Avez-vous déjà été contacté par une supposée éditrice disant travailler pour Webnovel, Dreame, Hinovel ou encore Kifflire ? Le démarchage est de plus en plus présent sur la plateforme, nous avons donc mené l'enquête pour vous !

Arnaque ou vraie opportunité ? 

L'enquête nous a d'abord mené à visiter les sites web de ces applications. Rapidement, on constate l'absence de SIRET. Au sens de la réglementation française, le SIRET est obligatoire et, sans, c'est une arnaque. Sans enregistrement auprès du FISC, il est impossible de percevoir une "rémunération". Il faut être enregistré comme auteur. 

En vertu de la législation française, le terme "rémunération" induit en erreur. En effet, une "rémunération" signifie qu'il y a eu contrat. Signer un contrat signifie que l'on possède le statut d'auteur au sens de la loi et qu'il faut donc être enregistré comme tel et déclarer ses revenus. Ce sont des informations, pourtant vitales, que ces plateformes n'abordent pas avec les auteurs. 

UNE ENTREPRISE CHINOISE

Ensuite, grâce aux informations de la section "Conditions de service" du site de l'application Kifflire, nous apprenons que cette plateforme est administrée par CHANGDU (HK) TECHNOLOGY LIMITED. Lorsque je google ce nom, j'apprend que cette entreprise est également propriétaire de Webnovel. 

D'après les informations récoltées, CHANGDU est localisé en Chine, à Hong Kong. Les contrats qu'ils proposent aux auteurs français sont donc régis par les lois chinoises, ce qui pourraient gravement compliquer les choses en cas de litige. Si tu souhaites rompre ton contrat, puisqu'il est étranger, il te faudra engager un avocat à tes frais, ce qui pourrait s'avérer compliqué et dispendieux. Beaucoup d'auteurs finissent par renoncer et perdent, de ce fait, leurs textes. 

Lorsqu'on cherche une adresse française, on tombe sur des adresses de boîtes postales à Paris ou des adresses menant à des "maisons d'entreprise". Ce sont tout simplement des lieux qui sont loués à des entreprises étrangères. Il n'y a ni employés ni salariés. La "maison" se charge alors de trier le courrier et de l'acheminer auxdites entreprises étrangères. 

DE RÉELS ÉDITEURS ?

Par définition, un éditeur devrait accompagner l'auteur sur son texte et à-travers toutes les étapes du processus éditorial. Or, ces plateformes ne sont pas des éditeurs et ils n'offriront aucun travail éditorial sur les textes. Ces plateformes sont des hébergeurs d'histoires. Pour autant, les démarcheurs se présentent comme "éditeurs" (ou bien plus souvent comme "éditrices"), une fausse représentation qui est donc illégale. Souvent, ces "éditrices" se trouvent en réalité être des autrices qui, ayant signé un contrat avec ces plateformes, se retrouvent à faire un démarchages agressif pour gagner quelques sous. 

Entre les branches, j'ai ouïe dire qu'on pouvait toucher jusqu'à 300€ pour dix auteurs ramenés.

Sur Dreame, une campagne de parrainage prévoyait 30$ USD (soit environ 26€) par auteur "parrainé" (à comprendre, ramené sur la plateforme) ou 50$ USD (soit environ 43€) si l'auteur acceptait de signer un contrat exclusif. 

ET LES VENTES ?

La plateforme n'offre aucune preuve du nombre de ventes. Les plateformes proposent des paiements en dollars américains, alors il faudra faire attention à la conversion. Les paiement (s'il y en a) sont versés au quadrimestre ou au semestre. Cela ne laisse que très peu d'argent dans les poches de l'auteur. 

En vertu des lois françaises, ils ne peuvent pas payer sauf en tant qu'Apporteurs d'Affaires. "Un apporteur d'affaires est une personne qui met en relation des personnes qui souhaitent réaliser entre elles des opérations commerciales. On parle également d'entremetteur. Il peut signer un contrat ou non, selon la sécurité juridique qu'il souhaite donner à cette activité." (source : Wikipédia) Quand viendra le moment hypothétique des virements, ces plateformes sont donc susceptibles de prétendre que les lois françaises les empêchent de faire ce qu'elles font dans leur pays et qu'il faudra donc parrainer de nouveaux auteurs pour être payé. 

Je réexplique : comme ces plateformes ne sont pas en mesure de rémunérer correctement les auteurs, car leurs méthodes contreviennent avec les réglementations françaises, ils proposent aux auteurs de devenir "Apporteurs d'Affaires" pour eux, puisqu'il s'agit du seul moyen légal de payer un particulier (qui n'est donc pas enregistré sous un statut légal) en France. C'est de cette façon que les auteurs de ces plateformes deviennent des "éditeurs", se transforment en racoleurs pour tenter d'être payés sur le nombre de nouveaux auteurs ramenés, parrainés. C'est pour cette raison que les démarchages se sont intensifiés et qu'ils sont de plus en plus omniprésents. 

À PROPOS DES DROITS D'AUTEUR

Les droits d'auteur, ce sont les droits qu'un auteur possède sur son texte, la paternité qu'il a sur son roman. Ce sont des droits dont on prête l'exploitation aux maisons d'édition.

Les contrats de ces plateformes (similaires entre eux) sont souvent envoyés en anglais aux auteurs francophones, alors il faut être très vigilant si on ne maîtrise pas la langue de Shakespeare. Ces contrats, bien que légaux dans le pays où ils sont émis, se gardent le droit de revendre les droits des textes à d'autres sites, plateformes ou maisons d'édition durant toute la durée que couvre le partenariat. Il est également mentionné que l'auteur ne perçoit une "rémunération" que pour les ventes effectués sur leur plateforme. On peut donc en déduire que l'auteur ne toucherait rien sur la vente de ses droits à des entreprises tierces.

J'ai également ouïe dire que la plateforme Kifflire refuse d'envoyer un contrat-type ou de parler d'argent tant et aussi longtemps que l'auteur n'a pas accepté d'uploader cinq chapitres sur le site. 

Si les "éditrices" cherchent et démarchent beaucoup d'auteurs écrivant du contenu pour adulte, les CGU de ces entreprises spécifient que les contenus matures ne sont pas sujets à rémunération et que les auteurs signent en reconnaissant avoir lu cette clause. Le contenu mature ne concerne pas seulement les scènes à caractère érotique, mais tout ce qui n'est pas considéré PJ-13. 

Quand on demande à une de ces éditrices si le contenu mature n'est pas susceptible de poser problème, elles répondent bien souvent "qu'il ne faut pas tout lire, car dans la réalité, ça ne se passe pas de cette façon-là". 

Mais un contrat est un contrat. Il aura toujours la prédominance. Et la loi est la loi. 

LES CGU

J'ai épluché les CGU de ces entreprises. Si Kifflire mentionne qu'il faut avoir un minimum de treize ans (comme sur Wattpad, c'est l'âge légal, selon les lois canadiennes, pour avoir l'accès aux réseaux sociaux) pour s'inscrire sur la plateforme, Hinovel parle plutôt d'un âge minimum de dix-huit ans (ou l'accord des parents, chose bien difficile à vérifier). C'est étrange pour deux plateformes appartenant à la même compagnie-mère, mais d'autant plus étrange pour des plateformes qui recherchent sciemment du contenu mature sans pour autant vouloir le rémunérer. 

Comme le démarchage est assez intensif, je n'ai aucune difficulté à imaginer que des personnes de moins de dix-huit ans ont pu être démarchées par ces plateformes. Il faut rappeler que la signature de contrat sans accord parental n'est pas légal, en France, en-deçà de cet âge. 

LISENT-ILS VRAIMENT NOS HISTOIRES ?

La réponse rapide, c'est non. 

(Après, les "éditrices" restent des humains et il peut arriver qu'elles aient lu une histoire pour le plaisir, comme tout le monde.)

Tu veux le vérifier ? Pose une question précise au sujet de ton histoire. Bien souvent, tu observera l'éditrice tenter de bafouiller quelque chose ou t'admettre qu'elle n'a eu le temps que de "regarder en diagonal". 

J'ai lu un témoignage assez récemment où une autrice Wattpad a piégé une de ces éditrices. Lorsque la démarcheuse l'a contactée en lui disant avoir adoré son histoire, l'autrice lui a répondu qu'elle était ravie qu'elle ait aimé son histoire, car la relation incestueuse entre le frère et la sœur + la grande différence d'âge entre les protagonistes étaient des sujets qui refroidissaient souvent.  Bien évidemment, son histoire n'avait RIEN à voir avec cette description, mais l'éditrice ne s'est rendue compte de rien. 

De plus, il est courant qu'un auteur se fasse offrir "l'édition" de sa fanfiction. La publication de fanficion est illégale (sauf si le sujet de l'histoire est tombé dans le domaine publique). 

LES LECTEURS

Les chapitres sont vendus 2€ chaque. En bref, une histoire avec beaucoup de chapitres peut rapidement coûtée 200€ à lire pour un lecteur, car on parle d'histoires qui peuvent compter jusqu'à SIX-CENTS chapitres. Plusieurs personnes se plaignent, par ailleurs, des sommes astronomiques à débourser pour lire la suite de l'histoire sur les réseaux sociaux de ces plateformes (Facebook, notamment). 

Les lecteurs ont relevé de histoires avec beaucoup de fautes. 

C'EST VIVABLE ?

Le nombre de mots à uploader sur la plateforme Dreame (par exemple) pour prétendre à une "rémunération" est excessivement élevé. 

Pour toucher 100$ USD (soit environ 86€), il faudrait écrire 50k mots en un mois. 50k mots en un mois, c'est le défi du NaNoWrimo, ce défi d'écriture incroyable que se donnent les écrivains en herbe à tous les mois de novembre. Il faudrait donc faire un NaNo chaque mois pour tenir le rythme. C'est environ 1.6k mots par jour. Or, nous avons tous des emplois, des études, des vies sociales... En bref, on vous demande de pondre, chaque mois, un roman, ni plus ni moins. 

Ces sommes sont également très légères (voire ridicules pour le travail fourni). Un contrat d'édition traditionnel avec une véritable maison d'édition rapporte beaucoup plus. 

ET WATTPAD DANS TOUT ÇA ?

Sachez que le démarchage de ce type est PROSCRIT par les guidelines de Wattpad. La prochaine fois qu'une "éditrice" en provenance d'une de ces plateformes vous contacte, sentez-vous libre de signaler son message pour SPAM. 

Alors, arnaque ou véritable opportunité ?

Je vous laisse vous faire votre propre idée sur le sujet et également vos propres recherches. Je vous encourage à vous informer par vous-mêmes et à ne pas croire tout ce que l'on dit, à ne pas croire les yeux fermés, même les informations qui viennent de moi. 

En ce qui me concerne, bien que j'ai été agressivement démarchée à plusieurs reprises non seulement sur Wattpad, mais aussi sur Instagram et Facebook, ce ne sont pas des contrats que je signerais. Cet avis n'engage que moi. 

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À bientôt pour un nouvel article ! 👋

Je tiens à remercier LineP_auteure pour son aide dans la rédaction de cet article. 

DISCLAIMER : cet article n'est pas à but diffamatoire, mais bien informatif. Les informations sont tirées de témoignages et de recherches personnelles (dont je garde toutes les traces). Chacun est libre de se faire sa propre idée sur le sujet. Et je ne doute pas que certains auteurs ont été satisfaits avec les contrats qui leur ont été proposés.