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CINQ ― Evelyn

EVELYN DÉTESTE ÊTRE SEULE.

La solitude est son pire ennemi. Mais paradoxalement, la compagnie de sa famille cet après-midi fut particulièrement insupportable.

Avec le départ de son mari, tous ses proches se sentent dans l'obligation de prêter main forte à Evelyn. Tous les jours, elle reçoit au moins un appel de son frère ou de sa sœur pour prendre de ses nouvelles. Ses neveux et nièces lui envoient parfois un message, alors qu'ils ne gardaient que rarement contact. Ses cousins passent souvent à l'improviste, en justifiant qu'ils passaient dans le coin mais Evelyn sait pertinemment qu'ils prévoyaient leur visite. Même ses parents dont la mémoire vacille lui rappellent ce dur événement - pour une fois qu'elle aurait préféré qu'ils oublient.

Quelle pauvre femme, doivent-ils se dire. Finir seule à quarante-cinq ans, quelle tristesse. Sera-t-elle capable de refaire sa vie ? Toute sa famille s'inquiète de son état mental. Mais ils n'ont pas tort. Evelyn souffre. Elle cache juste sa douleur à sa famille. Elle désire simplement qu'ils arrêtent de lui rappeler sa douleur.

Seul le dernier fils de son frère lui remonte le moral. Âgé de cinq ans, Félix est encore trop jeune pour comprendre ce que sa tante traverse en ce moment. Il n'est que joie, sourires, et bêtises enfantines. Sa bonne humeur change les idées de la quadragénaire.

Evelyn n'a pas la tête aux discussions de sa famille. Son frère et sa sœur débattent sur un sujet dont elle n'a pas suivi tandis que leurs parents n'intervenaient que brièvement, préférant déguster le repas. Ce fut la première fois qu'ils se réunissaient sans qu'elle ait son époux à ses côtés. Vingt ans qu'ils étaient mariés et qu'ils partageaient ces petits bonheurs de la vie, tel un repas conviviable en famille. Mais il est parti, et elle doit vivre avec.

Evelyn resta dans ses pensées. Son assiette est à moitié vide, ses feuilles de salade baignant dans la sauce abondante du poisson. Au bout de sa fourchette, un morceau de pomme de terre froid attend d'être mangé. Soudain, elle sentit une petite main tirer sa manche.

— Eh, tata Eve.

— Oui, Félix ?

Le garçon piqua avec sa fourchette un morceau de poisson qu'il n'apprécia pas.

— Qu'est-ce qu'il se passe quand deux poissons s'énervent ?

— Hum, je ne sais pas.

— Le thon monte ! cria-t-il en brandissant sa fourchette en l'air.

Son éclat de rire est la seule source de chaleur qui remplit le cœur de Evelyn. Elle rit à son tour, davantage amusée par les grimaces qu'il lança à son assiette. Aussitôt, le frère de Evelyn prit la fourchette de son fils pour éviter que Félix ne blesse quelqu'un avec ses gestes vifs.

— C'est sa période bêtises, a-t-il prévenu. Ne fais pas attention...

Au contraire, Evelyn apprécia cela. Elle pensa ainsi à autre chose que son mari. Dans une famille, il est inconcevable de dire que l'on préfère une personne parmi ses frères et sœurs ou enfants. Mais Evelyn ne le cache pas. Parmi ses neveux, le petit Félix est son favori.

— Tu viendras passer quelque jours chez moi et on mangera pleins de frites, lui a-t-elle soufflé à l'oreille.

— Ouais !

Le poisson n'étant visiblement pas son aliment favori, Evelyn fut certaine qu'avec des frites ou même de la glace, Félix serait partant. L'exclamation du garçon attira l'attention de la sœur de Evelyn, rassurée de voir un sourire sur ses lèvres avec ce qui lui arrive. La suite, Evelyn la connaît. Depuis trois mois, c'est la même chanson. De nouvelles conversations sur son mari, des paroles qui se veulent réconfortes mais qui agacent la quadragénaire. Et pour terminer, son départ avant tout le monde.

Bien qu'elle soit tôt à s'en aller, Evelyn ne rentre pas chez elle. Son appartement lui paraît si vide maintenant que son époux l'a quitté. Il ne sera plus là à l'attendre, assit sur le canapé ou dans la cuisine. La bonne odeur de ses petits plats n'envahit plus l'entrée quand elle franchit la porte. Parfois, elle croit entendre de la musique venant de la station de radio, mais les musiques préférées de son époux proviennent de ses souvenirs. Tout a disparu avec lui.

Ce sentiment de solitude pèse sur Evelyn. Elle n'a jamais vécue seule. Enfant, elle a grandit entourée de son petit frère et de sa sœur. L'ambiance a toujours été énergique, remplie de visites et bêtises qui animent la maison. Quand elle a rencontré l'amour de sa vie, elle a quitté la première le domicile familial pour s'installer avec lui dans un humble studio à Manhattan. Bien qu'ils n'ont pas eu d'enfants, leur rythme de vie était chargé. Ils recevaient souvent des amis ou de la famille, organisaient des petites fêtes et sortaient régulièrement. Vingt années de mariage, collés l'un à l'autre - peut-être trop pour apprendre à vivre seule du jour au lendemain.

Elle longe le fleuve Hudson qui semble si paisible. La lune se reflète sur l'eau, entourée de milliers d'étoiles. Aucun bateau ne vient perturber l'écoulement du fleuve et peu sont les riverains qui se baladent à cette heure. Evelyn connaît très bien ce chemin, elle l'emprunte presque tous les soirs quand elle ne se sent pas capable de rentrer chez elle. Ses pensées se vident avant d'affronter la solitude. Cette fois-ci, elle bifurque dans une rue parallèle pour allonger de quelques minutes sa promenade nocturne. Les passants se font un peu plus nombreux et bruyants, mais leur bonne humeur fait sourire Evelyn. Les néons lumineux ont remplacé les lampadaires et offre une tout autre atmosphère.

Ses jambes l'entraînent vers un groupe impatient d'entrer dans un club. Evelyn ne se rappelle plus la dernière fois qu'elle est entrée dans un de ces endroits. Elle fréquentait régulièrement les bars où des étoiles montantes se produisaient, des petits clubs au coin d'une rue calme. Son époux lui faisait découvrir de nouveaux genres musicaux et admirait les jeunes chanteurs qui se lançaient sans aucun bagage dans le monde si difficile de la musique.

— Tu vois ce musicien ? Je te parie que dans quelques années, on l'entendra sur toutes les radios, lui répétait-il lors de chaque concert.

Les boîtes de nuit lui rappellent sa jeunesse, quand rien ne lui faisait peur. Elle se sentait forte, inarrêtable, vivante.

Sans qu'elle ait son mot à dire, sa curiosité - et surtout sa peur de solitude - la guide jusqu'aux musiques festives du Moonlight. La première vague de clients touche à sa fin. Un couple et et un groupe d'étudiants patientent à l'extérieur tandis que le vacarme à l'intérieur se fait entendre à l'autre bout de la rue. Ils espèrent entrer avant que la seconde vague de fêtards arrive au petit matin, lorsque les premiers arrivés sortiront.

En cinq minutes, Evelyn est à l'intérieur du Moonlight. Dès son entrée, une nouvelle chanson est lancée. Les premières notes de piano de Stand on the word sont jouées. Evelyn est ravie qu'ils interprètent la version des Joubert Singers, celle des années 1980, qui a rythmé une période de sa vie. Elle n'était encore qu'une enfant quand la chanson est sortie. Dès lors, elle n'a jamais cessé de l'écouter durant toute son adolescence jusqu'à son mariage.

Avant même de s'asseoir en face du bar, un employé se dirige vers elle.

— Bonsoir, je vous sers ?

Evelyn observe le barman qui attend patiemment. Plusieurs secondes passent avant qu'elle donne sa réponse. Que boire ? Il y a à peine dix minutes, elle hésitait encore à entrer dans ce club. Elle n'avait même pas songé à consommer, juste profiter quelques instants de la musique. Elle jette alors un rapide regard vers la carte des boissons et lit la première chose qu'elle voit.

— Une margarita.

Le barman acquiesce et sort un verre dédié à cette boisson. Evelyn suit ses gestes du regard. Le mélange de l'agrume et de l'alcool, le rajout des glaçons, jusqu'à la rondelle de citron vert. Il verse le cocktail dans le verre puis le tend vers la quadragénaire.

Evelyn boit son cocktail aussi rapidement qu'il a été préparé. Le délicieux gout lui fait oublier tous ses tracas quotidiens. De suite, elle fait signe au barman et commande un second verre. Il le prépare avec la même technique et sourire chaleureux. Pour ce verre, Evelyn prend son temps. La musique la fait patienter. Le piano attire son attention plus que la voix mélodique du chanteur ou que l'énergique batterie. Les notes de l'instrument à cordes sont douces et maîtrisées.

Son second verre vide, Evelyn profite de la commande de son voisin de gauche pour appeler une nouvelle fois le barman.

— Une autre margarita, merci.

Le barman cesse ses aller-retours incessants d'un bout à l'autre du bar. Posté devant elle, Evelyn prend le temps de lire son nom sur son badge accroché à sa chemise blanche. Barry.

— Vous allez bien ? s'inquiète-il. Puis-je vous aider ?

Le jeune homme la dévisage quelques instants et Evelyn secoue la tête de gauche à droite. Bien qu'elle tente de paraître la plus naturelle possible, son visage est très expressif. Ses sourires sont toujours véritables et un rien lui fait rire. De l'autre côté, elle a beaucoup de mal à cacher sa tristesse ou sa colère. Les sourcils froncés, les yeux brillants, ou bien sa manie de faire rebondir sa jambe, tous ses gestes et mimiques signifient quelque chose. Alors mentir sur ses sentiments est une compétence qu'elle ne détient pas.

— Vous êtes aimable, mais merci. Ça ira.

Barry prend le verre vide de margarita et le passe sous l'eau. Il prend son torchon posé à côté de l'évier et relève la tête vers sa cliente, tout en essuyant le verre.

— Si je peux me permettre, boire n'est pas la meilleure façon d'oublier.

Evelyn se retient de tousser alors qu'elle avale sa salive de travers.

— Pardon ?

— Oui. Vous êtes seule, vous n'allez pas danser vous mélanger aux fêtards. Au contraire vous semblez être triste. Quelque chose vous tourmente, je me trompe ?

Le ton calme qu'il utilise perturbe Evelyn. Sa jambe rebondit de plus en plus vite et ses lèvres s'entrouvrent, bien qu'elle ne sache pas quoi répondre. Détournant son regard, elle tente d'avoir un comportement aussi détendu que lui.

— Vous lisez en tous vos clients comme dans un livre ouvert ou c'est juste avec moi ?

— C'est mon don, plaisante-il.

Barry repose le verre propre comme un sou neuf sur le comptoir. Perfectionniste, il reprend son torchon et nettoie le pied. Evelyn le regarde faire sans un mot, certes amusée par son comportement maniaque, à tel point qu'il dispose le récipient de façon qu'il soit parallèle aux autres verres à côté. Un bref rictus apparaît sur les lèvres d'Evelyn.

— Vous avez raison. Je ne savais pas quoi faire, alors je suis venue par hasard dans ce club.

Le barman pose son torchon à sa place initiale puis sort son shaker à cocktail. Cependant, il ne prend pas les bouteilles nécessaires pour préparer la troisième margarita commandée.

— Je comprends. Mais évitez de plonger votre tristesse dans l'alcool, ça ne vous apportera rien de bon.

Evelyn hausse les épaules. Elle détourne son regard comme si elle risquait de se faire gronder par ses parents.

— Je fonctionne comme ça depuis des semaines et c'est le seul moyen que j'ai trouvé pour me sentir mieux.

— Essayez la danse. Mêlez-vous aux fêtards. Il y a une joie de vivre intense, une bienveillance collective. Ressentez cette même euphorie.

Barry désigne les danseurs qui sont toujours aussi nombreux. Dos à eux, Evelyn ne se retourne pas. Elle les imagine très bien et cela lui suffit. Souriants, sans aucune honte, et sociables. Tous bienveillants avec les autres, sans distinction d'âge, de nationalité, de genre. Aucun problème ne vient perturber leur nuit.

— Depuis les trois années où je travaille ici, je n'ai pas connu un seul client qui n'avait pas le sourire aux lèvres en sortant, poursuit-il.

Ses avant-bras posés sur le comptoir, Barry se penche quelques instants vers sa cliente.

— Oubliez vos problèmes l'espace d'une soirée. Cette nuit, avancez au rythme de la musique.

— Si c'était si facile...

— Les musiciens de ce soir sont très bons.

Automatiquement, Evelyn se tourne vers la scène. Le groupe semble prendre du plaisir à jouer leurs morceaux favoris. Pourtant sobre dans leur mise en scène, ils se permettent de se déplacer sur la petite scène. Le bassiste rejoint le pianiste derrière son instrument et ils partagent quelques notes en commun. Puis, le bassiste se retourne pour faire face au batteur. Ensemble, ils forment le chœur de la fin de chanson pour accompagner le chanteur principal, resté sur le devant de la scène.

— Essayez, termine Barry, vous ne perdez rien. Et comme dit le dicton, qui ne tente rien n'a rien.

Il parle bien, songe Evelyn en le regardant s'éloigner vers d'autres clients. Elle doit avouer que ses paroles encourageantes lui donnent envie de changer d'air, mais passer à autre chose est plus compliqué que ce qu'il n'y paraît. Pourtant, Evelyn a envie de s'amuser cette nuit. Alors elle se tourne vers la foule, se mêlant un peu plus à eux, et ouvre l'oreille aux derniers notes mélodiques du piano.

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