"–  Plus que quatre jours !
– Et oui ! 
– J'ai hâte ! 
– J'espère que je vais avoir plein de cadeaux !
– Tu sais il n'y a pas que les cadeaux dans la vie Miss...
–  Je sais mais ça reste important non ?
  –  Et les moments passés ensembles, les dîners en famille, les parties de cache-cache avec ton frère ? Le père noël peut-il t-offrir cela ?
  – Non...   
  – Allez, commençons notre lecture. Aujourd'hui c'est...
–  "Un événement inattendu" de Ceylhan "

Deux jours avant Noël. Tu étais si excitée par cela ! Tu aimais cette fête parce que tu pouvais réunir toute ta famille en un seul lieu, pour de grands moments de joie inoubliables. Tu aimais même ces petites disputes du réveillon : qui va mettre l'étoile au-dessus du sapin ? Qui décorera le sapin ? Qui fera le bon repas ? Qui rangera tout à la fin... Tu aimais ces moments de paix, de vie fêtée.

De plus, cette année n'avait pas vraiment été ce que l'on pourrait appeler joyeuse. Mais tu as toujours gardé ton sourire, avec tes lèvres si craquantes et en forme de cœur ! Tu restais magnifique, jolie comme un perce-neige.

Grâce à tout ton optimisme, tu gardais la tête haute, tu ne montrais pas la tristesse perçante de ton âme, tu restais là, souriante, aimante, aimée.

Un jour avant Noël. Tu te retrouvais dans tous tes états. Tu étais très excitée, tu sautais telle une puce. Tu faisais tout ce qu'il y avait à faire : le ménage, les courses manquantes, nettoyer les décorations, faire le menu. Tu étais sur tous les fronts.

La joie était le premier sentiment que tu dégageais, ton sourire encore plus merveilleux qu'à l'habitude. Tu sentais la joie de vivre. Tu rayonnais la bonne humeur. Tu vivais.

Le jour de Noël. Tu avais hâte. Que tout le monde arrive, qu'ils se saluent, qu'ils se sourient. Tu respirais l'entrain.

Tes parents sont arrivés les premiers, ton mari étant allé les chercher à la gare tôt le matin. Puis ton frère, ta sœur. Et enfin, tes tantes et oncles, avec tes cousins. Vous étiez tous là, parlant à tout-va, souriant à toute blague ridicule, à toutes les grotesques imitations du père Noël que faisait ton père.

Grâce à tout ces bons et heureux sentiments, tu avais oublié. Oublié que plus tôt dans l'année, tu avais perdu ta faculté de marcher, de courir, de te tenir debout. Que tu te trouvais dans un fauteuil roulant.

Tu t'en fichais, tu étais là, ils étaient là, c'est tout ce qu'il comptait. C'était tout pour toi. Tu as une vie, tu la vis, tu la savoures.

Un peu avant le repas de Noël, vous aviez décidé d'aller sortir, de prendre l'air si frais de cet hiver pourtant ardu. Ton mari poussait ta chaise roulante, te faisant te sentir sur la route arc-en-ciel. Tu atteignais les étoiles si illuminées grâce à toute cette gentillesse, cette attention, grâce à ta famille...

Encore dehors, la neige commençait à vous tomber dessus, poudreuse et douce, blanche comme le pelage magique des petits rongeurs d'hiver. Elle te tombait dessus, lentement et tendrement, recouvrant tes jambes insensibles d'une couverture fraîche et clémente.

Tu souriais.

Tu vivais.

Tes jambes se refroidissaient... Et tu les sentais ! Pour la première fois depuis des mois, tu ressentais des picotements dans tes jambes. Froid, inconfort dû à tes vêtements mouillés... Tes jambes ! Tu restais étonnée, béat, le souffle coupé. Tu ne comprenais pas, tu n'y croyais pas. Tu étais abasourdie.

Tu ordonnais à ton tendre compagnon de s'arrêter, lui qui se dépêchait de te ramener chez vous. Il ne savait pas ce qu'il se passait, il ne voyait pas. Il ne sentait pas tes jambes, lui. Ainsi, sous le regard choqué de toute ta famille, tu essayais de te mettre debout. Bien sûr, leur premier réflexe fut de te remettre dans ton fauteuil, mais tu les repoussais sans cesse, tu étais sûre de toi. La neige t'avais sauvée, pensas-tu. Tu te mis debout, les jambes tremblantes, incertaines, et douloureuses. Les larmes aux yeux, tu fixais tes deux membres, tes mains te soutenant tout de même grâce à ton ancien fauteuil roulant. Tu pleurais de joie maintenant.

Ton mari te prit dans ses bras, et, un par un, chaque membre de ta famille faisait pareil. Ils étaient heureux pour toi. Tu étais heureuse de les rendre heureux. Cet événement était un cadeau suprême, divin même. C'était un présent inattendu pour tous.

Tu rêvais de ce moment tous les soirs, sans vraiment espérer la journée. Tu étais découragée à retrouver l'usage de tes jambes... Mais, la neige en avait décidée autrement. La magie de Noël, dirait-on. La magie de l'amour aussi. La magie de la famille, des liens forts et incassables. La magie de la joie.

La magie de la vie, tout simplement.

Les choses se réparent toujours, d'une façon ou d'une autre. Tu avais été réparée momentanément par un fauteuil roulant. Et tu es maintenant réparée véritablement. Tu es vivante et tu peux marcher.

Quoi rêver de mieux pour un jour de Noël ?

Lovée dans les bras de ton cher et tendre, tu souriais encore, clamant à tout-va que, cette année, tu vivais le meilleur Noël de toute ta vie, que tu ne pourrais espérer mieux.

Noël n'est pas que cadeau, Noël est aussi miracles et magie. Surtout miracles et magie.

« Joyeux Noël à tous les êtres-vivants de cet univers » chuchotas-tu béatement.