⑭ Quatorze Décembre: Fascination ⑭
Impatiemment l'enfant se précipita vers le calendrier, trônant au milieux de sa pièce depuis le début de ce mois de décembre. Sans faire preuve de délicatesse elle ouvrit la case marquée d'un chiffre "14" tout en interrogeant sa sœur du regard:
– Qu'est ce ça veut dire fascination ?
– Et si on lisait d'abord l'histoire ? Peut-être que tu comprendras.
– D'accord...
– Qui l'a écrit d'ailleurs ?
– Mysterieuseamie "
- Maman ! Maman ! Le Père Noël est passé !
Aurélie sourit quand elle voit ses filles penchées sur elle. Elle prend une photo, car elle sait que dans deux ans, Luna ne croira plus au Père Noël et que seule Maylis continuera à se réveiller tous les 25 décembre à sept heures pour ouvrir ses cadeaux.
Les deux filles la font s'extirper du lit et courent jusqu'au sapin au pied duquel sont posés des paquets cadeaux. Elles lisent avec application les étiquettes et ouvrent leurs cadeaux. Luna crie de joie en voyant le cadeau qu'elle demande depuis longtemps.
- Wow ! C'est trop génial !
Elles sont si différentes, les deux sœurs. La première saute de joie, tandis que la deuxième serre contre son coeur la peluche qu'elle vient de recevoir.
- Ne suce pas ton pouce, Maylis, c'est mauvais pour tes dents, reproche Aurélie.
La petite fille acquiesce et mâchouille sa peluche. Heureusement que je l'ai lavée avant de lui offrir, songe sa mère.
- J'ai faim... murmure-t-elle. Tu peux me faire un chocoyat chaud, s'il te pyaît ?
Aurélie se dirige vers la cuisine, tandis que Luna lance ses nouveaux jouets qui font beaucoup trop de musique avec un tel bonheur que sa mère oublie le brouhaha infernal que font ces petites choses modernes
Maylis s'assoit sur une chaise et pose ses mains sur la table. Aurélie lui donne son petit déjeuner.
- Tu yes fais moins bien que papa...
À ces mots, Luna se fige, et la sirène du camion de pompiers continue à tourner, comme pour signifier qu'elle a besoin d'être sauvée. Du haut de ses huit ans, la fillette a bien compris que son papa les a abandonnées l'année dernière et qu'il ne reviendrait jamais.
Aurélie ravale ses larmes. Christophe est parti à la naissance de Maylis, mais il revenait, parfois, jusqu'à l'année dernière, où il a laissé sa femme et ses filles derrière lui. Maylis adorait son père, et à chaque fois qu'il venait passer quelques jours dans leur maison, il préparait un chocolat chaud aux deux filles.
La petite fille avale son petit déjeuner dans le silence général, à part le camion de pompiers qui continue à hurler. Agacée, Aurélie coupe le son. Pour la première fois, Maylis se rend compte que ses mots peuvent blesser.
- Je vouyais pas faire du mail à Yuna et à toi, s'excuse-t-elle.
- C'est pas grave...
Christophe le lui disait, les enfants sont comme ça, ils mâchent leurs doudous, mais pas leurs mots. Aurélie le savait déjà, mais c'est ce qu'elle aime chez les enfants, leur innocence. Avec le recul, elle se demande comment elle a pu vouloir se marier avec cet homme, alors qu'ils sont si incompatibles, si différents, encore plus que Luna et Maylis qui sont pourtant représentatives de la notion de contraires.
Le silence est pesant. Puis, soudainement, Maylis descend de la chaise et court vers la fenêtre.
- Maman, ille neige... murmure-t-elle.
Tout d'un coup, les souvenirs remontent. Elle se rappelle des moments qu'elle a passé à jouer dans la neige avec son père avant qu'il s'en aille. Elle n'a que six ans, elle dit encore j'ai mail au lieu de j'ai mal, mais elle a déjà une avalanche de souvenirs qui l'assomme quand elle voit de la neige tomber.
Alors elle se met sur la pointe des pieds, essaye d'atteindre la fenêtre. Comme elle n'y arrive pas, elle monte sur une chaise.
- Maylis ! hurle sa mère quand elle la voit.
- Je veux ouvrir ya fenêtre !
Devant la fascination soudaine de sa fille, Aurélie n'a pas d'autre choix que de céder. Elle ouvre et laisse le vent glacé s'infiltrer dans la maison. Un flocon vole jusqu'à la main de Maylis qui l'observe avec attention.
- Papa...
Elle enfile son manteau toute seule pour la première fois depuis que son père est parti – car c'était toujours lui qui l'aidait – , et demande à sa mère de l'aider à mettre ses bottes de neige. Intriguée, Aurélie suit sa fille et entraîne Luna avec elle.
Maylis court dans la neige, comme si elle cherchait quelqu'un. Quand elle comprend qu'elle ne le trouvera pas ici, elle éclate en sanglots et se laisse tomber par terre. Aurélie essaye de la consoler mais sa fille la rejette. Elle a besoin d'être seule, seule avec cette neige qui la fascine, mais la fait tellement souffrir.
Un tourbillon de neige vole autour d'elle. Maylis ne songe même pas à appeler Luna qui s'amuse avec leur mère. Elle regarde les flocons danser, respire à leur rythme et s'apaise. Elle n'ose pas les toucher, c'est trop précieux pour elle. Elle entend la voix de son père qui l'appelle, puis celui de la voiture qui démarre.
- Papa...
Maylis fouille dans sa poche. Elle y trouve un crayon à papier, mais pas de feuille. Alors, tout doucement, pour ne pas abîmer la neige qui la fascine tant, elle dessine sur la surface de la neige. Elle représente son père dans la voiture qui s'en va pour ne plus jamais revenir. Elle représente sa mère qui pleure. Elle représente Luna qui fait coucou, pensant que son père reviendra dans un mois, comme d'habitude. Et elle se dessine, entourée de flocons de neige, pleurant des larmes de givre.
Elle recule pour regarder son dessin. Elle pleure, encore une fois, mais des larmes de délivrance. Elle a trouvé sa paix intérieure. Elle reste à contempler la neige qui tombe et efface son dessin, jusqu'à ce que sa mère vienne la rejoindre. Alors, comme une partie du dessin n'est pas cachée par la neige qui est tombée, elle l'efface elle-même.
Parce que c'est sa représentation de sa fascination pour la neige et son père.
Parce que c'est à elle, et à personne d'autre.
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