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Chapitre 8 - Malheureuse comme les pierres

18 avril 2289 - Camp d'Hanoï

Nous sommes à Hanoï depuis deux mois. Deux longs mois durant lesquels ma vie n'a été qu'un brouillard confus. Le sinistre hôpital du camp est devenu ma nouvelle maison. Je slalome entre les lits rouillés alignés les uns à côté des autres sur trois rangées, me prends les pieds dans les trous du carrelage, ignore la teinte ocre terne des murs nus qui m'entourent. Ce matin, je dois terminer les vérifications de routine chez le malheureux que j'ai dû amputer suite à l'attaque de la base et repars sans avoir desserré les dents. Second patient de la journée, un autre survivant ayant souffert de multiples fractures et qui suit depuis une semaine une rigoureuse rééducation. L'homme a renoncé à essayer de me décrocher un bonjour. Depuis mon retour de Faraday-4, je ne parle presque plus. C'est d'abord la tristesse qui m'a noué la gorge. Aucun mot n'est sorti quand Mei est venue à ma rencontre à mon retour de la mission de sauvetage. Adèle lui a tout expliqué. Les morts, le choc, Saïd. Puis la peine s'est muée en détresse, et enfin en sombre colère. Je n'ai plus fait partie d'aucune expédition. Lee m'a toisée d'un long regard méprisant avant de me hurler dessus quand je lui ai opposé mon refus définitif le mois dernier. Il peut beugler tant qu'il veut, je m'en tape. Il se murmure que son départ pour Jakarta est imminent, je patienterai.

Mei, Adèle et Lisa ont bien tenté de se montrer patientes et optimistes pour me dérider, en vain. Les deux dernières ont définitivement abandonné il y a deux semaines. Jusque-là, j'ai réussi à esquiver Gatien et sa tête de chien battu. Pourquoi n'a-t-il pas su protéger Saïd ? Il était avec lui quand c'est arrivé, il aurait pu lui éviter le pire... J'ai vaguement conscience que mon raisonnement est bancal, mais je m'en fiche. Pourquoi n'ai-je pas insisté pour qu'il embarque dans la navette avec Mei et moi ? Je méprise Lee au plus haut point, parce que c'est lui qui a ramené le selcyn à la base, lui qui a fui en abandonnant ses hommes. J'ai la rage contre nos ennemis, contre K qui les a attirés sur nous malgré lui. Mais par-dessus tout, je suis furieuse contre moi. Je n'aurais jamais dû accepter cette horrible mission secrète, et je n'aurais jamais dû laisser Saïd sur place. Je sors de ma poche ce petit papier qui ne me quitte plus : Docteur Lina Fera, je te retrouverai. K. Les selcyns auraient-ils perpétré un tel massacre si K m'avait localisée ? À quoi bon se poser la question, Saïd est parti, comme tant d'autres.

Purée de chiotte, des larmes se remettent à déborder de mes yeux. Mes excès de tristesse se font de moins en moins fréquents, mais je ne suis pas encore prête à passer à autre chose. Je range le papier et m'isole dans un coin de l'hôpital du camp pour faire passer ce moment de faiblesse à l'abri des regards. Une silhouette s'approche de moi, et re-zut : c'est Gatien. Ce n'est pas le moment. J'ai envie de grogner, mais je ne suis pas un animal alors je me contente de lui adresser mon plus mauvais regard.

— Lily... ça va ?

De toute évidence, non ! J'ai envie de lui hurler ma réponse, mais mes mâchoires refusent de se desserrer.

— Il faut qu'on parle, tu ne peux pas m'ignorer éternellement. Ça fait deux mois, Lily ! Je... je comprends que la mort de Saïd t'ait bouleversée, mais...

Cette fois, je crois que j'ai vraiment grogné en l'entendant prononcer son prénom. Il me regarde d'un air surpris avant de poursuivre.

— C'est vrai, vous avez été en couple pendant deux ans, ce n'est pas rien. Mais moi, je suis là ! Je suis revenu, Lily ! Ton comportement me blesse... J'ai l'impression que tu n'es pas heureuse de me savoir vivant, que tu aurais préféré que ce soit lui plutôt que moi.

T'as tout compris mon poulet, mais les règles de bienséances et ma conscience m'interdisent de te l'avouer. Je soupire longuement en fixant mes pieds.

— Désolée, marmonné-je.

— Ce n'est rien, je te pardonne.

— Non. Je suis désolée parce que toi et moi, c'est fini, reprends-je d'une voix plus assurée.

Je le sens se figer, mais n'ose toujours pas relever les yeux. Je n'ai rien à ajouter, pas envie de me justifier de mettre fin à une amourette qui a duré à peine trois mois. Je veux qu'il parte. Vite. Après de longues secondes, c'est ce qu'il finit par faire. Il s'immobilise après trois pas et me lance, sans se retourner.

— Ils connaissaient mon nom. Les aliens. Ils m'ont appelé. Je n'ai pas survécu par hasard. Ils m'ont volontairement épargné.

Je relève le menton de surprise et le regarde s'éloigner de sa démarche encore claudicante. J'essuie rageusement mes larmes et me remets au travail, préférant oublier ses dernières paroles.

La journée s'étire sans fin, je ne prends pas la peine de m'arrêter pour manger un déjeuner décent. Mei finit par me rejoindre en milieu d'après-midi avec une sorte de tartelette aux nashis, un fruit qui ressemble à la pomme.

— Salut, doc ! s'écrie-t-elle avec entrain. Tu ne fais jamais de pause ?

— Je suis la seule médecin diplômée, Mei.

— Oui, je sais, tu me le dis tous les jours. Mais nos blessés commencent à être bien remis. Tu devrais t'accorder du temps pour toi, m'en accorder à moi.

— Mei...

— Non, toi écoute-moi ! m'interrompt mon amie. Je sais que tu es bouleversée, et je te connais suffisamment pour savoir que tu t'en veux. Il faut que tu arrêtes, tu n'y es pour rien ! Les jours se suivent et toi, tu t'enfermes dans ta douleur et tes regrets !

— Les aliens les ont tous massacrés parce qu'ils voulaient venger leur copain, celui que j'ai étudié comme un rat de laboratoire. Mince, tu as vu le papier, il me cherchait, moi !

— Je croyais que tu n'aimais pas ce mot : alien.

— J'ai changé d'avis depuis qu'ils ont assassiné l'homme que j'ai aimé !

— Et Gatien ?

— J'ai rompu ce matin.

— Bien. Il était temps.

— Bien, répété-je.

— Nous aurons notre vengeance un jour, ma Lily, reprend mon amie en se rapprochant de moi. Plus le temps passe, plus les forces humaines reprennent de la vigueur. Les drones et les IAM réparés se multiplient, contrairement à leurs vaisseaux qui ne sont probablement pas remplacés après un crash. Ils sont trop peu nombreux, sans renfort, sans usine d'armement et sans leurs précieuses bombes IEM. Un ou deux milliards contre trente millions, c'est mathématique : nous les aurons. Et chaque terrien mort pour notre libération est un héros. Saïd est l'un d'eux.

Je saisis la main de Mei, confuse. Elle me sourit en plaçant une mèche de mes cheveux blonds derrière mon oreille. Puis elle me caresse la joue avec une grande tendresse. Je lui rends finalement un faible sourire. Mon amie fait alors une chose qui me prend de court : elle pose la tartelette sur la console, m'attrape le visage à deux mains et plaque ses lèvres sur les miennes. Ce n'est pas la première fois que nous nous embrassons, mais je sens dans cette étreinte quelque chose de différent. De stupeur, je laisse sa bouche s'emparer de la mienne. Il me faut peu de temps pour reprendre mes esprits, et je la repousse fermement.

— Mei...

Mon amie ne se départit pas de son joli sourire. Elle reprend la tartelette et me la tend.

— Joyeux anniversaire, Lily !

Je me fige. C'est mon anniversaire ? Un coup d'œil à l'horloge universelle me le confirme : jeudi 18 avril 2289. J'ai vingt-quatre ans. Je saisis le dessert que m'offre Mei et croque dedans davantage pour lui faire plaisir que par envie. Elle ne lâche pas ma bouche des yeux. Quand enfin son regard remonte au mien, elle lance d'une voix qui se veut pleine d'entrain :

— Je vais retrouver Adèle, je crois que c'est sérieux, elle et moi.

— OK, je suis contente pour toi.

— Je ne te propose pas de plan à trois comme cadeau ?

— Non merci, je préfère la tartel...

Une sirène se déclenche, comme une alarme d'hovercar, mais en plus fort. Un type entre dans le bâtiment en criant :

— Attaque ! Que tous les blessés capables de marcher nous viennent en aide ! Il nous faut des personnes au réapprovisionnement des tourelles et des pilotes aux commandes des drones ! Ceux qui savent manier un fusil doivent se rendre à l'armurerie. Les autres, au sous-sol. Docteur Ferrat, vous et vos infirmiers devez vous tenir prêts à recevoir des...

Une rafale de tirs laser l'interrompt. L'homme n'y survit que grâce à ses réflexes, en se mettant à couvert derrière un pilier. Affolée, je m'accroupis derrière un chariot en me bouchant les oreilles. Quand le vacarme cesse, je me relève pour constater les dégâts : toutes les vitres de ce côté-ci du rez-de-chaussée ont explosé. La poussière me fait tousser et me pique les yeux. Des cris de panique retentissent dans la rue et une dizaine de personnes entrent dans le bâtiment en portant des blessés, marchant sur les bris de verre sans y accorder la moindre importance. La terreur se lit sur leurs visages. Sidérée, je reste quelques secondes à les observer avant de réagir. Je saisis Mei et un autre infirmier par les bras et les entraîne vers les nouveaux venus. Une femme hurle, le visage en sang. Elle tient dans ses bras un bébé silencieux. Je la rejoins en quelques enjambées.

— Suivez-moi madame, vous êtes en sécurité à présent. Je suis le docteur Lyna Ferrat, je vais m'occuper de vous et de votre bébé.

J'assois la blessée toujours gémissante et entreprends un examen rapide de son visage. Je détecte rapidement une entaille à la joue. Rien de mortel, mais elle aura une belle cicatrice. Examiner son bébé s'avère plus compliqué. La mère continue de geindre en le maintenant serré contre sa poitrine. J'ai peur qu'elle l'étouffe, et en même temps, l'absence de cris du nourrisson me fait penser au pire. Quand enfin je peux approcher le petit corps, mes affreux doutes se confirment : l'enfant sans vie a servi de bouclier involontaire à sa mère. Je bloque sur la petite tête apaisée de la jeune victime, puis reviens vers la mère dont les cris ne sont plus que de faibles râles. Je m'imagine à sa place, si j'avais accepté de fonder une famille avec Saïd. Je me sens submergée par tout un tas d'émotions négatives. Un homme me sort de ma torpeur en m'attrapant le poignet.

— Doc, je vous en prie ! C'est ma femme... elle saigne beaucoup.

Je passe une couverture sur les épaules de la mère éplorée avant de le suivre.

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