Chapitre 34
HOLLY
Je sais que quelque chose cloche quand le regard de Nash ne quitte plus le mien, quand je sens ses doigts agrippés à mes hanches comme si elles lui permettaient un encrage. Je meurs d'envie de lui demander ce qu'il se passe, mais ma raison me pousse à rester silencieuse. Ses iris m'épient, passant de mes lèvres à mon regard. Je reste de marbre, même si mon petit froncement de sourcils ne lui échappe pas. Je déglutis tant son regard exprime la colère, la tristesse, le regret, tellement de choses que je ne demande qu'à comprendre. Je pensais pourtant que l'altercation qu'il a eue avec Dan tout à l'heure et notre explication suite à cela, avait apaisé les choses. J'ai dû me tromper.
Toutefois, alors que son regard se faisait insistant, il le quitte une fraction de seconde pour regarder derrière moi, une erreur qu'il vient de commettre pouvant me permettre de comprendre son comportement. Je pivote à mon tour, ma poitrine se comprime, mes yeux se plissent comme pour mieux voir ce qu'il se passe sous mes yeux. Je sais qui est cette fille. Je sais ce qu' elle a fait. Je sais que c'est elle qui a réduit le cœur de Nash en miette. Devant lui, se rejoue toute la scène, la scène qu'il a dû voir si souvent dans ses cauchemars et qui le hante encore.
Sans même m'en rendre compte, mes doigts cherchent ceux de Nash. Lorsque je les retrouve, j'entrecroise ses doigts au mien, il reste de marbre, ses yeux rivés dans leur direction, le visage complètement figé, ne me permettant même plus de deviner ce qu'il ressent. Ses bras son raide le long de son corps, j'imagine que son cœur lui, s'effrite un peu plus.
Un élan de colère me submerge, entraînée par la tristesse que je ressens pour mon meilleur ami. Je me surprends à marcher d'un pas décidé vers Dan, alors que cette fille qui l'accompagne est pendue à ses lèvres. Je me plante devant eux. Dan me toise, Laura, elle, fronce les sourcils.
— Est-ce qu'on peut t'aider ? m'interroge-t-elle d'un ton qui laisse transparaître son culot.
Comment Nash a-t-il pu tomber amoureux d'une fille comme elle...
— Oui, allez vous rouler des pelles ailleurs, lâché-je sans filtre.
Dan réprime un sourire. Je sais qu'il a remarqué Nash un peu plus loin et il en joue parfaitement.
— Pourquoi donc, tu es jalouse, Holly ? raille-t-il.
— Holly, c'est elle ? semble réaliser celle au cœur des tourments de Nash.
Je les regarde un à un, la colère irradiant mon corps.
— C'est moi, et si vous avez un minimum de respect pour celui que vous considériez comme votre ami, ou bien votre petit ami, allez plus loin, vous voyez bien que vous lui faites du mal... je souffle presque.
Dan secoue la tête comme s'il se foutait de ce que je dis, Laura quant à elle, lance un regard par-dessus mon épaule, elle n'exprime rien, si ce n'est... du regret ? Je crois apercevoir son regard s'assombrir un instant.
— Je pense que c'est à vous de dégager, c'est chez moi ici, Ly', assène Dan, se permettant d'utiliser le diminutif que Nash est le seul à se servir à mon égard.
Dan est l'un des types que je déteste le plus maintenant que je sais ce qu'il a fait à Nash. Je ne le pensais pas comme ça, et encore moins lorsque je l'ai rencontré.
— Tu as raison, on n'a plus rien à faire ici, conclus-je.
Mon regard dévie vers celui de Laura, qui fixe Nash, je me tends. Malgré moi, une jalousie s'empare de mes pores, je la sens monter, au fur et à mesure qu'elle l'analyse.
— Tu n'as plus le droit de le regarder comme ça. Pas après ce que tu lui fais, j'ajoute en m'adressant à Laura, amère.
J'ai enfin son attention, son regard m'envoie des éclairs.
— Et permets-moi d'ajouter que Nash s'en est remis, et qu'à l'heure actuelle, il n'a plus qu'un regret ; celui de t'avoir estimé bien plus qu'il n'aurait dû.
Je les plante là, sans un mot de plus, avant de retrouver Nash qui n'a sûrement rien loupé. Ses pupilles tombent dans les miennes lorsque je suis suffisamment proche de lui.
Je me hisse sur la pointe des pieds afin d'être à sa hauteur, remets une de ses éternelles mèches rebelles en arrière, son attention ne me quitte pas un instant.
— Est-ce que tu me laisses faire ? soufflé-je, sachant qu'il a compris où je voulais en venir.
Pour toute réponse, j'ai un hochement de tête, c'est suffisant pour moi. Empreinte d'un élan de courage, j'effleure ses lèvres des miennes, d'une douceur sans nom. Je ferme les yeux, appréciant simplement la chaleur de nos corps, proches l'un de l'autre, m'arrachant un frisson le long de mon échine.
— Holly... soupire Nash.
Mon prénom, prononcé avec tant de douleur dans sa voix, me comprime la poitrine. Il ne va pas bien. Pourtant, j'ai besoin qu'il aille mieux, c'est mon pilier, j'ai besoin qu'il me donne le sourire, qu'il me fasse rire.
— Je t'en prie Nash, ne pense pas à elle.
— Je ne peux pas, souffle-t-il.
Je rouvre mes paupières jusqu'ici closent, ce que j'y décèle me brise le cœur. Il est triste, même perdu. Une multitude d'émotions me sont transmises rien que par le regard qu'il me jette.
— Tu ne peux pas quoi ? je murmure, m'attendant certainement à une réponse qui me brisera le cœur.
— Je ne peux pas l'oublier. Elle est là, devant moi, et...
Les larmes aux yeux, je hoche la tête, parce que malgré tout, j'ai l'impression de le comprendre : il en a aimé une autre de tout son cœur, avant moi.
— Je comprends, je le coupe.
Je retombe à plat sur mes deux pieds, en ayant encore la sensation de ses lèvres tout près des miennes. Un poids atroce me comprime, je retiens mes larmes, je ne veux pas craquer. Pas alors qu'il n'y peut rien. Ce sont ses sentiments, il ne peut rien contre.
Alors que ma main s'était glissée dans la sienne, je la retire délicatement, comme si je m'ôtais de mon ancrage. Nash rattrape doucement mes doigts, son regard cherche le mien.
— Ne m'en veut pas, Ly'.
— Je ne t'en veux pas...
— Au fond de toi, si, et je le sais.
Son front tombe contre le mien, je pince mes lèvres comme pour éviter de pleurer.
— Pourquoi est-ce que tout est si compliqué entre nous ? je murmure, le cœur au bord des lèvres.
— J'en sais foutrement rien...
Est-ce que l'on est voué à s'aimer l'un l'autre, sans jamais y arriver pleinement ? Est-ce que notre amitié l'emportera toujours sur nos sentiments ? Est-ce que tout ce qu'il se passe est comme une mise en garde du destin, remettant en question ce que l'on ressent ?
Cette fois, je décide de sortir de cette maison qui devient trop étouffante. Sur le point de franchir le portail de la propriété, Nash me retient.
— Holly, attends.
Je m'arrête, me retourne afin de lui faire face, j'essuie ma joue, où une larme capricieuse a tracé son chemin sans mon accord.
— Où est-ce que tu vas ?
— Il est temps que je rentre, annoncé-je à celui qui fait battre mon cœur à la chamade.
— Laisse-moi te raccompagner, je n'aime pas quand tu rentres seule...
Quelque chose s'est éteint dans son regard. Je déteste ça.
— D'accord, je lui accorde.
Sur le chemin du retour, il ne prononce pas un mot, aucun de nous deux d'ailleurs. Je crains que si j'ose dire quoi que ce soit, ma voix ne faiblisse sous l'émotion.
Il me raccompagne jusqu'à ma résidence, nous nous plantons devant les grandes portes de mon bâtiment, silencieux. Il me regarde et j'ai l'impression de revenir quelques jours en arrière, avant notre première fois. Avant de nous rendre compte de nos sentiments mutuels.
Après un pas en avant, nous revoilà dix pas en arrière.
Lorsque je capte son regard, je ne résiste pas et fonce l'étreindre de toutes mes forces, j'en ai besoin. L'odeur du sweat qu'il porte emplit mes narines, je ferme les yeux en laissant une larme silencieuse mouiller son vêtement, discrète. Je ne veux pas qu'il se rende compte d'à quel point j'ai mal au cœur, surtout pas qu'il pense que c'est sa faute, parce que ça ne l'est pas.
— Je t'aime Nash, je souffle douloureusement.
Comme pour rendre notre étreinte encore plus forte, comme pour que je ne lui échappe pas, l'une de ses mains se glisse dans mon dos, me comprimant tout contre lui, l'autre s'emmêle dans mes cheveux. Je ferme les yeux, la joue posée contre son torse. Je laisse mes sentiments s'envoler, qu'ils aillent où bon leur semblent, qu'ils lui soient destinés où qu'ils soient réduits à néant, je sais que je suis folle de lui. Peu importe si nous ne savons pas si c'est au-delà d'une amitié indescriptible, ou d'un amour que je n'ai encore jamais ressenti, je lui laisse.
Je recule, mettant fin à notre étreinte, plonge mon regard une dernière fois dans le sien, éteint, et m'éloigne pour rentrer chez moi.
La porte de mon appartement refermée derrière moi, je me laisse glisser contre elle. Mon visage vissé contre mes mains, je ne pleure pas, je n'ai plus la force. J'ai mal au cœur, mais je ne pleure pas.
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