La tempête a repris de plus belle après une accalmie de quelques heures. Simon se trouve chanceux d'être revenu au bureau à temps. Katelyn est toujours dehors et doit sans doute être sur le retour. La route risque d'être longue avec ce mauvais temps. En attendant le retour de sa coéquipière, il file vérifier si ces problèmes d'identifications ont bels et bien été résolus.

« Hey ! Salut Simon ! fait Matt en le voyant débarqué dans sa chambre forte. Alors comme ça tu as fait la peau à tes problèmes d'identifications ?

- Oui. Il m'a bien fallu quelques heures pour y arriver. Les gens de SupChronics sont vraiment incroyables.

- Ah bon ? Dans le sens positif ou négatif de terme ?

- Hum... je dirais les deux. Autant ils sont compétents voire doués. Mais leur protocole de sécurité est démentiel au point où s'en est ridicule. A croire qu'ils ne font pas confiance à la police.

- Je te le confirme. Ils n'ont pas du tout confiance en nous.

- Comment le sais-tu ?

- Hé bien avant de travailler ici, j'ai eu une série d'entretiens d'embauche avec leur service informatique.

- Ah oui ?! Je ne le savais pas. Et comment ça s'est passé ? Tu as été recalé ?

- Non, au contraire, j'ai été admis. Mais j'ai préféré démissionner quand j'ai vu leurs protocoles de sécurité. J'ai même eu le temps de voir des données qui me laissent penser que SupChronics possède sa propre force d'intervention armée.

- Ça ne me semble pas trop légal. Tu en as parlé à quelqu'un d'autre ?

- Non. J'ai préféré me taire. Je ne veux pas mettre ma vie en danger pour une telle information !

- Tu as raison. Mais maintenant que je le sais, je vais enquêter dessus.

- Et l'homicide multiple ? Que vas-tu en faire ?

- T'inquiète. J'ai le pressentiment que ton information et notre enquête sont liées, d'une manière ou d'une autre.

- Si tu le dis.

- Et peut-être que les informations de Katelyn nous permettront de mettre en place une piste de recherche convenable... Bon quelle heure est-il ? Bon sang ! Mais qu'est-ce qu'elle fabrique ? J'espère qu'elle n'a pas eu de problèmes sur la route.

- Je l'espère aussi. Ah au fait ! Doc' voulait te voir. Il semblerait qu'il ait trouvé autre chose.

- Ok. Dis-lui que j'arrive. A plus tard. »

Quelques instants plus tard, Katelyn entre enfin au poste. Épuisée par sa visite et sa rencontre, elle se dirige machinalement vers son bureau. Ses sensations de malaise et de lassitude lui semblent se faire de plus en plus pesantes à mesure qu'elle progresse vers son bureau.

« Ah ! Kat' ! vous voilà enfin, fait l'Ours. Alors, la pêche a-t-elle été bonne ?

- Pas vraiment, répond-elle le souffle court. J'ai... j'ai juste...

- Qu'avez-vous Katelyn ? Que s'est-il passé ?

Katelyn dépose enfin sur son bureau l'énorme dossier que lui a remis le sénateur Léonard avant de s'affaler dans son fauteuil.

- Veuillez m'excuser, Patron. La visite chez le sénateur a été compliquée.

- Oui, je vois ça. Dîtes m'en plus.

Katelyn se concentre et prend le temps de souffler, histoire de recouvrer sa respiration habituelle.

- Hé bien... le sénateur m'a remis le dossier de tout le personnel du restaurant. Il m'a aussi confié quelque chose...

Katelyn jette un bref regard autour d'eux. Tous ses collègues lui paraissent à présent suspects, qu'ils soient ou pas de proches collègues, qu'ils aient ou pas déjà travaillé ensemble. Peu lui importent ces détails. Ce qu'elle a appris ce matin doit rester dans le secret. Il en va de la bonne avancée de l'enquête, mais aussi de la santé de Simon et elle.

- Écoutez, je préfère vous en parler en privé, si c'est possible. C'est quelque chose de trop important pour qu'on en discute ici.

- Très bien. Allons dans mon bureau.

- Je vous suit. »

L'odeur de cette pièce est insoutenable. Du moins c'est ce que pense Simon. Comment font Doc' et Shen pour rester ici ?

« Bon alors, Doc'. Vas-tu mettre fin au suspense et me dire enfin pourquoi tu m'as fait descendre ?

- Ne soit pas si pressé, Simon. Lui répond le médecin d'un air enjoué. Shen, apportes-moi tes échantillons, veux-tu ?

- Oui professeur.

Le jeune homme s'exécute et reviens aussi vite qu'il s'est éclipsé avec plusieurs bancs de tubes à essais.

- Merci Shen. Simon, observes bien tous ces tubes et dis-moi ce que tu vois.

Simon regarde tous ces tubes qui contiennent les résultats de différents tests. Mais il y en a seulement quelques-uns qui l'interpellent.

- Doc', ces tubes, là. Qu'est-ce qu'ils contiennent ?

- Ce qui va être utile pour l'avancée de ton enquête. Vois-tu le tube témoin ?

- Oui.

- Que constates-tu ?

- La solution est vert-pâle... Comme dans cet autre tube.

- En es-tu certain ?

- A y regarder de plus près, je dirais que la solution témoin ressemble à un possible mélange des contenus de deux autres.

- Oui, tout à fait. Nous avons donc seulement trois tubes qui nous intéressent vraiment. Vois-tu, le tube témoin contient un échantillon de la peau de l'androïde. Pour en déterminer la nature précise, Shen a eu l'idée de la comparer avec des peaux de différentes espèces animales.

- Bien vu Shen !

- Merci.

- Donc si je comprends bien, la peau de l'androïde contient...

- Oui ! Elle contient les ADN de quatre espèces différentes ! C'est fantastique !

- Mais vous n'auriez pas pu déceler ces ADN avec une électrophorèse ?

- Non, car les ADN ont merveilleusement bien été mélangés. Faire ainsi coexister plusieurs ADN est fantastique !

- Hum... oui. Du calme Doc'. Et alors, de quelles espèces proviennent les ADN sources ?

- Hé bien, vois-tu, je te propose au menu un peu d'axolotl braisé, de beignets d'anguilles, de fritures de frelon et de tardigrades.

- C'est un menu assez intéressant. Peux-tu m'expliquer pourquoi un tel mélange ?

- L'axolotl pour la régénération, l'anguille pour la production d'électricité à de hautes tensions et le frelon pour... nous ne le savons pas encore, et le tardigrade pour ses capacités hors-normes de survie en milieux extrêmes.

- S'agit-il d'espèces communes ?

- Pas du tout ! Mais laisses-nous encore un peu de temps et tu auras toutes les informations.

- Très bien. C'est vraiment du bon travail. Par contre, ça m'oblige à retourner à SupChronics. Je ne vois qu'eux pour faire de telles manipulations.

- Oui, moi aussi.

- J'espère que Kat' est revenue. Je n'ai pas envie d'y retourner seul. »

Simon quitte le laboratoire et remonte à son bureau. Sa visite à SupChronics était fort désagréable. Là-bas, les androïdes sont de partout et occupent toutes les fonctions qui leur est permis d'occuper. Avec sa nouvelle enquête et ce qu'il vient de découvrir, il soupçonne même quelques membres du personnel humain d'être en réalité des robots.

L'Ours reste perplexe après ce que Kat' vient de lui dire. Comment le sénateur peut-il être au courant de l'affaire des Mafias ? A sa connaissance, seuls quelques politiques très haut placé sont au courant et le sénateur Léonard n'en fait pas partie.

« Savez-vous d'où le sénateur tient ses informations concernant l'histoire avec la mafia ?

- Non. Il ne me l'a pas dit. Et j'ai préféré poursuivre sur notre enquête plutôt que de déterrer un vieux dossier.

- Hum... d'accord. Votre rencontre et ce que vous avez vécu chez lui vous ont sacrément secoués. Prenez quelques heures de repos pour aujourd'hui. Retournez chez vous. Simon saura se débrouiller sans vous.

- Vous en êtes sûr ? Je tiens à poursuivre cette enquête. Il y a peut-être dans ce dossier des choses qui pourront nous aiguiller. S'il le faut, je resterai au bureau tout le reste de la journée.

- Bon... très bien. Mais plus de sortie sur le terrain pour aujourd'hui. C'est d'accord ?

- Oui Chef ! »

Katelyn quitte le capitaine Fitzgerald plongé dans ses pensées et retourne à son bureau.

Toujours un peu sonnée par sa matinée, Katelyn sursaute à la réception d'un message sur son téléphone. Le message provient d'un numéro qu'elle ne connaît pas. Sa teneur lui indique rapidement son auteur : sa marraine. Elle referme illico son téléphone et lève les yeux vers son bureau. Elle y aperçoit Simon, debout, face à la fenêtre, encore perdu dans ses pensées. Non, se dit-elle en voyant le dossier posé sur son bureau. Je ne peux pas retourner chez moi et me reposer... Allez Kat' ! Secoue-toi un peu !

« Ah te voilà ! lui fais Simon à son entrée dans leur bureau.

- Oui... me voilà, fait-elle en feignant un sourire.

- Ouhla... tu n'as pas l'air dans ton assiette toi. Ton visage en ferait fuir plus d'un, moi compris si je ne te connaissais pas.

- Je t'ai déjà dit que j'adorais ta façon de réconforter les gens ? fait-elle avec un début de sourire.

- Hum... laisses-moi réfléchir un peu. Ce ne doit être que la dix-millième fois, non ?

- Je n'ai jamais compté mais tu ne dois pas être très loin. Pour te faire pardonner ton manque de tact, pourrais-tu me servir un peu de ce café que tu viens de faire ?

- Bien sûr ! Surtout qu'on va tous les deux en avoir besoin si on veut finir cette journée en limitant la casse.

- Que veux-tu dire ?

- Doc' et Shen m'ont fait part de nouvelles découvertes sur les robots, dit-il en lui passant un mug de café. Nous allons à SupChronics dès que tu t'en sens prête.

- Tu essaie de t'autopersuader ?

- Un peu... Alors ? Prête ?

- Laisse-moi le temps de savourer ce mauvais café. Pendant ce temps, réfléchi à un plan pour me faire sortir en douce. J'ai donné ma parole à l'Ours que je resterai au poste tout l'après-midi.

- C'est déjà tout trouvé. Je pense que Shen fera une très bonne diversion.

- En es-tu sûr ?

- Hum... disons que je fais un pari. Tu sais comme je suis joueur ?

- Malheureusement.

- Alors c'est tout vu. Je file voir Shen. Rejoins-moi au parking quand c'est bon de ton côté.

- Ça marche. »

En pleine réunion, son téléphone se met à vibrer. Rebecca y regarde la notification. Les deux lieutenants de la D.S.I. sont en approche. « Veuillez m'excuser, fait-elle à ses collègues. Je dois vous laisser. Une urgence à régler.

- Comment une affaire peut-elle être plus urgente que la planification de la prochaine production ? répond un de ses collaborateurs.

- Je pense qu'il s'agit d'un travail qui tient davantage de vos services que des miens, monsieur...

- Davis, fait le jeune homme, remonté par une telle marque d'affront. Nous travaillons ensemble depuis plusieurs années.

- Oui... il me semblait bien avoir déjà vu votre visage quelques fois dans nos locaux. Pardonnez-moi, je ne suis pas très physionomiste. Sur ce, je vous laisse gérer les nouveaux contrats. Mesdames, messieurs. »

A peine sortie de la salle de réunion, Rebecca contacte son assistante afin de préparer la réception de Katelyn et Simon. Alors que l'ascenseur l'amène au rez-de-chaussée, la scientifique ne peut s'empêcher de sourire à la perspective d'une rencontre qui lui paraît des plus prometteuses.

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D.S.I. : Division Spéciale d'Investigation