Chapitre 23 - Retour
Il ne lui restait plus qu'une pile de vêtements à ranger dans ses sacs et pourtant, Astrid se demandait qu'il n'était pas préférable de vider le contenu de sa valise et courir supplier le directeur de la laisser rester ici pendant les vacances d'été. Cela serait ridicule, certes, mais c'était mieux que d'affronter sa cousine après... après la fameuse lettre.
Contrairement aux précédentes années, elle n'avait pas peur de rentrer. En fait, pour être tout à fait honnête, une petite partie d'elle se languissait de quitter le château et de revoir le visage chaleureux de Nancy. Cependant, cette partie se faisait écraser par l'appréhension. Elle ne savait pas comment elle devrait se comporter à présent avec sa cousine. Surtout, elle ne savait pas comment elle se comporterait avec la blonde, et cela la remplissait d'angoisse.
Bien qu'elle ne se l'avouerait jamais, finalement, Astrid voyait le schéma de ses parents dans chacune des personnes à qui elle offrait sa confiance. Fût un temps, eux aussi étaient aimants et doux... Qui, qui pouvait lui certifier que Nancy ne lui planterait jamais de couteau dans le dos ? Que jamais elle ne se tournerait vers les forces du mal et abandonnerait Astrid à son triste sort ? Nancy, comme Fred ou Opal-Saturnin, ou bien George, et Lee... Elle avait choisi de leur faire confiance, mais aussi de prendre de risque de perdre à nouveau des proches.
Toutes ces craintes, elles se manifestaient en bruit de fond, en murmure irritants grattant le fond de son crâne. Quand elle était entourée et emportée dans d'autres sujets, ils se noyaient dans la réalité. Seulement, à chaque fois qu'elle était seule, avec rien pour la distraire... Ah, ces maudites voix, elles savaient s'y prendre pour éveiller ses plus profondes angoisses.
Elle n'en parlerait jamais à personne, d'une part parce qu'elle restait la jeune fille bornée qu'elle avait toujours été, mais également parce que cette partie d'elle était sa partie la plus vulnérable, la plus sensible. Alors elle continuerait à agir comme si la trahison de ses parents ne l'avaient jamais réellement affectée, et à vouloir fuir dès que l'occasion se présentait à un de ses proches pour démontrer sa loyauté. Astrid n'avait jamais été connue pour son courage après tout.
– T'as besoin d'aide pour porter cette énorme pile de dix centimètres, ou tu peux t'en occuper toute seule ?
Tout en roulant des yeux, la blonde se résigna et, la boule au ventre, elle déplaça ses vêtements dans sa valise, qu'elle ferma brutalement juste après, coupant court à sa profonde réflexion mais également aux applaudissements d'Opal-Saturnin.
– Qu'est-ce qu'elle t'a fait pour mériter ça, ta valise ?
– Elle ne savait pas quand la fermer, répliqua-t-elle dans un grognement.
– Junox, dis-nous, on rêve ou tu viens de faire un jeu de mots ?
– Un jeu de mots nul, soit dit en passant. Si tu veux des cours gratuits, tu peux toujours demander à Lee, mais si tu veux des cours de qualité, demande-nous ; on te fera même un prix d'amis.
Il ne manquait plus qu'eux. De mauvaise humeur, elle ne prit même pas la peine de répondre, lançant un regard meurtrier aux jumeaux et Lee (qui n'avait encore rien fait) tout en enfilant une chemise blanche par-dessus un top de la même couleur.
– Tu pourrais donner un peu de ta bonne humeur à Astrid ? proposa George à Opal-Saturnin, qui roula des yeux.
Prise dans une tornade d'agacement, d'irritation et d'angoisse, les mains tremblantes d'Astrid eurent du mal à nouer sa cravate, tant et si bien qu'elle abandonna l'idée, marmonnant des insultes dans sa barbe imaginaire en enfournant sa cravate dans sa poche.
– Besoin d'aide ? proposa Fred.
Elle secoua la tête, enfilant son pull Serpentard. Le rouquin soupira et tenta de tirer sur le bout de cravate qui dépassait, mais elle lui gifla la main, plissant ses yeux noisettes en regardant droit dans les siens. Ils se defièrent un instant du regard avant qu'il hausse les sourcils avec un sourire amusé.
Et comme toujours, Fred Weasley tourna la situation à la rigolade.
D'un geste vif, il essaya à nouveau de lui prendre sa cravate, mais elle esquiva. Il tenta de la bloquer avec son autre bras tandis qu'il effectua un deuxième essai, mais elle passa en dessous, avec une agilité qu'il ne lui suspectait pas. Rapidement, George s'ajouta à leur bataille, se glissant discrètement derrière elle pour lui dérober la cravate, mais Astrid lui écrasa son coude dans les côtes, accidentellement.
Lee et Opal-Saturnin explosèrent simultanément de rire en assistant à la scène.
Fred feinta, avançant une main explicitement tandis que l'autre était prête à foncer, mais la blonde, loin d'être stupide, comprit le stratagème. Toutefois, ce qu'elle ne soupçonna pas, ce fut l'alliance surprise — non, la trahison de son amie, qui, de la plus désinvolte des manières, se saisit de la cravate d'une main, l'autre croisée sur son ventre.
Le duo se figea, fixant le tissu brandit avec des yeux ébahis. Soudain, un chaos sans nom prit part de la pièce.
– LEE ! TIENS-LA !
– ATTRAPE, FRED !
– MA CRAVATE !
– HAAA ! ELLE VA ME CASSER LES DENTS !
C'est ainsi qu'Astrid se retrouva emprisonnée par Lee, un George blessé prêt à prendre le relais en cas de problème majeur, tandis que Fred se trouvait face à la blonde, tout sourire, Opal-Saturnin se tenant fièrement à ses côtés.
– Vous êtes complètement malade, Astrid murmura, sous le choc.
– Ce n'est que maintenant que tu t'en rends compte ? blagua Lee.
Son rire mourut rapidement quand elle s'agita un peu trop. Il resserra son emprise, la forçant à se calmer. Une fois immobile, Fred s'avança, cravate en mains. Il avait toujours son sourire diabolique aux lèvres. Le sourire des jumeaux Weasley.
– Pas bouger, la nargua-t-il, et ne me mord pas.
Elle lui lança un regard noir mais résigné. Alors, avec toute la prudence et la délicatesse dont il était capable, Fred glissa le tissu vert derrière son col, avant de rejoindre les deux extrémités devant. Il noua les bouts avec un parfait nœud de cravate. Bien que concentré, le fantôme de son sourire flottait toujours sur ses lèvres.
Astrid déglutit. C'était la première fois qu'elle se trouvait aussi proche de quelqu'un du sexe opposé, quelqu'un qui ne lui voulait pas de mal. Et si elle se fichait pas mal des mains de Lee qui emprisonnaient ses poignets, sentir le souffle caramélisé de Fred échouer sur ses joues la perturbait plus que nécessaire.
Une fois qu'il eut fini, ses yeux remontèrent jusqu'aux siens et à ce moment-là, son cœur loupa un battement. Il souriait toujours. Il souriait tout le temps.
– Voilà, c'était pas bien compliqué, chuchota-t-il.
Enfin, Lee la laissa partir. Ses yeux se dirigèrent vers un des lits vides. Elle se mordilla les joues, légèrement rosies de honte. Pourquoi étaient-ils toujours gentils avec elle, même quand elle ne le méritait pas ? C'était des ces moments là que les murmures mouraient, parce que rien au monde ne pouvait la convaincre que ces mêmes personnes finiraient comme ses parents. C'était peut-être naïf de sa part, mais elle aimait ça. Elle aimait effleurer du doigt cette nouvelle (ou ancienne ?) innocence, la même qu'elle aurait dû toujours posséder à son âge avant que ses parents ne la lui volent.
Après quelques secondes d'hésitation, elle décida de la meilleure des choses à faire.
– Merci. Merci beaucoup.
Fred lui offrit en retour un de ses fameux clin d'œil. Opal-Saturnin lui accorda le regard d'une maman fière, un détail qui réchauffa le cœur de la blonde. George, lui, lui fit un pouce en l'air avant de partir s'écraser sur un des lits, comme s'il venait d'exécuter le travail de dix sorciers alors qu'il était resté en retrait, par peur de se reprendre un coup.
– Astrid, t'es plus seule maintenant. Si t'as besoin de parler, on est là, la décoiffa légèrement Lee.
Elle lui sourit doucement, touchée. Il avait raison : même si elle n'avait pas l'habitude, elle pouvait sentir qu'ils étaient là. Non pas physiquement, parce que ses cinq sens s'occupaient déjà de lui relayer l'information, mais mentalement. Comme un nouvel instinct, une étrange certitude un peu folle, elle savait qu'au moindre coup de vent trop puissant, ils seraient là, stables et imperturbables, et elle n'avait qu'à tendre les bras pour s'agripper à eux et se stabiliser.
Ils étaient là. Pour elle. Cette simple pensée fit accélérer son cœur et lui piqua les yeux. Elle sentait leur regard sur elle, attendant patiemment qu'elle fasse le premier pas. Qu'elle tende la main vers eux pour retrouver l'équilibre.
– C'est..., hésita-t-elle, gênée, c'est qu'une histoire de famille un peu stupide, c'est tout.
– Tu t'y connais en histoire de famille, non ? blagua Fred.
Opal-Saturnin et Astrid lui lancèrent un regard las.
– Mais t'as de la chance : nous aussi, on s'y connait, sourit George en posant une main chaleureuse sur son épaule.
Elle n'apprecia pas le contact (pas à cause de George, mais du simple contact en lui-même) mais n'en dit rien pour autant.
– C'est toi qui es en tort, ou c'est l'autre personne ?
– Tu poses vraiment la question ? demanda Opal-Saturnin.
Lee ricana, fière de sa partenaire de drague. Malgré tout, George attendit la réponse d'Astrid. Les bras croisés et les sourcils froncés, elle regarda ailleurs, refusant de répondre. Fred ne put s'empêcher de sourire en la voyant réagir aussi puérilement.
– Je vois, sourit son jumeau. Et, elle sait que tu as tort ?
– Bien sûr ! C'est pour ça qu'elle a fait ce qu'elle a fait !
– Elle a fait quelque chose de bien ? De mal ?
Bien que ses yeux noisettes se perdirent dans le vide, ce fut comme si elle voyait la lettre devant elle, en encre et en papier. Aussi clairement qu'elle vit la lettre, elle se souvint de son premier ressenti : la honte, la colère, le déni. Puis, elle se souvint de toutes ces fois où ces mots l'avaient aidé, de toutes les impasses qu'elle avait pu franchir rien qu'avec des stupides mots écrits sous le coup de la colère.
Un sourire nostalgique qu'aucun ne lui connaissait étira ses lèvres. Si on le lui avait demandé au moment où elle avait reçu la lettre, Astrid vous aurait sûrement jeté un sort et envoyé au loin avec un coup de pied aux fesses. Toutefois, à présent... la réponse semblait évidente.
– De... de bien. De très bien même.
– Et... et tu as peur de la retrouver, parce que... ?
– Parce que...
Astrid soupira, s'asseyant sur son lit avec un air défaitiste.
– Parce qu'elle savait que j'avais tort. Et parce que je... j'ai changé. Je ne sais pas comment agir avec elle.
L'amusement dans le sourire de George avait fait place à de la compassion. C'était un sourire sincère, réconfortant. Elle aurait aimé se blottir contre ce sourire ; le voir tous les jours, ou plus souvent. Elle aurait aimé le voir quand sa vie était un chaos sans nom et que chaque jour semblait se noircir de plus en plus.
Elle aurait aimé voir ce sourire quand elle se trouvait allongée sur le carrelage froid de son manoir, avec pour seule source de chaleur son propre sang ; peut-être que l'Enfer aurait eu un goût moins amer.
Il s'accroupit face à elle pour la regarder en face.
– Soit toi-même.
– Facile à dire, marmonna-t-elle, les sourcils froncés, avant de regarder le rouquin droit dans les yeux avec toute la sincérité du monde. J'ai... George, je ne veux pas la décevoir.
Astrid sentit les mains crochues de l'angoisse empoigner son estomac et étrangler sa gorge. Son coeur, dans une veine tentative de fuir le monstre qui avait déjà pris en otage deux de ses congénaires, se mit à battre vite, si vite qu'il arriva au bord de ses lèvres.
Il était rare de la voir ainsi. Pourtant, plus le temps passait, et plus la réalité d'Astrid Junox se montrait à la lumière du jour. Ses mains vinrent tirer sur les racines de ses cheveux, cherchant désespérement à fuir le moment présent.
– Et si elle en attendait plus de moi ? Si elle s'attendait à voir quelqu'un de joyeux, de sociable, chaleureux ? Je ne sais pas quoi faire. Je ne veux plus être quelqu'un d'autre. J'aimerais juste...
Être comme les autres. Parce qu'au fond, le vrai dilemme était là : Astrid n'était pas comme les autres. Ce n'était pas une différence amusante, ou le genre qui la faisait drôlement sortir du lot : Astrid était différente parce qu'elle était traumatisée. Elle avait vécu des années de maltraitance et de manipulation. Elle vivait par instinct, celui de survie.
Il fallait à présent qu'elle face fasse à une réalité bien déplaisante : elle ne serait jamais comme les autres. Son cerveau ne fonctionnerait jamais pareil, et elle serait souvent la seule à frissonner quand un sort serait jeté, et elle serait souvent la seule à tressaillir quand une main serait levée, et elle serait la seule à se battre contre elle-même, contre ses propres pensées et son propre passé, parce qu'un duel interieur est mené inlassablement ; le duel de qui elle était et qui elle voudrait devenir.
Elle ne serait jamais la cousine que Nancy mériterait, ni l'amie que Fred, George, Lee et Opal-Saturnin mériterait, ni la fille que ses parents désiraient. Elle serait toujours rien de plus qu'une déception.
Son coeur — son pauvre coeur, il mourait dans sa poitrine. Comme une fleur assechée, il fanaît, désespéré de s'abreuver de larmes et de paix. Si Astrid ne pouvait lui donner l'eau dont il avait besoin, ses amis s'étaient décidés à lui apporter le dernier remède.
– Si elle attendait quelqu'un d'autre que toi, tu veux dire ? demanda Fred, s'abaissant aux côtés de son frère. Mais c'est toi qu'elle attend. Enfin, elle s'attend sûrement à voir la peste de Junox, alors imagine la fierté qu'elle ressentira en te voyant, toi !
Astrid regarda les jumeaux un à un, ce moment s'impregnant au fer blanc dans ses souvenirs. Un sourire doux s'immiça sur son visage. Chacun de leur mot allégeait le poids qu'elle avait prit l'habitude de porter seule sur ses épaules.
Un de ses amis s'asseya à ses côtés ; elle le sut grâce au léger enfoncement de son matela. Une odeur de jasmin lui emplit les narines, et elle sut que c'était le bras d'Opal-Saturnin qui vînt gentiment entourer ses épaules.
– Je suis fière de toi Astrid.
A ces mots, ses yeux s'aggrandirent, son cerveau incapable d'enregistrer l'information.
– On l'est tous. C'est pour ça qu'on sait qu'elle aussi, elle sera fière de toi.
Astrid et Opal-Saturnin se regardèrent un instant, l'une et l'autre partageant silencieusement toute la gratitude qu'elles ressentaient l'une pour l'autre. Lee sauta sur le lit, faisant sursauter les deux amies, et il immisca sa tête entre les deux, la tournant vers Opal-Saturnin pour lui sourire, puis vers Astrid :
– Faut pas avoir peur. On sera pas loin, et puis, on sera toujours là si ça se passe mal.
– Ca ne se passera pas mal, grogna Opal-Saturnin en roulant des yeux.
– Tu sais pas ! Un jour, ma tante ne m'a plus parlée pendant plusieurs mois parce que j'avais dit que ses chaussures étaient trop bleues.
– Lee, la ferme ! râla George. Tu vas nous la faire paniquer !
– Mais non ! Ah, la famille, c'est pas indispensable si ils te font trop de mal. Mais cette personne a l'air de te faire du bien, alors... Alors je suis certain que ça se passera bien. J'ai juste dit ça pour qu'au moins, tu gardes à l'esprit que tu n'es pas coincée !
Astrid fut surprise lorsqu'elle sentit ses yeux piquer et une larme couler sur sa joue. Elle la toucha sur bout des doigts, et elle vint se loger sur la pulpe de son index. C'était tellement rare. Astrid ne pleurait jamais, alors pourquoi pleurait-elle maintenant ?
Contre toute attente, cela la fit sourire, et elle rit doucement, un rire étouffée par sa gorge serrée.
– Merci, souffla-t-elle à ses amis, merci mille fois.
~•~
Le retour se passa sans encombre.
Ils se mirent tous ensemble dans une cabine, avec Angelina et Alicia. Le trajet passa vite (peut-être trop vite au goût d'Astrid) grâce aux anneries des jumeaux et aux chamailleries d'Opal-Saturnin et Astrid. Les deux dernières n'étant pas très proches des deux autres meilleures amies, elles s'étaient rapprochées et parlaient plus ensemble qu'avec les autres.
La gare apparut au loin. Astrid laissa échapper un soupir. Son ventre était emmêlé, un tas de noeuds et d'organe qui l'aurait presque fait vomir. Plus le train s'approcha, plus il fut facile de voir les familles ; de trouver Nancy. Ses yeux cherchèrent un long moment, et ne trouvèrent sa cousine qu'au moment où le train s'arrêta définitivement.
A son grand malheur, le train se vida. Sans un mot, elle partit récupérer ses affaires et decendit du wagon, le coeur battant à tout rompre. Elle chercha à nouveau Nancy, et son souffle se coupa quand elle la vit traverser la foule dans sa direction. Inconsciemment, elle fit un pas en arrière et chercha un échapatoir, mais Fred entoura les épaules de la blonde d'un bras, l'autre portant ses valises.
– Tu ne vas nul part, Astrid, sourit-il.
Alors qu'Opal-Saturnin et Lee descendaient du train, Nancy arriva face aux jeunes, un sourire rayonnant mais taquin aux lèvres. Astrid fronça les sourcils et regarda ailleurs, gonflant légèrement ses joues. George ricana en la décoiffant sauvagement. Elle leva la main pour le bousculer, mais il s'échappa avant qu'elle ne puisse l'atteindre.
Il fut temps de faire ses adieux. N'étant pas très démonstrative, la blonde leur fit un au-revoir de la main avec un petit sourire avant de s'avancer vers Nancy. De leurs côtés, ils lui firent tous de grands au-revoir, lui souhaitant de bonnes vacances et de bien se reposer. Cela lui fit garder son sourire un peu plus longtemps, attirant le regard curieux de sa cousine.
Astrid et Nancy quittèrent la gare. La brune fourra ses mains dans les poches, avant de les enlever pour demander :
– Tu as besoin d'aide avec tes valises ?
– Non, merci.
Merci ? Le coin de ses lèvres se leva mais elle ne dit rien, la regardant plus longement en remettant ses mains dans ses poches.
– Tu t'es fait des amis, remarqua-t-elle.
Astrid sourit et hocha la tête, ses yeux noisettes se perdant dans le vide. Avant qu'elles ne puissent continuer cette conversation inconfortable, quelqu'un appela au loin, une voix qu'elle ne connaissait pas. Elle l'ignora tout simplement, pressant le pas pour ne pas attirer d'ennuies à Nancy, mais la voix continua de l'interpeller.
Soudain, cette voix la ramena quelques années en arrière. La même voix, mais pas le même cri.
Lyle Abott avait troqué ses hurlements de terreur pour appeler son nom. Elle crut faire une crise cardiaque, mais se rétablit vite, s'arrêtant d'un coup pour se tourner vers la voix.
Un garçon courait vers elle, fendant la foule comme il pouvait. Il souriait. Lyle souriait souvent, Astrid avait remarqué. Même quelques jours après s'être fait agressé par des Serpentards. Et ce qui l'avait toujours dérangé, c'était qu'il lui avait toujours sourit. A elle, l'inconnue qui l'avait sauvé, mais aussi celle qui avait demandé pardon à ses agresseurs pour l'avoir secouru.
Même après ça, il lui souriait dès qu'ils se croisaient.
A bout de souffle, il arriva jusqu'à elle et Nancy.
– Tu le connais ? demanda discrètement sa cousine.
Astrid hésita, avant de hausser les épaules.
– Jun- Astrid, se reprit-il avec un sourire gêné. Désolé. Ca va ? demanda-t-il, respirant bruyamment.
Elle hocha la tête, fronçant légèrement les sourcils. Nancy lui enfonca son coude dans les côtes.
– Et toi ? demanda-t-elle en s'empêchant de rouler des yeux.
Ses yeux s'illuminèrent avant qu'il de hoche vivement la tête.
– Merci ! Enfin, merci pour m'avoir sauvé, pas pour me demander comment j'vais. Ou pour les deux-- est-ce que ça marche pour les deux ? Merci deux fois. Mais le premier merci est plus important.
Elle hocha lentement la tête, le visage impassible.
– C'est... tu sais quoi ? J'suis super content que tu n'parles plus à tes parents. Cette année, t'as l'air d'aller mieux, d'être sortie d'ta bulle. Non ? Tu trouves pas ?
Etait-ce si évident pour les autres qu'elle était sortie de sa bulle ? Il était vachement honnête pour quelqu'un avec qui elle avait intéragit qu'une fois.
– Enfin voilà, c'est tout. Merci Astrid ! Ca te dit qu'on s'parle pendant les vacances ?
Astrid hésita, avant de hocher la tête à nouveau, cette fois les joues légèrement roses à l'idée de se faire un nouvel ami.
– Génial ! s'écria-t-il.
Il sortit un papier — qu'il avait préalablement préparé — de sa poche et le lui tendit. Avec une légère hésitation, Astrid saisit le papier et le déplia pour découvrir une adresse proprement écrite à l'encre noire. Quand elle releva les yeux vers lui, il souriait de toutes ses dents, sautant légèrement sur place comme si il était incapable de contenir son excitation.
– J'ai trop hâte, j'ai trop hâte ! Merci, encore, et bonnes vacances !
Et juste comme il était venu, il reparti en courant. Quel curieux personnage, pensa la blonde, un sourire presque amusé perçant son expression neutre.
Nancy la contemplait avec un air impressioné. Alors, sa cousine avait réellement changé, au point de s'ouvrir petit à petit aux autres et de ne pas repousser ceux qui s'approchaient avec de bonnes intentions. Savoir ceci la remplit de joie. Elle ne put se contenir, et alors qu'Astrid se tourna vers elle pour lui demander quelque chose, Nancy l'attira contre elle et la serra dans ses bras.
Astrid, d'abord sous le choc, ne bougea plus. Puis, instinctivement, elle tapota le dos de sa cousine, ne sachant que faire d'autre.
– C'est génial... T'es géniale. Je suis tellement fière de toi.
Si la jeune fille était plus sensible, ses jambes auraient laché et elle aurait fondu en larmes ici même. Le stress qu'elle ressentait précédement se dissipa d'un coup, relaxant ses épaules et le reste de ses muscles. Tout ce chemin qu'elle avait accompli, et tout ce qu'elle avait du changer pour arriver à ce moment précis -- le coeur léger d'avoir gagné la fierté de Nancy, la conviction que les choses iraient mieux, que des gens tenaient à elle et seraient heureux de la retrouver après les vacances -- ; cela lui fit presque tourner la tête.
Et, à sa grande surprise, elle le ressenti. Peut-être que ça avait été là depuis le début et qu'elle n'avait jamais su le déceler ; peut-être que cela venait d'apparaître grâce à Nancy ; peut-être que ça ne venait même pas d'elle, mais simplement de sa cousine. Mais c'était réel, et peu importe d'où ce sentiment venait et depuis quand il était là, c'était à cet instant qu'il parcouru ses veines et enfla son coeur.
Astrid était fière d'elle. Astrid était fière de tout ce qu'elle avait accompli, et tout ce qu'elle se sentait prête à accomplir. Elle était fière de s'être détachée de ses parents, de ses convictions ; fière de ne pas avoir continué à repousser ses amis et d'avoir apprit à aimer ; fière de changer et de continuer d'évoluer.
Oh, elle savait que cette année aurait changé sa vie, mais elle n'avait pas envisagé un tel revirement de situation. Et ça lui plaisait. A présent, elle n'avait qu'une hâte : le commencement de sa cinquième année à Poudlard.
(Voici le dernier chapitre de la Partie 1 ! Joyeux Noël à tous.tes, en espérant que cette fin vous a plu ;))
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