2. Espoir
La Terre avait tremblé. J'en étais persuadée et le monde entier aussi. Maintenant allongée sur mon lit à cause de la secousse, je regardais à travers la fenêtre essayant de trouver un ou des indices dévoilant ce que je redoutais depuis plus de deux ans.
La fin du monde.
Mon père, un scientifique plutôt vieux, possédant un crâne sans cheveux et des lunettes tombant sur son nez, était arrivé, un jour, en hurlant des paroles incompréhensibles, à un discours politique à la télé, pétrifiant le président et les spectateurs.
C'était lui qui avait déclaré que ses calculs étaient exacts.
C'était lui que personne ne croyait.
Et, au final, c'était lui qui avait raison ; la Terre allait disparaître.
Un nouveau tremblement de terre survint, et j'entendis de la vaisselle se briser. Vinrent ensuite les jurons de ma mère accompagnés de ses soupirs bruyants.
Mes yeux se posèrent machinalement sur un bout de carton épinglé à mon mur. Je le connaissais sur le bout des doigts, le lisant plus de trois fois par jour depuis que mon père me l'avait donné. Son écriture penchée et presque illisible m'était très familière, ce qui faisait que je la déchiffrais sans difficultés.
À retenir :
1) Tremblements de terre
2) Tsunamis
3) Tornades
4) Explosion de la Terre
Ne jamais oublier : croire en la vie. L'espoir est plus puissant que n'importe quoi d'autre.
L'espoir... Une étincelle qui paraissait être un rêve à présent. Mais j'y croyais, je me disais que j'allais m'en sortir et j'espérais aussi fort que possible un miracle.
Je ne savais toujours pas pourquoi la Terre allait disparaître et comment ces événements pouvaient se produire comme ça, tout d'un coup. Je ne connaissais toujours pas les réponses à mes questions et je détestais ça. De plus, même mon père ne pouvait m'aider...
Il est décédé d'une crise cardiaque alors qu'il n'avait que 53 ans.
Et maintenant, je suis destinée à mourir ou à m'échapper de cette Terre sur le point de s'effacer.
— Fiona, c'est l'heure !
La voix de ma mère retentit à mes oreilles, me sortant de mon espèce de transe. Le gouvernement avait mis au point des espèces de fusées capables de nous transporter loin de cette catastrophe pour nous déposer sur une autre planète et nous devions aller les prendre.
2456 ; la fin de ma vie normale.
Me relevant brusquement, je jetai un dernier regard à ma chambre. Pièce toute simple aux murs bleu ciel, remplie d'un lit rectangulaire en lévitation à 20 cm du sol, d'un bureau circulaire trônant au milieu du parquet et d'une armoire noire à panneaux coulissants dotée d'un dispositif holographique qui projette mes habits, les souvenirs revinrent en force, menaçant de faire couler quelques larmes.
Je me ressaisis presque aussitôt, n'ayant aucune envie de mourir ici, puis saisis ma valise posée sur le parquet. Après avoir jeté un dernier regard à la pièce qui m'a toujours servie de nid douillet, je me retournai et descendis les escaliers pour rejoindre ma mère déjà dehors, dans notre voiture volante.
*
La route ne fut pas très longue. En quelques minutes, nous étions arrivées au hangar à fusées. Une foule de personnes en tous genres attendait tout autour du bâtiment, pressée de s'enfuir de cette bombe à retardement, pressée d'entendre leur nom traverser les lèvres du contrôleur.
Au moment où nous sortîmes de notre moyen de transport, une sonnerie venant de mon poignet retentit. Je baissai la tête vers ma montre haute technologie équipée d'un écran tactile et d'un projecteur holographique et appuyai sur le bouton rouge qui clignotait. Les écritures s'affichant me glacèrent jusqu'au sang.
Flash spécial /!\
On a signalé des tsunamis et des tornades se déclenchant un peu partout dans le monde.
Le nombre de blessés n'a pas encore été donné mais sachez qu'il vous faut à tout prix partir d'ici, sous peine d'une mort atroce.
Rendez-vous au hangar le plus proche de chez vous le plus vite possible. Nous espérons avoir plus de vivants que de morts.
Garry G. directeur du réseau d'informations international.
La fin approchait. Les files diminuaient petit à petit, laissant apparaître, malgré moi, un sourire sur mon visage. Je commençai alors à regarder les innombrables immeubles faisant partis de ma vie depuis toujours.
Une tape sur l'épaule me fit sursauter. C'était à nous. Ma mère prit mon bras et nous marchâmes jusqu'à un homme placé juste devant une fusée. Il lui posa quelques questions, questions que je n'entendis pas, perdue dans mes pensées.
— Départ de la fusée 234 ! Départ de la fusée 234 !
Quand la voix du contrôleur me parvint, elle me sembla lointaine. J'étais comme en plein rêve : je n'avais pas l'impression d'être vraiment à l'endroit où j'étais, coincée dans une bulle invisible.
Je fis quelques pas en avant et gravis l'échelle en fer. Cinq fauteuils attendaient, trois déjà occupés par des femmes. On s'installa sur ceux qui restaient et je fermai les yeux.
Un grondement sourd résonna, prouvant la mise en marche des réacteurs puis la fusée commença à voler et traversa le plafond grâce à une trappe ouverte juste à temps.
Nous étions enfin partis. Nous avions gagnés.
J'avais envie de hurler de joie tellement j'étais heureuse !
Je soupirai et ouvris les yeux. Subjuguée par la vue du ciel que l'on pouvait apercevoir par les fenêtres carrés disposées aux quatre coins de l'appareil rectangulaire, je ne fis pas attention à la détonation retentissant plus bas.
Soudain, la fusée émit un sifflement aigu tandis qu'un choc brusque fit tomber les passagers hors de leur fauteuil.
— Qu'est-ce qu'il se passe ? lança une femme à la chevelure blonde.
Je ne pus pas répondre que, déjà, un nouveau choc ébranla l'appareil qui commença à perdre de l'altitude. C'est vrai cela, que se passait-il ?
La réponse arriva immédiatement. Un hologramme de jeune homme apparut en plein milieu de notre transport et articula des mots presque inaudibles, accompagnés de grésillements très désagréables :
— Fin du... Attention ! Blessés... Morts... Explosions... !
Il disparut instantanément et je compris ce qu'il se passait ; la Terre avait commencé à exploser. Les autres comprirent également et se mirent à paniquer.
Des larmes salées commencèrent à couler le long de mes joues. J'espérais la victoire, j'espérais la vie !
La fusée explosa en un horrible bruit semblable à un coup de canon. Je me retrouvai éjectée, sans savoir où j'étais, d'innombrables douleurs partout et mes oreilles percevant des cris de terreur.
J'ai tout de suite su que c'était la fin. Tout était terminé, pour de bon.
Je m'appelais Fiona, j'avais 16 ans et je suis morte le 3 septembre 2456 lors de la fin du monde.
En ce jour, même l'espoir ne m'avait pas sauvée.
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