Chapitre 2 : Troubles
La nuit était tombée et je m'apprêtais à faire mon sac pour le lendemain matin quand le vent se mit à souffler violemment. Je sursautais au bruit énorme que fit mon volet en claquant contre le mur de la maison. Posant le livre de français sur mon bureau je me dirigeais vers la fenêtre afin de fermer le volet. Une bourrasque entra dans ma chambre et souffla les feuilles que j'avais soigneusement triées sur mon bureau. Je grognais et fermais le premier volet quand quelque chose attira mon attention. La forêt, sur laquelle donnait directement ma chambre, charriait l'odeur ténue des pins. Une ombre dans un bosquet traversa mon champ de vision. Probablement un animal. Je ne pus cependant réprimer un frisson, sans savoir si c'était le vent froid ou cette étrange sensation d'insécurité. Je refermai brusquement ma fenêtre et ramassai les feuilles éparpillées.
***
Le lendemain soir je rentrais en compagnie de Codd comme à notre habitude. Aujourd'hui aussi avait été un jour agité, les rumeurs ne tarissaient pas. Nous stoppâmes soudain devant un groupe de six jeunes, dont le karatéka d'hier. Et à voir leurs têtes ils n'avaient pas l'intention d'êtres sympathiques. Ils nous coincèrent dans une petite ruelle sombre, pour être sûrs que personne n'interviendrait. Tous devaient êtres plus âgés que nous, à l'exception d'un, bien évidemment. La situation était mauvaise, très mauvaise. Je jetai un œil vers Codd, qui n'en menait pas large, ce qui étais justifié. Je ne l'avais jamais vu se battre, après tout. Et nos adversaires étaient non seulement plus imposants physiquement mais sûrement aussi au niveau de leur technique, s'ils étaient amis avec le karatéka. Il n'y avait pas d'issues.
Le plus âgé du groupe, probablement 18 ou 19 ans, s'approcha de moi avec un sourire en coin. Codd recula d'un pas.
- Alors il parait que c'est toi qui a cherché des problèmes avec notre petit Malts ?
- En effet, qu'est ce que vous voulez ?
Question stupide. Mon corps se raidit en voyant son poing voler dans ma direction. Rapide ! J'eus à peine le temps de couvrir mon visage de mes bras que son coup m'envoya voler un peu plus loin. Je me relevai encore un peu sonné, les bras engourdis. Un sourire mauvais barrait le visage de l'aîné de Malts.
- Je me demande ce que tu vas encore pouvoir encaisser, gamin !
- Arrêtez !
La voix de Codd résonna dans la ruelle étroite. Tous les regards convergèrent vers lui. Il bredouilla, un peu gêné d'avoir crié sur un coup de tête.
- Je veux dire, c'est Malts qui a commencé en agressant cette fille au lycée... Terry a juste voulu la protéger...
Je doutais fort que les arguments de mon ami allaient fonctionner contre des lâches obligés de venir à six pour battre un gamin comme moi, mais j'admirais le courage de Codd, qui est d'habitude celui qui regarde de loin et ne se mêle pas de mes combats. Un silence pesant tomba. Toute trace de sourire avait disparu du visage de mon agresseur. Il toisa Codd d'un regard dur.
- Bouge de là, moucheron, j'ai une affaire à régler avec ce type là-bas !
- ...
- T'attends quoi, le déluge ?
Le jeune homme commençait à perdre patience. Il serra son poing et le leva, mon ami ferma les yeux, prêt à encaisser. Il sursauta quand le poing de l'adversaire s'écrasa dans le mur, le frôlant. J'avais réagi au quart de tour et mon pied cogna la tête de l'agresseur, qui bougea à peine et m'envoya valdinguer quelques mètres plus loin en riant.
- Tiens toi à carreaux, gamin, où je ne donne pas cher de la peau du rouquin !
Je tentais de me relever lamentablement. Ma tête tournait et me faisait mal, elle avait heurté le béton plutôt violemment.
Je remarquai cependant que quelque chose dans l'air avait changé. Mes yeux rencontrèrent ceux de Codd, qui ne faisait pas attention à moi. Ils étaient remplis de haine, d'une lueur bestiale. L'attitude soudainement agressive de mon ami si pacifique me choqua. Le jeune homme le sentit également et hésita. Codd prit la parole d'une voix plus grave que d'habitude, voilée par la rage.
- Vous n'êtes qu'une bande ce chiens galeux, incapables de faire quoi que ce soit seuls, sinon vous fuiriez la queue entre les jambes.
L'agresseur reprit de la contenance à l'annonce de cette phrase et frappa. Je m'évanouis au même moment.
Je me réveillais quelques heures plus tard, un bandage autour du front, essayant de reprendre mes repères. Je tentais de me relever quand une douleur lancinante me vrilla la tête et m'obligea à rester allonger. Je reconnu le plafond de ma chambre. Je restai longtemps dans cette position, jusqu'à ce que j'entende les pas de ma mère faisant craquer les marches de l'escalier. Elle entra dans ma chambre et parut surprise que je sois réveillé. Un sourire éclaira cependant son visage.
- Terry ! Tu es réveillé ! J'ai eu tellement peur !
- Que... qu'est ce qu'il s'est passé ?
- Tu ne te souviens pas ? Codd t'a porté jusqu'ici en disant que tu t'étais encore battu !
- Ah... Et il allait bien ?
Ma mère parut décontenancé par ma question.
- Et bien oui... Je pense, il avait du sang sur ses vêtements alors je lui ai proposé de l'examiner mais il a refusé en répliquant que ce n'était pas le sien...
Pas le sien ? C'était impossible que ce soit le mien, je ne saignait pas assez pour cela. Mais alors...? Il me semble que j'allais devoir lui demander des explications quand je le reverrais.
***
Une semaine s'était écoulée et cela faisait maintenant trois jours que j'étais retourné au lycée et pas le moindre signe de Codd. Il ne répondait pas non plus aux messages que je lui avais envoyés, et je commençais sérieusement à m'inquiéter. Les cours finissaient à 12h30 aujourd'hui, je passerais le voir après le repas.
L'angoisse me prit au moment où je pressai le bouton de la sonnette de la maison de mon ami. Ce fut son père qui m'ouvrit.
- Oui...? Oh, c'est toi Terry !
- Bonjour... Codd est là ?
Il parut gêné.
- Oui mais... Il s'est enfermé dans sa chambre depuis la semaine dernière et refuse de parler... Viens, entre, peut-être que tu pourras comprendre mieux que nous ce qu'il se passe.
Je me déchaussais et regardai en haut de l'escalier, où se trouvait la-dite chambre. Le père de Codd m'invita à monter, ce que je fit, la tête pleine de questions qui allaient enfin trouver des réponses. Mais ce qui m'intriguais le plus était son attitude. Qu'est-ce qui pourrait donc le pousser à ne plus sortir de chez lui ? Ces types l'aurait-ils menacé ? Au vu des regards effrayés que me lançait Malts au lycée, ce n'était pas le cas. Je toquai à la porte. Silence. Je répétai mon geste. Toujours rien. J'agrippai la poignée et l'abaissai lentement.
- J'entre...
J'ouvris doucement la porte. Les battants de la fenêtre étaient ouverts, laissant une fine brise entrer dans la pièce.
- Codd...?
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