Chapitre 6
KALHAN
— Elle est dans sa chambre, demandé-je a Clever, à peine ai-je franchi la porte d'entrée.
Il répond d'un signe de tête, la bouche pleine.
— Ou veux-tu qu'elle soit, ironise-t-il en terminant sa bouchée de pâtes.
J'enlève ma veste en cuir.
— Tu l'as installée dans quelle chambre ?
— Dans celle adjacente à la tienne, lâche-t-il, son attention rivée dans son assiette.
Je le dévisage sans relâche. Il croise mon regard alors qu'il enfourne une énième bouchée de pâtes.
— Je me suis dit que c'était plus judicieux pour pouvoir garder un œil sur elle, hausse-t-il les épaule.
— Je veux qu'elle change de chambre. Immédiatement Clever, ordonné-je.
Clever lève les yeux au ciel.
— C'est la chambre la mieux isolée de celle qu'il reste. Elle risque de crevé de froid si elle change.
— Je n'en ai rien à foutre, ce n'est pas un hôtel, elle se contentera de ce qu'elle aura, protesté-je.
Clever se lève brusquement et débarrasse son assiette, agacé.
— Tu crois qu'elle a envie d'être ici ? Sérieusement Kalhan, du jour au lendemain, elle se retrouve avec deux types qu'elle ne connaît pas, a fait face à un mec complètement taré, et dormait à même le sol, énonce-t-il sur les nerfs.
— Nous ne l'avons pas décidé non plus. On se retrouve avec cette mission sur les bras, sans savoir ce que ça implique réellement, grogné-je.
— C'est vrai, on ne sait pas, mais elle, elle ne sait rien non plus. Elle m'a redemandé ce qu'elle faisait ici...
— Tu ne lui a rien dit, pas vrai, le questionné-je.
— Non, rien, souffle-t-il.
Il se munit de sa veste et de son arme à feu avant de se planter devant l'entrée.
— Tu peux rester dormir ici, proposé-je.
Il secoue négativement la tête.
— Non, merci. Je préfère pioncer chez moi ce soir.
Il déverrouille la porte, et suspend tout à coup son geste. Je fronce les sourcils en constatant qu'il est sur ses gardes.
— Va chercher May-Ly, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond, m'informe-t-il.
Je ne cherche pas plus longtemps avant de monter les escaliers deux par deux. Je ne prends même pas la peine de toquer à la porte de sa chambre avant d'entrer. Plantée devant la fenêtre, elle se tourne vivement dans ma direction.
— Éloigne-toi de la fenêtre, et descend, lui ordonné-je.
Elle fronce les sourcils, mais ne cherche pas à comprendre avant de rejoindre Clever en bas. Je jette un coup d'œil par la fenêtre, et constate que deux voitures tourne en rond autour de la maison.
— Kalhan, il faut y aller, annonce Clever en bas.
Je descends, tandis que l'angoisse grimpe progressivement sans que je puisse la contrôler.
— On passe par la porte du garage, ce sera plus prudent, indique Clever.
— Que se passe-t-il, s'inquiète May-Ly.
Personne ne lui répond, bien trop occupé à veiller sur sa sécurité.
— Monte, lui décrété-je en ouvrant la portière passagère.
— Je vous suis à moto, déclare Clever. Je pourrais vous couvrir plus facilement.
Ma respiration s'accélère, mon rythme cardiaque s'enflamme.
— Concentre-toi sur la route, Kalhan le reste, je m'en charge, tempère-t-il, une main sur mon épaule.
Je referme la portière lorsque May-Ly est à l'intérieur. Je prends le contrôle du volant, alors que Clever fait vrombir le moteur de sa moto.
— Pourquoi est-ce qu'on s'en va ? On va où, s'affole May-Ly.
Incapable de lui donner ne serait-ce qu'une réponse, j'appuie sur l'accélérateur sans réfléchir et fonce sur la chaussée. Clever nous suit de près.
— Kalhan ?
Sa voix angoissée ne me parvient qu'en arrière-plan, comme si je ne traitais que les informations les plus importantes. Comme si je ne m'autorisais aucune distraction, uniquement préoccupé par la route.
Des coups de feu retentissent à l'arrière. Ni une ni deux, je jette un œil dans le rétroviseur, en direction de Clever. Il n'est pas touché, mais sa moto slalom, il a dû craindre les coups de feu, et perdre le contrôle du guidon.
Il accélère pour se retrouver à nos côtes puis fait un signe de la main, pour nous indiquer qu'il passe devant, afin de nous assurer l'accès. Je lui réponds d'un bref hochement de la tête. May-Ly est agitée à mes côtés, j'ai comme l'impression d'absorber toute sa nervosité.
De nouveau coups de feu retentissent alors qu'on redouble de vitesse en escomptant pouvoir semer ces types qui nous coursent.
Mes membres tremblent, mes sens se multiplient. Mes yeux alternent entre les rétroviseurs et la voie face à moi.
Une voiture nous fait soudainement front, je prépare mon pied à presser le frein. Clever ralentis lui aussi, mais la vitesse de sa moto est bien trop puissante pour être arrêtée à temps.
La bagnole face à nous se met en travers de la route, s'arrête et le conducteur sourit. Un sourire qui n'augure rien de bon.
Clever n'a pas le temps d'anticiper, sa moto est projetée par-dessus la voiture noire. May-Ly étouffe un cri entre ses doigts. Je n'ai le temps de rien, j'arrête simplement ma caisse à quelques mètres de celle en face de nous.
Je ne suis plus que l'ombre de moi-même.
Je ne suis plus Kalhan.
Je ne suis que son enveloppe corporelle.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro