Point de vue de Gabriella

Je me réveille doucement. Comme d'habitude, j'ai du mal à émerger. Ceci dit, je ne suis pas dans la même position. Normalement je dors sur mon ventre et pas sur mon dos... J'ouvre les yeux. Visiblement je ne suis pas chez moi. Je me rends compte que je suis dans une chambre d'hôpital mais pourquoi? Je ne me rappelle pas avoir eu d'accident. Je continue à observer et je suis très étonnée de voir quelqu'un à mon chevet. On dirait Logan... mais oui c'est lui. Il est endormi. Ses bras sont posés sur le lit et sa tête sur ses bras. Sa main tien la mienne. Je serre cette dernière pour être sûre que je ne rêve pas. C'est bien réel. Il est là, à côté de moi. Il lève la tête. Il a l'air aussi perdu que moi.

- Gaby... me dit-il hésitant.

- Salut, lui répondis-je avec un petit sourire. Qu'est-ce que je fais là?

- Tout ce que je sais c'est que tu m'as appelé à l'aide. Tu as juste eu le temps de prononcer ces mots puis je ne t'ai plus entendue. Je suis vite allé chercher Gabe et nous sommes venus chez toi. On a du crocheter ta serrure et quand on est rentré, tu étais inconsciente. Gabe a appelé une ambulance. J'ai eu tellement peur... Tu te souviens de quelque chose?

- Je me rappelle que j'étais chez moi, je venais de rentrer quand mon père m'a appelée...

Et là, le choc, je me rappelle exactement ce qu'il s'est passé. La douleur au niveau de ma poitrine revient en force. J'ai du mal à respirer. Je gémis.

- Calme toi ma belle. Tu te rappelles n'est-ce pas?

J'acquiesce alors que les larmes dévalent sur mes joues.

- Tu veux bien m'expliquer? me dit-il doucement.

- Mon père m'a appelé, ça ne lui arrive jamais... il m'a expliqué que Christophe, mon frère avait un dîner en entreprise et qu'il devait ramener des plats mais que ma mère ne pouvait pas le faire. Il voulait que je le fasse. Je lui ai demandé pourquoi elle ne savait pas... c'est là qu'il m'a... c'est là qu'il m'a expliqué que ma mère est dans le coma depuis deux semaines.

Je n'en peux plus, je sanglote de plus en plus fort.

- Il ne t'avait pas prévenue? Pour ta mère?

Je lui fais non de la tête, je n'arrive plus à parler. Il me prend dans ses bras et me berce. Je sens qu'il dépose des baisers sur ma tête. Ça présence me fait du bien. Personne ne m'a jamais câlinée ni même prise dans les bras. Je ne sais pas combien de temps nous restons comme ça mais il parvient à me calmer, mes sanglots s'espacent. La porte s'ouvre. Probablement quelqu'un pour la personne qui est à côté de moi. J'ai effectivement pu me rendre compte que c'était une chambre à deux lits et que le deuxième est occupé. J'entends la personne se rapprocher. Peut-être une infirmière, personne à part Logan ne s'intéresse à moi de toute manière. Quelques minutes plus tard, une voix que je connais m'interpelle.

- Gaby?

- Christophe? Dire que je suis étonnée est un euphémisme. Que fais-tu ici? Je ne ferai pas tes plats. Tu peux retourner chez toi.

- Non je ne suis pas là pour ça. Je ne voulais pas que papa t'appelle. Je ne voulais pas qu'il te demande de le faire.

- Je ne comprends pas...

Il regarde Logan. Je suppose qu'il veut savoir s'il peut parler devant lui.

- Tu peux parler devant lui, lui dis-je excédée.

- C'est lui ton petit-ami? Ton voisin m'a dit qu'il t'avait accompagnée dans l'ambulance.

Je regarde Logan qui me fait un petit signe que oui. Ses yeux me disent eux que nous en parleront plus tard.

- Oui c'est mon petit-ami, lui dis-je en souriant à Logan. Vas-y, j'ai hâte de savoir pourquoi tu es là.

- Je voulais m'excuser. J'ai essayé de te joindre sur ton téléphone mais ça ne répondait pas. Je comprends mieux pourquoi maintenant. J'ai décidé d'aller à ton appartement et là un voisin m'a expliqué que tu étais partie en ambulance. Il m'a dit que tu serais probablement amenée ici. Du coup j'ai foncé...

Je reste silencieuse, abasourdie par son explication. Il y a quand même une chose que je ne comprends pas.

- Pourquoi t'excuser?

Il a l'air gêné. Il regarde ses pieds et se dandine. Je vois qu'il ne sait pas comment s'y prendre.

- Assieds-toi et explique-moi, s'il te plaît, lui dis-je doucement.

- Je n'ai rien vu... Je n'ai jamais fait attention à la manière dont les parents te traitaient... Je m'en veux, si tu savais.

- Qu'est-ce qui t'a fait ouvrir les yeux? lui dis-je en essuyant une larme.

- Sophie. Tu te rappelles le dîner où tu t'es enfuie? En partant ce jour-là, elle m'a demandé si c'était normal. Je n'ai pas compris ce qu'elle a voulu dire. Après ses explications, j'y ai réfléchi pendant des jours. Je me suis rendu compte que tu n'as jamais fait partie de la famille et que sans le vouloir, j'ai participé à cet état de fait. Je n'ai jamais rien fait qu'y puisse te prouver le contraire...

Je n'en reviens pas. Après tout ce temps, il se rend compte de ce que j'ai subi. Pour la première fois de ma vie, j'ai devant les yeux mon frère en larmes. Il a l'air sincère. Si je peux le comprendre, je ne peux pas encore lui pardonner. Il me faudra du temps pour ça.

- Merci. Tu ne peux pas savoir à quel point ça me touche.

- Je suis tellement désolé. Pourras-tu me pardonner?

- Oui... mais pas tout de suite. J'ai besoin de temps. J'ai encore une question...

- Vas-y, je te répondrai si je peux.

- Pourquoi tu ne m'as pas prévenu pour maman?

- Je pensais que tu étais au courant. D'un autre côté, je trouvais ça bizarre que tu ne sois pas venue la voir. J'en ai parlé à papa juste avant qu'il ne t'appelle. C'est là qu'il m'a dit que tu ne savais rien.

- Comment va-t-elle?

- Son état est stationnaire. Ils attendent juste qu'elle se réveille. Je peux te demander quelque chose à mon tour?

- Oui, je t'écoute.

- J'ai envie de reprendre sur des bases nouvelles. Je sais qu'on ne pourra pas rattraper toutes ces années mais j'aimerais essayer. Est-ce qu'on pourrait apprendre à nous connaître? Vraiment, je veux dire. Pour moi, tu as toujours fait partie de la famille. Je suis ton frère même si je n'ai pas agi comme tel.

- Je veux bien. J'aimerais bien découvrir mon grand frère, lui dis-je émue.

- Merci. Quant à maman et papa,

- Non, je ne veux plus avoir à faire à eux, je le coupe.

- Je pense que tu devrais avoir une vraie conversation avec eux quand maman sera remise et que tu t'en sentiras prête. Leur comportement n'est pas normal. Je viendrai avec toi si tu veux. Tu n'as plus à être seule face à eux.

- Christophe a raison, tu dois les confronter mais tu ne dois pas le faire seule. Tu pourras compter sur moi aussi, me dit Logan.

- Je ne me sens pas encore prête...

- Préviens-moi quand ce sera le cas. Je t'aime Gaby. J'espère vraiment qu'on pourra avoir une vraie relation fraternelle à l'avenir, me dit mon frère en m'embrassant sur la joue. Je dois te laisser, j'ai rendez-vous avec Sophie et j'aimerais avec les idées claires.

- Merci pour tout Chris. Tu remercieras également Sophie. Elle t'a ouvert les yeux alors que je n'ai pas été spécialement sympa avec elle.

- Elle a compris ne t'inquiète pas. Tiens-moi au courant pour la suite.

- Je n'y manquerai pas, promis. Et Chris?

- Oui...

- Je t'aime aussi.

Il me fait un grand sourire ému et sort de la chambre. Je me retourne vers Logan. Il me reprend dans ses bras et j'en profite pour déposer ma tête sur son épaule.

- Pourquoi tu ne m'as pas dit pour tes problèmes avec ta famille?

- Je ne voulais pas t'embêter et puis ça n'avait pas d'importance.

- Si c'est important. Tout ce qui te concerne est important. Quand tu te sentiras prête, tu me raconteras cette partie de ta vie d'accord?

- D'accord. Merci d'être là.

- Tu ne peux pas savoir comme j'ai eu peur pour toi. Quand l'ambulancier m'a demandé si j'étais de ta famille, je me suis fait passé pour ton petit-ami. Il n'aurait jamais voulu me laisser monter sinon. Tu m'en veux?

Je ne lui réponds pas. Ça fait beaucoup de choses en même temps. D'un autre côté, j'ai envie de savoir ce qu'il en pense. Après plusieurs minutes, je me lance.

- C'est ce que tu es?

- Quoi?

- Mon petit-ami. C'est ce que tu voudrais être?

- Et bien, tout dépend de ce que toi tu veux. Mais oui, j'aimerais que tu sois ma petite-amie. Tu comptes beaucoup pour moi et tu me connais mieux que quiconque. Quelque chose de fort est en train de se tisser entre nous. Je n'ai jamais ressenti ça...

C'est le jour des émotions. Les larmes ont recommencé à couler. Je regarde vers lui. Au fur et à mesure, je vois son visage se décomposer.

- Ce n'est pas grave, je ...

- Oui je veux être ta petite-amie. Excuse-moi de ne pas t'avoir répondu tout de suite. C'est beaucoup d'émotions pour moi aujourd'hui.

- En te voyant pleurer, j'ai cru que tu ne voulais pas.

- Ce sont des larmes de joie. Pour une fois, quelqu'un veut de moi. Je sais que c'est pathétique mais c'est vrai. Je sens aussi ce lien et tu ne peux pas t'imaginer le bien que tu me fais. Alors oui, j'aimerais qu'on soit ensemble. J'aimerais voir où cela peut nous mener.

Il me regarde avec un énorme sourire. Son regard descend jusqu'à ma bouche et je sens qu'il va m'embrasser. Après quelques secondes, ses lèvres touchent les miennes avec douceur. J'ai l'impression que des papillons volent dans mon ventre et qu'un feu d'artifice éclate dans ma tête. Je me sens entière pour la première fois de ma vie. Un raclement de gorge nous fait revenir à la réalité. Il me faut un peu de temps avant de pouvoir quitter ce moment magique et de me retourner vers le visiteur.

- Bonjour, je suis votre médecin. À ce que je vois vous allez beaucoup mieux, me dit-il avec un sourire en coin.

- Bonjour docteur, lui répondis-je

- J'ai de bonnes nouvelles. Vous pouvez partir, les examens n'ont rien décelé de grave. Il vous faut juste du repos et surtout une alimentation correcte. Je vais vous faire un certificat pour deux semaines et

- Deux semaines c'est beaucoup trop long. Je suis bientôt en examens. Je ne peux pas me permettre d'être absente aussi longtemps.

- Très bien, je vous donne une semaine mais ce sera repos complet d'accord? me dit-il en me tendant les papiers.

- Merci docteur.

- Voilà, tout est en ordre. Vous pouvez rentrer chez vous. Prenez soin de vous mademoiselle.

- Oui je le ferai, lui répondis-je avec un sourire. Logan? demandais-je en me tournant vers ce dernier.

- Oui ma belle?

- Comment je vais rentrer chez moi? Je n'ai rien sur moi et je suppose que tu n'as pas pris mon sac en partant.

- Ne t'inquiète pas. Gabe m'a demandé de le prévenir. Il s'est proposé pour nous ramener.

- Oh, c'est gentil à lui.

- Il sait à quel point je tiens à toi. Tous les gars de mon régiment le savent. D'ailleurs, ils sont venus prendre de tes nouvelles tout à l'heure.

Si quelqu'un m'avait dit que la terre est plate, je n'aurais pas été plus surprise. Ils sont tous venus??

- Euh d'accord.

Il a dû remarquer mon hébétude parce qu'il rigole et m'explique qu'ils sont très soudés. Il téléphone à Gabe pour le prévenir qu'il peut venir nous chercher et raccroche.

- Il sera là dans une trentaine de minutes. Ça te laisse le temps de te préparer tranquillement. Tes affaires sont dans l'armoire. Attends, je te les donne.

Je les prends en le remerciant et vais dans la salle de bain pour me changer. Une fois prête, nous sortons de la chambre et partons attendre Gabe devant l'hôpital. Dire que ma vie est bouleversée serait trop simple. En deux jours, j'ai été trahie, mon frère s'est excusé et a demandé pour qu'on devienne vraiment frère et sœur et j'ai un petit-ami. Heureusement Logan et Christophe sont parvenus à adoucir un peu ce que mon père m'a infligé. Je ne sais pas comment cela va tourner mais je compte bien profiter de ce presque nouveau départ. J'ai un frère, un vrai. Je regarde Logan. J'étais tellement perdue dans mes pensées que je n'ai pas vu Gabe arrivé. Un sourire timide naît sur mon visage. Même si je suis toujours meurtrie voir brisée, j'ai deux bonnes raisons d'essayer de m'en sortir.

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Voilà, un peu de soleil pour notre chère Gabriella :-). Et le début d'un couple, ils se sont lancés finalement.

Profitez-bien du beau temps.

Bisouilles

Chapitre corrigé le 1/07/18