Collège :
Ou comment je suis devenu un loup :
Les gens ne sont pas des moutons, ce sont des loups.
Le monde n'est pas un immense troupeau bêlant et suivant docilement un berger mais une multitude de meute dont les membres suivent un alpha. Ils ne se rebellent pas et se plient aux ordres mais de là à croire que ce sont des moutons... Les moutons attaquent-ils le plus faible du troupeau ? Mettent-ils de côté une bête choisie pour la tourmenter ? Bien sûr que non. Ils sont idiots mais ils sont égaux.
Dans une meute il y a l'alpha et sa femme, puis viens le bêta, la patte droite du chef, et ensuite une multitude de suiveur et enfin arrive l'oméga. Il fait partie de la meute mais est en même temps à part, il est le souffre-douleur des autres mais il est important, grâce à lui la meute reste soudé. En martyrisant un seul individu ils évitent de se chercher des noises entre eux, c'est la manière qu'a trouvé la Nature pour que des prédateurs puissent vivre en meute.
L'homme lambda est un loup. Il fait parti d'une meute au travail, d'une autre lorsqu'il est en famille et d'encore une autre lorsqu'il est avec ses amis et parfois ses rôles varis. Alpha dans l'un, suiveur dans l'autre, Oméga dans le troisième, cela dépend.
Avant le collège j'étais une louve solitaire, une de celle cherchant désespérément une meute tout en sentant qu'elle ne serait à sa place dans aucune. Comme un animal je me battais, comme une vipère je crachais mon venin aux visages des autres, comme un humain je faisais des coups bas.
Mais lorsque j'arrivai au collège quelque chose changea.
Je retrouvai mon amie d'enfance qui avait un an d'avance et elle me présenta à son groupe d'amie. Sans le vouloir elle venait de m'intégrer de force dans une meute et quelque part au fond de moi je compris qu'il valait mieux que je me conforme aux règles la régissant.
Alors je suis devenu une Oméga. Une victime consentante. J'étais plus jeune, on me jugeait idiote et je baissais la tête, allant même parfois jusqu'à me mordre la langue pour ne rien dire d'intelligent.
J'étais la fille gentille, un peu stupide et ignorante de la vie.
Il ne faut pas vous méprendre, ce n'était pas moi, c'était le rôle que l'on m'avait assigné. Et je m'y pliais car je pensais, à tort, à raison, je ne sais pas, qu'ils s'en prendraient à moi avec moins de cruauté si je ne disais rien.
L'adolescence est un période charnière. On se détache de papa et maman, on se rapproche de nos amis, on construit nos goût et les fondations de notre vie. C'est le moment où on s'affirme et où on se rebelle, c'est le moment où on apprend à aimer les choses nous même et où notre personnalité s'élève.
Ce ne fut pas le cas pour moi.
En bon Oméga je me conformai.
Mon amie aimait un livre ? Je l'aimais aussi. Elle déclarait que telle musique était géniale ? Je faisais de même. Elle riait de cette personne ? Ma bouche s'ouvrait et ma gorge laissait échapper des gloussements.
Mes vêtements, mon apparence et mes goûts, je faisais tout pour me fondre dans la masse. Mais, quelque part en moi, la louve solitaire feulait, tournant en rond dans la cage que je lui avais construite. Elle savait que je n'étais dans la meute que pour me faire mordre, qu'au fond je n'étais pas accepté et que rien de ce que prétendais être n'était réellement moi.
Preuve en était, les autres meutes me tourmentaient sans cesse et moi, bon Oméga, je ne disais rien. Sauf parfois où ma colère explosait et où je sautais, littéralement à la gorge de mon agresseur pour le rouer de coups, lui saisir la gorge de mes mains, le trainer au sol par les cheveux. Mais après cela je redevenais la fille timide, effacé et je tendais une joue lorsqu'on me frappait.
Je raconte cela pour vous faire comprendre que je ne peux pas savoir si, à cette époque déjà, je me considérais comme un homme et si mon orientation sexuelle était déjà déterminée.
Me considérais-je comme une fille parce que je pensais l'être réellement ? Ou parce que c'était le rôle que m'avait attribué mes différentes meutes ? Aimais-je réellement les garçons comme une fille hétéro doit les aimer ? Ou bien ne les ais-je aimé ainsi que parce que c'était le seul modèle que me présentaient mes meutes ?
Si j'étais resté la louve solitaire de mon enfance m'en serais-je rendu plus tôt ? L'aurais-je accepté plus tôt ?
Je ne sais pas. Personne ne peut le savoir.
Le collège poursuivit son cour et très vite la troisième arriva.
Ce fut une année importante car elle représenta ma première rébellion.
En effet mon amie d'enfance et sa meute partirent pour le lycée me laissant seule dans un environnement hostile. Je ne savais pas fonctionner seule, j'étais conditionnée à suivre, à entendre les ordres et les exécuter. Alors j'essayai de me rapprocher d'une nouvelle meute, une où je pourrais reprendre ma place d'Oméga.
Je pourrais vous dire que c'est là que je l'ai rencontré, que cette rencontre changea ma vie et, c'est vrai, elle la changea mais pas dans le bon sens. Mais nous nous connaissions depuis des années, nous étions allés dans la même école maternelle puis dans la même primaire, nous ne nous étions juste jamais vraiment parlé.
Elle était une louve dominante mais solitaire, une alpha en puissance ne demandant qu'à former sa meute. Elle était différente avec ses robes ressemblant à des déguisements recouverts de nœuds et de dentelles, elle semblait tout droit sortie d'un manga se passant au dix-neuvième siècle.
En moi la louve solitaire, endormi depuis des années, se réveilla et me poussa vers elle, elle me chuchota que nous étions semblable et que cela serait parfait. Elle avait tort. Nous n'étions semblable que parce que nous étions toutes deux différentes, pour le reste nous étions aux antipodes.
Elle se révéla très vite beaucoup plus cruelle que mon amie d'enfance et je me rendis compte qu'il y avait pire qu'être assimilé à un être inférieur. En effet pour mon ancienne meute j'étais en dessous d'eux et ils me le rappelaient parfois, pour bien que je reste à ma place. Mais elle prenait un plaisir sadique à me rabaisser, à m'enfoncer de plus en plus profond dans un trou d'infériorité et à me rendre dépendante d'elle.
Cela passa par diverses choses. Les mangas qu'elle me prêtait elle me faisait bien comprendre que je ne les méritais pas, qu'elle était gentille de me les passer et que, de toute manière, je ne pourrais jamais lui rendre la pareille car ceux que je lisais n'été pas de bonne qualité. Les romans que j'écrivais été mauvais, alors que les siens étaient splendides, preuve en était elle les publiait sur un blog et recevait des dizaines de commentaires laudatifs. Elle me fit l'honneur de me dire qu'elle voulait en écrire un avec moi mais ne me laissa participer ni à l'élaboration du scénario, ni à l'écriture, c'était d'ailleurs toujours elle qui tapait sur le clavier. Mais parfois elle acceptait un de mes mots et je ressentais une fierté immense, déplacée, incohérente. Mon apparence, mon poids en trop et ma poitrine, se heurta à la sienne, petite androgyne et peau pâle, qu'elle qualifiait de pure.
J'étais devenue une créature étrange.
Avant je me sentais inférieur à tous, maintenant je considérais les autres comme des insectes, j'avais des idées de grandeurs et de toute puissance et elle je la voyais presque comme un Dieu. Je n'étais rien face à elle mais comparé aux autres j'étais bien mieux. Ce fut sans doute pour ça que je m'accrochais autant à elle parce qu'elle arrivait à me faire sentir si petite et inutile et si grande et puissante à la fois.
La louve solitaire était satisfaite, l'Oméga ronronnait.
Aujourd'hui le Dieu est tombé de son piédestal et j'ai piétiné sa statue jusqu'à ce qu'il n'en reste qu'une fine poussière. Mais il y a une chose que je lui dois, une chose, là seule, qui fut positive dans cette relation malsaine qui devait durer encore un an. Ce fut par elle que je découvris l'homosexualité.
J'ai fouillé dans ma mémoire, essayant vainement de me souvenir à quel moment j'ai pu apprendre que de telles relations existaient, mais rien ne me vient alors je vais considérer que ce fut elle qui m'apprit que c'était une chose possible.
Elle aimait les mangas et plus particulièrement les yaois et, bien que je trouvais cela répugnant –deux garçons ensembles, quelle chose contre-nature !- je ne pouvais m'empêcher de la questionner là-dessus. Elle avait l'air de s'y connaître tellement bien, cela me fascinait. Une attraction malsaine, comme si j'étais convaincu au fond de moi de faire quelque chose de mal mais sans pouvoir m'en empêcher, et elle comprit très vite comment en tirer partie.
L'étiquette « perverse » me fut immédiatement collée sur le front et elle me nourrit alors d'anecdotes, de détails et de mots crus tout en me reprochant clairement ce drôle de hobby.
Pourquoi ce genre de relation me fascinait autant ? Avaient-elles réveillée quelque chose en moi ? Ma louve solitaire venait-elle de se rendre compte qu'elle n'était peut être pas tant une louve que ça ? Ou bien étais-ce une attraction normale ? Beaucoup de filles sont attirées par les relations homosexuelles, peut être en fut-il de même pour moi.
Le collège se termina ainsi.
Je me pensais toujours fille, toujours hétéro et en moi l'Oméga et la louve solitaire semblait avoir trouvé un terrain d'entente. Terrain friable, pentu, dangereux comme le bord d'une falaise car le lycée montra par la suite qu'un rien serait suffisant pour briser cet équilibre.
Le voyage se poursuit et pour le moment rien dans mon passé ne semble indiquer que j'étais destiné à devenir un jeune homme.
Le quatorze on attaquera le lycée et plus particulièrement mon année de seconde, c'est là que les choses commencèrent à changer.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro