S'apprivoiser
- Alors ...
- Alors quoi ?
- Laisse-moi parler ou bien tu ne le sauras jamais.
- D'accord, d'accord ...
- Alors, d'où viens-tu ?
- Est-ce que c'est important ?
- J'étais sûre que tu réagirais comme ça. Tu es trop prévisible mon pauvre !
- C'est faux !
- Menteur, tu sais que j'ai raison !
- Mademoiselle, on ne distrait pas le conducteur.
- Bon alors, tu réponds ?
- J'habitais La Cabucelle*. Et toi ?
- Saint-Louis*.
- On s'est déjà croisé ?
- Aucune chance ! Je n'avais pas le droit de sortir de mon quartier, sauf pour aller au lycée.
- Ah oui ? Et qu'est-ce que tu fais là-bas le soir de l'accident ?
- C'est pas tes affaires !
- D'accord, comme tu veux. Et tu as quel âge ?
- Presque 20 ans.
- Et tu vis encore chez tes parents ?
- Ils avaient besoin d'aide et puis ... Non mais attends, c'est une question à la fois, tricheur !
- Ah oui, pardon. Prochaine question ?
- Ton âge ?
- Copieuse !
- ça risque pas, je ne copie pas les tricheurs, moi !
- Mouais ... Je viens d'avoir 25 ans.
- Joyeux anniversaire, vieux croûton !
- T'es en retard de trois mois. Mais merci quand même.
- De rien !
- J'ai une autre question pour toi.
- Je t'écoute.
- C'est quoi le problème avec tes parents ?
- Ils sont ... Comment dire ... Spéciaux.
- C'est à dire ?
- Ma mère est folle. Mais mon père a refusé de l'enfermer dans un asile, car son "cas" n'était pas vraiment "grave". Le problème c'est que mon père sombre peu à peu dans une dépression aigüe et je ne peux rien faire pour l'aider. Alors j'ai mis de côté mes études pour pouvoir m'occuper d'eux.
- Je suis désolé.
- Tu ne dois pas l'être. Il ne faut pas les plaindre. Il l'ont mérité.
- Mais ...
- Il ne faut pas, je te le dis. Je l'ai mérité.
- Et tu n'as pas peur de ne plus les revoir à ton retour ?
- Primo, j'ai renoncé à me suicider, simplement parce que je savais que ce n'était pas à moi de mourir, mais à eux. Secundo, je ne reviendrai pas.
- Mais où veux-tu aller ?
- Peu m'importe. Emmène-moi au bout du monde si cela te plaît. Conduis-moi là où se croise partout et nulle part, je m'en moque. Je n'ai pas de destination. Je n'ai qu'un point de départ, et je n'y retournerai pas. A toi de choisir notre fin, je ne suis là que pour le voyage.
- Et si je m'arrêtais. Si je te laissais là, sur le bord de la route, tu ferais quoi ?
- Tu n'en aurais pas le cœur.
- Je n'ai jamais demandé à être accompagné, et tu le sais très bien.
- Si tu me laissais quelque part, n'importe où dans les villes, dans les campagnes de France, je continuerai à pied. J'ai toujours aimé marcher. Et puis, je te l'ai déjà dit, je ne suis là que pour le voyage.
* Quartiers de Marseille, 15ème arrondissement
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