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⑯ Seize Décembre: Un cadeaux des plus précieux ⑯

"  – Tu penses qu'il va m'apporter quoi le Père Noël ? 

–  Ce que tu as commandé non ?

– Mais... Tu es sûre qu'il va pouvoir m'apporter mon dinosaure ?

Prise d'une soudaine quinte de toux son aînée manqua de recracher son jus d'orange. Après s'être calmée elle s'exclama, interloquée :

  –   Un dinosaure ? Sérieusement ?

  –  T'as bien demandé un chat toi !

–  Ce n'est pas la même chose ! Cela risque d'être beaucoup plus compliqué pour toi !

Une mine déçue s'afficha sur le visage de la petite, contrite elle murmura:

  – C'est la taille c'est ça ? Il peut pas passer par la cheminée ?

Décidée de quitter cette pente glissante sur laquelle elle s'aventurait  et ne voulant pas briser ses espoirs, sa sœur répliqua:  

–  Passons plutôt à notre histoire du jour, d'accord ?  Il me semble que c'est...

Elle fut coupée dans sa phrase par le petit bout d'être; plus qu'impatiente:

  – "Un cadeau des plus précieux" ! De  PtiteRenarde "

Avez-vous déjà entendu parler du royaume de Perleblanche ?

C'est un pays minuscule, à l'autre bout du monde, caché dans l'ombre d'un cercle de montagnes. Certaines de ces montagnes sont si grandes qu'elles traversent les nuages ! Les rayons du soleil ont bien du mal à passer entre leur sommet et le bleu du ciel ; c'est pour cela qu'à Perleblanche, l'hiver dure toute l'année.

Les épaisses montagnes abritent de nombreuses cavernes et galeries, au fond desquelles brillent des milliards de cristaux incrustés dans la pierre. La plupart des hommes du pays travaillent ici toute la journée, dans le ventre sombre de la montagne, pour extraire cette précieuse matière dont le roi est complètement fou.

Car, oui, dans un royaume, il y a forcément un roi. Celui-là n'était pas bien méchant, mais alors qu'est-ce qu'il était cupide ! Il voulait toujours devenir encore plus riche qu'il ne l'était déjà, et sa soif de cristal était telle que son château en était entièrement constitué. Les murs, les fenêtres, le toit, les meubles, les tapis, les objets, les vêtements, les tableaux, les prisons, tout devait absolument être en cristal ou en avoir la couleur ! On raconte même que ses cuisiniers étaient obligés de colorer en bleu glace n'importe quel plat destiné à un habitant du palais, car même la nourriture n'échappait pas à la règle. Certains prétendent aussi que tous les serveurs qui n'étaient pas bien blonds se faisaient carrément teindre les cheveux avant d'apporter leurs assiettes au roi, par peur qu'il ne se mette en colère en voyant une tache foncée dans le décor, juste au-dessus de leur tête qui plus est.

Depuis que ce roi était sur le trône, c'est-à-dire depuis plus de cinquante ans, il avait pour projet d'élever les douze tours de son château jusqu'aux nuages, afin de dépasser la hauteur des montagnes et de pouvoir découvrir ce qu'il y avait au-delà. En effet, les montagnes étaient bien trop droites et lisses pour qu'on puisse les escalader et sortir du pays. Ainsi, il avait d'abord fallu élargir le château, car plus les tours seraient grandes, plus elles auraient de chances de se casser : on devait répartir un maximum de poids à la base, et tailler les tours en pyramide pour les alléger au fur et à mesure qu'elles prenaient de la hauteur. Durant les premiers mois, les meilleurs mathématiciens du royaume avaient dû faire des essais et des calculs monstrueux pour trouver les bonnes longueurs à donner à chaque arête des tours, pour qu'elles puissent dépasser les montagnes, accueillir un observatoire à leur bout et un escalier en leur intérieur, tout en tenant debout.

On obligea alors tous les hommes du pays en capacité de travailler, à s'engouffrer dans les entrailles des montagnes pour en extraire le précieux cristal, à le faire fondre pour y tailler les immenses murs des douze tours, leurs cabanes et leurs escaliers, et à les élever à l'aide de cordages et de la seule force de leurs bras. Ce fut un chantier énorme, gigantissime, colossal ! Beaucoup pensaient en silence que c'était bien trop incroyable pour être réalisable, et que tout finirait par s'écrouler.

C'est ce qui arriva. Le jour du soixante-dixième anniversaire du roi, les douze tours de cristal étaient debout, avec leurs escaliers à l'intérieur et leurs petites maisons qui trônaient dans le ciel. Il ne restait que les échafaudages - en bois, n'exagérons rien - tout autour. Le roi aurait pu se contenter d'inaugurer une seule tour, pour voir d'abord si elle était solide sans toutes les protections qui la maintenaient et enlaidissaient le paysage. Mais non ! Ce sombre idiot avait ordonné qu'on enlève tous les échafaudages en même temps, pour profiter pleinement du spectacle de sa réussite.

Les mathématiciens du début, qui étaient morts depuis longtemps - et tant mieux pour eux, car personne n'aurait aimé se trouver dans le viseur du roi à cet instant précis -, s'étaient légèrement trompés dans leurs calculs.

Les douze tours, à peine présentées au public dans toute leur splendeur, s'effondrèrent en produisant une tempête de poussière et d'éclats de cristal qui recouvrit le pays tout entier. Même les fondations s'étaient enfoncées loin dans le sol.

Cinquante ans de travail acharné pour rien...

Le roi entra dans une colère qui fut légendaire. Les dégâts étaient tout simplement trop importants pour être estimés. Il s'enferma pendant des mois dans sa chambre de cristal. Le chantier dévasté resta tel quel ; les travailleurs, en ayant plus qu'assez de ce roi qui n'en faisait qu'à sa tête sans bouger le petit doigt, avaient décidé de faire la grève, et les ministres chargés de gérer le royaume en "l'absence" du roi n'avaient aucune autorité. Ainsi, durant ces quelques mois, la vie reprit son cours monotone qu'elle avait perdu depuis cinquante ans.

La richesse du roi s'arrêtait aux portes du château. Autour, le royaume était fait de forêts et de petits villages éparpillés. Les enfants jouaient avec les chiens dans la neige épaisse qui recouvrait les chemins, et les plus habiles allaient danser sur les mares, gelées toute l'année ; les femmes balayaient le seuil des maisons, cuisinaient les légumes qu'elles ramenaient des fermes voisines, ou racommodaient les vêtements devant un bon feu de cheminée ; les hommes, après être rentrés du palais pour prendre leur retraite, passaient leurs journées à traquer les morceaux de cristal tombés sur leur territoire - rien ne devait leur rappeler les caprices du roi - et à discuter entre eux dans la taverne du coin. On était pauvre mais on s'en fichait ; on vivait de pain, d'eau, du peu de cultures capables de pousser sous la neige, mais surtout de rires et de beaucoup de solidarité.

Dans l'un des villages les plus proches de la paroi montagneuse, vivaient deux jeunes hommes assez singuliers. Jumeaux, ils avaient été abandonnés tout bébés sur le pas de la porte de Mère Flocon, une vieille dame avec le cœur sur la main qui les éleva comme ses propres fils, tous depuis longtemps mariés et partis vivre dans d'autres villages avec leurs épouses. Elle, qu'on plaignait toujours d'habiter seule dans sa grande maison et de s'y ennuyer quand elle ne tricotait pas des couvertures pour ses chats, n'avait jamais été aussi heureuse de toute sa vie.

Mère Flocon n'avait jamais compris : comment pouvait-on quitter des enfants aussi adorables ? Ou plutôt, qui pouvait subir la misère au point de devoir renoncer à sa responsabilité de parent ? Personne ici ne pouvait être dans un tel état sans que cela ne se sache. Tout le monde s'entraidait à longueur de journée, et si femme ou homme en difficulté il y avait, tous les voisins accourraient pour offrir le peu de ressources et l'abondance de bonne humeur qu'ils avaient.

L'origine de ces deux frères resta donc un mystère à part entière. Qu'importe ! Ils grandirent comme deux enfants normaux, firent des bonshommes de neige, jouèrent avec les chiens des voisins, dansèrent sur les mares gelées, aidèrent leur mère adoptive à rapiécer ses tricots et dormirent avec ses chats.

Ils avaient bientôt seize ans à présent. Seulement, outre leur âge, et un secret sur lequel nous reviendrons plus tard, ils n'avaient rien en commun.

Le premier, Givre, était sans conteste le plus bel homme de tout le pays. Grand, fort et téméraire, sa peau de lait faisait ressortir ses yeux couleur cristal et ses cheveux noir corbeau. Mais, arrogant et obstiné, ses conquêtes et son regard moqueur faisaient ressortir la glace qui entourait son cœur.

Le second, Nivalis, était beaucoup plus mince et discret, et on cernait difficilement son caractère : on le disait intelligent, distrait et ambitieux, mais toujours à errer à l'écart des autres depuis qu'il avait cessé de faire des bonshommes de neige avec son frère. Ses iris étaient d'un bleu doux débordant de sincérité, et ses cheveux d'un joli noir comme une nuit sans étoiles. Son nom faisait référence au Galanthus nivalis, plus connu sous le nom de perce-neige : cette petite fleur timide, qui pointait parfois le bout de son nez sous un rayon de soleil, au plus grand bonheur des passants.

Néanmoins, les jumeaux avaient une idée en commun, une seule, qui les rassemblait : ils rêvaient, comme le roi, d'explorer l'extérieur. Ils avaient d'ailleurs passé la majeure partie de leur enfance à imaginer ensemble divers plans pour franchir les montagnes. Ils avaient d'abord pensé à trouver la grotte la plus profonde et à la creuser jusqu'à trouer la roche de l'autre côté. Puis ils s'étaient mis à dessiner des échelles de bois et des escaliers creusés dans la pierre. Ils avaient même commencé à penser des machines volantes et des élevages de dragons, avant de réaliser que tout cet enthousiaste n'était qu'un pauvre rêve impossible.

Ainsi, ils avaient attendu leur seizième anniversaire toute leur vie. À Perleblanche, seize ans, c'était l'âge où l'on devenait adulte. À seize ans, ils commenceraient à travailler. Et, contrairement aux autres hommes, ils étaient terriblement impatients à l'idée de participer au chantier des douze tours. Le roi avait réellement les moyens de découvrir ce qu'il y avait au-delà des montagnes, et de satisfaire enfin leur curiosité ! Peut-être même qu'eux aussi, après l'inauguration faite par le roi, ils auraient le droit de monter les escaliers de cristal pour regarder le paysage depuis les petits observatoires.

Alors, quand ils virent les tours s'effondrer et le dirigeant se reclure dans son palais, ils furent terriblement déçus. Ils passèrent les quelques mois suivants sans se parler. Givre continuait à séduire de jolies filles en songeant à un avenir glorieux, et Nivalis se promenait toute la journée dans les bois pour rêvasser tranquillement.

Enfin, un beau matin, on annonça dans tout le royaume que le roi avait cessé de bouder. Il avait même renoncé à ses caprices sur le cristal ! Tout ce temps enfermé dans sa chambre, il avait énormément réfléchi et pris une décision. Il était trop vieux pour poursuivre ces idées démesurées, et se sentait de plus en plus faible. Mais il gardait l'intime conviction que des choses incroyables se cachaient derrière les montagnes.

Il fit donc placarder des affiches partout dans le pays. Son annonce était extraordinaire : celui ou celle qui lui ramènerait la plus grande richesse de l'extérieur serait désigné comme son successeur ! Aussitôt, le peuple oublia sa rancœur pour se mettre à l'ouvrage. Chacun débordait d'imagination pour réformer toutes les lois une fois devenu prince ou princesse. Ainsi, par petits groupes ou par gros clans, les habitants de Perleblanche se rassemblèrent pour trouver le moyen de franchir les montagnes. Ce fut comme si les dessins d'enfants des jumeaux prenaient vie : de parts et d'autres, on construisait des montgolfières, on échafaudait des escaliers à même la pierre, on coupait des arbres pour former une solide échelle, on fouillait les grottes les plus profondes pour les creuser jusqu'à l'extérieur.

La dernière technique fut finalement abandonnée. Mais, une à une, les autres grappes d'explorateurs parvinrent à toucher le ciel et à retomber de l'autre côté. Givre était à la tête de la plus grosse expédition, et il fut le tout premier homme de Perleblanche à poser ses pieds sur le sol de l'extérieur. Nivalis, de son côté, n'avait été accepté dans aucun groupe. À vrai dire, il n'avait pas vraiment cherché à s'incruster. Comme toujours, il préférait la solitude. Il savait très bien qu'il n'avait pas le profil d'un prince, il fallait être fort, courageux et sociable, et il n'avait que sa piètre sensibilité et ses lambeaux de rêves pour espérer atteindre le trône. Alors, il resta au royaume avec les enfants, les vieux et les familles qui n'étaient pas partis. Et puis, il ne pouvait pas laisser sa vieille mère adoptive se débrouiller seule.

Un jour, pourtant, alors que son frère avait disparu depuis deux semaines - il lui manquait beaucoup malgré son mauvais caractère -, il eut sans l'avoir voulu un contact avec l'extérieur. C'était un soir pluvieux, où l'orage l'avait pris par surprise dans la forêt, et il choisit de passer la nuit à l'abri d'un petit sapin - il avait peur des plus grands arbres, car il les savait plus enclins à être touchés par la foudre. Bizarrement, il ne neigeait pas toujours dans les bois, la température y étant plus ambiante au couvert des arbres. Mère Flocon s'inquiéterait certainement pour lui, mais ce serait une folie de rentrer sur les chemins boueux, dans le noir complet, à la merci d'éventuelles attaques de loups. Après avoir mangé la moitié de ses provisions, il s'endormit donc contre le maigre tronc du sapin, ses branches basses lui chatouillant les joues mais le protégeant en partie de la pluie, et masquant son odeur susceptible d'attirer les prédateurs grâce à son doux parfum de sève.

Le lendemain matin, une goutte froide tombant sur son nez le réveilla. La pluie avait cessé, laissant place à la rosée de l'aube, et les tièdes rayons du soleil réchauffaient le sentier et ses vêtements humides. Il s'étira longuement, et finit ses provisions en observant les arbres alentours et le ciel pâle. Des moutons de nuages roses s'étiraient depuis l'astre orangé, invisible derrière les montagnes. Nivalis se sentit apaisé à tel point qu'il aurait pu rester assis là toute sa vie.

Mais en repensant à sa mère qui devait être morte d'inquiétude, il se décida à rentrer. Il avait parcouru de si nombreuses fois les forêts du royaume, il n'aurait aucun mal à trouver le chemin du retour. Il se mit donc en route, faisant la course avec le soleil qui s'élevait lentement au-dessus des sommets rocheux.

Il allait atteindre l'orée du bois lorsqu'un cri d'oiseau tout proche l'interpella. Un petit cri, faible et plaintif, comme un gémissement de douleur. Guidé par les piaillements de l'animal, il se dirigea vers un buisson au bord du sentier, où poussaient des baies rouges et juteuses qu'il savait empoisonnées. Là, il découvrit une jeune hirondelle couchée sous les branches. Son aile droite semblait cassée. Sans hésiter, le jeune homme prit délicatement la créature et l'enveloppa dans la chaleur de sa veste, contre son flanc.

Il la ramena ainsi chez lui. Sans poser de questions, Mère Flocon, qui adorait les animaux, recueillit l'oiseau dans sa couverture la plus confortable et lui prépara un remède miracle dont elle seule avait le secret. Nivalis s'occupa d'éloigner les chats, alléchés par la vue de l'hirondelle dodue. Lorsqu'elle fut un peu rétablie sous les bons soins de la vieille dame, ils purent l'interroger.

- Que faisais-tu dans la forêt, bel oiseau ? demanda le jeune homme.

- Je volais au-dessus de votre royaume quand l'orage m'a surprise, chanta l'hirondelle. Je suis tombée dans les arbres et me suis brisée l'aile. J'ai sautillé jusqu'à ce buisson de fruits pour reprendre des forces, mais ensuite, j'avais affreusement mal au ventre !

- Tu viens de l'extérieur ? s'étonna Nivalis.

- Oui, bien sûr ! J'adore voleter au-dessus de chez vous, toute cette neige, ces arbres, et votre château... C'est magnifique ! Chez moi, les rues sont bruyantes et les humains toujours pressés. On a du mal à trouver le calme. Ça grouille, ça furette, ça braille, ça s'euguirlande partout ! Et pis, avec vos explorateurs, là, l'animation est à son comble. C'est insupportable. Alors, on aime chercher notre tranquillité ailleurs, vois-tu !

Le volatile mit plusieurs semaines à recouvrer ses forces. Mère Flocon et son fils venaient s'assurer qu'elle se portait bien à toute heure de la journée. L'oiseau et le jeune homme pouvaient discuter inlassablement de leurs deux royaumes, leur curiosité n'étant jamais rassasiée. À l'extérieur, les gens étaient riches, nombreux, ils vivaient dans des maisons en terre cuite, ne connaissaient pas la neige, se rassemblaient dans des immenses marchés où l'on vendait des milliers d'objets et d'aliments colorés. La nature n'était pas aussi omniprésente et jolie qu'à Perleblanche. On ne la laissait que pour l'agriculture et la décoration. Selon l'hirondelle, la paix qui régnait dans leur petit royaume était inestimable.

Vint le jour où l'oiseau chantant fut complètement guéri. Le jour des aux revoir. Nivalis pleura avec sa mère ce jour-là. Il n'avait pas honte : cétait sa seule véritable amie qui s'en allait.

- Promis, je reviendrai vous voir, siffla Hirelle l'hirondelle. Mais ma famille m'attend, et l'agitation de l'extérieur me manque un peu aussi. Elles font parties de mon quotidien, je ne peux pas rester éternellement ici.

- Je comprends, murmura le jeune homme, ému. Je t'attendrai, bel oiseau. Bon retour chez toi !

Avant de s'envoler, Hirelle offrit à son ami sa plus belle plume, une grande rayée de noir et de blanc, lisse et douce. Il la garda précautieusement dans sa veste, où il l'avait recueillie un mois plus tôt.

Le lendemain, trois petits groupes rentrèrent au pays. Le roi demanda à ce qu'on attende qu'ils soient tous revenus pour procéder à la cérémonie. Les retours et les retrouvailles se succédèrent. L'expédition de Givre fut la dernière à rentrer, un mois et demi plus tard, chargée d'or, de soie, de café et d'autres denrées nouvelles en grande quantité.

Un chantier avait repris au palais entre temps, pour élargir la salle de bal afin qu'elle puisse accueillir tous les habitants de Perleblanche. Les festivités durèrent toute la journée. On se remplit la panse jusqu'à n'en plus finir et on dansa au rythme de l'orchestre. Au crépuscule, le roi fit enfin son apparition. Appuyé sur une canne, le regard doux et sage, vêtu d'habits riches et colorés, il avait définitivement laissé de côté son obsession pour le cristal.

Il invita les explorateurs à se ranger en file indienne devant lui. Givre, persuadé qu'il possédait la plus grande des richesses, avait décidé de se présenter en dernier. Il s'approcha de son jumeau, qui mangeait en silence au buffet. Il s'était découvert un amour incontestable pour cette nouvelle nourriture appelée chocolat, et il était loin d'être le seul.

- Alors, petit frère ? Comment vas-tu ? Essaye donc de deviner ce que j'ai apporté à notre bon roi, pendant que tu poursuivais tes stupides balades en forêt !

- Je vais on ne peut mieux, répondit calmement Nivalis. Mais j'aimerais bien que tu cesses de te croire supérieur, nous ne savons pas qui de nous deux est l'aîné. Et puis, je ne sais pas... Il y a tant de richesses que vous avez découvertes... Es-tu certain que la tienne dépasse toutes les autres ? Ton orgueil peut te jouer des tours.

- Sûr et certain ! rit le jeune homme aux cheveux corbeau. Dans ce cas, tu verras le moment venu.

Il s'éloigna vers un rassemblement de jeunes filles qu'il avait repéré. Les yeux dans le vague, Nivalis s'attarda un instant sur la procession d'explorateurs qui défilait aux pieds du roi. De nombreuses marchandises différentes y passèrent : tapis, pierres précieuses, bijoux, vaisselle, vin, tableaux, livres, sucre, plantes, animaux... Le vieil homme, tel un enfant le jour de Noël, s'émerveillait un peu plus à chaque fois. Hélas, il lui manquait toujours ce petit "quelque chose" qui ferait toute la différence. Et comble du comble, il préféra la pipe remplie de tabac au bol de cacao chaud !

Vint le tour du dernier de la file, un jeune de quatorze ou quinze ans qui avait réussi à apprivoiser un lionceau orphelin. Il présenta son petit numéro de cirque, comique et attendrissant. Malgré son admiration, le roi ne put se résoudre à casser la complicité qui unissait l'adolescent et l'animal. Il le renvoya en disant réfléchir à sa proposition.

- Y a-t-il encore des volontaires ? s'informa-t-il sans quitter son siège.

Des chuchotements parcoururent l'assemblée. Sous les regards impatients, Givre prit la main de la jeune femme avec qui il valsait depuis quelques minutes, et la guida jusqu'au trône avant de s'agenouiller respectueusement devant le roi. Ses boucles dorées encadraient son délicieux visage de poupée, et sa robe bleue richement décorée s'accordait parfaitement aux yeux de glace du jeune homme. Une étrange complicité les liait, comme entre le lionceau et l'enfant, Hirelle et Nivalis.

- Relève-toi, jeune homme, ordonna le roi. Quelle est donc ta trouvaille ?

Givre obéit et jeta un coup d'œil empreint de tendresse à la belle inconnue. Après avoir gonflé ses poumons d'une grande inspiration, il prit la parole sur un ton très théâtral.

- Votre Majesté, mon nom est Givre, fils de parents inconnus, recueilli très tôt par l'humble Mère Flocon. La richesse que je vous présente, c'est cette jeune fille qui se tient à mes côtés. Après avoir combattu vaillamment pour le roi de l'Extérieur, il m'a accordé la main de son unique fille, Yléannora, que voici. Nos épousailles auront lieu l'année prochaine. Ce sera le mariage le plus grandiose que vous aurez jamais vu ! Et ainsi, j'acquerrai tous les territoires et toutes les richesses de l'extérieur. Alors, que vous me fassiez prince de Perleblanche ou non, sachez que je m'en moque, car je suis déjà roi d'un pays cent fois plus grand...

Il s'inclina lentement. Son audace provoquait déjà de nombreuses rumeurs dans la foule. Qu'allait répondre le roi à cet affront ?

- Eh bien, Givre, commença-t-il en grattant sa barbichette blanche. J'ai fait une promesse et je la tiendrai : celui qui me ramène la plus précieuse richesse d'au-delà des montagnes s'assiéra un jour sur ce trône que j'occupe. Et tu as trouvé le moyen de toutes les posséder. Je t'en félicite. S'il n'y a rien plus loin que l'Extérieur, alors tu seras roi du monde, Givre, fils de Mère Flocon. Ton destin était certainement tout tracé dès ta naissance. Malheureusement, je vois bien que ton cœur n'est pas pur. Tu es arrogant et pas assez à l'écoute des autres. J'espère que tu ne reproduiras pas la même erreur que moi en abusant de ton pouvoir. Je te souhaite bonne chance pour ton futur règne, Givre de Perleblanche.

La foule hurla, acclamant son nouveau roi, applaudissant à tout rompre. Un sourire triste sur le visage, Nivalis s'éclipsa sur le balcon enneigé, sous la nuit étoilée. Il avait un peu peur de l'avenir, c'est vrai, mais il était d'abord heureux pour son frère.

Il s'agrippa à la balustrade de cristal. Son regard se perdit dans le ciel où pleuvaient les flocons. Au loin, il aperçut la silhouette familière d'une hirondelle qui volait dans sa direction.

Son sourire s'élargit, et son visage sembla s'éclairer dans la nuit. Peut-être que Givre possédait à présent toutes les richesses du monde. Mais lui avait trouvé un cadeau bien plus précieux encore, que son frère n'arriverait jamais à conquérir.

L'amitié.

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