Chapitre 47 - Amis
Retenant son souffle, Hermione se pressa contre le mur, priant pour qu'Orron ne décide pas de siffler. Draco, Crabbe et Goyle étaient si proches qu'elle pouvait entendre le froissement de leurs capes. Ne pas bouger était probablement sa meilleure option ; ils n'allaient pas rester là et risquer d'être surpris par un professeur hors du dortoir.
— Elle est où ?
C'était Crabbe.
— De qui est-ce que tu parles ? répondit Draco d'un ton sec.
Mais sa voix était crispée.
— C'est ça. Tout le monde s'est aperçu que tu laissais le trio tranquille. Apparemment tu as même invité la Sang-de-Bourbe chez toi. C'est ta copine ? C'est pour la rejoindre que tu as disparu ce soir ?
Hermione reçut un coup de bec et s'obligea à détendre ses mains pour ne pas trop comprimer Orron. Ils en savaient bien trop. Les parents de Draco avaient parlé, mais dans quel but ? Elle doutait qu'une information aussi grave leur ait échappé pendant une soirée thé et biscuits avec d'autres parents, alors était-ce pour que les autres Serpentards surveillent leur fils ?
— Tu suggères que je suis intéressé par une Sang-de-Bourbe, Crabbe ? Non seulement ça, mais que je serais assez stupide pour la ramener sous le nez de mes parents ? Aucun de vos brillants cerveaux n'a pensé que j'avais une raison ?
— Une raison ?
— C'est exactement pour ça que je ne partage pas mes plans avec vous. Je savais que son retour était imminent. J'ai fait en sorte de lui préparer le terrain.
— En bécotant la Sang-de-Bourbe ?
— En infiltrant une taupe dans leur petit groupe.
Sa phrase fut suivie du froissement d'un parchemin.
— Une taupe ? C'est du papier, dit Goyle.
— Remarquable sens de l'observation. Vous vous souvenez du devoir que j'ai découvert à la bibliothèque ? Il appartenait à Granger.
Il y eut un silence.
— Quel devoir ?
— Un parchemin, abandonné, qui parlait d'une potion.
Le silence se prolongea.
— Peu importe. Les notes dessus décrivaient comment transformer un parchemin en un outil de communication. J'ai compris que l'ingrédient manquant se trouvait dans la forêt interdite, c'est pour ça que je vous ai demandé de m'y suivre, je voulais les surprendre.
— Ça je m'en souviens.
Derrière l'armure, Hermione grinça des dents. Elle aussi avait un souvenir très net de Crabbe et Goyle qui détalaient comme des lapins hors de la forêt interdite en abandonnant Draco à son sort.
— Dans ce cas vous devez aussi vous souvenir des acromentules. Il s'agissait de leur venin. J'ai travaillé toute l'année à infiltrer leurs échanges.
— Ça n'explique pas ce que l'autre Sang-de-Bourbe faisait chez toi.
— Les notes n'étaient pas complètes, alors aucune de mes premières tentatives n'a fonctionné. Il me fallait travailler sur un échantillon des leurs et Granger était la plus facile à berner, mais ce n'est qu'en l'amenant chez moi que j'ai réussi à l'isoler assez pour qu'elle soit obligée de sortir ce maudit parchemin. Ensuite il ne me restait plus qu'à l'étudier et le reproduire.
— Et ce soir ?
Il y eut un froissement de papier.
— J'ai lu qu'ils partaient à la recherche de venin pour créer un nouveau de réseau de parchemins pour l'Ordre du Phénix. Il faut le venin de la même araignée pour pouvoir infiltrer le réseau donc je devais en prélever aussi.
— L'Ordre du Phénix ?
— C'est la résistance que le vieux Dumby a montée. Une information de plus que les espionner m'a apporté.
— Ou de les fréquenter, dit Crabbe avec un sourire entendu dans la voix.
Tout était vrai, à l'exception près qu'au lieu de venin d'acromentule, il s'agissait de plumes de Vivet. S'ils demandait à voir le venin qu'il était supposé avoir prélevé... Le Vivet choisit ce moment pour pousser un sifflement. Le son aigu résonna dans tout le hall. Après tout ce que Draco avait fait pour masquer son existence... Le cœur au bord des lèvres, Hermione le prit en coupe dans ses mains puis le fit glisser sur l'épaule de l'armure. Il y fit deux bonds avant que Draco ne le siffle à son tour et s'envola pour le rejoindre.
— C'est quoi ça...
— Un petit trophée, mentit Draco. Il était coincé dans une toile. C'est l'oiseau qui servait de Vif d'or dans les premiers matchs de Quidditch. Je comptais m'en servir pour m'entrainer.
Goyle eut un rire.
— Pas sûr que ça serve.
Il y eut un bruit de pas, un unique, venant dans sa direction.
— Reste là, Crabbe, je n'ai pas fini, dit Draco.
Les mains moites, Hermione comprit qu'ils voulaient vérifier d'où venait le Vivet. Qu'est-ce qui pouvait les distraire ? Elle les voyait, la stature imposante de Crabbe et Goyle face à Draco qui tenait le parchemin pour seule arme... Le parchemin ! Elle glissa ses doigts tremblants dans la poche de sa veste et en ressortit son propre morceau ainsi que la plume minuscule. Tordue pour s'appuyer contre le mur, elle inscrivit « C'est bon Ron, j'ai trouvé Hermione. ».
— Quelque chose s'est écrit ! s'exclama Goyle.
— Oui, ils s'en servent pour communiquer, c'est ce que je me tue à vous dire.
— Attends, il va répondre ?
Hermione s'appliqua à tracer, dans l'écriture brouillonne de Ron, « OK je vous rejoins au château ».
— Ils arrivent, dit Goyle.
— On ferait mieux de partir, répondit Draco.
Leurs voix commencèrent enfin à s'éloigner.
— Ne vous avisez pas de parler de ce que je vous ai dit à qui que ce soit, ajouta-t-il.
Hermione resta dissimulée encore de longues minutes avant de sortir de derrière l'armure et regagner la tour de Gryffondor. Dans un mélange de joie et d'angoisse où chacun des deux ne cessait de prendre le dessus sur l'autre, elle atteint enfin le portrait de la grosse dame. Celle-ci s'était endormie, une flûte de champagne à la main.
— Mimbulus Mimbletonia ? tenta-t-elle à voix basse.
La grosse dame ne réagit pas. Même si Draco l'aimait assez pour désirer une relation secrète avec elle, l'altercation avec Crabbe et Goyle n'allait-elle pas le refroidir ? Des soupçons pesaient déjà sur lui, sortir avec elle lui ferait courir beaucoup de risques. Un mouvement sur le parchemin qu'elle tenait toujours à la main attira son attention.
« Tu peux me remercier, Crabbe et Goyle sont sous contrôle. »
« De rien, Draco, je suis heureuse que ma formidable intervention ait pu t'aider. Tout ira bien pour Orron ? »
« Pas besoin de t'inquiéter pour lui, personne n'oserait toucher une plume de quelque chose qui m'appartient. »
Elle sourit, soulagée, et se racla la gorge. La grosse dame entrouvrit enfin un œil puis pivota de mauvaise grâce au mot de passe. Hermione retrouva la salle commune silencieuse, les yeux fixés sur le papier.
« Je dois aller prendre la température auprès des autres Serpentards, va savoir ce que ces idiots sont allés raconter. Surtout, ne pense pas trop à moi. »
Elle s'arrêta sur une table pour répondre.
« Oh ? »
Après avoir pesé un instant comment formuler la suite, elle ajouta : « Tu ne disais pas ça avant. En plus le lien n'existe plus, je ne vois vraiment pas en quoi ça pourrait te déranger. »
« Tu serais capable de dire que c'est ma faute si tu n'arrives pas à te concentrer demain. »
« Ne dis pas de bêtise, je ne suis jamais trop fatiguée pour me concentrer. »
« Très bien alors, je t'autorise à penser à moi. »
Elle pouvait presque entendre son ton moqueur.
« C'est ça oui, Draco. Et fais attention, avec les Serpentards. »
Un sourire flottant sur ses lèvres, elle releva la plume, et un raclement de gorge éclata sa bulle. Enfoncée dans un fauteuil près de la cheminée, Ginny l'observait, un air narquois sur la figure. Elles étaient seules dans la salle commune.
— Alooors ce rendez-vous ?
L'envie de tout lui raconter se heurta à l'habitude qu'ils avaient pris de tout dissimuler.
— Je ne... je suis sortie dans l'intention de libérer le Vivet, se défendit Hermione. Je ne lui ai même pas demandé de venir.
— Mais il est venu, pas vrai ?
Elle mourrait d'envie de tout lui confier. Les mots se pressaient déjà à ses lèvres. Elle les ravala.
— Il m'a attendue, admit-elle en approchant de la cheminée pour pouvoir baisser la voix.
— Et ?
— Il m'a accompagnée.
— Et ?
— Il m'a...
Le mot « embrassée » semblait encore trop fou pour être prononcé. La sensation du baiser, le froid du lac, leur conversation resurgirent d'eux-mêmes et elle eut beaucoup de mal à cacher l'euphorie qui s'empara d'elle. Ginny écarquilla les yeux.
— Mais non ! s'exclama-t-elle d'un ton bas. Pour de vrai ?
Dans son fauteuil, elle entama une petite danse de victoire.
— Oh là là c'est génial ! Il a pris les devants beaucoup plus vite que je ne l'imaginais. Comment tu te sens ? Heureuse ? Tu dois te sentir un peu perdue aussi, j'imagine ?
Son enthousiasme abattit ses dernières réticences et Hermione lui avoua tout, y compris la conversation qui avait suivi le baiser, avec la promesse que Ginny n'en parlerait à personne. Celle-ci la serra dans ses bras et la bombarda de questions quand elle s'assit enfin à côté d'elle, les jambes en compote comme si elle venait de tout revivre une seconde fois. Puis l'excitation retomba pour laisser place à un air pensif.
— Ginny ?
— Oh, pardon. Je me demandais comment vous alliez réussir à garder ça secret. Il a suffit de très peu de choses pour que Crabbe et Goyle le soupçonnent, non ?
Hermione se perdit dans les flammes. Crabbe et Goyle avaient rendu ce problème très réel très vite. La jolie idée qu'ils affronteraient tout à deux était fausse ; si quoique ce soit révélait leur relation au grand jour elle risquait fort de le perdre, mais elle voulait lui faire confiance, malgré tout.
༻ ───── ☾✧☽ ───── ༺
Bon, on est clairement pas sur les mêmes "amis"..
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro