|7| Partners in crime
Qu'on le sorte de là, vite. Ses nerfs étaient sur le point de lâcher, sa patience était à bout. Passer quatre heures sur le terrain avec Dazai n'était pas des plus facile. Le brun lui tapait sur le système et il se vénérait presque pour avoir tenu si longtemps ! Entre les piques, chansons et autres gamineries, Chuuya était sur le point de craquer mais la voix de Mori retentissait toujours dans sa petite tête chapeautée.
« Ne vous faites pas remarquer, ne vous disputez pas et détruisez-moi cette organisation », avait-il dit, son éternel sourire narquois collé sur les lèvres. Clair, concis, piquant, comme toujours.
Plus facile à dire qu'à faire ! Si seulement leur boss avait déjà fait équipe avec Dazai, il aurait compris que ce nom était loin d'être synonyme de calme et discrétion. Le garçon au visage bandé entama le deuxième couplet de l'une de ses chansons morbides, écorchant au passage les oreilles du pauvre Chuuya. Un sourire franchit la barrière de ses lèvres quant à sa réplique future et il se prépara mentalement à rembarrer Dazai.
« Tu veux pas la fermer bordel ?! », bon il devait bien avouer que ce n'était pas des plus original mais il n'avait que ça en stock. En même temps, l'originalité n'était pas éternelle...
« Oh Chibiii, tu t'ennuierais sans moi, répondit le brun théâtralement.
– Je t'en foutrai de l'ennuie", marmonna le rouquin en se renfrognant.
Un large sourire étira les lèvres du brunet. Ce qu'il aimait mettre son petit partenaire en rogne ! C'était probablement un de ses passe-temps préférés, en très grande partie grâce à la réaction du chapeauté. Il devenait A-D-O-R-A-B-L-E ! Ses petites joues viraient au rouge écarlate, ses sourcils se fronçaient et ses fines mains se serraient pour former un poing aux jointures blanches. Tous ces petits détails étaient un régal pour ses yeux ambrés – bien que l'un soit légèrement obscurci par la bande blanche qui reposait dessus.
Perdu dans ses pensées, Osamu ne remarqua pas le subit arrêt de son cher porte-chapeau et lui rentra dedans. La collision les fit presque tomber au sol mais ils retrouvèrent leur équilibre à temps et Chuuya maudit la déchéance d'un homme sans laquelle il n'aurait pas été à deux doigts de se retrouver les quatre fers en l'air.
« Ma limace, je sais que ma beauté est incommensurable mais tu n'as pas besoin de t'arrêter pour m'admirer tu sais, tu en auras tout le temps en rentrant ! sourit le brun tandis que l'autre piquait un fard.
– Tu veux pas te taire pour une fois ? On arrive sur le terrain ennemi là, grogna ladite limace, les joues virant au rouge écrevisse.
– Mais l'ambiance est glauque sinon ! », s'insurgea-t-il plus que de raison.
Chuuya devait reconnaître qu'il n'avait pas entièrement tort. A dire vrai, en occultant leur présence, les seuls sons alentours provenaient du vent qui bruissait dans les feuilles jaunies d'arbres à moitié morts. Sans oublier la météo du jour qui n'était pas des plus encourageantes. Au loin le tonnerre grondait et son cortège de nuages noirs ne demandait qu'à éclater en un orage défiant toute autre loi de la nature.
L'automne était une saison des plus fascinantes : ni complètement chaude, ni complètement froide. Prête à chasser d'un coup de main l'été mais remplaçant l'hiver le plus longtemps possible. Un parfait intermédiaire plein de puissance qui rappelait toujours à Dazai les cheveux et le tempérament de feu de son compagnon.
Leur attention fut soudain attirée par un claquement sourd face à eux. Ils posèrent leurs yeux sur la porte de bois qui servait d'entrée à l'ancienne église de pierre face à eux. Le lierre semblait à la fois l'étouffer et la sublimer. Jamais le temps n'avait laissé de si bel endroit intact – esthétiquement parlant. Leur objectif premier leur revint tout de suite en mémoire : trouver l'organisation des fleurs du mal, Charles Baudelaire et les réduire tous deux à néant.
« T'es prêt ? interrogea Chuuya.
– Pour toi ? Toujours ma limace~ »
Le rouquin leva les yeux au ciel, désespéré, et fit signe à son homologue de le suivre en silence. Ils pénétrèrent dans la bâtisse délabrée et se mirent dos à dos, tendus. Ils parcoururent du regard le cœur de l'église. Personne. Le silence complet, même le vent s'était tu. Ils se séparèrent lentement, légèrement à contre-coeur, les sens toujours aux aguets. Ils échangèrent un signe de tête et, d'un commun accord, décidèrent que Chuuya irait explorer l'étage supérieur. Il se dirigea jusqu'à l'escalier de pierre qui l'attendait dans un coin et adressa un dernier regard à Dazai.
Chacun de ses pas faisait écho au précédent, amplifiant le sentiment d'oppression qui avait pris place dans sa poitrine. Ça faisait longtemps qu'il n'avait pas eu peur. Oh, évidemment ce n'était pas pour lui, sa vie importait assez peu dans l'immensité de l'univers mais celle d'Osamu était précieuse. Probablement plus précieuse que n'importe quel joyau, tout simplement parce qu'il avait su briser la protection de diamant qui recouvrait son cœur. Mori le lui avait dit ; seul un diamant pouvait en polir un autre.
Les pas de cette autre pierre translucide résonnaient sous lui, allégeant le poids sur ses épaules. Il n'était pas seul. Il le savait et c'était sûrement sa plus grande source de motivation, telle une injection d'adrénaline pure dans ses veines. Son cœur, sa respiration, ses pas, tout se calait sur le rythme que tenait le brun en bas, créant une harmonie et une symbiose qui n'avait que rarement eu de pareille. Cette mélodie s'élevait puissamment, réveillant un écho endormi depuis longtemps. Ce n'était plus leurs jambes ou consciences qui les portaient mais bien cette force qui les liait l'un à l'autre.
Une telle force qu'ils ne semblaient faire plus qu'un. Rien ne pouvait les couper dans leur élan si bien qu'église, automne, orage, partenariat, tout tomba dans les confins de leurs esprits. Tout cela n'avait plus grande importance, le seul repère qu'ils pouvaient capter étant l'aura que dégageait leur homologue respectif. Ils avaient créé une bulle autour d'eux et de la bâtisse, occultant tout autre détail superflu.
Chuuya approcha finalement d'un grand orgue et fit courir ses doigts dessus, poursuivant la cadence installée auparavant. Ses mains se mouvaient seules, expression de vieux souvenirs flous dus à un lointain apprentissage. Pourquoi cette mélodie était-elle si importante alors même qu'il ne savait plus quelle note il avait frappée l'instant d'avant ? Do ? Ré ? Pourquoi se rappeler et réfléchir alors que son âme avait pris les commandes de son corps ? Il n'était animé que par leur mélodie.
Un grand fracas retentit à l'étage inférieur en même temps que dans le cœur du rouquin, rompant l'équilibre installé ces dernières secondes. Dazai. Il se passait quelque chose. En une fraction de secondes, ses doigts fins quittèrent le clavier et il dévala l'escalier de pierre pour retrouver son compagnon d'aventure.
Lorsqu'il posa un pied sur la dernière marche, il les vit. Deux hommes, deux oxymores, qui entouraient son partenaire. L'un était plus du genre armoire à glace, ses cheveux coupés court durcissant plus encore les traits de son visage coupés au couteau. Ses petits yeux noirs étaient enfoncés dans leurs orbites et brillaient d'un éclat sauvage, animal. Son acolyte, quant à lui, se rapprochait plus de la fragile brindille que de l'imposant gorille et pourtant, malgré ses bras de l'épaisseur d'un manche à balais, ses yeux clairs brillaient du même éclat farouche que ceux de l'autre.
« Dazai ! » s'écria-t-il, son pied droit touchant enfin le sol carrelé, sans avoir pu retenir son apostrophe.
L'interpellé tourna la tête vers lui et leurs pupilles ne se croisèrent qu'un millième de secondes alors que le garçon aux bandages se reconcentra sur sa confrontation, le sourire aux lèvres. Chuuya, lui, était horrifié. Comment son partenaire pouvait-il sourire ? Son regard lui avait expressément commandé de ne pas avancer et, bien sûr, le rouquin respectait cette demande ; il en allait de l'honneur du brun. Cependant il ne pouvait empêcher ses pieds de bouger imperceptiblement pour s'approcher de lui. Il ne voulait pas le laisser, et avec raison.
Tout se passa très vite. Le mastodonte claqua son poing de la taille d'un fer à repasser sur la tête brune qui dodelina quelques instants puis tout le corps d'Osamu sembla se liquéfier et il tomba, inconscient, sur le sol froid et rugueux. Le sang de Chuuya se glaça tandis que les deux hommes emmenaient – « tiraient » aurait été plus adapté à la situation actuelle – le corps inerte de Dazai jusqu'à une petite trappe du sol. Ils étaient très probablement entrés par là, de ce fait cette ouverture devait mener jusqu'à l'homme qu'ils recherchaient depuis un moment.
Lorsque les dernières boucles châtains de leur opposant le plus frêle disparu, Chuuya approcha du trou noir et le fixa. Un véritable combat se jouait en lui, opposant cœur et raison. La voix de Mori retentit à nouveau dans sa mémoire :
« Si vous venez à être séparés, rentrez immédiatement. » avait-il dit pour conclure ses instructions le matin-même.
Au diable Mori ! Un accès de courage envahit sa poitrine et il bondit dans le trou. Car ils étaient le double noir, partenaires de coeurs, partenaires dans la nuit mais surtout partenaires de crime.
Fin
***
Bonjour bonjour, j'ai conscience que ça fait longtemps haha (3 ans déjà...) et que ce jour-ci sort tard mais je voulais vous le poster avant de disparaître un moment ^^ <3
Je vous rassure, les autres sont toujours dans mes brouillons et j'y travaille toujours même si c'est assez long haha qui sait, un jour ils verront peut-être le jour !
Portez vous bien, des bisous !!
Reya <3
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