces. J'étais tellement amoureuse de toi que j'aurais pu en crever. Et je pense que c'est ce qu'il se serait passé si j'étais resté à tes côtés. Je me suis enfuie pour fuir une vérité que je ne pouvais pas endurer.

Le jeune homme s'approche d'elle pour finalement s'asseoir à ses côtés et lui prendre les mains. Mais elle s'en dégage très rapidement, refusant tout contact avec lui. Elle préfère se lever et s'asseoir sur un fauteuil installé juste en face.

Charles - Any... Je ne savais pas.

Il vient vers elle avec l'intention de la prendre dans ses bras mais elle le repousse.

Bethany - Arrête.

Charles - Je suis tellement désolé. Je n'avais vu les choses comme ça. Je ne savais vraiment pas.

Bethany - Maintenant, tu sais.

Alors que Charly est décontenancé par ces révélations, Bethany se renferme totalement sur elle. Elle n'aurait jamais voulu vivre cette situation. Elle qui pensait ne jamais le revoir. Il tourne en rond dans le petit appartement, une main à la taille, l'autre sur son front. Il s'en veut d'être la cause de ses larmes. Il n'a jamais voulu lui faire de mal.

Bethany - Va-t'en s'il-te-plaît.

C'est à son tour de sentir son cœur se briser lorsqu'il entend les paroles de la demoiselle.

Bethany - Laisse-moi !

Positionné juste derrière le fauteuil, il pose délicatement sa main sur l'épaule de Bethany. Cette fois, elle ne bouge pas mais le supplie.

Bethany - Je t'en prie. Charly, va-t'en !

Le vague à l'âme, le beau brun quitte l'appartement. À peine a-t-il fermé la porte, qu'il s'adosse à celle-ci. Il n'en revient pas de ce qu'il vient de se passer. Il avait tout imaginé, mais jamais être la cause de cette fuite prématurée. Tout ça parce qu'elle était amoureuse de lui... Mais lui aussi l'aimait. Un peu comme une sœur, il est vrai. Mais ses sentiments étaient sincères et il aurait tout fait pour elle. Il la connaissait depuis tellement longtemps qu'il ne l'avait jamais regardé avec les yeux d'un homme, jusqu'à aujourd'hui. Après de longues minutes, il se décide enfin à partir, dépité.

Dans l'appartement, Bethany n'a pas réussi à retenir son chagrin. Une fois Charly parti, elle se laisse tomber sur son lit en position fœtale pour pleurer. Cela faisait si longtemps qu'elle n'avait pas pleuré. Et encore moins pour lui. Tout lui était revenu au moment même où elle avait ouvert la porte. Ses cheveux étaient bien courts maintenant. Il avait perdu ses joues joufflues, creusant son visage. Sa barbe de quelques jours faisait ressortir ses yeux azurs. Il avait toujours le même tic avec sa langue et son sourire avait creusé des petites rides aux coins de ses yeux avec les années. Elle n'aurait jamais pensé que le temps lui irait si bien. Son petit cœur, qu'elle avait mis en sourdine toutes ces années, s'est réveillé en le voyant. De nouveau, les papillons ont volé dans son estomac. Elle avait encore une fois succombé au jeune homme, comme s'il était écrit dans les astres qu'il devait être l'unique être qu'elle devait aimer.

Toujours recroquevillée au milieu de ses draps, elle met du temps à se calmer. Elle a soudainement un besoin irréductible d'écrire. De poser sur le papier un tas de réflexions qui parcourent son esprit. D'écrire à celle qu'elle était plus jeune une lettre sur l'amour et ce que cela peut provoquer dans le cœur d'une jeune fille. Il faut savoir que ce principe est le fondement même de sa chronique. Utiliser ce qu'elle vit au quotidien et écrire une lettre qui commence comme quand elle avait encore son journal intime. Comme si elle se l'envoyait, il y a quelques années.

"Dear Any...

Ne t'es-tu jamais demandé pourquoi l'amour ça fait souffrir ? Que l'on soit amoureux, ou qu'on ne le soit pas, ce que l'on espère comme un sentiment de plénitude se transforme bien trop souvent en peine, tristesse, déprime... Les synonymes sont nombreux pour mettre en avant que ce n'est pas toujours joyeux, qu'aimer peut blesser. D'ailleurs ne dit-on pas "tomber amoureux" ? Avoir un "Coup de foudre" ? Ou un "Choc amoureux" ? Et tout cela pour finalement avoir le "cœur brisé" ? Même le spécialiste de la psychologie, Sigmund Freud, a dit que "Nous ne sommes jamais aussi mal protégés contre la souffrance que lorsque nous aimons". Alors pourquoi une chose aussi belle et pure qu'aimer laisse les cicatrices les plus difficiles à cacher ?

L'amour, c'est en premier lieu la découverte de sensations inconnues, de ressentis dans des organes habituellement discrets et dénués de paroles. Étrangement, notre cœur se met à chanter, notre estomac à papillonner, nos pensées à s'envoler... Physiologiquement, ces métaphores ne sont que pure imagination. Les médecins vous diront que ce n'est qu'une question d'hormones qui s'agitent entre elles pour créer cet état d'épanouissement total : la dopamine, l'adrénaline et la noradrénaline accélèrent notre rythme cardiaque, nous empêchent de dormir ou nous coupent l'appétit. Si on ne nous donnait que cette liste de symptômes, je ne suis pas certaine que beaucoup de personnes souhaiteraient attraper cette maladie. Et ça, ce ne sont que les sentiments de l'amour. Ajoutons à cela le désir sexuel et nous ouvrons une porte supplémentaire vers les possibilités de souffrir. Quoi de plus déprimant que les remords, ou les regrets. J'aurai dû, je n'aurai pas dû...

Est-ce une bonne chose de tomber amoureux ? Est-ce que l'homme avec un grand H ne serait pas maso et se complèterait à souffrir pour ne pas être seul et satisfaire quelques instincts primaires ? Ou, ne serait-ce pas qu'une question de point de vue ? Si pour certains être amoureux est un sentiment agréable, d'harmonie avec l'autre, d'écoute de soi et de ses envies, pour d'autres ce n'est qu'un moyen de répondre à la dictature culturelle et naturelle qui impose aux êtres de se trouver un partenaire pour partager le temps et aider à la pérennisation de la société par la procréation. C'est tout de suite moins reluisant et attractif.

Mais je sens que je te fais peur, ma Dear Any. Toi qui, dans ton innocence de la vie à venir, est bercée par de jolies histoires romantiques, découvre tes premiers émois et commence à appréhender ton propre corps et tes envies. Surtout, prends bien soin de protéger cette petite flamme qui brûle en toi et qui te rend unique. Car un jour, et c'est malheureusement certain, un ou une essayera de la souffler pour t'éteindre. Et on n'est jamais certain que quelqu'un arrive à la rallumer après cela...

Ta chère Betty"

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