❧ Chapitre 27 ❧
« Avant le jour de sa mort, personne ne sait exactement son courage... »
- Jean Anouilh
Le chemin jusqu'à la voiture est long et difficile mais tellement heureux. Nous devons avoir l'air de survivants avec nos vêtements déchirés, nos visages couverts d'entailles, de sueur et de suie. Aydan boite, aussi nous progressons lentement. Nos yeux ne cessent de s'échanger des regards complices, d'immenses sourires sur les lèvres. Marie-Anne a délaissé le corps de Northwood et Henry se retrouve à trainer le corps de son père sur tout le chemin irrégulier à travers les tombes. Je vois également que Monique est fatiguée. Bien qu'elle ne le laisse pas paraitre, utiliser sa magie lui a beaucoup coûté. Alors qu'elle s'arrête pour reprendre son souffle, nous nous arrêtons à sa hauteur.
— Vous allez bien Monique ? l'interroge le blessé.
— Ne vous inquiétez pas...pour moi... joli coeur... Les vieilles femmes aiment toujours prendre leur temps, trouve-t-elle la force de plaisanter malgré sa respiration saccadée.
J'entends chacun soupirer de soulagement face à l'apparition du véhicule droit devant nous, à la sortie du cimetière. C'est alors que je remarque la tête inerte d'Aimée dépasser de la portière arrière et que l'urgence de la situation me saisit. Tout n'est pas fini, nous devons encore sauver mon double qui pourrait potentiellement m'entrainer dans sa chute vers une mort certaine. Henry lâche tout de même son père avec douceur sur le sol pour se diriger vers la jeune fille évanouie.
— Nous devons la transporter à l'hôpital le plus proche, tranche-t-il avec inquiétude.
— Hors de question, m'empressé-je de dire devant le regard ébahi de tous sauf d'Aydan. Sans vous offenser, les hôpitaux de 1920 ne sont pas réputés efficaces ou même sûrs, les médecins ne savent pas encore très bien quoi faire pour le genre de blessures que présente Aimée. Non, je crois qu'il est plus sûr pour elle que nous nous occupions d'elle nous-même...
— Elie a raison, ils ne feraient qu'empirer son état au lieu de la soigner, m'épaule mon camarade Passeur.
— Bien, acquiesce sérieusement son meilleur ami, sans grande conviction quant à notre argumentation.
Le souci semble avoir pris le relais chez le jeune homme, ses sourcils restent constamment froncés, les plis de sa bouche se creusent alors que son regard est fuyant. Il semblerait qu'il ne puisse soutenir très longtemps les regards qu'Aydan, ou même moi, lui destinons.
— Il n'y aura pas assez de place pour tout le monde, remarque Marie-Anne avec calme en effectuant un rapide calcul des places disponibles dans la cabriolet.
— Monique allez devant, décidé-je. Aydan, Marie-Anne et Aimée seront derrière et Northwood...
— Non, Elie, tu viens avec nous à l'arrière, objecte Aydan. Aimée sera allongée sur nos genoux. Quant à Northwood...
— Il ira dans le coffre de la voiture, nous prend tous de court Henry. Je crois qu'après tout ce qu'il nous a fait subir, c'est tout ce qu'il mérite, continue-t-il en le tirant par les chevilles.
Malgré ses douleurs à l'abdomen, le ressuscité aide son ami à charger son père dans l'habitacle tandis que nous nous installons. Marie-Anne et moi installons convenablement le corps de ma jumelle sur nos jambes et la retenons de nos mains pour lui éviter une chute.
— Qu'est-ce que va devenir Northwood ? Elie m'a apprit qu'il était ton père, entends-je Aydan dire à celui qu'il considère comme son frère alors qu'ils achèvent de fermer le coffre.
— Je l'enverrais en maison de convalescence, c'est un sort moins dur que la prison mais je pourrais m'assurer qu'il ne fera plus jamais de mal à qui que ce soit, nous assure Henry avec certitude et je lui fais confiance.
J'imagine la douleur qu'il doit ressentir. Être contraint de penser à la meilleure option pour enfermer son père à jamais doit être horrible. Le jeune héritier Northwood est profondément attristé, je le vois : c'est comme si sa présence s'effaçait, il ne parle qu'avec une voix faible, fatiguée alors que ses traits ne marquent que l'accablement.
— Et ses hommes de main ? demande enfin mon ex-chambrière tandis que les deux hommes prennent place à leur tour dans la voiture.
— J'appèlerais les autorités dès que nous arriverons, j'y ai un bon ami, il pourra s'assurer qu'ils ne sortent jamais d'une cellule. Ils paieront pour leurs crimes, nous informe-t-il en démarrant le véhicule, trop concentré sur sa tâche pour ne pas montrer qu'il souffre d'endosser un rôle vengeur qu'il abhorre.
De l'extérieur, n'importe qui nous voyant croirait avoir une hallucination : un jeune homme blanc conduisant deux femmes de couleur, deux blessés graves et tous étant couverts d'ecchymoses, de sang séché et de suie. Je prie pour que le trajet se déroule rapidement.
— Je n'aurais jamais cru un jour être assise à bord de l'une de ses voitures de riches et encore moins être conduite par l'un d'eux, rit la sorcière de sa voix grave en observant Henry, ce qui parvient même à lui arracher un timide sourire.
— Sachez Madame, que c'est avec plaisir, lui réponds Henry, narquois, avant de prendre sa main et d'en embrasser le dos.
— Ma petite Elie, je crois que je commence à apprécier ton jeune ami...
Le regard qu'elle lui coule est alors empreint d'étonnement et de malice. Je souris à mon tour. Elle ne cessera jamais de me faire rire, même dans des situations austères. Soudain, je vois le visage d'Aimée se tordre avec une lenteur inquiétante sur mes genoux. Le souffle de la jeune fille est lent et ses yeux se révulsent presque instantanément. Je tente alors de la redresser pour la garder éveillée :
— Aimée, accroches-toi, nous sommes bientôt arrivés, tiens bon ! Henry, sommes-nous encore loin de la maison des Bloomingdale ?
— Encore quelques rues, m'informe-t-il en me rendant mon regard inquiet dans le rétroviseur central.
À l'opposé de la banquette arrière, je vois la jambe d'Aydan tressauter furieusement. Moi aussi je suis inquiète, mais au fond de moi, je ne peux m'empêcher d'espérer. Aimée guérira, j'en suis certaine. Notre projet de départ avec Aydan reprend alors du sens instantanément : tous mes chagrins à propos de sa trahison ne sont plus qu'un lointain souvenir, aussi je m'imagine déjà découvrir l'Europe à ses côtés. D'ailleurs un coup d'oeil vers lui m'apprend qu'il discute avec la nièce de Monique, un air de curiosité sur son visage contusionné. Il semblerait qu'il n'ait pas ma capacité à cicatriser à une vitesse surnaturelle, je me demande bien pourquoi. Soudain je me rappelle que Monique m'a parlé de la puissance mystique des années à double chiffre, mon don doit surement venir de là...
— Vous êtes la nièce de Monique Delasseau ?! s'étonne Aydan, incrédule, ses yeux faisant sans cesse l'aller-retour entre la sorcière et sa filleule.
— Oui, acquiesce Marie-Anne d'un air fier mais réservé, évitant soigneusement de laisser ses yeux tomber nez à nez avec le torse nu de son voisin. Je veillais sur Elie tout ce temps...
À ces mots, elle se tourne vers moi en m'adressant un regard bienveillant que je lui renvoie. Derrière elle, le jeune homme m'observe aussi, un sourire tendre étirant ses lèvres pourtant entaillées. J'accroche mes prunelles aux siennes et c'est un milliers de mots que nous nous échangeons en silence. J'aimerais le serrer dans mes bras pour être certaine qu'il est bien là, en vie, et qu'il ne me quittera plus jamais. Mais lorsque nous franchissons la grille des Bloomingdale dans un cahot, j'entend Aimée siffler difficilement, le sang s'écoulant d'entre ses lèvres en une trainée vermeille qui tache ma robe.
Aussitôt le véhicule à l'arrêt, c'est comme un ballet qui s'organise, comme si chacun avait anticipé son propre comportement dès notre arrivée. Henry sort le premier, vite rattrapé par Aydan qui fait de même quoiqu'avec un peu plus de difficulté pour se mouvoir. L'amant de Cécilia parvient à porter le corps inerte de mon double en se penchant au dessus de la portière de la décapotable. Marie-Anne se faufile quant à elle hors de l'habitacle pour aider sa tante à se lever, tandis que je me dirige d'un pas rapide vers la porte d'entrée, non sans un dernier regard inquiet en direction du coffre. Je prie intérieurement pour que les Bloomingdale ne soient pas là... Henry me suit de près et nous montons l'escalier aussi vite que possible.
— Il n'y a personne ? cherche-t-il à savoir autant pour se rassurer que saisit par la surprise.
— De toute évidence, répondis-je distraitement en regardant au quatre coins du hall d'entrée à l'affut du moindre intrus. James et Morris doivent être à la compagnie et Ann doit probablement passer du temps chez des amis...si tant est qu'elle en a vraiment.
J'indique à Henry la direction de ma chambre d'un signe du bras avant de me retourner vers Marie-Anne qui ferme la marche en bas des escaliers.
— Peux-tu prévenir le personnel que je leur offre leur journée ? Dis-leur qu'ils seront tout de même payé, cela devrait suffire. Il nous faut aussi de l'eau, des linges propres et tous les médicaments que tu pourras trouver...
Mon amie hoche la tête, signe qu'elle a comprit. Je cours jusque'à la salle de bain de l'étage et fouille dans tous les tiroirs à la recherche du moindre calmant ou aspirine. Je ne trouve que des somnifères, malheureusement d'aucune utilité. Lorsque j'arrive dans la chambre, ma vieille amie s'affaire déjà au dessus du corps blanchâtre d'Aimée. Aydan et son ami se tiennent en retrait, attendant la suite.
— Vous pourrez trouver des vêtements propres dans la chambre de James, leur dis-je et c'est sans se faire prier qu'ils s'exécutent mais au passage, Aydan m'interpelle :
— Nous nous occupons de Northwood, mieux vaut garder un oeil sur lui.
C'est alors que je réplique d'une voix sure et immédiate :
— La chambre d'ami juste à côté devrait convenir, personne ne s'y rend.
Il lance alors un dernier regard au corps ensanglanté de mon double avant de me considérer d'un regard inquiet :
— J'espère qu'Aimée ira mieux. (Puis en se rapprochant de moi de telle sorte à toucher ma joue de sa main :) Je ne voudrais pas qu'il t'arrive quelque chose...
Je ferme brièvement les yeux à son contact puis arbore mon sourire le plus serein :
— Tout ira bien, ne t'en fais pas. Maintenant vas-y, lui intimé-je doucement en le couvant du regard.
Il s'en va alors à la suite de son ami tout en se tenant les côtes. Je me surprend à penser que si la situation était toute autre, j'aurais rougi de voir le torse nu d'Aydan ou encore sa musculature impressionnante d'aussi près. Mais ces préoccupations ne sont pas de circonstance - du moins elles ne le sont plus. Monique me ramène à la dure réalité en me hélant. Au même moment, sa nièce arrive les bras chargés de bandages et tenant fermement entre ses mains une bassine d'eau qui se déverse à chaque pas précipité qu'elle fait. C'est alors que la sorcière du vieux carré prend les choses en mains et dirige les deux jeunes novices qu'elle a devant elle.
— Nous allons la laver, cela nous aidera à y voir plus clair. Elie, trouves-lui des vêtements propres. Marie-Anne, l'éponge !
La vieille femme déshabille mon double, ce qui peut presque me faire sentir nue moi aussi, et jète les tissus imbibés de sang dans un coin de la pièce. Une chemise de nuit propre dans les mains, mon coeur se soulève à la vue du corps meurtri de la jeune fille. Sa peau arbore des camaïeux de bleu et de violet mêlés de jaune sur le ventre, les jambes et les bras. Son visage quant à lui est toujours gonflé et se pare des mêmes teintes contre-nature sur les tempes et ses pommettes. L'eau de la bassine devient très vite noire malgré la dominance du rouge. Je m'occupe de bander les doigts cassés et le genou tordu de la blessée avec fermeté lorsque la tâche que nous nous acharnons à faire m'apparait impossible. L'étendue des dégâts est trop importante pour qu'Aimée se rétablisse, je le sens car j'ai enduré ces mêmes blessures auparavant. Je n'avais qu'une seule envie alors : m'endormir définitivement. Alors que sa filleule s'occupe d'éponger le flux continu de sang qui s'écoule de la bouche d'Aimée, je prends à part Monique :
— Je commences à penser qu'elle ne s'en sortira pas, ces blessures sont trop graves, chuchoté-je. (Au même instant, une inspiration rauque et sifflante secoue le corps inerte de ma jumelle, nous interpellant.)
— Le mal est à l'intérieur, dit-elle, maussade. Nous ne pouvons plus rien faire...
Je sens son abattement trouver un écho en moi et mon corps se relâche. Une hémorragie interne, voilà ce que ma conscience me susurre pourtant une part de moi veut trouver un moyen. Aussi, alors que la mage s'apprêtait à retourner auprès de la mourante, je la retient par l'épaule.
— Mais Aimée n'a pas causé volontairement ce qui lui arrive, tenté-je de comprendre, mes yeux cherchant activement une réponse à travers toute la pièce. Elle ne devrait pas mourir, je ne devrais pas mourir...
Aussitôt, celle qui est devenue comme ma grand-mère, me prend dans ses bras en caressant mon dos d'une main dans un geste qui se veut réconfortant. Mon incompréhension à dû la toucher car je crois voir ses yeux s'humidifier lorsque nous nous détachons.
— Tu sais Elie, chuchote-elle presque en essuyant d'un coup de main son nez qui menace de couler, la magie trouve toujours des moyens bien fallacieux d'accomplir son oeuvre et de faire payer son prix. Aimée, en collaborant avec ce monstre qui vous voulait du mal, à causé sa propre perte d'une certaine manière. Elle a choisit elle-même de...
— Je vois, murmuré-je en l'arrêtant d'un geste de la main sur son avant-bras potelé. Je suppose que je n'aurais rien pu faire, le destin s'est chargé de mon avenir à ma place, tout était déjà écrit...
Mes yeux se perdent dans le vague et la nausée me prend. Les mises en garde de la sorcière étaient donc vraies, j'aurais dû l'écouter, prendre cela plus au sérieux, ne jamais avoir recueillie Aimée ou peut-être ne jamais avoir rencontré Northwood ou même Aydan... Seulement, voilà, je ne regrette rien de tout ce que j'ai fait : j'ai sauvé un jeune homme d'une mort certaine, j'ai permis à Cécilia et Henry de se rencontrer, j'ai aidé James à se fiancer à la femme qu'il aime... Mais tout cela se serait-il produit même sans mon intervention ? N'était-ce pas écrit comme cela bien avant que je n'arrive à cette époque ? Je crois avoir au contraire accomplit la mission que l'univers et les ancêtres de Monique avaient justement prévue pour moi, et bien malgré moi...
— Elie, je... je suis désolée, se sent-elle le besoin de me dire, ses yeux s'ouvrant grands devant mon état d'inertie, cherchant à me prendre la main comme pour rattraper le sort et lui faire entendre raison.
— Merci Monique pour tout ce que tu as fait pour moi - sincèrement, achevé-je. Je ferais mieux de rester auprès d'Aimée maintenant, elle en aura besoin, lui souris-je faiblement, le regard fuyant, effaçant pour quelques minutes encore ma tristesse.
Arrivée à la hauteur de celle qui m'a trahie, toute rancune à disparue. Je m'assois sur le tapis au pied du lit et lui prend la main. La poitrine d'Aimée ne se soulève plus que très lentement en dessous du fin tissus blanc de sa chemise de nuit. Au contact de ma paume contre la sienne, celle-ci ouvre péniblement les yeux. Je lui souris pour lui redonner de l'espoir, comme si elle allait s'en sortir. J'ai revêtu mon masque à cet instant, pour elle.
— Elie... parviens-je à comprendre à travers sa respiration sifflante.
— Oui Aimée, je suis là, dis-je en exerçant encore une pression sur sa main.
Monique et Marie-Anne se tiennent en retrait derrière nous. Je me retiens de pleurer, c'est la première fois que j'assiste à l'agonie de quelqu'un -hormis moi-même. Face à l'afflux toujours continu de sang au coin de sa bouche, je me sens le besoin de l'installer sur son côté pour favoriser sa respiration et ses poumons encombrés de liquide. Au son moins sifflant qui se dégage, j'en conclut que cela l'a soulagé, aussi se sent-elle le besoin de me sourire péniblement, son visage tuméfié se relevant vers moi :
— Me-merci Elie...
— Ce n'est rien, il faut seulement que tu te reposes...
Voyant la mine austère de mes deux comparses dans mon dos, mon double se met à pleurer, deux larmes glissant sur ses joues bleuies.
— Je...je sais que... je vais mourir...Elie, me dit-elle d'une respiration hachée.
— Non non Aimée, bats-toi. Tu verras, quand tu iras mieux, tu pourras prendre ma place auprès des Bloomingdale et faire tout ce que tu veux : tu pourras sortir, faire la fête ou même les boutiques, tenté-je de faire de l'humour, mes larmes menaçant de couler à leur tour.
Je réussis tout de même à arracher un rictus douloureux à la jeune fille qui me ressemble trait pour trait, c'est à mes yeux comme si je me voyais décliner dans un affreux cauchemar. Soudain, Aimée retrouve son sérieux et cherche à s'agripper à ma main, quoi qu'il lui en coûte. Même les contusions sur son corps se semblent plus lui être aussi douloureuses alors qu'elle rapproche nos visages.
— Je suis...désolée Elie, me chuchote-t-elle au creux de l'oreille. Pour tout ce que...je t'ai fait. J'en paye...le prix aujourd'hui.
— Ne dis pas ça, souris-je chaleureusement malgré ma volonté de pleurer, mon regard devenant fuyant, ne pouvant mentir ouvertement plus longtemps à une mourante.
— Aydan et toi... vous formez un...très beau...couple, parvient-elle à achever dans un murmure, à bout de souffle. Vous vivrez heureux...
Ses yeux tendent déjà à se fermer progressivement, ces dernières forces semblent la quitter et je n'ai pas le courage de la contredire. Aimée ignore que mon sort est lié au sien de cette manière. Je ne veux pas la culpabiliser, mieux vaut la laisser partir en paix.
— Toi aussi Aimée, tu vivras heureuse. N'importe quel homme donnerait tout pour ne serait-ce qu'apprendre à te connaitre. (Je lui serre un peu plus la main à chaque parole, consciente que la vie s'échappe déjà de son corps sans que je ne puisses rien y faire.) Tu rencontreras un beau et intelligent jeune garçon et tu fonderas une famille...
— Une famille...répète-elle les yeux fermés, le teint livide.
— Aydan et moi viendrons vous voir très souvent et nous rirons tous de bon coeur dans le jardin alors que tes enfants courront partout autour de nous dans de grands éclats de rire et...
Une main chaleureuse trouve mon épaule et la presse doucement. Je lève la tête vers Monique qui me contemple de toute sa hauteur d'un air abattu. C'est d'une voix lointaine, presque céleste, qu'elle déclare :
— C'est fini Elie, elle a rejoint les ancêtres...
Je me tourne alors vers la jeune fille et constate avec horreur que sa poitrine à arrêté de se soulever. Aimée est si paisible, adorablement endormie. Je... Contempler la mort, là devant moi, m'intimide. Alors c'est elle qui m'a arrachée à ma vie, elle que chacun doit voir sous mes traits en 2020... Les larmes dévalent silencieusement mes joues et je remarque que cela est vrai pour chacune d'entre nous. Même si toute la vie d'Aimée n'a été qu'une fiction créée par le destin, nous nous sommes chacune quelque peu attachée à elle. J'espère avoir soulagé ses peines ne serait-ce qu'un peu, j'aurais aimé que quelqu'un soit présent pour moi lors de mon dernier souffle. Marie-Anne, jusque-là en retrait, se poste à coté de moi, à l'opposé de sa tante, et prend ma main dans un élan de réconfort. Et c'est soudain sous nos yeux que le corps raide de mon double se transforme : sa peau bleuâtre semble se craquelée avant se se creuser en sillages de poussière. Aimée s'efface. Nous regardons, stupéfaites, son être disparaitre en nuées de poussière jusqu'à n'être plus qu'une fine étendu de fin sable gris sur le lit sous le tissus de sa chemise immaculée.
— Voilà à quoi nous sommes réduit et pourtant destinés, murmuré-je en me rappelant les paroles de ma grand-mère maternelle.
Aimée n'est plus. La vérité me frappe à nouveau de plein fouet. Je vais mourrir. Encore.
Voilà encore un chapitre bien triste ! Désolée cher lecteur, chère lectrice, sinon être auteur serait moins passionnant ! ;) J'espère que ce chapitre vous a plu, si oui une petit étoile et un commentaire sont toujours les biens venus !
À bientôt,
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