Chapitre 38
Alors qu'il marchait près d'Elsa, et qu'ils se promenaient tous les deux dans la ville, Sebastian fit soudain un écart et disparut derrière un tonneau. La jeune femme, surprise, lui emboîta le pas et l'interrogea du regard.
— Kinatuae est au bout de la rue, je ne veux pas la voir, répondit-il.
— Elle ne peut rien te faire...
— Je sais, mais rien que la savoir ici, et pire, qu'elle soit peut-être celle qui m'a mis au monde, me répugne !
Elsa pencha la tête, les lèvres serrées. Elle avisa ensuite la ruelle derrière son compagnon, lui prit la main et l'entraîna après elle.
— Où allons-nous, ainsi ?
— Loin de cette mégère.
— Mais encore ?
Ils débouchèrent à l'extérieur de la ville et Sebastian avisa l'orée de la forêt.
— Je voudrais m'entraîner, dit alors la jeune femme. Avec autant de Magikers autour de moi, mes pouvoirs sont en train de revenir, mais je dois les ranimer et je sens que tu as envie de détruire quelque chose...
Le jeune homme serra sa main sur son bâton. Il avait remarqué, dès le lendemain de leur arrivée, que beaucoup de Magikers se promenaient avec des bâtons comme le sien, certains plus ouvragés que d'autres, au cristal passant par toutes les couleurs du spectre, toutes les formes et toutes les tailles...
— Tu es sûre que tu veux te retrouver seule dans les bois avec moi ? demanda-t-il.
— Allons, tu es bien élevé, tu sauras te tenir, j'en suis sûre !
— Je ne parlais pas... de ça.
— Je sais.
Elsa tourna les talons et s'approcha de la rangée d'arbres qui entourait la ville. Cela faisait quatre jours qu'ils avaient débarqué sur cette île et Mohekar leur avait expliqué qu'elle était couverte de forêts et, qu'ici et là, il y avait des villages de plus ou moins grande taille et que de ce fait, ils ne seraient jamais perdus, surtout s'ils suivaient le littoral.
— Allez, viens, s'il te plaît... insista Elsa. Je sais que j'ai été méchante avec toi à de trop nombreuses reprises, mais tu es mon seul ami et je ne veux pas te perdre... Je n'ai même plus de sœur, désormais.
Bash secoua la tête.
— Anna sera toujours ta sœur, même si tu as été adoptée, répondit-il. Elle est désormais la reine légitime d'Arendelle et nous devrions lui écrire pour tout lui raconter, d'ailleurs.
— Je le ferais, mais avant je voudrais passer du temps avec toi et me faire pardonner d'avoir été une idiote.
— Tu es une ravissante idiote, Elsa, et je ne t'en voudrais jamais d'avoir été aussi acide et hautaine avec moi. Tu étais la reine, tu étais toute-puissante ; ce n'est plus le cas désormais, tu es enfin une jeune femme comme les autres et tu as enfin le droit de dire merde au monde.
Elsa haussa un sourcil puis sourit.
— J'ai l'impression qu'on a retiré un énorme poids de mes épaules... C'est comme si j'avais enfin ouvert les yeux, je vois le monde d'une autre manière et ça m'effraie. Oui j'ai toujours voulu être comme tout le monde, ne pas avoir de pouvoirs magiques, mais alors qu'aujourd'hui c'est le cas, je suis perdue et c'est maintenant que j'ai besoin de toi. Tu étais venu pour m'aider à canaliser ma colère, tu vas devoir m'aider à la retrouver pour déclencher mes pouvoirs...
Sebastian grimaça.
— Tu es sûre ?
— Oui. Adoptée ou pas, je reste Elsa, la reine des neiges, et sans mes pouvoirs, je ne suis rien du tout.
— Et je fais ça comment ? Tu veux que je t'insulte, que je te dise des choses méchantes, que...
Elsa plissa les yeux et un sourire étira alors sa bouche.
— Fais apparaître Hans, dit-elle alors.
— Hans ? Mais...
— Cela m'est égal qu'il soit le mari de ma sœur, je le détesterai toujours pour avoir tenté de me tuer et de s'emparer de mon trône par la ruse. Modèle un Hans en neige plus vrai que nature, que je puisse me défouler sur lui, à défaut du vrai.
Sebastian haussa les sourcils puis obéit et un Hans taille réelle aux détails troublants se forma devant le jeune couple, affichant un posture d'attaque avec une épée à la main. L'effet sur Elsa fut immédiat, elle serra les poings et la tension se fit palpable. La seconde suivante, elle décochait une attaque qui frappa la statue à la poitrine, y creusant un trou de quelques centimètres de profondeur que Bash s'empressa de réparer.
— Recommence ! dit-il alors.
Elsa ne se fit pas prier ; pendant vingt minutes ensuite, elle degomma toutes ses maigres forces sur la statue de glace, ne parvenant qu'à faire sauter des écailles de neige plus ou moins grandes et profondes.
— Faisons une pause, décreta soudain Sebastian.
— Non, on continue.
— Et j'ai dis non, Elsa, tu ne dois pas forcer sous peine de reperdre tes pouvoirs et...
— Qui es-tu donc pour donner des ordres à une reine ?
Surpris, Sebastian observa son amie, mais elle secoua la tête. Il pivota et alors avisa Kinatuae qui approchait.
— Tu n'as pas répondu.
— Et il n'a pas à vous répondre, répondit Elsa. De plus, je ne suis pas une reine.
— Crois-tu ?
Le couple échangea un regard.
— Sauriez-vous quelque chose sur mes parents ? demanda alors Elsa, soupçonneuse.
— Non.
— Dans ce cas, inutile que nous continuions cette discussion. Au revoir.
La jeune femme tourna le dos à la Magiker qui serra le poing. Bash dû sentir que la femme allait attaquer, car il bascula soudain son bâton et le cristal brilla, attirant l'attention d'Elsa qui se retourna.
— Allez-vous en, Kinatuae, dit-il. Si vous vous en prenez à Elsa, vous en paierez les conséquences.
— Sebastian...
La blonde posa une main sur son bras puis observa la Magiker qui inspira et se redressa, mâchoires serrées.
— J'ignore à qui tu as volés ces pouvoirs, dit-elle. Mais si tu es bien l'enfant que j'ai mis au monde il y a vingt-cinq ans, alors tu ne devrais même pas avoir connaissance de notre existence !
— Comment savez-vous que c'est votre fils, d'ailleurs ? demanda alors Elsa en croisant les bras. Vous dites qu'il est né sans pouvoirs, mais Sebastian est le Magiker le plus puissant que je connais. Il m'a poussée dans mes retranchements pour que j'accepte de gérer ma colère, et en aucun cas je n'ai pensé, pas un seul instant, qu'il pourrait être un usurpateur !
La Magiker préféra ne rien répondre, tourna les talons et quitta les bois. Elsa inspira ; Bash grogna alors et s'éloigna. La jeune reine l'observa s'asseoir sur un tronc d'arbre et elle le rejoignit.
— Est-ce que c'est vraiment ta mère ?
— Je ne sais pas... Si c'est elle, et qu'elle dit que je suis né sans pouvoirs, alors d'où viennent-ils ? Et pas de toi, non, puisque je ne te connaissais pas et que je pratique la magie depuis ma plus tendre enfance...
Il baissa le nez et Elsa approcha sa main pour le toucher, mais une décharge d'électricité la fit glapir et elle recula sa main.
— C'était quoi ?! sexclama-t-elle.
— Je ne sais pas... On aurait dit de l'électricité statique, mais...
— Oh, non, c'était bien plus puissant ! Pourtant tu n'es pas...
— Non je ne contrôle que l'eau sous toutes formes...
— Et moi la glace et la neige...
La jeune femme regarda alors autour d'eux, mais la clairière était vide et silencieuse. Elle soupira alors par le nez et se releva ; Bash l'imita et proposa qu'ils rentrent chez Mohekar. Elsa accepta, un peu frustrée et agacée, et le chemin du retour fut très silencieux...
.
— Je vais lui parler.
— Non.
Mohekar soupira. Elsa et Sebastian lui avaient raconté leur entrevue avec Kinatuea, et le Magiker avait clairement montré son agacement.
— Comment puis-je savoir si je suis son fils ou pas ? demanda alors le jeune magicien.
— Il n'y a aucun moyen, hormis la magie.
— Et avec la magie, ça se passerait comment ?
— Déjà, passer par Kin est hors de question, répondit Mohekar. Son mari sera sans doute plus enclin à nous aider, mais il nous faudra le brosser dans le sens du poil...
— C'est à dire ? Avec une épouse comme cette femme, il a sans doute des demandes qui pourraient être exhaussées ?
— Du genre ? demanda Sebastian.
— Eh bien, peut-être, partir ?
Mohekar grimaça.
— Nous n'aimons pas quitter notre île, répondit-il. Polijoe est un homme gentil, il supporte Kin depuis trente ans, mais elle n'était pas aussi véhémente avant...
— A-t-elle d'autres enfanrs ? demanda Bash.
— Huit, oui. Trois filles et cinq garçons ; le plus âgé à vingt ans, mais tu serais potentiellement son aîné.
— J'aurais donc huit frères et sœurs... C'est un comble pour moi qui ait vécu seul pendant plus de dix ans...
— C'est une évidence, mais ses autres enfants sont tous des Magikers et...
— Et lui aussi... rappela Elsa.
Mohekar préféra ne rien répondre et soupira en glissant un sucre dans sa tasse de thé. Elsa l'imita, mais Bash demeura immobile et silencieux un moment, comme s'il encaissait le fait qu'il avait toujours eu de la famille, qu'ils ne les connaissait simplement pas...
Lorsqu'il quitta la pièce, Elsa amorça le mouvement de le suivre, mais Moheka l'en empêcha.
— Laisse-lui de l'air un moment.
— Je ne l'envahi pas pourtant...
— Non, mais il a besoin de réfléchir. Toi tu as toujours eu une famille, Elsa, lui non. Il a été chassé de sa maison par sa propre mère adoptive qui ne voulait pas que son mariage souffre de sa présence... Si ton père adoptif avait fait la même chose, tu aurais sans doute voulu toi aussi un peu de solitude.
Elsa grimaça.
— Je suis la solitude faite femme, Mohekar... J'ai passé toute mon enfance enfermée dans ma chambre, terrifiée par mes pouvoirs après avoir accidentellement blessé Anna... Quand nos parents sont morts en mer, je ne suis pas allée à l'enterrement, je ne me sentais pas digne de cela alors que je n'avais rien fait pour eux. Mais j'ai finalement dû sortir, pour prendre la place qui m'était due, et la solitude a été encore pire dès que je suis devenue reine ! Même ma sœur me montrait une déférence qu'elle n'avait jamais eue...
— C'est normal, répondit le Magiker. Tu n'es plus sa grande sœur désormais, mais sa reine, et elle te doit le respect qu'il t'es dû. Quand tu rentreras à Arendelle, tu seras sa vassalle, elle sera la reine, et tu feras exactement comme elle avec toi.
Elsa serra les lèvres et jeta un coup d'œil vers les escalier menant aux chambres.
— Sebastian m'a été "offert" si j'ose dire, par ma sœur, dit-elle doucement. Elle a pensé qu'un autre magicien pourrait m'apaiser et m'apprendre à contrôler mes pouvoirs... Ce n'est pas exactement ce qu'il s'est passé, mais je sais maintenant que je ne pourrais plus vivre sans lui.
— Tu l'aimes ?
Elsa baissa les yeux.
— Je n'ai pas de référence sur le sujet, je ne peux donc pas te répondre, dit-elle en haussant une épaule.
— Je ne peux pas répondre à ta place, néanmoins, de ce que je vois, sans vous avoir connu avant, il y a quelque chose qui se tisse entre vous deux. Quelque chose de solide qui, outre le fait que vous soyez de la même race, vous liera pour le reste de votre vie.
Elsa serra les lèvres.
— Notre avenir à tous les deux dépendra uniquement des réponses que nous allons obtenir ici...
Mohekar opina. Pour le moment, ses contacts restaient muets, personne ne savait si un couple avait quitté l'île vingt-et-un ans en arrière et donné naissance à une petite fille, abandonnée ensuite chez les souverains d'Arendelle, mais l'île était vaste et elle avait plein de petits atoles où il pouvait y avoir des gens ayant connu les parents d'Elsa, peut-être même de la famille !
Malheureusement, ces recherches allaient prendre des semaines, des mois sans doute, et le couple ne sera pas de retour à Arendelle avant une année au moins, ce qui forcerait Anna a considérer que sa sœur est morte et donc, à monter officiellement sur le trône...
On a vu mieux comme début de règne... songea le Magiker en observant la jeune femme de l'autre côté de la table.
Elle sirotait son thé, pensive. Elle était un joli brin de fille, blonde, les yeux bleus comme de l'eau... Malheureusement, ses traits ne rappelaient rien au magicien, il ne pouvait donc même pas partir d'une base quelconque pour l'aider à retrouver sa famille, si toutefois elle en avait une...
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