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La porte du lac aux fées -- 2/2


Mais Siloë avait ramené avec lui une part entière du monde humain. Il avait ramené un cœur brisé, un amour sincère, un espoir déçu, un premier baiser, et la trace de dizaine et de dizaine de conversations épars qui résonnaient encore sous les frondaisons magiques.

Alors qu'il tentait d'oublier, les autres se souvenaient. La mémoire leur revenait par fragment, petit à petit, comme une peinture dont chaque tache ajoute un peu plus à l'ensemble du tableau. Quelques fées firent le voyage jusqu'au monde humain, ramenant avec elles, parfois, quelques créatures de là-bas. D'autres s'y installèrent même, adoptant une enveloppe mortelle.

Et, ainsi, Siloë ne put pas oublier.

Deux ans s'écoulèrent, pour lui, jusqu'à ce qu'il se décide enfin et plonge de nouveau dans le lac. Lorsqu'il creva la surface, c'était encore l'hiver, et il crut un instant n'être partit que quelques heures. Et si les fous furieux étaient encore là ? Il hésita à replonger, mais s'arma de courage, au simple souvenir d'une danse.

Il faisait nuit. Une silhouette était assise sur le rivage. Il s'approcha.

Ce n'était pas Damien. C'était un autre humain, vaguement familier, vêtu d'une sorte de robe marron, une croix en bois sur la poitrine. Il était vieux, si vieux... Chaque trait de son visage semblait sculpté dans une pierre millénaire. Il pleurait.

Siloë hésita. L'humain devait être le « Père Marc », dont son Damien lui avait tant parlé. À priori, il ne lui ferait pas de mal. Mais sait-on jamais...

Il s'approcha lentement, ses yeux sortant à peine de l'eau, ses longs cheveux roux laissant à la surface de l'onde une trainée de feu.

Le Père Marc sursauta et releva la tête. Il avait les yeux ronds, aussi rond que ceux de Damien la première fois qu'il l'avait rencontré. La comparaison lui arracha un sourire. Il sortit un peu plus de l'eau, découvrant ses épaules.

-Bonsoir, dit-il. Vous êtes le Père Marc ? Vous êtes beaucoup plus vieux qu'au bal.

L'humain mit un instant à retrouver sa langue.

-Alors c'était vrai... Balbutia-t-il. Alors c'était vrai... Le lac aux fées... Les voyages qu'il me racontait... La créature rousse, si belles, qui venaient le rencontrer... Alors c'était vrai... Siloë ?

-C'est moi, acquiesça l'intéressé, les sourcils froncés. Où est Damien ?

-Vingt ans, souffla le vieil homme. Vingt ans se sont écoulés.

Comme frappé en plein cœur, Siloë tituba. Pourquoi, pourquoi avait-il fallut qu'il parte ? Son humain était-il vieux et ridé, à présent ? Était-il... Était-il...

Pour la première fois, il rencontra l'idée de la mort. Et cela le terrifia, comme il n'avait jamais été terrifié.

-Il s'est marié, dit le vieux prêtre, à une femme dont personne ne voulait, car elle était défigurée.

-Marié ? Répéta Siloë, choqué.

Damien lui avait expliqué la signification de ce mot, et l'associer à lui, avec une autre personne, déclenchait dans sa poitrine une douleur furieuse.

-Il n'avait pas vraiment le choix, balbutia le pauvre prêtre, effrayé par l'ombre qui s'était étendue dans les yeux du fay. Son père l'a obligé. Mais il n'a jamais eu d'enfant.

La pensée apaisa Siloë, légèrement.

-Où est-il ? Demanda-t-il de nouveau.

-Il est à la guerre, répondit laconiquement le prêtre. Il est à la guerre depuis des années et des années. Son père est mort. Sa femme aussi. Une maladie.

-C'est quoi, la guerre ?

Le Père Marc lui adressa un regard mouillé de larmes. Quelque chose, en lui, se répugnait à souiller l'innocence de cet être avec les aliénations humaines. Mais il lui expliqua tout de même, car c'était plus simple que de répondre à la première question.

Lorsqu'il eut terminé, Siloë, assit sur la rive, tremblait de tous ses membres.

-Où est Damien ? Demanda-t-il de nouveau, à travers ses larmes.

Le prêtre lui ouvrit le poing, révélant un bout de papier froissé.

-Il a disparu sur un champ de bataille, dit-il. Il est compté comme mort. Son cousin a pris sa place aujourd'hui et m'a chassé de la chapelle.

-Il est mort ?

-Je ne sais pas, Siloë. Je ne sais pas. Mon vieux cœur espère que non. Ma raison a peur que si. Je hais ce monde, parfois. J'ai passé les trois quarts de mon existence à prier l'amour d'un être indifférent. J'ai peur des hommes. Je suis fatigué...

-Vous pouvez venir vous reposer chez moi, si vous voulez. Vous ne serez plus jamais fatigué, là-bas. Plongez au fond du lac.

Père Marc lui jeta un regard trouble. Ce Siloë lui proposait-il de se suicider ?

-Il vous suffit d'y croire, expliqua le fay. Ayez foi en moi.

-Je n'ai eu qu'une seule foi, dans ma vie... Et elle excluait les fées, croyez-moi. En plus, je ne sais pas nager.

-C'est votre choix, vieil homme, répondit gentiment Siloë en sortant totalement de l'eau.

Un battement de paupière plus tard et il était habillé, les cheveux attachés derrière la nuque. Il avait l'air humain, mais son aura étrange était toujours là pour défaire cette première impression.

-Où allez-vous ? lança le prêtre à la silhouette qui s'éloignait déjà.

-Je vais chercher Damien, répondit Siloë sur un ton d'évidence.

Le vieil homme le regarda s'éloigner. Puis il reporta son regard sur l'onde tranquille, lisse, comme un miroir, où était reproduit les joyaux du ciel.

On n'a plus jamais revu le Père Marc, après cette nuit-là. On ne retrouva qu'une croix, au milieu du lac, flottant, abandonnée.

Et ainsi, Siloë arpenta le monde des hommes. Il lui fallut des mois pour trouver le champ de bataille, guidé par le murmure des arbres et les pleurs des rivières rouges.

Au milieu des cadavres, il ne trouva pas Damien. Infiniment soulagé, il chanta pour les morts une ode qui résonna sur des lieux et des lieux, parant d'une tristesse profonde le cœur des hommes, qui se trouvèrent soudain débarrassés de tous désirs de violence.

Puis il repartit à la recherche de son humain. Il croisa nombre d'existences, au long de son périple, accordant des dons aux uns, jetant à ceux qui voulaient profiter de lui, ou abuser de sa beauté, des maléfices étranges qui le firent à la fois craindre et aimer. On lui apprit que le Seigneur de Montfort avait été fait prisonnier, qu'il avait était échangé, pris en otage, puis vendu...

Il marcha jusqu'à un château lointain, traversa une mer, puis une forêt. Combien de mois encore ? Il n'aurait su dire, il ne savait pas compter.

Et enfin, un jour, on lui indiqua une petite maison en pierre, au bord d'une rivière. Les gens que celui qui vivait là avait été Seigneur, puis prisonnier de guerre, avant de racheter sa liberté par quelque acte héroïque, pour finir en ermite.

Siloë marcha jusqu'à la rivière. Un homme nu se baignait dans l'eau. Sa peau était ridée. Ses cheveux blancs, comme la neige. Sa silhouette maigre et sèche, comme les arbres anciens.

Ils se regardèrent un instant. Puis Damien sourit et son rire s'envola jusqu'au ciel.

-Siloë ! Siloë ! s'exclama-t-il en sortant de l'eau pour étreindre le fay aux cheveux roux. Est-ce toi ? Est-ce vraiment toi ? Oh, Siloë, douce créature de mon enfance ! Comme tu es beau ! Encore plus beau que dans ma mémoire ! Comment est-ce possible que je t'aime encore ?

Siloë ne connaissait pas de réponse à cette question. Il se contenta de l'embrasser.

Lorsque le baiser prit fin, Damien avait retrouvé l'apparence qu'il arborait au bal, après leur première danse, après sa première déclaration. Les vingt dernières années, le sang, la misère, la violence et l'errance, s'effilochaient déjà dans son esprit, échappant à sa mémoire. Il ne restait que le désir, le regard, la présence, la peau contre la peau, les lèvres contre les lèvres, et les habits mystérieusement disparus.

Ils firent l'amour sur les rives d'une rivière et se réveillèrent au bord d'un lac à la surface lisse comme un miroir, au fond d'une forêt mille enchantée.

Et c'est ainsi que le lac trouva deux gardiens, Damien et Siloë, qui passèrent le reste de leur longue existence à voyager entre le monde des hommes et celui des fées, gardant à jamais ouvert le passage entre les univers.

~

La voix s'est éteinte, s'échouant sur une note de tendresse. Le conteur vous adresse un regard amusé, les mots dansant encore sur ses lèvres souriantes.

Un éclat, dans l'eau, vous fait tourner la tête. Un homme vient de surgir à la surface du lac, brouillant le reflet du ciel. Il vous sourit, lui aussi, avant de tendre une main en direction du conteur, qui rit et saute dans l'eau pour le rejoindre, sa chevelure rousse laissant dans son sillage une trainée enflammée.

-Voudriez-vous nous rejoindre ? Lança-t-il par-dessus son épaule, dans votre direction. Le passage reste ouvert, si vous le souhaitez. Il vous suffit d'y croire.

L'instant d'après, ils ont disparu. L'onde est de nouveau lisse. La musique qui vous a attiré jusqu'ici s'est tue, ses dernières notes résonnant encore sous les branches de la forêt de Brocéliande.

Il ne vous reste qu'un choix à faire.

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