▬7▬▬ A venir ▬▬▬▬
Un rayon de soleil traverse le léger vitrage de la maisonnette et vient frapper mes yeux encore fermés, provoquant un soupir de ma part. Je me tourne pour échapper à cette luminosité éclatante et ainsi prolonger le profond sommeil dans lequel je m'étais engagé.
Cependant un individu ne fut pas du même avis que moi.
- Allez debout ! Ce n'est pas en restant allongé que vous reconquérez Stäfa !
Je feins le sommeil mais il se trouve que mon interlocuteur avait la détestable capacité à détecter les corps éveillés.
Sans plus de procès il tire alors la couverture qui me recouvrait et je frisonne désagréablement sous le souffle frais matinal qui imprégnait la maison. Je me révolte alors en ouvrant les yeux et en me redressant :
- Il fait froid !
Je me trouve alors face à un Jungkook qui se tenait debout, la précieuse couverture à la main, et qui me regardait d'un air sévère. Son regard transperçant me fait alors me sentir comme un jeune enfant et je me retiens de rougir de gêne.
- Des centaines de personnes dorment dehors et travaillent depuis déjà des heures et vous, vous trouvez le moyen de vous plaindre ?, demanda-t-il d'une voix sombre et bien trop lente.
- Je ne savais.. je ne voulais pas..., je balbutie péniblement.
Je ne sais quoi dire par ce sermon matinal, d'autant plus que plus le temps passait, plus l'aura du fils du cuisinier semblait m'écraser. Je ne savais pas pourquoi il me faisait perdre autant mes moyens et cela m'agaçait.
- Jungkook sois gentil, va me chercher du romarin. J'en aurais besoin pour le déjeuner, retentit alors une voix qui me paraissait bien plus bienveillante.
- Bien Père, soupire le brun avant de filer sans un regard.
Je vois alors le cuisinier s'approcher de moi avec un sourire fatigué.
- Que diriez-vous d'un bain Taehyung ?, il demande pour changer de sujet.
- Je peux ?, je demande timidement.
- Bien sûr mon garçon ! On s'occupera de ça après le déjeuner.
Je souris sincèrement à l'idée. Mais je ne peux m'empêcher de lui proposer mon aide pour le repas, ce qu'il accepte sans broncher. Mes débuts sont très maladroits, n'ayant jamais tenu de couteau avec un autre objectif que pour couper la viande afin de la manger, cependant Jung Kwon se montre particulièrement patient avec moi et je découvre avec joie le plaisir de couper des légumes, de réchauffer de l'eau par le feu. Des gestes simples, avec des buts simples, mais qui provoquent une certaine chaleur dans mon cœur.
Jungkook nous rejoint de longues minutes plus tard, et nous observe d'un air impassible, accoudé nonchalamment contre son plan de travail. J'essaye de montrer que je ne suis pas complètement inutile et tente de faire de mon mieux pour couper les courgettes qui étaient face à moi.
Cependant il me suffit d'une seconde d'inattention pour que le couteau dérape et vienne se loger sur le flanc de mon doigt. Je pousse un couinement de douleur qui alerte le brun.
- Je m'en occupe, il soupire.
- Non ! Ce n'est rien, vraiment, je proteste.
- Ne soyez pas ridicule vous allez en mettre partout.
Il me tire alors vers l'échelle qui permet de monter à l'étage et je monte sans poser de question en évitant de toucher les barreaux de ma main blessée. Une fois arrivé en haut je découvris ce qui semblait être une chambre, composé d'un grand lit qui prenait presque toute la surface de la pièce, d'une petite table, mais c'est surtout l'immense fenêtre qui occupait le toit qui me fascinait. Au château je n'avais jamais vu ce genre d'ouverture et maintenant que je l'avais sous les yeux je ne peux m'empêcher de m'en approcher pour découvrir le ciel marbré de nuages argent.
- Venez, me rappelle à l'ordre le brun pour me diriger vers une petite salle conjointe à la chambre.
Je découvris alors une petite salle sans ouverture avec une chaise et de nombreux placards comme seuls meubles.
- Asseyez-vous.
Je m'installe sur la chaise avec la dérangeante impression de suivre des ordres venant du plus jeune.
Jungkook s'empare alors de ma main et examine la plaie avant de la lâcher brusquement et de fouiller parmi les étagères de ces placards pour en sortir un linge blanc ainsi qu'une petite bouteille verte. Sans qu'il ne me l'ordonne je lui tends la main et il me la soigne sans un mot, le regard concentré sur sa tâche. Je ne réagis à peine quand le désinfectant irrite ma peau à vif, bien trop occupé à dévisager le brun.
Une fois sa tâche accomplie il se relève et tourne autour de ma chaise tel un rapace. Alors que j'allais lui demander ce qui lui prenait sa voix claqua :
- Vos cheveux.
- Quoi ?, je fais en ne comprenant pas.
- Vous ne pouvez pas vous permettre de les laisser longs, vous serez reconnu en un rien de temps et il est hors de question qu'on se fasse repérer.
J'accuse le coup difficilement. Comment ça il fallait que je me sépare de ma longue chevelure ?
- Il en est hors de question, je gronde pris d'une vague de courage.
- Soit vous les coupez soit vous mourrez, s'énerve le brun.
- Si je les coupe ce sera pire châtiment que la mort, vous ne comprenez pas.
- C'est vous qui ne comprenez pas, aucun homme en dehors de votre famille ne porte les cheveux longs. Il n'existe pas indicateur plus explicite.
Les larmes me montent aux yeux à ses paroles. Cette chevelure est le signe de mon appartenance avec la famille Kim, celle qui a été choyée par mon père durant les rares fois où j'avais des moments privilégiés avec lui. La couper serait vu comme un sacrilège et un signe de renie ou pire encore de profond déshonneur.
- Je ne peux pas, je suis désolé.
- Vous n'avez pas le choix.
- On peut trouver un arrangement j'en suis sûr !, je m'écrie en me levant face à lui.
Il hausse un sourcil et me défie silencieusement de continuer ce que je fais sans trop réfléchir :
- Si vous dites que je suis reconnaissable avec alors c'est très simple je n'aurai qu'à rester caché ! Comme ça personne ne me verra.
- Vous êtes immature.
Sa voix avait été encore plus sèche que d'habitude, pleine de reproches. Ce ton glacial me terrifie, non pas parce que le propriétaire m'intimide, mais plutôt car j'ai la soudaine impression que je n'ai pas d'autre alternative que de l'écouter. Abattu, je baisse, encore une fois, la tête en ne sachant quoi répondre.
Il est vrai que j'avais voulu m'échapper de la demeure de mon père afin de découvrir des terres, de vivre par moi-même. Mais je ne m'étais pas rendu compte à quel point j'étais ignorant du monde, et cela Jungkook me le balançait en pleine figure. Jamais je n'aurais pensé devoir me séparer de quelque chose comme ma chevelure, mais en y repensant il est vrai que seul mon père, Oncle Namjoon et moi les laissions longs parmi les gens que j'avais côtoyé.
Une main s'emparant d'une mèche de mes cheveux m'interrompt dans mes pensées et je lève les yeux vers Jungkook qui était penché dessus, un voile de tristesse s'emparant de ses yeux d'habitude quasiment inexpressifs. Je l'observe pincer doucement de ces doigts rugueux ma chevelure devenue légèrement poisseuse par le manque d'hygiène.
- D'accord, il soupire.
- Quoi ?
- Je vous préviens, vous ne sortirez pas de ma maison à moins que je vous accompagne. Vous resterez ici aider mon père pour cuisiner et entretenir le foyer.
Je le regarde avec un espoir en me redressant soudainement, le faisant reculer.
- Mais attention, pas de sortie, pas de bruit, je veux que votre existence soit invisible pour le moment, avant que je vous trouve des alliés pour votre retour.
Je hoche vivement la tête, bien trop heureux pour protester contre ces conditions.
En sortant de la pièce, je m'attarde encore sur le lit au dessus duquel se déployait cette ouverture sur le ciel, ce que remarque le brun rapidement. Il ne bronche cependant pas et descends avec agilité jusqu'au rez-de-chaussée. Je le rejoins en me rappelant que le cuisinier continuait de s'atteler seul, ce qui me fait me sentir coupable.
- Vous allez mieux Taehyung ?, s'inquiète ce dernier.
- Je ne sens pas la douleur, je lui assure joyeusement.
- Vous avez l'air heureux.
- Je le suis !
- Il est heureux de s'enfermer encore une fois dans une demeure, intervient Jungkook d'une voix moqueuse.
Je ne relève pas et nous finissons de préparer le repas. L'après-midi se passe calmement, je découvre sans grand étonnement que la chambre au dessus est celle du propriétaire. Nous nous sommes occupés de déplacer sa bibliothèque à l'étage afin de libérer de l'espace pour placer une couchette supplémentaire pour le père, qui jusqu'alors dormait avec Jungkook. La maisonnette fut alors réaménagée d'ici la fin de la journée de façon à accueillir le père de Jungkook et moi, puisque nous ne savons pas jusqu'à quand nous allions devoir rester chez lui.
Nous avions convenu de placer nos lits en file indienne en dessous de la mezzanine où se trouvait le lit de Jungkook de façon à profiter de la chaleur de la cheminée qui jouxtait la cuisine, mais aussi pour que le brun soit proche de nous pour « garder un œil sur nous », avait-il dit.
Une fois cette nouvelle mise en espace terminée, Jungkook me propose d'aller faire le fameux bain dont m'avait parlé son père le matin. Je le suis vers une petite trappe à côté de la table de cuisine et nous descendons pour nous retrouver au bord de la rivière auprès de laquelle je m'étais attardé pour boire.
Une fois la surprise passée nous enlevâmes nos vêtements et sans plus de procès nous engageâmes dans le courant à demi couvert par la maison de Jungkook. Je grimace face à la sensation glaciale de l'eau de la rivière sur mon corps mais pour ne pas encore une fois passer pour un faible je suis Jungkook vers le milieu, et m'immerge de la tête aux pieds.
Je reste quelques secondes sous l'eau, ressentant la force de l'eau parcourir de façon invisible ce monde silencieux. Cette sensation particulière me détend bien plus que le fait de me laver.
En remontant à la surface, je vois Jungkook qui me tend un savon dont je m'empare avant de le faire mousser entre mes mains et de me l'étaler. Je le repasse au brun qui finit par le poser sur la rive, à quelques mètres. Nous finissons notre tâche silencieusement. Malgré le fait que nous soyons à des lieues d'un quelconque village et que nous soyons à demi cachés par la maison, je sentais le regard du brun furtif, il était sans aucun doute aux aguets.
Ne voulant pas l'attarder dans ce sentiment de danger, je finis rapidement de me laver et nous nous enveloppâmes dans d'épaisses couvertures avant de monter nous réchauffer près de la cheminée où le feu crépitait avec fougue.
Mais c'est en me rhabillant qu'un souvenir me vient de plein fouet. Je revisualise alors l'instant où Père me passe ses effets. Je me souviens de la dague, et de la petite perle qui dorénavant ne quittait plus mon cou. Mais j'étais persuadé qu'il m'avait légué un troisième objet, un objet presque sphérique que j'avais fourré dans la poche de ma veste.
Je me lève alors, et regarde avec précipitation le contenu des poches de ce fameux manteau mais je n'y trouve rien, pas même une petite bille. Je m'empare du vêtement et le rapporte près du foyer afin de bénéficier de plus de lumière, et tourne et retourne dans tous les sens le vêtement, sans rien trouver. Avais-je donc rêvé ?
C'est en examinant davantage la couture d'une poche que mon cœur ratte un battement. Sur toute la tranche inférieure de la poche les fils avaient été décousus, créant un trou béant dans celle-ci.
L'objet que mon père m'avait confié étaient perdu.
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