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Le cobra et la mangouste (I)

Debout sur un rempart, à l'ombre d'une énorme cascade de feuilles vertes accrochée aux pierres, le poète Eljad ben Samora contemplait le palais de Salasala élevé tout autour de lui.

Cela faisait trois jours qu'il s'y trouvait, ou plus exactement qu'il y errait, perdu. Les Sozyès semblaient n'avoir ni sens de la symétrie ni organisation logique. Il n'y avait pas d'étages à proprement parler, les pièces et les cours paraissaient construites chacune à son propre niveau, le tout relié par une multitude d'escaliers, d'échelles de cordes et de ponts suspendus. L'édifice semblait en fait n'être qu'un assemblage de structures diverses agrégées sur la colline, dont la roche affleurait par endroits. Certains couloirs même traversaient le roc de part en part, à la grande perplexité d'Eljad. Les jardins et les plantes, innombrables, augmentaient son trouble. Ils lui donnaient l'illusion d'être sorti sans s'en rendre compte, alors qu'il ne s'enfonçait que davantage dans le dédale.

Juché sur ce chemin de ronde, il se rendait compte de la démesure de l'endroit. Le soleil de la matinée en éclairait une partie et en laissait l'autre dans l'ombre, comme sur les versants des montagnes.

Un sourire léger flottait sur les lèvres d'Eljad et il murmura quelques vers, impressionné par le travail colossal qu'avait dû exiger une telle construction. Réjouit de son éloquence, il faillit ne pas remarquer deux soldats qui approchaient en devisant. Son cœur s'affola. Même s'il portait un uniforme similaire, il avait compris, au fil des conversations espionnées, que son stratagème pour entrer dans le palais avait été éventé et qu'on le recherchait activement.

Il recula très vite dans l'amas de feuilles émeraude et se plaqua au rempart, son javelot contre lui. Les deux gardes arrivaient. Eljad retint son souffle, ferma les yeux et se concentra sur leur paroles.

« ... toujours pas, c'est pas bon pour nous ! Le Moine Mystérieux n'est pas content du tout, tu imagines ! J'ai peur qu'il s'énerve, tu sais comment ils sont, dans cette famille...

- Oui... acquiesça l'autre en baissant la voix. D'ailleurs qu'est-ce qui est arrivé au responsable des portes ? Il a disparu... Il paraît qu'il a été tué par l'éléphant, tu sais... la fête des Ancêtres... Mais comment c'est possible ? »

Les soldats passaient au niveau d'Eljad. Il distinguait parfaitement leurs murmures.

« Ça doit être lié à ce garde que nous recherchons.

- Mais comment le retrouver alors que nous savons à peine à quoi il ressemble ? En plus on m'a dit qu'il a peut-être changé de costume ? C'est impossible !

- Crois-moi, ça pue, cette histoire, plus que de la diarrhée de phacochère. »

Eljad n'en entendit pas plus ; les deux hommes s'éloignaient. Il fixaa leurs dos tournés avec un sourire rusé et sinistre.

Vous n'avez encore rien vu... Vous allez mourir. Vous allez tous mourir.

Quelques heures plus tard, après de nouvelles déambulations, il se retrouva dans une salle étrange, vaste, de forme ovoïde. Un entrelas de chemins tenait lieu de sol, au-dessus d'un bassin d'eau de rose. Les vapeurs capiteuses du parfum lui firent tourner la tête. Il allait s'en retourner quand il aperçut, au fond de la pièce, une table où trônait une coupe de fruits et un grand pichet décoré. Son cœur s'accéléra. C'était ce qu'il cherchait.

D'un pas rapide, il s'élança sur le chemin. En s'introduisant dans ce palais, il s'était imaginé devoir ensuite infiltrer les cuisines, mais les Sozyès lui avaient facilité la tâche. Il laissaient de la nourriture en évidence dans de nombreuses pièces, assez pour que le premier venu puisse se rassasier. Ça allait leur coûter cher.

Il souleva le couvercle du beau vase bleu et le trouva plein d'eau claire. Il plongea sa main par l'échancrure de sa tunique. Il portait dessous une petite bourse, attachée autour de son cou, qui contenait plusieurs fioles. Il en déboucha une et la pencha au-dessus du récipient. Trois gouttes tombèrent, avec un doux clapotis mortel.

Eljad rangea sa fiole. Même s'il avait ainsi répandu du poison partout où il l'avait pu, il lui en restait encore assez pour décupler l'hécatombe. Il fit volte-face pour partir. Et tressaillit violemment.

Un garçon l'observait depuis le seuil de la pièce. Six ou sept ans, échevelé, dépenaillé, le visage sale et le regard sauvage. Il s'enfuit comme un lièvre au premier mouvement d'Eljad.

Celui-ci en fut glacé des pieds à la tête. L'enfant l'avait-il vu verser le poison ? Allait-il prévenir quelqu'un ? Soudain aux abois, Eljad se précipita hors de la salle, manquant glisser dans le bassin d'eau de rose. Il regarda à droite, à gauche et en haut, en direction des chemins qui montaient vers les tours et les jardins suspendus. Nulle trace du garçon. Il aperçut par contre plusieurs gardes et quelques nobles, mais personne ne rua sur lui.

Eljad n'en fut pas rassuré pour autant. Il s'éloigna en hâte.

Il faut que je sois plus prudent ! Et que je commence à penser à partir d'ici avant qu'il ne soit trop tard, je ne pourrais pas me cacher indéfiniment... Mais je n'ai pas achevé ma mission... Si seulement la chance pouvait me sourire !

Son vœu fut exaucé dès le lendemain matin, alors qu'il traversait un patio tranquille. Un petit lac où reposaient des lotus, bordé de galets brillants et ombragé de palmiers, suscitait apaisement et détente. Eljad eut presque envie d'aller s'asseoir au bord et composer quelques vers, dans les irrisations paisibles de la lumière matinale.

Mais un cliquetis métallique l'alerta soudain. C'était le son caractéristique des fléaux que les prêtres agitaient constamment, pour éloigner les mauvais esprits. Eljad, effaré, aperçut une silhouette épaisse dans l'escalier demi-circulaire qui descendait vers le patio. Il chercha du regard une cachette, ne vit que quelques rochers au bord du lac et se rua derrière aussi silencieusement que possible. Il posa d'abord son javelot et s'allongea par-dessus, les lèvres sèches. Son cœur battait à coups sourds et douloureux.

Pourvu qu'il passe vite !

En haussant un peu la tête, il put distinguer le prêtre au bas des marches, coiffé d'un chapeau conique, vêtu de robes aux teintes violacées, les yeux mis-clos, le teint grisâtre, la barbe miteuse et l'air fatigué. Sa main n'agitait son fléau que par saccades. Eljad se rendit alors compte qu'il discutait avec quelqu'un, et un autre homme apparut à ses côtés. Celui-là portait le châle vert des moines sozyès, des piquants de porc-épic dans les cheveux en signe de pénitence perpétuelle, et une chaîne lui enserrait la taille.

L'anxiété d'Eljad augmenta d'un cran. Il avait déjà rencontré des moines sozyès, et les avait tous constatés sensibles à ce qui les entourait, comme s'ils bénéficiaient d'un sixième sens. Il se rencogna dans sa cachette et se contenta d'écouter. Le moine parlait sur un ton court et âpre :

« Je vais partir tout de suite pour la cité sacrée. Je n'ai que trop tardé, je devrais déjà être en route. Ces événements ont tout bouleversé. D'ailleurs, lorsque vous aurez attrapé cet intrus, enfermez-le dans les cachots les plus profonds, mais ne le touchez pas. Je veux lui parler moi-même à mon retour.

- Les ordres seront appliqués, Moine Mystérieux », répondit le prêtre de sa voix peu audible.

Eljad se mordit la main pour retenir un cri de surprise.

Le Moine Mystérieux ! Je n'y crois pas... La voilà, ma chance, la voilà !

Ivre d'adrénaline, il se redressa à la suite des deux hommes. Ceux-ci s'engageaient dans un autre escalier pour descendre dans une cour plus basse, ceinte de rochers aussi imposants que des pans de falaise. À pas furtifs, Eljad alla se tapir juste à côté, derrière un muret. Il n'entendit cependant plus qu'une dernière phrase du Moine Mystérieux :

« Je vais laisser le pouvoir au grand vizir, mais surveille-le. Je n'ai pas confiance en lui. »

Puis les deux Sozyès se séparèrent dans cette cour. Le prêtre s'en fut à gauche, par un couloir ouvert dans le roc, tandis que le Moine Mystérieux pénétrait dans une pièce semi-troglodyte à sa droite. Il y demeura un long moment. Eljad changea de cachette pour qu'on ne puisse pas l'apercevoir depuis les hauteurs du palais et patienta.

Le Moine Mystérieux finit par ressortir, une sacoche en bandoulière et un manteau bleu plié sur le bras. Son regard fit le tour du patio. Eljad se ratatina autant que possible derrière les massifs de fleurs rouges. Le calme et la maîtrise de cet homme lui faisaient peur, sa façon de tourner lentement la tête à droite et à gauche lui donnait l'air d'un félin qui sonde son environnement à la recherche d'une proie.

Il est plus dangereux qu'une panthère... Et moi je suis dans son antre ! S'il me trouve, je n'aurais aucune chance !

Heureusement, le Moine Mystérieux ne s'attarda pas. Il s'éloigna par le couloir que le prêtre avait emprunté avant lui. Eljad reprit son souffle, secoua sa tunique qu'une sueur froide avait collé contre sa peau. Se pouvait-il qu'il soit si près du but ?

« Je vais partir pour la cité sacrée, je devrais déjà être en route. »

Si le Moine Mystérieux partait en voyage et qu'il avait préparé ses affaires dans cette pièce, cela signifiait qu'il s'agissait de ses appartements ! Pour être sûr qu'il était bel et bien parti, Eljad attendit un long moment avant de descendre à son tour.

De grandes pierres grises dallaient la cour, parfaitement imbriquées malgré leurs formes irrégulières. Vue de l'extérieur, la salle où était entré le moine faisait penser à une grotte refermée par un mur de briques claires. Celui-ci était percé d'une petite fenêtre à barreaux, et d'une entrée rectangulaire, sans ornement aucun. Il n'y avait même pas de porte pour refermer cette ouverture. Eljad s'arrêta, nerveux, et essuya ses mains moites sur sa tunique. Ce n'était pas normal. Le gouverneur de la région s'absentait-il en laissant ainsi ses appartements sans surveillance, ouverts au premier venu ? Il n'y avait aucun garde alentour, rien pour protéger cette entrée béante. Eljad pouvait voir à l'intérieur quelques coffres et étagères, un pupitre chargé de parchemins ainsi qu'une planche posée par terre. Il s'approcha un peu plus, avant de reculer de quelques pas. Cela empestait le piège. Il ne pouvait pas en être autrement.

Au comble de la nervosité, Eljad se décala, regarda autour de lui pour déceler un éventuel détail suspect. Rien ne l'alerta, il s'avança et recula derechef. Un rire spasmodique lui échappa. Cette situation lui rappelait un poème de Kazhem ben Houl, le légendaire aventurier du désert. Certains prétendaient que ce héros n'avait jamais existé que dans les fables, mais Eljad ne comptait pas parmi ces incrédules. Kazhem était son modèle, et ses faits et gestes guidaient toute sa vie.

En l'occurrence, Eljad se remémorait ce que Kazhem avait psalmodié dans une de ses plus célèbres poésies, au sujet d'une gazelle assoiffée s'approchant d'un trou d'eau, consciente de la présence d'un crocodile sous la surface trouble, tiraillée entre sa soif et son instinct de survie. Kazhem en avait tiré un de ses vers les plus tragiques : " Mais la gazelle finit toujours par boire ".

Soudain, Eljad remarqua un détail saillant sur la roche sombre, tout près du mur de briques. Il s'approcha, circonspect. Il s'agissait d'une petite manivelle. Il sourit, fier de sa présence d'esprit.

Le voilà, le piège. C'est lié à ça. Je vais voir...

D'une main un peu tremblante, il empoigna le morceau de bois. Il ne savait pas lui-même à quoi il s'attendait exactement, mais il ne se passa rien. La manivelle ne bougea pas, ni dans un sens ni dans l'autre.

C'est bloqué ? Ce serait vraiment trop de chance...

Il hésitait encore malgré tout. L'entrée ouverte l'attirait telle une tentation irrésistible, il y avait peut-être là ce qu'il était venu chercher, mais...

Il prit d'un coup sa résolution. Il fallait y aller de toute façon, il ne pouvait pas faire demi-tour après tous ces efforts.

Il franchit le seuil et s'avança dans la pièce. La luminosité y était faible, il papillonna un instant des yeux pour s'y habituer. Et le piège pressenti se referma.

Comme surgie de nulle part, un porte se referma derrière lui avec un choc sourd. Le cœur d'Eljad fit un bond à s'échapper hors de sa poitrine. Il se rua sur l'épais battant. D'où était venue cette porte ? Personne ne l'avait actionnée ! Il chercha à la rouvrir mais il n'y avait pas de poignée, rien pour la manœuvrer. Il cala son épaule dessus et pesa de toutes ses forces. En vain.

" Mais la gazelle finit toujours par boire. "



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