Chapitre 9
Les jours ne lui avaient sans doute jamais parus aussi longs. Ron passait son temps à courir entre les salles de classe, à faire ses devoirs, à échapper aux réprimandes d'Hermione et à élaborer des tentatives pour faire fuir les premiers années prenant tous les fauteuils de la Salle Commune. Leurs professeurs continuaient à leur donner de plus en plus de devoirs et Ron avait demandé à sa mère de lui envoyer de l'encre supplémentaire, n'en ayant déjà plus en réserve.
Il lui restait un devoir d'astronomie et de potion alors que la lune éclairait déjà bien le château. Ron avait décidé de faire ses devoirs sérieusement dans le calme de son dortoir, loin de ses frères et d'Hermione qui, d'un côté comme de l'autre, l'aurait dérangé. Il avançait bien mais les heures passaient et ses yeux commençaient sérieusement à le piquer. Harry dormait déjà, ainsi que Neville et Seamus, Dean n'étant toujours pas couché. Il écrivit encore un paragraphe entier sur certaines étoiles avant de se décider à quitter son lit. Son ventre commençait à sérieusement le tirailler et il ne comptait pas attendre le petit déjeuner.
Ses pieds rencontrèrent le tapis et, vêtu de son pyjama et de son peignoir, il se décida à descendre rapidement les escaliers. Il aperçut Dean dans la Salle Commune en pleine partie de bataille explosive avec un garçon d'une autre année. Il le salua d'un signe de tête et sortit sans attendre. Quand ses pieds rencontrèrent la pierre froide il regretta de ne pas avoir mis de chaussettes. Il se retourna vers la Grosse Dame mais, en croisant son regard sévère, décida de ne pas la déranger plus que ça. Il entreprit de descendre les nombreux escaliers qui menaient à la cuisine, bien heureux d'en connaître l'endroit et le moyen d'entrer. Il parcourait rapidement les couloirs, ne prenant pas la peine d'éclairer les alentours avec sa baguette. Il était trop fatigué pour avoir peur de rencontrer un professeur ou un fantôme.
Proche du rez-de-chaussée, il constata mi-ravi mi-désespéré que sa fatigue l'eût quelque peu quittée. Il franchit les dernières marches en se frottant les yeux, et fut arrêté dans son bâillement par la rencontre d'un obstacle. Il cligna des yeux et se rendit compte alors qu'Allan le regardait. Déglutissant difficilement sa salive, il réussit tout de même à dire :
« Salut... »
Le Poufsouffle le fixa un moment avant de répéter d'un ton interrogatif :
« Salut ? »
Ron chercha quelque chose à répondre mais heureusement -du moins c'était ce qu'il pensait au début- Allan reprit la parole :
« Tu m'ignores toute la semaine et tu me dis 'salut' ? Sérieusement ? »
Ron, encore sur la dernière marche, se sentait plus petit que jamais. Il voulait que le sol s'ouvre sous ses pieds et qu'il s'y engouffre sans plus jamais ne revoir la lumière du jour. Il voulait en cet instant être invisible et regrettait de ne pas avoir pris la cape d'invisibilité d'Harry. Mais, il dût bien se l'admettre, il était content qu'Allan lui adresse encore la parole.
« Ça ne te fatigue pas de jouer au yoyo avec moi ?
-Je ne joue pas au yoyo avec toi ! se défendit le rouquin. Je... C'est quoi un yoyo ?
-On s'en fiche de ce qu'est un yoyo ! »
Malgré le ton qui montait, Allan s'était mis à chuchoter. Il voulait visiblement l'engueuler mais ne voulait pas se faire prendre si stupidement par les professeurs.
« Tu crois pouvoir m'ignorer et venir me parler ensuite comme si de rien n'était ?!
-Je suis pas venu te parler ! C'est toi qui te trouvais là !
-Ma Salle Commune est juste à côté, cervelle de Troll ! Et toi, qu'est-ce que tu fais là en pleine nuit ?! T'as rien à faire ici !
-La cuisine est juste là, pour qu'elle autre raison je serais venu ici ?! »
Allan lui lança un regard noir et Ron le soutint du mieux qu'il put, les nerfs à vif.
« De toute façon, cuisine ou pas, je comprends pas pourquoi tu me parles, reprit Allan.
-Moi non plus je comprends pas pourquoi tu me parles si tu me déteste !
-Je te déteste pas ! C'est toi qui m'ignores depuis le début !
-Je... »
Ron s'interrompit lui-même, le regard soudainement tourné vers la Grande Salle. Il entendait du bruit et en avait rapidement identifié la source. Allan s'apprêtait à rajouter quelque chose, toujours sur le même ton énervé, mais Ron fut plus rapide :
« Peeves arrive ! »
Le Poufsouffle suivit la direction de son regard et écarquilla les yeux. Ils se mirent silencieusement en accord et coururent vers les escaliers. Il ne leur fallut que quelques instants pour rejoindre une salle de classe vide au premier étage. Alors qu'ils refermaient la porte le plus discrètement possible, Peeves flottait vers les étages en chantonnant des airs. Allan se tourna vers lui et il put distinguer ses différents grains de beauté. Son visage paraissait doux et il avait soudainement envie de le toucher. Ron le savait, il s'en rendait maintenant pleinement compte, Allan lui avait manqué.
Il aurait voulu dire quelque chose. Il aurait voulu prononcer une phrase qui soit digne d'être mémorable. Il aurait voulu déclencher son rire, provoquer chez lui un regard plus serein, disperser ses propres pensées aux quatre vents pour ne plus fixer ses yeux... Ses yeux dont les couronnes dorées ressortaient grâce à la lune. Sa lumière venait juste se poser précisément sur les iris du jeune homme et Ron ne put s'empêcher de se dire que les choses étaient bien faites. A peine cette pensée traversa-t-elle son esprit qu'il sentit les lèvres d'Allan se poser sur les siennes.
Il ne savait plus qui de lui ou du Poufsouffle s'était avancé vers l'autre. Peut-être que, comme les autres fois, ils s'étaient tous les deux rapprochés. Il avait juste conscience, en cet instant, de leur bouche en contact et de la proximité du corps d'Allan près du sien. Bien vite, il sentit le mur contre son dos et approfondit le baiser sans même réfléchir.
Une de ses mains vint naturellement se poser sur sa nuque, ce qui lui permis de l'approcher un peu plus de lui. Il sentit les doigts d'Allan sur ses joues et se rendit alors compte qu'il avait lui-même les yeux fermés. Savourant ce moment, Ron prenait à peine le temps de reprendre sa respiration entre leurs baisers. Son autre main vint se perdre sur le torse du jeune homme et il souhaita que jamais cet instant ne cesse.
Puis Ron ouvrit les yeux, réalisant ce qu'il était en train de faire. Cédant à sa passion il en avait oublié tout le reste, même l'endroit où ils se trouvaient. Allan se détacha de lui et ils se regardèrent. Le silence s'installa, l'échange dura longtemps mais aucun des deux ne s'en rendit réellement compte. Encore si proche l'un de l'autre, et ne voulant pas mettre plus de distance entre eux, Ron réussit tout de même à lui faire part de ses pensées :
« Arrête, s'il te plaît. »
A sa grande surprise, ce ne fut pas de la déception qu'il put lire dans les yeux d'Allan. Ce dernier s'était rapproché de quelques centimètres, juste assez pour que leur visage soit suffisamment proche l'un de l'autre et pour qu'il puisse ainsi ressentir d'autant plus l'absence de sa bouche sur la sienne. Et dans ses yeux, une lueur de défi s'éveillait. Ron déglutit avec difficulté en tenant de ne pas regarder trop longuement ses lèvres. Se concentrant sur ses iris, il avait tout de même une conscience aigüe de cette proximité. Il sentit son cœur s'affoler et comprit bien vite qu'il ne résisterait pas longtemps. Il eut juste le temps de laisser échapper :
« Oh et puis merde. »
Sans attendre une seconde de plus, il prit le visage d'Allan dans ses mains et l'embrassa avec fougue. Le Poufsouffle y répondit sans attendre, se rapprochant d'autant plus de Ron qu'il n'était possible. Le rouquin sentit ses mains glisser dans ses cheveux et cette sensation le transporta ailleurs. Il avait l'impression de voler, de flotter dans l'air, de ne pas avoir ce mur froid contre son dos ni ce sol de pierre contre ses pieds. Il pensait n'être qu'avec Allan, perdus dans l'univers au milieu des étoiles. Et il se sentait bien, mieux que partout ailleurs.
Ils s'embrassèrent ainsi durant un long moment. En sortant de la salle de classe, Peeves n'avait pas laissé une seule trace de son passage. Ils se séparèrent sur l'escalier du premier étage, Allan devant redescendre pour atteindre sa Salle Commune et Ron devant gravir plusieurs escaliers vers les hauteurs. Au moment de se dire au revoir ils se regardèrent un instant et, sans le prévenir, le Poufsouffle le prit dans ses bras.
Ron profita de l'étreinte. Il se sentait si serein en sa présence. Il savait qu'ils allaient se séparer et il préféra écarter cette idée. Il ne voulait pas y penser, le fait même de l'imaginer faisait trembler son cœur. Il ne comprenait pas exactement ce qu'il lui arrivait, il savait juste qu'il ne voulait pas s'éloigner d'Allan. Mais ce n'était pas possible, il devrait attendre le lendemain pour se revoir.
Allan se décala légèrement de lui et posa son front contre le sien. Caressant sa nuque du bout des doigts, il lui confia dans un murmure :
« Je comprends que tu ne sois pas prêt, mais ne me fuis plus comme ça... »
Ron aurait donné n'importe quoi pour qu'Allan ouvre les yeux à cet instant et puisse le regarder. Il se contenta alors de resserrer son étreinte et d'enfouir son nez dans son cou.
« Je suis désolé. »
Il ne put savoir s'il l'avait entendu, mais le fait même d'avoir pu le lui dire le soulageait. Quand ils se séparèrent ils échangèrent un dernier baiser, plus tendre et plus doux que ceux qu'ils avaient échangé plus tôt. Ron l'observa s'éloigner et ne partit lui-même que lorsqu'il fut hors de vue. Chaque marche fut difficile à monter, chaque pas faisait rebondir son cœur et semblait le fissurer un peu plus. En retournant dans son lit, dans le dortoir silencieux des quatrièmes années, Ron repassait dans son esprit les images de sa nuit. Le ventre gargouillant il trouva tout de même le sommeil, oubliant ses parchemins qui attendaient toujours d'être remplis.
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