Sans Titre
Dans le secret de son cœur, il lui déclamait des poèmes enflammés. Dans le calme du grand jardin, il admirait ses cheveux dénoués. Dans l'intimité de sa chambre, il pleurait de ne pas pouvoir l'aimer.
Elle était tendre, elle était belle, elle était tout. Son rire tintait comme un carillon divin, ses yeux brillait d'une intelligence qui niait ce monde manichéen. La douceur de sa peau n'avait d'égale que celle de son cœur. Ses mains de pianistes s'égaraient souvent sur les pages d'un livre ou sur les pétales d'une rose. Et ses lèvres, oh ses lèvres ! Toujours étirées en un sourire épanoui, révolté. Il se serait damné pour pouvoir l'embrasser.
Elle aussi l'aimait. Elle lui avait murmuré sa tendresse un soir dans la cour, alors qu'ils étaient seuls dans la pénombre. Elle lui avait écrit d'ardentes lettres qu'il n'osait lire, de peur qu'elles ne lui fassent oublier la réalité. Elle pleurait elle aussi, dans l'intimité de sa chambre, lasse qu'on lui parle de mariage avec un autre. Un autre riche, un autre qui la ferait briller en société, un autre qu'elle ne pourrait jamais aimer, un autre qu'elle devrait épouser. Un homme ''comme il faut'', si différent de celui qui la faisait rêver.
Ils s'étaient aimés, une fois, au creux d'un temple oublié dans la forêt. Ils s'étaient aimés de tous leurs corps, puisque leurs cœurs ne le diraient jamais assez. Ils avaient hurlé leur tendresse, brûlé de désir, s'étaient consumés de désespoir. Ils ne s'embrasseront pas le soir, ne se consoleront pas de leurs cauchemars. Il ne peut y avoir de suite à leur histoire.
Elle mourra dans l'opulence, entourée de gens qui ne comprennent pas, qui ne tolèrent pas, blanche colombe qui aimait la pluie. Il périra opprimé, rejeté, à jamais soumis à leur volonté. Désabusé, il ne cessera pourtant jamais de penser à ce bel oiseau qui ne craignait pas sa peau noire de suie. Dans ce New-York ségrégationniste, ils savaient que nul amour n'existe.
Texte de Boubouzou35
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