Le thriller judiciaire
textes écrits durant un séminaire sur le thriller judiciaire :
1. L'adjectif : écrire un portrait à partir d'un adjectif
Josh a toujours été quelquun de froid ; physiquement et socialement. Il naime pas les gens vivants, il préfère les morts. Josh est thanatopracteur et il le sait depuis quil est petit ; un jour il a vu un oiseau mort écrasé sur le bord de la route. Il la ramené chez lui, il lui a remis les ailes en place, il a pris le kit de couture de sa grand-mère pour recoudre ce quil y avait à recoudre après avoir remis les organes à lintérieur. Il sest demandé sil nallait pas lempailler mais il navait pas de paille à la maison, donc il a abandonné lidée.
Les morts sont froids, comme lui. Ils ne cherchent pas à parler sans cesse, parce quils sont morts. Ils ne cherchent pas à savoir tout de la vie de Josh parce quils sont morts. Et surtout, ils ne posent pas de questions débiles à longueur de journée. Josh déteste les questions débiles. Quand la mère de Josh a découvert loiseau dans le garage, la première question quelle lui a posé cest « pourquoi tu as fait ça à cet oiseau ? pourquoi tu las tué ? » Josh a levé les yeux au ciel, comme sil était capable de tuer un être vivant. Il a juste répondu : « il était tout froid, alors jai voulu le réchauffer. »
2. Objet de peur : écrire à partir d'un objet, d'une situation qui nous effraie
Cette chaise remplie de vêtement est là. Dans cette pièce sombre, Anna naime pas cette chaise car elle a une forme humaine dans le noir. « Maman, tu peux vérifier dans larmoire encore une fois sil te plait ? ». Sa mère soupire et ouvre grand le placard avant de se tourner vers sa fille. « Tu vois ? il ny a rien dans ton placard, comme tous les soirs. » Au moment où sa mère se retourne pour lui parler, deux yeux brillants apparaissent, ce qui fait hurler la petite fille. Elle se cache sous sa couette. Sa mère soupire de nouveau.
« Je laisse ta porte entrouverte avec de la lumière, ça te va comme ça ? » Anna secoue la tête. Quand la porte est entrouverte, elle voit la chaise remplie de vêtement qui a une forme humaine, et ce soir, elle a vraiment une forme humaine. Elle a une silhouette humaine, une taille humaine, des yeux humains et surtout une démarche humaine. La porte du couloir claque. La forme humaine sapproche delle et plaque une main gantée sur sa bouche.
On entend un hurlement au loin. Les infos passent cet info macabre en boucle : « une jeune fille de 8 ans assassinée dans son sommeil. La piste de linfanticide est privilégiée. »
3. Texte sur le thriller judiciaire : Post traumatique
Ma blouse blanche me démange au niveau du cou, et lépingle à nourrice qui maintient mon badge me pique la poitrine. On refuse de me laisser entrer dans la morgue. La victime est ma sur jumelle, merde. Certes, je suis le médecin légiste de lhôpital où elle a été admise, mais je reste son frère. La police ne ma même pas laissé rentrer dans la pièce où se trouver son corps ; jai dû rester sur le seuil Elle était blanche, ses veines étaient apparentes. Aucune trace de blessures nétait visible. Elle est sûrement morte dune cause interne. Mais je nai pas eu le droit au rapport dautopsie. Jai le droit de ne rien savoir en ce qui la concerne.
Merde, merde, merde. Ça tourne en boucle, jarrive pas à réfléchir correctement. Jai une perceuse qui me fend le crâne en deux. Jai envie de me taper la tête contre le mur blanc de ce putain de bâtiment pour laisser une trace de ma souffrance psychologique.
-Monsieur Allen, vous pouvez me suivre.
Je relève la tête et fixe le lieutenant Anderson en face de moi. Je me lève et le suis dans la salle dinterrogatoire. On sinstalle à une table, lun en face de lautre. Le lieutenant sinstalle, pose sa tasse de café et un dossier devant moi.
-Sara Allen, votre sur jumelle, a été retrouvé morte à son domicile samedi matin à 8 heures 30 par un voisin. Elle avait pour habitude daller chercher son petit-déjeuner à 7 heures du matin, avant de se mettre au travail chez elle, devant son ordinateur. Au bout du troisième jour sans lavoir vue dans les parties communes, le voisinage a commencé à sinquiéter et ont décidé de nous appeler pour vérifier si tout allait bien chez elle. On la trouvé ligotée sur son lit, mais aucune séquelle nétait présente sur son corps.
Une nausée violente marrive. Le lieutenant soupire, se dirige vers le distributeur deau et mapporte un gobelet. Je le fixe, respire profondément en attendant que lenvie de vomir passe. Un silence lourd sinstalle dans la pièce ; lhorloge au mur casse lambiance pesante ; tic-tac, tic-tac.
-Est-ce que vous avez des questions à me poser ?
Je fixe la table. La nausée sest transformée en colère ; ma mâchoire se serre en même temps que mes poings.
-Tu comprends bien que je ne pouvais pas te laisser inspecter le corps au vu de ta situation, Luther ?
Je lève les yeux vers lui ; il a lair compatissant, mais jen ai rien à foutre quon soit compatissant avec moi.
-Je veux juste savoir ce quil la tuée, je chuchote.
-Je ne peux pas te faire cet honneur. Tu es déjà fichée en rouge dans cette affaire, personne ne te laissera approcher la scène de crime.
-Je suis médecin légiste ! Je peux vous aider à trouver le meurtrier !
-Quest-ce qui te fait croire quelle a été tué ?
Je détourne le regard et attrape le gobelet pour moccuper les mains. Ce nest pas parce quon ne me donne pas accès à laffaire que je ne peux pas faire des petites recherches de mon côté. Le lieutenant me regarde intensément. Il soupire et il fait glisser le dossier en face de moi. Je lattrape et ouvre le document.
« RAPPORT DAUTOPSIE
Nom : ALLEN Prénom : Sara
Née le 12 décembre 1985 à Juvignac (34)
Dossier n° 35915
Date présumée du décès : entre le 09 mars 2019 13h30 et le 10 mars 2019 à 6 h 45.
Autopsie pratiquée le 10 mars 2019
Donneur dordre : Madame Eva POLNE, Procureur de la République de Nouvelle-Calédonie.
Corps identifié par Monsieur Neuville Loïc
Mode de décès: Infarctus
Cause immédiate du décès: Hémorragie crânienne entraînant un arrêt cardiaque. »
Ça na aucun sens Rien de tout ça na de sens : même un papier officiel mempêche de penser que cest un simple accident. Une personne en bonne santé à 4 % de chance davoir un arrêt cardiaque. Ma sur était un exemple, un modèle : elle ne fumait pas, ne buvait pas une seule goutte dalcool, faisait du sport, dormait bien, mangeait équilibré Bref, elle était un modèle de perfection pour moi
-Si je te montre la scène de crime, est-ce que ça taidera à apaiser ta conscience et à passer à autre chose ?
***
Mes doigts refusent de saisir la poignée. Ressaisis toi bordel, tu as voulu voir les choses ; maintenant, tu assumes. Le lieutenant prend ma main dans la sienne pour lamener doucement vers la porte et tourne la poignée avec moi. Je ne reste pas longtemps sur le seuil de la porte et me dirige vers le salon. Tout est intact, pas de trace deffraction, pas de lutte, pas de trace de sang, en apparence.
-Les nettoyeurs ne sont pas encore passés. Je voulais dabord faire le point sur cette affaire avec toi. Voir si tu pouvais nous aider à trouver quelque chose qui nous mènerait à la cause de ce meurtre.
Je frissonne à la fin de sa phrase : putain, je suis médecin légiste. Jen vois tous les jours des horreurs. Mais quand lhorreur touche ma moitié, cest comme si je prenais un coup de poignard à chaque battement de cur. Comme sil se sentait quil navait plus le droit de battre depuis que Sara est morte.
Je balaye du regard la pièce ; on dirait quelle a juste quitté lappartement pour aller faire quelques courses et quelle va passer le pas de la porte dune seconde à lautre. Je mapproche du tiroir où elle a lhabitude de ranger ses clefs, mais interromps mon mouvement et me tourne vers le lieutenant.
-Je peux ?
-Les empreintes ont déjà été relevées, il sourit. Tu peux poser tes doigts où tu veux.
Jouvre le tiroir et trouve tout à sa place, sauf ses clefs de voiture.
-Sa voiture a été réquisitionnée ? Je questionne en fouillant dans le meuble.
-Non, sa place de parking était vide quand on la trouvée.
Bizarre, comme si elle était vraiment partie quelque part. Pourquoi sa voiture a disparu si son corps a été retrouvé dans sa chambre, qui plus est attaché au lit ? Je me déplace vers le salon et remarque une photo de Sara avec un homme que je nai jamais vu auparavant.
-Vous connaissez cet homme ?
-Edward Silver, on la interrogé quand on a vu sa photo dans le salon de la victime, mais il navait rien de compromettant le concernant ; son casier est vierge et il est inconnu des services de police.
Je repose le cadre et fixe la porte de sa chambre : lendroit fatidique Je prends la poignée, mais je ne la tourne pas. Tu dois savoir ce qui sest passé, pour Sara, et pour éviter que dautres victimes ne samoncellent si le meurtrier est encore en liberté. Jouvre enfin la porte pour trouver la chambre de ma sur dans un désordre pas possible.
-Le désordre était dorigine ou cest la police ?
-Un peu des deux, sourit le lieutenant. La chambre a été fouillé quand on est arrivé, comme un cambriolage. Mais aucune trace deffraction, donc la personne qui a mis ce désordre a été invité à entrer par votre sur.
Donc le vol était prémédité ? Ce qui minquiète encore plus sur cette affaire, et que je nai pas précisé au lieutenant, cest que jétais en froid avec ma sur depuis un peu plus de six mois. Jai donc aucune idée des fréquentations quelle a pu avoir, ni même les actions quelle a pu faire juste avant sa mort.
-Vous avez mentionné que Sara était attachée au lit quand vous lavez trouvée ? Je pense quon pourrait rapprocher ça au fait que des choses ont été volé Le coupable ne voulait sûrement pas que sa victime se débatte pendant quil cherchait son butin.
-Daprès le rapport de la police, elle est morte avant davoir été attachée, sinon il y aurait des marques sur ses poignets : de plus, les liens nétaient pas serrés.
-Vous pensez à une mise en scène morbide ?
***
-Tu es sûr de toi ?
-Oui, Alex. Pour la vingtième fois, je suis sûre de vouloir voir le corps de ma sur. Jai envie de vérifier quelque chose par moi-même.
Alex est le thanatopracteur, il soccupe dembellir les cadavres avant lenterrement – ou autre rituel selon la religion de la personne. Ma sur na jamais voulu être enterrée, en vérité, on en a jamais vraiment parlé. Elle ne pensait pas à la mort et moi non plus. On pensait juste à linstant présent et cest ce que jaimais chez elle ; son sourire, son optimisme du moment, sa manière de me dire « tout sarrange un jour » quand il marrivait une merde.
Il fait froid. Les frigos mortuaires se succèdent devant moi, jai limpression dêtre dans un tunnel sans fin. Le centre de la pièce est éclairé avec une table et un corps est dessus. Le bruit de mes pas résonne dans toute la salle. On dirait quelle dort, elle est paisible. Je parcours son corps pour déceler le moindre hématome. Ce nest pas possible quelle soit morte sans aucune séquelle Jallais partir quand japerçois une cicatrice sur lintérieur de son bras droit. Elle est encore rose, ce qui indique quelle est récente. Elle navait pas cette cicatrice il y a quelques mois, pas avant quon se voie pour la dernière fois
Je sors de la pièce et me dirige vers mon bureau. Alex me suit à la trace depuis que je suis sortie de la morgue. Je me place devant lordinateur et tape le nom de ma sur dans la barre de recherche du terminal de lhôpital.
-« Opération de lappendicite en 2006 », « fracture du bras en 2013 » Alex, tu peux aller demander en traumato sils ont eu à soccuper de ma sur il y a quelques mois. Il y a un truc qui ne colle pas avec son dossier
-Elle est peut-être allée dans un autre hôpital pour se faire opérer, non ? Demande Alex, perplexe de mon comportement.
-Alex On est plus au moyen-âge Toutes les opérations que tu fais, peu importe où tu vas, ton dossier médical numérique se met à jour automatiquement. Ça évite la paperasse inutile.
-Donc si cette cicatrice est là et que tu ne la trouves pas dans son dossier, cest quelle a été faite Clandestinement ?
Il y a rien qui va, lemplacement de la cicatrice nest pas logique, elle est mal faite parce que jai remarqué des boursouflures sur la peau. Et surtout, elle se trouve à lintérieur du bras, donc elle a été faite à cet endroit pour ne pas quon la voit. Et surtout, pourquoi navoir laissé aucune trace, mais avoir laissé la victime attaché au lit ? Je me frotte les yeux. Ces conneries me donnent mal à la tête. Alex arrive en courant dans mon bureau, tout essoufflé.
-Edward Silver Il est arrivé au commissariat et il est passé aux aveux
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