La cité
- Tu es sérieux ! finit par répondre la sirène en regardant fixement le jeune homme. Tu t'appelles Cyril ?
Le concerné hocha la tête sans comprendre pourquoi son nom provoquait une telle réaction chez elle.
- Mais c'est quoi, ce nom ?! Comment peux-tu porter un nom aussi étrange ? Ils ont été le cherché où, tes parents, ce nom ?!
Cyril continuait de regarder la sirène sans dire un mot. Il ne comprenait vraiment pas ce qu'elle trouvait d'étrange à son nom. C'était bien la seule chose sur laquelle son frère ou les villageois ne s'étaient jamais moqué !
- Enfin, soupira-t-elle, c'est toi qui le subis, ce nom, pas moi. Alors, dis-moi, que faisait si près de la terre ?
Elle n'avait cessé de le regarder fixement.
- Je... je viens de là-bas.
- De là-bas, reprit-elle, l'air étonné. Tu veux dire...
- De la terre.
- C'est ça ! Quand tu auras fini de me prendre pour une imbécile... viens, tu expliqueras ça à mon père.
Deux coups de queue suffirent à la sirène pour s'éloigner. Cyril, incapable de faire le moindre geste, la regarda s'éloigner... et revenir en trombe quelques instants plus tard.
- Tu attends quoi ? lui demanda-t-elle d'un ton sec. Que l'océan se vide ! Tu crois que j'ai que ça à faire ?
- Je... je sais pas nager.
Surprise, la sirène resta la bouche ouverte à regarder Cyril avec des yeux ronds. Comment ça, il ne savait pas nager !? Mais c'était impossible selon elle, les siréneaux savaient nager quasiment depuis la naissance ! Alors il était prié de cesser de se moquer d'elle !
- Mais c'est vrai, continua Cyril. Il y a encore quelques heures peut-être, j'étais encore un humain !
- Un humain ? répéta-t-elle, incrédule. Et tu crois que je vais croire une énormité pareille !
Mais c'était vrai, se défendit le jeune homme qui se lança dans une explication plus ou moins confuse des événements qui l'avait conduit à devenir une sirène.
- JE suis une sirène, rectifia celle-ci, et TU es un sirin. Et comme ta queue est différente de la mienne, tu viens d'une autre profondeur. Parce que si tu venais de la terre...
- Je suis... enfin, j'étais un humain, soupira Cyril.
- Si tu étais un humain, continua-t-elle, tu aurais deux espèces de... queues sans écailles qui te servirais à...
Visiblement, la sirène ne connaissait pas le mot. Alors elle mima avec ses doigts un humain marchant sur ses deux jambes.
- Marcher, compléta Cyril en soupirant de nouveau parce qu'il ne savait plus comment la convaincre.
La sirène s'immobilisa en fixant Cyril, étonnée cette fois. Se pourrait-il qu'il dise la vérité ? Ou alors il avait une parfaite connaissance... D'un seul coup intriguée, elle fit le tour de ce sirin qui prétendait être un humain.
- Tu étais vraiment un humain ? répéta-t-elle une seconde fois en fouillant les cheveux de Cyril. Pourtant, ils n'ont pas cette couleur... Et cette sirène que tu as vue dans les récifs ? Tu es sûr de toi ? C'en était une ?
Le comportement de la sirène avait complètement changé. De l'incrédulité, elle était passé à l'intérêt. Elle ne connaissait pas le monde d'où venait Cyril, mais elle avait quelques notions que n'avaient visiblement pas le reste de son peuple.
- Viens, on va aller voir mon père !
Et elle avait de nouveau filé en laissant Cyril en arrière. Et le nouveau sirin ne pouvait même pas l'appeler : il ne connaissait pas son nom ! C'était malin, ça ! Voilà qu'il se retrouvait encore tout seul ! Et dire qu'il avait rencontré quelqu'un dans cette immensité ! Enfin, pour être plus précis, c'était elle qui l'avait trouvé. Bon, il allait devoir se débrouiller seul. Donc, il entreprit de nouveau de nager... enfin de bouger, ce serait déjà pas mal ! Peut-être que s'il bougeait ses deux jambes en même temps. Dans son esprit, il avait encore des jambes là où ses yeux voyaient une queue de poisson. Il y avait donc conflit...
- C'est vrai ! J'avais oublié ! Si tu étais vraiment un humain, tu ne sais pas nager !
Cyril sentit son cœur faire un bond dans sa poitrine. Il ne l'avait pas vue revenir. Sans rien lui demander, elle se saisit de sa main et commença à l'entrainer. Il avait d'ailleurs craint de se prendre des coups de queue mais rien.
- Attends ! Arrête !
Elle finit par s'exécuter mais son regard s'était fait autoritaire en se posant sur Cyril.
- Ce serait peut-être plus pratique si je connaissais ton nom.
- C'est vrai, soupira-t-elle. Gayelle. C'est bon, on peut y aller maintenant ?
Mais Cyril refusa. Il retira sa main lorsque la sirène voulut s'en saisir de nouveau. Seulement, il ne voulait pas être trainé, il préférait apprendre à nager. Gayelle le fixa un moment en silence. Puis, elle acquiesça avec un léger sourire. Alors elle tenta de lui expliquer comment elle nageait. Mais il ne lui était pas facile d'expliquer quelque chose qu'elle faisait naturellement. Même ralentir sa nage pour lui montrer s'avérait pour elle un exercice difficile. Et Cyril eut du mal à la singer. Il essayait d'abord d'imiter l'ondulation du corps de la sirène pour tenter d'en comprendre le principe. Ce qui était inné chez Gayelle, Cyril devait l'apprendre aux prix de gros efforts et de persévérance. Aussi après un long, long moment, un nombre volontairement non compté d'essais, Cyril était enfin parvenu à acquérir une nage rudimentaire. Et de cet apprentissage laborieux, Cyril ne retint qu'une seule chose : heureusement qu'il ne pouvait pas se noyer !
Alors Gayelle avait estimé qu'il était en mesure de la suivre. Elle avait apprécié le fait qu'il refuse d'être trainé. C'était correct de sa part mais qu'est-ce qu'il était lent ! Plus d'une fois, elle avait dû ralentir sa nage pour lui permettre de suivre. Elle n'en disait rien mais elle était agacée, Cyril le voyait bien. Et il se demanda pourquoi elle l'aidait. Était-ce par pure générosité ou bien y avait-il autre chose derrière ?
Plongé dans ses pensées, Cyril n'avait pas vu la sirène disparaitre dans les profondeurs obscures et il ne s'arrêta qu'au tout dernier moment et en posant ses mains sur la roche. Il n'avait pas vu le bord de la falaise ! Il s'était contenté de suivre Gayelle. Comme elle avait piqué vers le fond, il avait fait la même chose, en même temps mais sans réaliser qu'il se trouvait derrière elle. Il avait donc failli se prendre le bord de la falaise en plein visage ! Enfin, heureusement qu'il ne nageait ni très vite, ni très bien !
Jusque-là, plus ils s'étaient enfoncés dans les profondeurs et plus les environs s'était obscurcit. Mais là, c'était le contraire. Gayelle et Cyril se dirigeaient vers un espace baignée d'une douce lumière bleuté. Et plus ils approchaient...
Waouhh !!!
Cyril en restait sans voix. C'était... magnifique !
Sous ses yeux émerveillés s'entendait ce qui semblait être une cité de corail au pied de la falaise. Des coquillages géants aux formes aussi variées que leurs tailles et leurs couleurs, semblaient servir de maisons aux sirènes et sirins qui passaient devant Cyril. De larges espaces entre les habitations donnaient à la cité un aspect très « aérien ». Des parterres de coraux colorés s'étendaient jusque dans l'obscurité, plus loin. Une multitude de poissons fourmillaient un peu partout, rivalisant de formes et de couleurs.
Mais ce n'est pas seulement leurs queues aux couleurs chatoyantes qui avaient le plus surpris Cyril. Le nouveau sirin détaillait avec étonnements les habitants de cette merveilleuse cité. Leurs queues aussi bien que la couleur de leurs cheveux étaient aussi variées qu'une prairie en fleurs. Du rose, du jaune, du bleu, du rouge et du vert venaient s'ajouter aux traditionnels noir, brun, blond et même roux que connaissait Cyril. Ce dernier comprenait mieux maintenant pourquoi Gayelle n'avait pas été surprise par la couleur des cheveux de Cyril. Pour elle, il était naturel que sa chevelure ne soit pas forcément brune, blonde, châtains ou rousse. Et du coup, il se sentait plus à l'aise avec sa chevelure châtain relevé d'une pointe de violet. Enfin, étant mouillés, ses cheveux devaient davantage tirer sur la couleur aubergine. Mais ça semblait ne choquer personne ici.
La sirène l'observait attentivement. Perplexe peut-être. Mais elle était surtout surprise de l'attitude de Cyril. A croire qu'il n'avait vraiment jamais vu d'autres sirins et sirènes. Même la forme des maisons l'avait surpris. Elles n'avaient pourtant rien d'extraordinaires, leurs maisons !
- Tu viens, on y va, le pressa-t-elle, impatience de savoir ce que pensait son père de cet étrange sirin qui se prétendait humain.
Cyril se contenta de hocher la tête et il suivit la sirène. Mais en se retournant, il fit face à la falaise et...
Le souffle coupé, il regardait cette énorme coquille Saint-Jacques posée contre la paroi rocheuse. Elle faisait quoi... vingt... trente mètres de haut. Cyril n'aurait su le dire. Mais il était vraiment énorme, ce coquillage !
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