Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Chapitre 28 - Alice (Partie 2)

Après une heure de marche à travers l'étendue de champs moissonnés qui bordaient la cité, Alice s'arrêta pour souffler et scruter les alentours. Sur l'horizon, la pollution urbaine estompait les barres d'immeubles austères que l'adolescente exécrait, tandis qu'à un mètre, une forêt de pins arrêtait son regard. L'édifice de bois, obstacle à la modernité, dressait ses troncs nus vers le ciel et intéressait la jeune fille comme d'autres de son âge s'intéressent au shopping. Alors, pleine d'entrain, Alice laissa un sourire se plaquer sur son visage, tira sur les bretelles de son sac à dos et s'enfonça entre les arbres.

Derrière la frontière qui séparait les devoirs de la liberté, l'adolescente retrouva une nature accueillante et paisible : le ronronnement de l'autoroute avait disparu comme par magie au profit de quelques pépiements et du craquement agréable que les aiguilles produisaient sous ses baskets. L'azur s'avérait désormais plus profond sous le couvert des cimes et seule une traînée blanchâtre éraflait le ciel en dénonçant le passage d'un avion. Tout ici cherchait à apaiser l'esprit du citadin, mais trop peu comprenaient l'intérêt de se couper du monde, d'arrêter le temps, de troquer la grisaille pour la verdure, même en cet étouffant mois d'août ; les vacances s'achevaient sur une canicule infernale et, fort heureusement, les sous-bois donnaient matière à se rafraîchir.

Sa destination bien en tête, Alice accéléra le pas. Une longue tresse multicolore sautillait dans son dos, ses jambes affichaient quelques égratignures et son cœur cognait à l'allure de sa marche. Alors, le calme ambiant plongea la jeune fille dans une intense introspection ; elle connaissait le chemin sur le bout des doigts pour l'avoir emprunté tout l'été, comme les étés précédents, et même si ses yeux s'accrochaient aux décharges sauvages qui pointaient par endroit, ils se noyaient avant tout dans les bons moments passés à grimper aux arbres, à fouiller chaque recoin de ce labyrinthe forestier et à rire, à boire, à s'aimer - se désaimer - entre amis, les siens, ceux de son grand frère - surtout ceux de son grand frère.

Alice y attachait une importance vitale. Elle savait que tous les enfants rêvent d'aventures, mais que seuls quelques-uns mettent leur plan à exécution. Son groupe était de ceux-là. Ils formaient un cercle soudé de révoltés, bercés par l'illusion qu'en grandissant, chacun respecterait leur pacte fraternel, convaincu que leurs routes resteraient parallèles, voisines, et que leur origine commune, ces blocs étagés de béton qui ne les accueillaient que pour la nuit, deviendrait leur fierté, un lien impossible à rompre quoi qu'il arrive. Alice espérait que la rentrée prochaine ne changerait rien à leurs habitudes, que tous se souviendraient de cet exceptionnel été et qu'ils reviendraient l'année suivante pour partager leurs douleurs, leurs blessures, leurs joies. Elle ne se sentait à l'aise qu'avec eux. Pour rien au monde, elle ne voulait que s'arrêtent leurs vadrouilles à travers ce royaume farouche dont ils étaient les princes. À quelques jours de l'ouverture des classes, le temps devenait leur pire cauchemar. Tous luttaient contre lui avec l'avarice d'un vieux banquier sans scrupule : ils tenaient le compte des heures restantes, grinçaient des dents à chaque dépense et tentaient de trafiquer la course des secondes, mais la mélancolie avait raison de chacune de leurs activités. La fin approchait et elle les enfermerait bientôt entre les lignes de leurs cahiers.

Après le dernier virage qui la séparait de l'arrivée, Alice évacua sa lassitude d'un froncement de sourcils. Derrière les buissons que la troupe de copains avait disposés comme la parodie d'un rempart médiéval au sommet d'un vallon, la jeune fille distingua la silhouette de leur château fort. En réalité, il ne s'agissait là que d'une cabane de vieux branchages coiffée d'une bâche dégotée parmi les décharges environnantes. Les murs, ligotés de ficelle, ne dépassaient pas le mètre cinquante si bien que personne ne tenait debout à l'intérieur, à part celui qu'on nommait P'tit-Frère et dont on ne se souvenait jamais vraiment de qui il était le cadet.

En approchant du repaire, Alice s'étonna de ne capter aucune voix et s'inquiéta que personne ne vienne l'accueillir en courant. Intriguée, elle s'empressa alors d'abandonner le sentier - lequel continuait sa route dans la sapinière - pour emprunter une voie transverse, mais à peine eut-elle atteint les premières barricades végétales qu'elle s'arrêta net, le cœur tordu de déception : seul Maël était présent sur les lieux, allongé sur une chaise longue au tissu patiné, les pieds en éventails. Le jeune homme lui tournait le dos. Il secouait la tête ; le casque sur ses oreilles écrasait sa chevelure épaisse, ses doigts battaient la mesure sur la canette de bière qu'il tenait à la main et sur son torse reposait un baladeur CD. Ainsi avachi, il n'entendit pas l'adolescente s'avancer vers lui, et lorsque celle-ci lui empoigna l'épaule pour signifier sa présence, il sursauta immanquablement. Un jet mousseux éclaboussa son t-shirt, son visage criblé d'acné passa du pâle au pourpre en une fraction de seconde et son casque s'arracha de son crâne quand il se redressa.

« Alice. Putain, quoi ! » hurla Maël.

La jeune fille enchaîna sans s'excuser.

« Personne n'est venu aujourd'hui ? »

L'autre fulminait encore ; il peinait à retrouver sa blancheur.

« Tu m'as fait vraiment peur... Tu sais ça ?

— Pauvre petit chou », se moqua Alice en lui ébouriffant les cheveux.

Maël souffla un bon coup.

« Alors, ils sont où ? insista la jeune fille.

— Tu l'aurais su si t'avais un portable.

— Genre, tu crois que mes parents peuvent se l'permettre ?

— Pas besoin d'eux. Le mien, c'est Fred qui me l'a refourgué. »

Une moue s'imprima sur le visage de l'adolescente.

« Un truc volé par mon frangin ? Non merci...

— J'pensais pas que ça te posait problème, mais bon...

— Pis ça vous sert à quoi à part jouer h24 au snake ?

— D'après toi ? »

Alice grogna.

« On est tous de la même cité, les gars. Fatiha pouvait très bien passer ; son appart' est sous le mien ! Ça l'aurait pas tué de prévenir. Ça tue personne...

— Ok, ok, renonça Maël, les mains levées. J'ai rien dit. »

Alice fronçait toujours les sourcils. L'autre lui sourit.

« Tu vas rester debout longtemps ? Prends une bière et assieds-toi !

— J'ai pas soif », lança la jeune fille en s'installant.

La chaise longue grinça sous son poids et, à travers les écouteurs qui pendaient au cou du garçon, le gémissement d'une guitare brisa à son tour le silence. Maël sauta sur son baladeur et pressa le bouton stop ; le calme revint aussitôt.

« Désolé... s'excusa-t-il.

— Du coup, ils sont partis faire quoi ?

— Rien d'intéressant, crois-moi ; Marc flippe parce qu'il change de lycée.

— Sérieux ?

— Ouais. Alors ils font du repérage tous ensemble », précisa-t-il.

Puis il avala une gorgée d'alcool. Alice lui jeta un regard suspicieux.

« Et toi alors ?

— Moi ? répondit innocemment Maël.

— Pourquoi t'es là si tu savais que personne viendrait ?

— Je me suis dit que... »

Ses doigts se crispèrent sur sa canette.

« Qu'on serait que tous les deux, tu vois ? »

Sa main libre se posa sur la cuisse d'Alice qui la dégagea aussitôt.

« Tu me mets mal à l'aise, là ! Tu t'es cru en plein plan drague ?

— Non, non. J'pensais que... se défendit Maël.

— Que quoi ? »

L'armature couina quand le garçon s'écarta d'une fesse.

« C'est pas parce qu'on l'a déjà fait que ça doit recommencer.

— Oui, oui, pardon. T'as raison, t'as raison... »

Alice le surveillait du coin de l'œil ; et voilà qu'elle culpabilisait.

« En plus, soupira-t-elle, j'ai pas trop la tête à ça. »

Incapable de tenir en place, elle se remit debout puis se planta devant le garçon qui prit soin d'éviter que sa bière ne se renverse encore. Sous leurs chaussures, le tapis de feuilles mortes gagna en intérêt ; Alice le contempla avec attention avant de relever la tête. Elle n'osait pas affronter le regard brumeux du jeune homme.

« T'as l'air toute sérieuse, d'un coup ! T'es sûr que ça va ?

— En fait, avoua Alice, je voulais vous annoncer un truc...

— Bah, vas-y !

— Et comme y a que toi, ça m'emmerde un peu... »

Maël s'apprêta à militer pour qu'elle parle, mais l'adolescente l'interrompit.

« Je vais faire avec de toute façon...

— Oh ! Donc, tu me l'annonces juste à moi ?

— Oui. Par contre, si tu t'avises de balancer...

— Tu me tords le cou, je sais. T'en fais pas, je vais la fermer ! »

L'excitation habitait les pupilles du garçon ; la jeune fille ajouta :

« Je plaisante pas, hein ! C'est moi qui dois leur annoncer, Maël.

— Promis, j'dirais rien ! insista l'autre ; il gagnait en sincérité.

— Très bien. J'te fais confiance. »

Avant de poursuivre, Alice inspira profondément, puis laissa échapper un :

« Je suis enceinte »

Devant la nouvelle, Maël ne cilla pas d'une paupière. Avait-il seulement compris ?

« Je suis enceinte, répéta Alice en posant ses mains sur celles du garçon.

— Tu veux dire que... marmonna-t-il.

— Que je suis en-cein-te. C'est clair pourtant !

— Putain... »

Le regard de Maël se vida de toute l'impatience accumulée jusque-là et n'afficha plus rien qui ne s'apparente, de près ou de loin, à une forme de joie. Est-ce que quelqu'un l'avait seulement mis au courant qu'une coutume ancestrale voulait qu'on félicite celles qui attendent un heureux évènement ? Alice en doutait.

« Je sais même pas comment gérer la nouvelle... dit-il.

— Parce que c'est à toi de gérer quoi que ce soit ? »

L'adolescente serra des dents. L'autre ne l'écoutait pas.

« Mais merde... Me dis pas que c'est moi le père, en plus ?

— J'en sais rien, souffla Alice. Je m'en fous.

— Ton frère va tellement me défoncer. »

Qu'est-ce que Fred venait faire dans l'histoire ? Il avait peut-être dix-huit ans - et elle quinze -, son frère ne disposait d'aucun droit d'aînesse sur sa chair, et encore moins d'un droit de regard sur ses fréquentations. Alice baissa la tête, déçue ; elle s'était attendue à de l'étonnement, à du flottement, à un quelconque malaise, mais pas à ce qu'on s'accapare ses doutes et ses inquiétudes. C'était de son ventre qu'il s'agissait, d'un truc qu'elle ne contrôlait pas et qui pouvait mal se terminer. Et dire qu'elle devrait revivre ça avec tous les autres...

Le rouge lui montait aux joues.

« Putain Maël, c'est pas toi qui vas morfler pendant plusieurs mois. »

Le garçon cligna des yeux ; une évidence lui tombait dans les bras.

« Mais... tu vas. Enfin tu sais, y a un truc là... bafouilla-t-il.

— L'avortement ?

— Ouais, ce machin-là !

— Non, je vais pas avorter !

— Mais pourquoi ? Tu t'en fous, ça fait la taille d'un haricot.

— La taille de deux haricots.

— Deux, ils sont deux ? grimaça Maël.

— Oui. »

Alice sentit les doigts du garçon se serrer sur les siens.

« Et tes parents, ils sont au courant ?

— Non, j'me suis occupée de ça toute seule.

— Et le lycée ? Comment tu vas faire à la rentrée ?

— Je m'arrangerai. »

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro