Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

"Aujourd'hui ne meurt qu'un assassin" de @Idrille


Note au lecteur : Народнаиа Волиа, à prononcer Narodnaya Volya (littéralement : la Volonté du Peuple) est une organisation terroriste destinée à l'assassinat du tsar Alexandre II. Elle parviendra à son but en 1881, après un sixième attentat. Le groupe extrémiste sera alors dissous et responsables du dernier attentat pendus.



Un frisson le parcourt en sentant la corde se refermer autour de son cou. Il la sent, lourde, contre ses épaules - ses fils entremêlés lui chatouillent la gorge, et il y a le nœud, nœud coulant, nœud traître, qui l'achèvera tantôt. Au dessus de lui, la corde menaçante reste relâchée. Pour le moment. 

Il serre le poing pour écraser à l'intérieur la pointe d'angoisse naissant en lui. Un sourire étire lentement ses lèvres. Il observe la foule, à ses pieds - les vagues de la foule grouillante qui le dévisage. Il l'observe et le rire naît au creux de sa gorge. C'est d'abord une sensation ténue, celle que l'on contient par un simple sourire narquois - vous ne m'atteignez pas -, mais qui s'étend ensuite à tout son corps, parcourant ses veines, réveillant ses membres et les faisant fourmiller d'une hilarité grandissante. Il la retient en serrant son second point et se fige un instant, parfaitement droit. Aujourd'hui, il s'apprête à mourir si idiotement. Lui, le terroriste en quête de l'extermination impitoyable de l'autocratie, lui, professionnel des attentats ratés dont il s'échappait toujours, terreur de la Russie ! Pris idiotement au piège par la population d'Odessa qu'il s'évertuait à défendre. Car il avait participé au meurtre du général Strelnikov.

Il laisse ses yeux cruels s'accrocher aux visages de quelques moujiks. Afin de les marquer à jamais. Et il explose de rire. Ilia Aleksandrévitch Kasarmov, complice d'assassinat et condamné ce matin à mort, explose du rire dévastateur qu'il contenait.

La foule et les gardes se figent. Suspension du temps. Tous fixent ce corps décharné, cet organisme dont la fin a été soigneusement programmée et qui reprend soudain son contrôle dans un sursaut brutal, absurde - gangrené par le rire qui jaillit de sa gorge et colonise le moindre centimètre de vide de la place.
Le bourreau, reprenant ses esprits, ne se laisse qu'un temps d'hésitation. Sa victime est un homme dangereux. Rodé par l'expérience, il ne voit que deux explications à son comportement. Ou il est gagné par la folie due à la terreur, ou il se moque ouvertement du peuple et des dirigeants russes. Et il n'aime pas qu'on se moque de lui. Alors, il pose sa main sur le levier et tourne la tête vers le garde. Le condamné le voit - et le rire meurt au fond de sa gorge. L'échéance se compte désormais en secondes, et il ne peut plus l'empêcher.
Il tente de se remémorer la scène qui a provoqué son exécution... Mais c'est une autre qui s'impose en lui :

Il est accoudé à la balustrade d'un immeuble presque contiguë au Palais d'Hiver. Le compte à rebours résonne dans sa tête, implacable et régulier.
Quatre -
Trois -
Deux -
Un.
La détonation fait vibrer les murs. Il clôt ses yeux et savoure son instant de victoire - le seul qu'il puisse se permettre. Galvanisé.
Une myriade d'images se construisent et se superposent, visions horrifiques qui ravivent une nouvelle fois la flamme. La seule qui brûle encore - seule raison de vivre qui subsiste en lui. La flamme de Народнаиа Волиа.
Il imagine les yeux révulsés du tsar la mort se répandant dans son corps traître, la portée de l'explosion, son souffle diffusant l'odeur de mort dans la ville entière, une partie du palais s'effondrant sur lui-même, les domestiques affolés, les cris ! Puis l'euphorie, après quelques jours, qui gagnera peu à peu le peuple, libéré. Indépendant ! L'autocratie piétinée, lapidée par une foule débarrassée de tout obscurantisme, comme un nouveau printemps des peuples... Avènement d'un âge d'or russe.

L'odeur de fumée se mêle à celle du sang. Il sait que l'assassinat d'Alexandre II a probablement provoqué un certain nombre de victimes collatérales - et cette senteur ne fait que le confirmer. Mais il reste persuadé que le jeu en vaut la chandelle. Il ne faut pas avoir de regrets.
Derrière lui, deux autres hommes s'agitent, visages masqués. Quelques uns de ses complices.
Le projet avait grandit au fil des mois, porté par une rage contenue par les minuscules avancées quotidiennes. Il n'est pas seul, non ! Si l'on démantelait l'organisation, tous pourraient être plongés dans l'affaire jusqu'au cou. Lui, est simplement le nœud, la main exécutrice, futur terreur de l'oligarchie russe. Mais il tient surtout le rôle symbolique, représentant de la volonté du peuple - Народнаиа Волиа.

Un homme déboule en trombe derrière lui, essoufflé. Murmure :
- Le tsar... Était en retard. La bombe a explosé trop tôt.
Il s'appuie contre le fauteuil et laisse s'écouler un temps. Devant lui, l'autre ne bouge pas. Ses yeux son fixés sur un point invisible, corps totalement immobile mais esprit tournant à toute vitesse - désillusion cruelle.
- Alexandre est vivant. Tu dois fuir, Stepan.
Un temps. Fulgurance. Son corps se met en mouvement, silencieux et rapide - saisir son sac, balayer la pièce du regard, ne pas laisser de traces, puis partir, condamner la porte sans regrets, dévaler les escaliers comme un chat, prenant garde de ne pas être vu, et monter dans le fiacre qui l'attend en bas.
Assis dans le fond du véhicule, il efface déjà Saint Pétersbourg de son esprit, remplacé par Moscou - sa destination. Aucun remord ne le traverse. Il a l'habitude. Il recommencera autant de fois qu'il le faudra. Jusqu'à parvenir à son objectif.
Et il changera encore d'identité, de profession, reconstruisant tout le nécessaire pour faire croire à une vie, une existence réelle - chose qu'il ne connaître jamais.
Parce qu'il représente Народнаиа Волиа.
Parce que son but est unique.
Parce qu'il est l'ennemi juré de l'autocratie.
Parce que, surtout.
Il est l'ennemi du tsar.

Un cri fuse du fond de la place :
- A mort Kasarmov !
Le condamné cherche le visage de celui qui vient de hurler, et bloque ses pupilles brunes dans les siennes, l'obligeant à soutenir son regard. Son faciès a retrouvé le masque de marbre qu'il porte au quotidien. Infrangible. Et de son regard, il tente de transmettre à ce jeune odessite fougueux le mal qui l'a jadis contaminé. Lui montrer les raisons de ses actes - lui transmettre le virus. La haine germée au creux du coeur noirci, puis le besoin pressant de danger, et enfin la soif intarissable d'inconstance - vivre sans lendemain, parce que le lendemain n'a pas de sens lorsqu'on utilise pas toutes les limites de son aujourd'hui.

L'odessite baisse les yeux. L'autre regarde à nouveau la foule, assailli par un brusque ennui. Que font-ils là, tous ces hommes et femmes ? Pourquoi ne sent-il pas la révolte vivre en eux ? Il ne retrouve ici aucun visage connu, ni aucune figure dont l'expression serait familière - fougue et cruauté à fleur de peau -, qui pourrait lui paraître complice... Non, Народнаиа Волиа a été réduite en poussière il y a déjà un an, entraînant avec elle toute expression possible de contestation. Et, aujourd'hui, son dernier survivant va s'éteindre.
Il sursaute.
Là bas. Il l'aperçoit, tout au fond de la place, adossée à une masure sale. Elle est venue. Nina Nikolaïevna Khalturina, unique vestige de son passé, va assister à son exécution. Droite et fière, dégageant cette aura de froideur qui contraint toute personne à rester à plusieurs mètres d'elle, Nina le fixe. Aucune expression figée ne transparaît sur son visage. Seulement quelques émotions fugitives, aussitôt disparues. Petit air narquois - je t'ai toujours dit que tu mourrais avant moi - froideur - tristesse - froideur. Et la glace encore. Elle lui ressemble comme deux gouttes d'eau - et sera la seule qui pourra raconter la vérité, plus tard. La seule a savoir qui il est.

Hochement de tête du garde - la main du bourreau s'abat sur le levier. Le condamné sourit. La corde se ressert autour de son cou, l'étrangle, il perd pied. Ses jambes battent en un ultime élan de désespoir. Il sent ses cervicales se briser en un craquement sec, la corde comprimer sa trachée, la douleur vive, insupportable et sa conscience qui l'abandonne - il meurt. Mais ses lèvres restent audacieusement étirées.
Au bout de la potence pend un homme victorieux.
Parce qu'aujourd'hui ne meurt que le vulgaire assassin d'un général de police. Aujourd'hui ne meurt que Kasarmov - sa fausse identité.

Parce que Stepan Nikolaïevitch Khalturine,
L'ébéniste du Palais d'Hiver,
Le dernier membre de Народнаиа Волиа,
Le terroriste ayant fait trembler tout Saint Pétersbourg,
Ne sera jamais attrapé par la justice.

Parce que Stepan Nikolaïevitch Khalturine,
Continuera de terroriser le nouveau tsar Alexandre III,
Fantôme à jamais en liberté.





Encore bravo à Idrille pour cette super nouvelle ! N'hésitez pas à laisser des commentaires à l'auteur dans cette partie ou à voter pour cette dernière en commentaire comme ceci : +Aujourd'hui ne meurt qu'un assassin

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro