Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Le pire jour de sa vie (III)

     La surface du lac vola en éclats. Un élan venu de ses tréfonds la projeta en mille fragments vers le ciel. Le Farle fut subitement entraîné vers l'eau tourbeuse. La surprise fit tressaillir la main de Shand-Zang ; le carreau bondit hors de l'arbalète, siffla et ne perfora que les flots.

     Le tueur se redressa avec un juron. Envahi par une sourde frayeur, Fuzal se mit à genoux à son tour. Un crocodile avait jailli du trou d'eau et attrapé le Farle par le bras. N'était sa main droite crispée sur une des racines de l'arbuste à ses côtés, il aurait été emporté. Fuzal plaqua ses doigts contre sa bouche sans parvenir à étouffer un cri.

     Affalé dans la boue, écartelé entre le reptile et l'arbuste, le Farle leva les yeux vers le monticule où tous se relevaient. Malgré sa carrure impressionnante, et la petite taille du crocodile, il peinait à résister à la traction. Il ne faisait aucun doute que le saurien finirait par l'emporter.

     Sa contrariété effacée par la cruauté du spectacle, Shand-Zang remit son arbalète dans son dos. Un sourire ravi lui découvrait les gencives. Il adressa un salut de la main au Farle.

     " Belle journée, n'est-ce pas ? " lui cria-t-il.

     Trépignant d'une joie malsaine, il donna ensuite une tape sur l'épaule d'Astayâr, le représentant du clan du Caïman.

     " Bravo ! Ton frère a bien travaillé ! "

     Puis il se retourna à nouveau vers le Farle :

     " Tu l'as bien cherché ! Tu aurais mieux fait de rester dans ton Empire ! " 

     Olfiyûr hocha la tête. Glacé d'horreur et d'incompréhension, Fuzal les regarda les uns après les autres. Tous contemplaient la scène sans bouger, le sourire aux lèvres ; à l'exception de Nilani qui paraissait un peu contrariée, mais qui ne faisait pas mine d'intervenir pour autant. Shand-Zang lança de nouveaux quolibets au Farle et Olfiyûr se joignit à lui, se moquant de sa peau claire rougie par l'effort et le soleil.

     " Au moins nous voyons la couleur de son sang ! Parce que je ne crois pas que ce crocodile nous en laissera un morceau !

     - Au moins il disparaîtra complètement, comme s'il n'avait jamais existé !

     - Si seulement il n'avait jamais existé, lui et tous les autres ! Allez, frère du Centre ! Bouffe-le !

     - Qu'en dis-tu si nous pariions ? Cinquante coquillages verts qu'il ne tiendra pas plus d'une minute encore !

     - D'accord, mais montre-moi tes coquillages d'abord. S'ils sont beaux, je veux bien parier cent. "

     Dans la tête de Fuzal, une tornade se levait. Logique, raison et émotions se fracassaient les unes contre les autres en une tempête destructrice. C'était comme si, après avoir aperçu un beau tableau brillant, on en avait peu à peu modifié les détails pour le transformer en un monde affreux et sordide. Il sentait son cœur trembler dans sa gorge, il peinait à respirer. Il dû s'y reprendre à deux fois pour murmurer :

     " Mais... il faut l'aider ! "

     Les cinq paires d'yeux le clouèrent à sa place comme un piquet de clôture.

     " Qu'est-ce que tu dis, toi ? " s'ébahit Olfiyûr.

     Il le dévisagea avec incrédulité puis éclata de rire.

     " L'aider ? Tu as perdu la tête ?! À l'instant on allait le tuer à l'arbalète, qu'est-ce que ça change qu'il meure comme ci ou comme ça ? Pourquoi tu veux l'aider maintenant ?

     - Mais... balbutia Fuzal égaré, c'est un être humain !

     - Un être humain ! " s'esclaffa Olfiyûr.

     L'hilarité l'empêcha de parler plus. Tous se congratulèrent comme s'ils avaient entendu une bonne plaisanterie. Olfiyûr hoqueta :

     " J'ai trouvé comment nous allons t'appeler, toi ! Fuzal l'Être Humain ! (Il rit de plus belle.) ! Ton père Marfil Bris de Crâne va se retourner dans sa tombe ! Fuzal l'Être Humain !

     - Ou Fuzal Main Tendue ! " s'écria Nicia.

     Nouvelle explosion de rires. Shand-Zang se tapa sur la cuisse, Olfiyûr s'accrocha à l'épaule du Chasseur pour ne pas s'écrouler et Nicia se plia en deux en poussant des hululements hachés. Même Nilani lâcha un hoquet amusé et Astayâr, qui ne manifestait d'ordinaire guère d'émotions, se fendit lui aussi d'un sourire.

     La colère embrasa d'un coup la poitrine de Fuzal. La tête lui tourna, une bouffée de rancœur amère lui envahit la bouche. Il plongea sa main sous sa tunique et en extirpa son poignard. Sursaut étincela d'un sourire meurtrier, couronné de gemmes bleues. Les rires se turent.

    " Mais qu'est-ce... C'est qu'il a une arme, le môme ! s'exclama Nicia.

     - Elle est sacrément belle en plus ! Fais voir ", lança Shand-Zang en s'avançant, la main tendue.

     Fuzal recula à pas nerveux.

     " N'approchez pas ! s'écria-t-il, la respiration entrecoupée. N'approchez pas... Vous êtes des monstres ! "

     Et sans leur laisser le temps de réagir, il dévala le monticule. Le Farle n'était qu'à quelques mètres, mais Fuzal eut l'impression de mettre un temps infini à le rejoindre. Chaque enjambée soulevait la poussière, il ne savait plus très bien ce qu'il faisait, ni comment il allait repousser le crocodile - celui-ci l'avait vu d'ailleurs, son œil fixe aux teintes minérales, tout empli d'une malice séculaire, le regardait approcher sans réagir.

     Pourtant, c'était le regard du Farle qui l'effrayait le plus. Dans son visage couturé de plusieurs cicatrices, au-dessus d'un nez légèrement tronqué, ses iris gris se débattaient dans l'étreinte d'une émotion des plus violentes - celle de se voir mourir sans rien pouvoir faire.

     Fuzal ralentit, hésitant sur la conduite à tenir. Le Farle lui jeta dans un sozyès sans accent :

     " Frappe sa bouche, petit, dans sa bouche ! "

     Mais au même moment, comme s'il avait compris quelque chose, le crocodile relâcha son étreinte et se renfonça dans les eaux. Le Farle ramena contre lui son bras disloqué et se précipita vers son cheval. Fuzal se détourna, écœuré par la vision du sang, des chairs abîmées et de l'os mis à nu. Il aperçut alors ses compagnons qui accouraient derrière lui, les armes à la main.

     " Fizial ! " rugissait Olfiyûr.

     C'était cependant Shand-Zang qui venait en tête, propulsé par toute la puissance de ses grandes jambes. Astayâr le suivait de près. Leurs visages fermés et leurs regards meurtriers plantés sur le Farle indiquaient clairement leurs intentions. Ils dépassèrent Fuzal sans lui prêter attention, tandis que le cheval blanc s'élançait dans un tourbillon de sable.

     " Fuzal ! "

     Il se retourna à nouveau, au son d'une voix affolée. Nilani et Nicia se précipitaient vers lui. Il resta perplexe une seconde. Puis une gueule énorme, rosâtre, toute hérissée de dents pointues, jaillit à ses côtés, projetée par un immense corps cuirassé.

     Traversé d'une brutale décharge nerveuse, Fuzal bondit sur place et roula par terre. Cela ne dura qu'un instant, il se vit perdu ;  malgré le bras de Nilani, prolongé de son superbe katana, interposé entre lui et le monstre. La lame demi-circulaire de Nicia s'abattit au même moment, dans un sifflement sourd ; et le crocodile reflua en emportant le bras tranché de Nilani.

     L'incrédulité, l'horreur, puis la douleur, s'imprimèrent sur le visage de la jeune femme, en autant de gifles successives. Un cri lui échappa, un cri que Fuzal aurait préféré ne jamais entendre, et elle plaqua sa main sur son épaule. Le sang giclait entre ses doigts comme d'une outre percée. Elle tomba à genoux. Nicia bredouilla :

     " C'est... c'est le crocodile que je voulais frapper...

     - Eh bien heureusement que tu l'as raté, je ne sais pas si tu lui aurait fait grand mal ! riposta sèchement Olfiyûr. En revanche elle, elle aurait été emportée, si tu ne lui avais pas coupé le bras ! Repli ! Repli ! "

     Il empoigna Fuzal par le col et l'éloigna sans ménagement de la berge. Astayâr et Shand-Zang revinrent sur leur pas en courant. Le second pestait :

     " Mais qu'est-ce qui se passe ? Le Farle nous a échappé, il va aller prévenir les autres...

     - Repli ! gueula Olfiyûr. Nicia, occupe-toi de celui-là ( il bouscula Fuzal vers elle ), Shand-Zang, emmène Nilani, Astâyar, viens avec moi chercher les chevaux ! On s'en va de là ! "


    
     Après une galopade frénétique qui les éloigna plus profond dans la combe, parmi des replis sablonneux étalés au bord d'un nouvel affaissement de terrain, ils mirent pied à terre. Fuzal avait chevauché avec Nicia, Nilani avec Shand-Zang, la monture de cette dernière entraînée à leur suite par Astâyâr.

     Nilani fut déposée contre un accotement, mais Fuzal n'osa pas regarder dans sa direction. Il ne vit que Shand-Zang venir vers Olfiyûr. Le Fléau des Farles secouait ses mains à grands gestes, projetant des gouttelettes rouges tout autour de lui. Ses vêtements étaient tachés de sang comme ceux d'un boucher.

     " Elle va crever, elle, affirma-t-il sans que cela ait l'air de l'attrister. Il faut cautériser tout de suite ou elle va crever. Mais est-ce qu'on peut prendre le risque de faire un feu ? "

     Fuzal eut envie de lui sauter à la gorge. Bien sûr que non, Nilani n'allait pas mourir. Ce n'était possible. Comment pouvait-il émettre pareille idée ? Nicia également parut ne pas apprécier.

     " Il n'y a pas à se poser la question ! gronda-t-elle en assemblant quelques pierres. Je vais le faire tout de suite, avec ses pierres à feu... Ce sera vite fait, les Farles n'auront pas le temps de nous rejoindre... Eux aussi ont leur blessé à soigner. "

     Olfiyûr grimaça mais n'objecta rien. Dès que les premières flammes crépitèrent, il tira de sa ceinture un poignard à la lame courte et large.

     Au même instant, une sorte de ricanement retentit tout près, un cri discordant et désagréable. Les chevaux se mirent à renacler et piétiner. En une seconde, Shand-Zang arma son arbalète.

     " Des hyènes, siffla-t-il. Je déteste ces bêtes-là. "

     Là-dessus au moins, Fuzal pouvait le comprendre.
    
     " Elle est morte. J'ai vu sa gorge tranchée et son corps bouffé par les hyènes. "

     Dès qu'elles apparurent au détour d'une dune, il relâcha la corde. Fuzal eut à peine le temps d'avoir peur devant leur lourde tête féroce, aux mâchoires proéminentes dentelées de crocs menaçants, sous un gros museau noir. Le carreau s'enfonça dans le poitrail de la première hyène, ses pattes se dérobèrent et elle s'affaissa. Les autres s'écartèrent dans un concert de ricanements stridents. Shand-Zang en toucha une seconde au flanc, avant qu'elles ne prennent la fuite.

     Olfiyûr le remercia d'un signe de tête.

      " Allez, viens. On a besoin de toi pour la tenir. C'est Nicia qui va monter la garde. "

     Ce disant, il retira des braises son poignard chauffé à blanc. Fuzal avait envie de s'enfoncer sous terre pour échapper à ce cauchemar. Il ferma les yeux et se recroquevilla autant que possible, les doigts enfoncés dans les oreilles et la tête entre les genoux. Mais le mugissement de Nilani lui parvint quand même, accompagné d'une affreuse odeur de sang brûlé.

     Le ventre de Fuzal se resserra de nœuds insupportables. Tout avait basculé tellement vite. Il aurait donné n'importe quoi pour revenir en arrière, pour que rien ne se passe comme ça.

     Un choc violent contre sa hanche le fit soudain ouvrir les yeux et lever la tête. Olfiyûr se tenait près de lui, il venait de lui donner un coup de pied. Ses yeux débordaient de fureur. Fuzal comprit que l'heure de la punition était arrivée. Un élan de crainte le traversa, il voulu reculer. Puis la frayeur disparut sous une vague de résignation. C'était sa faute, il fallait qu'il paye. Il ne chercha pas à se défendre lorsque les premiers coups tombèrent.

     Olfiyûr lui administra une raclée monumentale, accompagnée d'injures et d'accusations. Sous la pluie de coups, Fuzal n'en discerna que quelques-unes, " sale crétin abruti ", " catastrophe ",  " tout gâché ", " n'écoute rien ", " imbécile de Fizial ".

     " Tu l'as tuée.

     - Non !

     - Tu l'as tuée ! "

     Dévoré de remords, Fuzal leva les yeux vers l'accusateur. Sous sa chevelure ébouriffée, Sohl l'écrasait d'un regard moqueur.

     " Tu vois ? C'est toi le coupable maintenant ! "

     Et il partit d'un grand éclat de rire. Fuzal voulut se jeter sur lui, mais son petit frère se déroba avec une litanie moqueuse :

     " Tu l'as tuée ! Criminel ! Tu l'as tuée ! Criminel !

     - Non ! C'est toi ! C'est toi qui... Mère... "

     Mère ? Nilani ? De qui parle-t-il ?

     Fuzal s'ébroua pour repousser la culpabilité, se mit à courir dans l'espoir de la laisser derrière lui. Mais des pierres commencèrent à lui tomber dessus et Sohl le narguait :

     " Tu l'as tuée ! "

     Fuzal s'élança dans le palais, fuyant d'allée en allée. Curieusement, toutes se ressemblaient. Il avait beau tourner à droite et à gauche, les mêmes dalles se succédaient, encore et encore. Et la voix accusatrice ne faiblissait pas :

     "Assassin ! Tu l'as tuée ! "

     Le visage mince de Nilani flottait de part et d'autre, tout assombri de reproches, l'air de dire :

     " Oui, Fuzal. Pourquoi ? Pourquoi ? "

     Fuzal avait beau hâter sa course, les chemins n'en finissaient pas ; au contraire même, ils semblaient se multiplier. Et à chaque embranchement l'attendait une silhouette vengeresse. Fuzal reconnu d'abord les yeux verts de Tzanado, réjouits, amusés de sa déchéance. Puis son autre cousin Kalal, un bras passé autour des épaules d'Ayana ; tous deux l'observèrent avant de détourner avec indifférence. Ensuite il vit les nattes noires d'Ololia flotter au vent ; sa sœur ne sourit pas et haussa les épaules, comme pour signifier qu'il l'avait bien cherché.

      De plus en plus oppressé, Fuzal aurait voulu que tout s'arrête. Mais une force impérieuse le poussait toujours plus loin sur le sentier, toujours plus loin, tandis que l'obscurité tombait peu à peu. Le cœur faillit lui manquer quand il aperçut un homme sur une pierre en surplomb, drapé d'un châle vert - le modèle tant admiré, Mian-Meh le Moine Mystérieux. Fuzal tendit le bras pour l'appeler à l'aide, mais son oncle ne fit pas un geste. Lui aussi fronçait les sourcils de colère.

     " Je t'avais mis en garde ! Je t'avais prévenu de ne pas faire échouer la mission ! Tu as tout gâché ! "

     Cependant les jambes de Fuzal l'emmenaient déjà plus loin, plus loin, au milieu de gueules largement ouvertes qui jaillissaient de toutes parts ; et alors qu'il s'élançait pour se sauver sur un chemin de plus en plus intangible, elles le conduisirent jusqu'à une nuit noire, obscure, sans étoiles...

     " Tu bois trop d'arack, Marfil. "

     Dans un grand sursaut, Fuzal ouvrit les yeux. Il lui fallut quelques secondes pour revenir à la réalité. Il se trouvait toujours au même endroit, là où Olfiyûr l'avait battu. Il avait dû s'évanouir, ou bien tomber de fatigue, ou peut-être un mélange des deux. Peu importait, seule comptait une chose...

     " Tu l'as tuée !"

     Il fouilla les alentours du regard pour situer ses compagnons. Ils s'étaient éloignés vers le ravin, qu'ils scrutaient en devisant. En tout cas, ils ne regardaient pas dans sa direction.

     Fuzal se précipita, à quatre pattes dans la poussière, vers la forme inerte de Nilani. Son cœur menaçait d'exploser. Il avait l'impression qu'il ne survivrait pas si la jeune femme était bel et bien décédée.

     Il évita soigneusement de regarder son côté droit et lui attrapa l'autre main. Elle était chaude et moite. Fuzal la pressa entre les siennes et l'appela à mi-voix :

     " Nilani ! Nilani ! "

     Elle referma ses doigts d'un coup, avec une force inattendue qui lui fit mal, et se redressa légèrement. Bien que grands ouverts, ses yeux ne semblaient pas voir.

     " Eljad, haleta-t-elle. Eljad ! "

     Fuzal balbutia une réponse inintelligible. Le corps de Nilani se relâcha d'un coup et elle retomba en arrière, sans connaissance. Fuzal demeura figé près d'elle, sans savoir que faire.

     Le reste du groupe revint sur ses entrefaites. Fuzal se recroquevilla dans la crainte de nouveaux coups, mais Olfiyûr ne lui prêta aucune attention. Seule Nicia lui jeta quelques mots :

     " Lève-toi. On est trop exposés ici. Il y a un peu de forêt, là, en bas. On descend. "

□□□

    

    

    

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro