26- Les toilettes
TW : harcèlement et TS /!\
Pdv Johnny
Lorsque j'entrai dans les toilettes, une seule cabine était fermée, le reste de la pièce était désert. Je me doutai donc que c'était là que je trouverais Ten -enfin, mon corps physique dans lequel il était-. Le verrou était rouge, indiquant que la porte était fermée. Je vins donc m'asseoir dos à lui, seule la porte close nous séparait.
-Ten ? fis-je
Je ne savais pas pourquoi, j'avais besoin de combler le silence qu'il y avait. Alors je prétextais de l'appeler, pour faire mine de lui indiquer ma présence. Je sentis juste les pieds du plus jeune bouger légèrement, comme s'il venait de replier ses genoux contre lui.
-Tu comptes rester là encore longtemps ? demandai-je
-Jusqu'à la fin de mes jours. répondit-il
-Arrête tes conneries, sors de là.
-Non.
-Sors de là, j'te dis ! insistai-je
J'étais à deux doigts de me lever pour balancer un grand coup de pied dans la porte. Mais j'entendis des légers reniflements venant du côté de Ten qui interpellèrent mon attention. Je collai mon oreille près de la porte pour mieux entendre.
-Ten tu... pleures ? demandai-je
Je l'entendis passer une main sur son visage -enfin le mien. Je soupirai.
-Je suis désolé, d'avoir enfreint la règle Johnny... me dit-il d'une faible voix, Je sais pas ce qui m'a pris, je reconnais que c'était bête et immature de ma part. C'est juste que... Je sais jamais comment m'y prendre avec toi. J'ai pensé que répondre à la violence par la violence serait la solution... C'était qu'une putain de connerie. Comme tout le reste.
Je n'avais jamais entendu ma propre voix parler avec un timbre aussi doux. Peut-être que ça avait dû arriver, mais ça faisait tellement longtemps que je n'avais pas connu la paix. Cette époque n'existait plus désormais. Ça me fit un coup d'en prendre conscience.
-J'ai pas toujours fait ce qu'il fallait... Mais sérieux, c'était une raison pour faire ce que t'as fait avec Taeyong ? me demanda-t-il
Ten avait raison, je n'aurais pas dû me servir des sentiments de Taeyong pour régler mes propres comptes. Je savais que depuis des mois mon ami était en flash sur Ten, et je m'en étais servi pour une stupide histoire de vengeance. Maintenant, avec du recul et du calme, je me rendais compte combien j'avais agi comme un putain de salaud. Taeyong avait toujours été présent pour moi, je n'aurais jamais dû lui faire un truc pareil.
-J'suis désolé Ten. répondis-je après un silence, J'étais tellement en colère pour ce que t'avais dit, pour Jae... J'ai agi sans prendre conscience des conséquences de mes actes. J'aurais pas dû flirter avec Tae et jouer avec vos sentiments. Mais bon... Tout ça n'est-il pas digne du connard que j'ai toujours été ?
-Tu n'as pas toujours été comme ça Johnny.
Sous l'espace de la porte, je sentis que nos mains se frôlèrent. Un putain de courant électrique traversa tout mon avant-bras -enfin, celui de Ten. Je retirai vivement ma main, comme si on venait de me jeter de l'acide. Ça me perturbait de ne pas pouvoir voir le visage qu'il affichait actuellement à cause de cette putain de porte.
-De quoi tu parles ? demandai-je
Il soupira.
-Je.. J'ai trouvé ton carnet ? Et je me suis dit que j'y trouverais des réponses. me répondit-il
Je me levai vivement comme si je venais de me prendre une putain de décharge électrique.
-Johnny... Ne pars pas, s'il te plait... me dit-il
-Attends, t'es en train de dire que t'es allé fouiller dans mes affaires ? demandai-je, Et tu me tapes une crise pour Taeyong ?! Tu te fous de ma putain de gueule !
-Non c'est pas du tout ça... Je l'ai trouvé par hasard.
-Il était caché, mon carnet ! T'avais aucune raison de le trouver ! Putain Chittaphon, putain de merde si y avait pas cette porte t'aurais déjà plus de tête !
Evidemment que ces mots n'avaient aucun sens, parce que si je décapitais vraiment Ten, alors ça serait mon propre corps qui n'aurait plus de tête. J'étais tellement en colère. Ce putain de carnet que je m'étais efforcé de cacher pendant toutes ces années, il avait fallu que cet avorton fourre son nez où il ne devait pas. Bordel de merde, j'avais l'impression qu'il venait de franchir ma dernière limite. J'étais complètement à poil devant lui, ça me foutait la putain de trouille.
J'envoyai plusieurs coups de pieds dans les murs en criant, pour faire sortir la pression. Lorsque je relevai la tête, je vis le visage de Ten dans le miroir. Mes nerfs me lâchèrent, je frappai le reflet en face de moi de toutes mes forces. Les phalanges de mes mains -enfin, celles de Ten- étaient en sang. Le corps d'une personne comme Ten n'était pas prêt à endurer toute la violence que j'infligeais au mien depuis tout ce temps.
J'étais à bout de souffle, ma poitrine se bloquait à intervalles irréguliers. Je fus obligé de me rasseoir contre la porte des chiottes dans lesquels Ten était toujours enfermé. Je n'arrivais pas à réaliser ce qu'il venait de m'avouer.
-Je suis désolé Johnny, j'aurais voulu t'en parler... finit par dire Ten après un moment, Je ne voulais pas que tu te braques, je veux dire encore plus que ce que tu n'étais déjà.
Je fermai les yeux, mes poings tremblaient de rage.
-Tu n'es pas celui que tu prétends être. continua-t-il, Ce sont les gens qui t'ont rendu comme ça.
-Ferme-la, tu ne sais pas de quoi tu parles. le coupai-je
-Je n'ai jamais vécu de harcèlement, certes. me répondit-il, Mais je sais écouter, et ça peut aider dans ce genre de moments. Enfin, je crois.
-T'as aucune putain d'idée de ce dont j'ai besoin. dis-je les mâchoires serrées, Merde, pourquoi il a fallu que tu rentres dans ma vie ? Pourquoi ? Pourquoi tu perds ton temps à essayer de chercher des réponses pour un gars comme moi ? Y a plus rien à sauver Chittaphon, j'suis foutu.
-Je sais que t'as essayé de te foutre en l'air. me répondit-il
-Même ça j'ai pas été capable de le faire correctement, putain. lâchai-je
Ça y est, les plaies au niveau de mes mains commençaient à me brûler. Je sentis les larmes se mettre à me brûler les yeux, elles étaient à deux doigts de dévaler le long de mes joues. Ma gorge se serra à m'en faire manquer d'air.
-Tu es fort Johnny, très fort. J'aurais jamais tenu à ta place. me dit Ten
Je ricanai d'un rire presque moqueur.
-Qu'est-ce que tu ne réussis pas Ten ? demandai-je, T'es brillant, absolument tout le monde le pense.
-Je ne suis pas aussi fort que toi... La preuve, je m'enferme dans des toilettes pour pleurer.
Pour la première fois depuis notre rencontre, on échangea un rire ensemble. Et putain, j'eus l'impression que ça me retira un poids énorme au niveau du cœur. Un silence nous sépara.
-T'avais raison, Ten. finis-je par dire
-Quoi ?
Je relevai la tête pour fixer un point invisible en face de moi, car je ne pouvais pas le voir lui. Mais sa présence derrière la porte me redonna un peu de courage. Je ne m'étais jamais confié auprès de quelqu'un comme j'étais en train de le faire avec lui. Ça me faisait bizarre et en même temps, je me sentais plus léger. M'ouvrir était libérateur.
-Je me forge un masque depuis le début. commençai d'une petite voix que je ne me connaissais pas, Et j'ai été trop con pour m'en rendre compte. Il a fallu qu'on vive ce putain d'échange pour que je comprenne que je faisais fausse route. C'est un truc de fou. T'as raison... Pendant tout ce temps, je n'ai pensé qu'à ma putain de gueule sans me demander quel impact ça pouvait avoir sur les autres. Mes propres potes et mon petit ami sont plus à l'aise avec toi qu'avec moi. J'ai l'impression que quand je te regarde j'ai tout raté. Je suis passé à côté de plein de trucs. Je sais que c'est parce qu'il reste encore ces putains de traumas que j'ai vécus quand je me faisais harceler et violenter au collège... Putain de merde.
Le thaïlandais de l'autre côté de la porte eut un doux sourire, je le sentis par un léger souffle. Il laissa quelques instants passer, sans rien répondre. Peut-être cherchait il ce qu'il comptait me répondre.
-Ne dis pas ça Johnny. me dit-il après un moment, Le harcèlement tu en étais victime. Ce n'est pas toi, et ce n'est pas de ta faute. Alors ne t'excuse pas et ne te sens pas bête. Dis-toi simplement que peu importe ce qu'il a été, le passé est derrière. Ce qui importe c'est ce que tu vas faire maintenant, pour le futur. Il n'y a que toi qui peut agir et faire en sorte que les choses puissent s'arranger.
-J'ai déjà changé une première fois et ça n'a pas marché. répondis-je en serrant les poings pour contenir l'émotion, C'est tellement dur. J'ai essayé de devenir plus fort, c'est ce que j'ai fait. Et même là j'ai tout foiré. A quoi ça sert de changer indéfiniment si c'est pour que jamais rien n'aille ?
-On ne te demande pas de changer Johnny. poursuivit le plus jeune, Ça fait partie de la nature humaine d'évoluer. Mais personne ne te demandera de changer la personne que tu es. T'es un être humain avec son caractère, ses défauts, ses failles. Il faut apprendre à faire avec, et c'est pareil pour tout le monde. Tu n'es pas pire ou mieux qu'un autre, tu es toi-même. C'est ça qui compte. Ça ne dépend que de toi et des choix que tu vas faire. Tu as la possibilité d'arranger les choses Johnny et je suis sûr que tu es capable de le faire. Les clés pour avancer et pour guérir, tu les as. Elles sont en toi.
Je sentis malgré moi qu'une larme glissa de mon œil, je soupirai comme pour chasser l'émotion. Personne ne m'avait jamais parlé comme Ten le faisait. Et putain, ça faisait du bien d'entendre ces mots. J'aurais tellement aimé que quelqu'un me dise des trucs comme ça, avant que je ne fasse toutes ces conneries qui m'ont encore plus brisé que ce que je n'étais déjà.
-Tu as des amis et un petit ami qui t'aiment, qui te soutiennent et tu as énormément de chance de les avoir. continua Ten, Alors, ce serait bête de tout gâcher alors que tu as toi-même pris conscience que ta manière de voir les choses n'était pas vraiment la solution à tout ça. La seule chose qui te manque vraiment, c'est de te retrouver toi-même Johnny.
Je passai une main sur mes yeux pour sécher les larmes qui perlaient sur mes cils. Un long silence suivit ce que Ten venait de me dire, j'étais tout bonnement incapable de décrocher un mot. Même si ma vie en dépendait. C'était comme si je venais de me prendre un seau d'eau glacée en pleine canicule. Mon cœur titubait, il avait du mal à suivre le rythme des évènements.
Après quelques minutes, j'entendis le loquet de la porte s'ouvrir. Je me levai tandis que Ten ouvrit la porte pour sortir de la cabine dans laquelle il était enfermé depuis tout ce temps. On se regarda quelques instants, sans vraiment savoir quoi se dire. Ses yeux -enfin les miens- étaient rouges, je ne devais franchement pas être mieux.
Puis, je finis par arborer un léger sourire.
Ça faisait un sacré paquet de temps que personne ne m'avait tendu la main comme Ten venait de le faire. Dès notre première rencontre il avait été là, et il était resté malgré tout ce que j'avais pu faire. J'avais peur, ça me terrifiait de redonner ma confiance à quelqu'un. Mais au vu de la situation qu'on expérimentait tous les deux depuis plusieurs semaines, je ne pouvais pas croire qu'au hasard. C'était comme si la vie elle-même me donnait une seconde chance.
Bon... Maintenant qu'on avait parlé à cœur ouvert je pouvais peut-être lui dire la vérité.
-Au fait, j'ai pas baisé avec Taeyong. finis-je par dire
-Quoi ?
-J'voulais juste te faire flipper, c'était qu'un suçon. répondis-je en haussant les épaules
Dans ses yeux -enfin, les miens- je vis le soulagement. Il m'asséna un coup au niveau de l'épaule.
-Espèce d'idiot ! me dit-il
On échangea à nouveau un rire. Je ne savais pas pourquoi, mais j'eus le sentiment qu'on avait tous les deux besoin de cette conversation et que le fait d'avoir parlé ensemble avait débloqué quelque chose, je ne savais pas quoi. Ten reprit son sérieux le premier et me regarda.
- Johnny... commença-t-il, Tu as fait des conneries avec mon corps, tu as joué avec mes sentiments et avec ceux de ton propre ami. Mais pourquoi tu as fait ça ? Je n'ai pas de sentiments pour Taeyong.
A vrai dire, je ne m'attendais pas à ce qu'il me pose cette question.
-Ah ouais, t'en es sûr ? répondis-je en arquant un sourcil
-Je sais pas, je ne le connais pas. fit Ten avant de passer une main derrière sa nuque -enfin ma nuque, Enfin... Mon corps ne le connait pas. Putain c'est compliqué... Dans tous les cas ça nous concerne Taeyong et mois, avec nos sentiments. Tu n'avais pas à t'emmêler.
-Je suis désolé. répondis-je
Je pris une inspiration avant de prendre la main de Ten -enfin celle de mon corps dans lequel il était coincé-. Je me pinçai les lèvres pour me laisser quelques secondes de réflexion avant de relever la tête vers lui, eh oui j'étais plus petit que lui maintenant.
-Je ne te demande pas de me pardonner, mais s'il te plait ne me lâche pas Ten. dis-je, J'ai besoin de toi. J'ai vraiment besoin de toi. Je ne peux pas arriver à la fin de tout ça si tu n'es pas là. Alors peu importe si tu me détestes ou pas, s'il te plait reste avec moi.
Ten me sourit, et sur son visage il y avait une forme de tendresse que je n'avais pas vu depuis longtemps sur mes propres traits. Tellement que j'avais presque oublié que cette douce lueur avait déjà existé quelque part.
-Je t'ai promis que je resterai et que je serai là pour toi Johnny. me répondit-il, Je veux bien te pardonner pour Taeyong. Mais maintenant plus de vacheries, d'accord ? Et si on a un problème, on s'en parle.
Je hochai la tête.
- papillon
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