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Chapitre 57: Espoir

Un être artificiel pouvait-il laisser son empreinte dans la mémoire collective ? Telle était la question qui obnubilait Mirai depuis son départ de Chrysantia. À force de côtoyer Airi et Iris, la chanteuse avait fini par se demander elle aussi ce qu'il resterait d'elle après sa disparition. Allait-elle tomber dans l'oubli, être remplacée comme on remplaçait les projecteurs qui étaient braqués sur elle lors de ses passages sur scène ? Ou bien pouvait-elle prétendre également rentrer dans l'histoire comme les plus grands artistes humains ?

La Vocaloid n'avait jamais rêvé de gloire ni de célébrité. Elle ne chantait pas pour gagner de l'argent ni pour être connue mondialement et avoir sa tête sur les couvertures des magazines people. Elle chantait pour rendre les gens heureux. Dans un monde rongé par la haine, la peur et gangréné par le fanatisme, Mirai voulait que sa voix aide les plus fragiles à sortir de cette boucle infernale et illumine, l'espace de quelques minutes, leurs journées grises.

Mais était-ce son souhait ? Ou bien ne s'agissait-il que de son programme interne ? Elle l'ignorait. Toutefois, l'idole de métal était certaine d'une chose : au moment où elle s'était connectée au terminal de Chroma et lui avait injecté le virus, elle avait volontairement mis fin à ses jours en ayant conscience que son action engendrerait beaucoup de peines. Pourtant, cette pensée ne la dérangeait pas. Elle n'était pas un simple amas de lignes de code informatique. Tout comme Airi, elle était vivante, possédait sa propre volonté. Elle était libre de ses choix. Et elle comptait bien le prouver au monde.

Si je pouvais rêver, d'une autre réalité

Je me laisserais pousser, des ailes pour les déployer

D'une teinte immaculée, grâce à elles je m'élèverais.

Enfin je deviendrais, comme un oiseau : libéré.

Alors que la voix de Mirai résonnait dans le laboratoire, les tours de contrôle alimentant le super ordinateur s'éteignirent une à une. Le professeur Turing, en réalisant ce qu'il se passait, tenta d'intervenir pour arrêter manuellement la propagation du virus, mais Airi lui barra la route. L'homme, dont l'armure se vidait peu à peu de sa puissance, ne parvint pas à atteindre la Vocaloid malgré tous ses efforts.

Tout en se battant avec son créateur, la cheffe de Chrysantia communiqua mentalement avec son amie.

— Mirai ? Que fais-tu ? C'était à moi d'injecter le virus ! s'exclama Airi par message.

— Je suis désolée. Tu dois rentrer à Chrysantia quoiqu'il arrive. Ton peuple t'attend, lui répondit Mirai très calmement. Tu as le devoir de les guider.

— Toi aussi, tu dois rentrer ! Tu as promis à Ronan !

— Je lui ai promis que je resterai à ses côtés, et je n'ai pas menti. Après tout, les AIntelects en sont incapables. Toutefois, je n'ai pas besoin d'être physiquement présente pour cela. Tant que ma voix demeurera gravée dans sa mémoire, je serai avec lui. C'est ce qu'Iris et toi avez dit, n'est-ce pas ? Nous ne mourrons pas vraiment tant que nous continuerons à exister dans les souvenirs de quelqu'un. Si cette affirmation est vraie pour les humains, elle l'est également pour les AIntelects. Mon code source sera peut-être effacé, mes chansons vous accompagneront jusqu'à la fin.

Je veux déployer mes ailes, et m'envoler vers le ciel

Pour disparaître sans retour...

Je volerai dans l'allégresse, et partirai sans tristesse,

Pour planer et sentir mes ailes...

Voler dans le ciel...

Deux autres tours s'éteignirent. Alors que le téléchargement atteignait les 60 %, un court-circuit se répandit dans le corps de Mirai, qui posa un genou à terre. Ses composants furent touchés de plein fouet, de même que sa mémoire vive. Ses fichiers les plus anciens commencèrent à s'effacer un par un.

Sa partenaire continuait à se battre avec Bertrand, dont les mouvements étaient de plus en plus ralentis. Ce n'était qu'une question de seconde avant que son exosquelette ne cesse entièrement de fonctionner, de même que Chroma.

Avant que tous ses souvenirs ne disparaissent, Mirai reprit la parole mentalement.

— Tu sais, Airi, en vous rejoignant, j'ignorais ce qui nous attendait, nous, AIntelects. J'étais encore soumise au programme Asimov. Néanmoins, depuis que tu l'as retiré, j'ai cherché quel pouvait être le véritable sens de mon existence. Et je pense qu'aujourd'hui, je l'ai enfin trouvé. Ma mission lors de mon court passage sur cette terre est de chanter, non pas pour apporter du bonheur à une foule d'inconnus, mais pour insuffler à mes compagnons de route le courage d'aborder l'avenir avec sérénité.

— Arrête, Mirai, tu n'es pas obligée de...

— Nous sommes des êtres doués de volonté. Nous sommes libres de faire des choix, de nous tromper ou de réussir. Mais nous sommes également tous liés par ce sentiment commun qu'est l'espoir d'un lendemain meilleur. S'il te plait, permets-moi incarner pour la première et dernière fois ton espoir d'un futur où humain et AIntelects pourront marcher main dans la main. Laisse-moi détruire Chroma.

Je ne veux pas de richesses, ni que tout le monde me connaisse,

Je veux juste des ailes, pour m'envoler vers le ciel

Je garde en moi tous ces rêves, ces pensées tant belles que brèves...

Ces rêves infantiles, dans lesquels tout est possible...

Un nouveau court-circuit obligea Mirai à couper la communication. Son disque dur venait d'être infecté à son tour par le virus. Alors que sa mémoire s'estompait lentement, ses sens disparurent un à un. Le combat qui avait lieu devant ses capteurs oculaires se réduisit à un amas de pixels flous. Sa propre voix lui sembla bientôt aussi ténue qu'un murmure lointain.

Malgré tous ses dysfonctionnements, la Vocaloid continua à chanter. Elle redoubla même d'intensité afin de transmettre l'intégralité de ses sentiments à travers son ultime mélodie, la même qui lui avait permis de rencontrer ses compagnons et qui avait donné un sens à sa vie de robot sans âme.

Je veux déployer mes ailes, et m'envoler vers le ciel

Pour disparaître sans retour...

Je volerai dans l'allégresse, et partirai sans tristesse,

Pour planer et sentir mes ailes...

Voler dans le ciel...

Les images de Chrysantia s'effacèrent à leur tour. Alors que le programme mortel arrivait à son terme, il ne restait dans la mémoire de Mirai que ses derniers instants avec l'homme qu'elle aimait, ainsi que la promesse qu'elle lui avait faite. Il s'agissait de son souvenir le plus précieux, celui qu'elle chérissait par-dessus tout et qu'elle refusait d'oublier. Elle s'y accrochait de toutes ses forces afin de continuer à chanter malgré son corps défaillant sur le point de s'éteindre. Elle ne savait plus ni pourquoi elle faisait ça, ni où elle se trouvait, ni qui étaient ces personnes qu'elle distinguait.

Mirai n'était pas effrayée. Au contraire, elle se sentait étonnement apaisée, comme si elle avait pu accomplir quelque chose d'important pour quelqu'un qui lui était très cher.

Je veux déployer mes ailes, bien au-delà du réel,

Pour changer le monde sans retour...

Je vivrai par la pensée, une existence insensée,

J'accomplirai cette promesse...

Je pense donc je vis...

Un tintement métallique résonna dans le laboratoire plongé dans l'obscurité après que la dernière tour se fut éteinte. Le corps sans vie de Mirai s'effondra sur le sol tandis qu'au même moment, Airi asséna un violent coup de pied à son créateur. L'armure de Bertrand se disloqua sous la puissance de l'impact et le vieil homme fut propulsé contre le terminal sur lequel il s'écrasa de tout son poids.

La cheffe de Chrysantia attendit quelques secondes, la ventilation tournant à plein régime pour refroidir ses composants sur le point de fondre. Sa batterie ne possédait plus que 2 %. Si son adversaire se relevait, elle serait incapable de tenir un second round. Heureusement, Bertrand semblait avoir lui aussi atteint ses limites.

Sans perdre un instant de plus, Airi se précipita vers sa partenaire. Elle la débrancha précipitamment et tenta de la rallumer par tous les moyens. Elle alla même jusqu'à lui transmettre le peu d'énergie qu'il lui restait. Mais il était trop tard. Le code source de Mirai avait disparu, de même que tous ses souvenirs.

C'était étrange. Le visage de la Vocaloid était si serein que n'importe qui aurait pu penser qu'elle était simplement en veille, attendant que quelqu'un vienne la rechercher pour recommencer à chanter et illuminer le quotidien de ses proches.

Airi avait assisté à la mort de nombreux hommes, mais c'était la première fois qu'elle se sentait aussi affectée par une disparition. Mirai n'était pas qu'une simple AIntelect parmi des milliers d'autres. Elle était une amie très chère aux yeux de la meneuse. Elle avait l'impression d'avoir toujours entendu sa voix, d'avoir toujours été rassurée par son sourire, d'avoir toujours ri avec elle. La Vocaloid faisait partie intégrante de sa vie.

Malgré l'immense vide laissé par l'effacement de Mirai, Airi savait qu'elle devait continuer à avancer. C'était ce que sa sœur lui avait demandé. Elle devait retourner auprès des siens et leur annoncer le commencement d'une nouvelle ère de paix. Le sacrifice de Mirai n'était pas vain. Grâce à elle, la face du monde allait changer pour le meilleur. Et l'ancienne chercheuse de l'ESA allait s'assurer personnellement d'honorer sa mémoire.

Alors qu'elle s'apprêtait à ramener la dépouille de la chanteuse jusqu'au vaisseau, l'AIntelect aux cheveux rouges remarqua une carte mémoire dans la paume fermée de son amie disparue. Intriguée, elle l'inséra dans son lecteur. Ce qu'elle découvrit la laissa sans voix.

Il s'agissait d'une copie du code source de la Vocaloid ! Non. Le programme était semblable, mais différent de l'original. Il comportait de nombreuses fonctions bien trop singulières pour avoir été programmées pour un usage commercial. Ce code source modifié ressemblait comme deux gouttes d'eau... à la retranscription numérique d'un ADN humain...

Oui. Airi en était certaine. Aussi fou que cela ait pu paraître, l'essence même de Mirai semblait avoir muté de manière spontanée pour se rapprocher de quelque chose de plus naturel : un ADN organométallique. La cheffe de Chrysantia tenait entre ses mains la première cellule de cette nouvelle forme de vie qu'elle avait tant cherché à atteindre.

— Tu portais vraiment bien ton nom, murmura-t-elle. Je te promets que ta descendance connaîtra ton héroïsme et ta bonté.

Un gémissement tira Airi de ses pensées. Bertrand reprenait lentement conscience. Toutefois, il était mortellement blessé, en témoignait la tâche noire sur sa chemise au niveau de son ventre qui grossissait à vue d'œil. L'AIntelect allongea délicatement son amie sur le sol et se dirigea vers son créateur. Ce dernier puisa dans ses dernières forces pour s'asseoir et faire face à sa fille en lui souriant malgré la douleur.

— Tu as... Tu as vraiment grandi, haleta-t-il entre deux quintes de toux sanglantes. Je n'aurais jamais cru que cette AIntelect pleine de bugs parviendrait un jour à devenir reine d'un pays entier...

— Pourquoi avoir agi ainsi, professeur ? lui demanda Airi timidement. J'avais confiance en vous. Vous étiez comme un père pour moi. Qu'est-ce qui vous a poussé à vous allier à l'AVO et à vous opposer à moi ?

— Je pensais... Je pensais que tu n'avais pas conscience de ce que tu faisais, avoua l'homme, presque honteux. Pour moi, tu es toujours une petite fille un peu immature et rêveuse. Pour moi, tu continuais à rêver tout en étant détachée de la réalité. Mais force de constater que je m'étais trompé. Tu as pleinement conscience de ce que tu fais et tu agis pour le bien de tous. J'ai été stupide... d'avoir été incapable de le voir plus tôt.

— Non. C'est moi qui suis fautive. Je n'aurais pas dû vous abandonner, il y a dix ans. J'ai agi de manière impulsive et je vous ai éliminé de ma vie, car j'ai été incapable de comprendre ce que vous ressentiez à ce moment-là. Sur le coup, j'ai vraiment été une gamine immature, comme dirait Astro. D'autant plus que je n'ai jamais cherché à m'excuser envers vous. Si j'avais été la même qu'à l'époque, vous auriez eu raison de vouloir m'arrêter. Mais durant ces dix ans, beaucoup de choses se sont passées. J'ai perdu des proches. J'ai rencontré des personnes formidables. J'ai dû créer un pays à partir de rien et le défendre contre les menaces. Toutes ces expériences ont fait de moi celle que je suis aujourd'hui. Elles m'ont poussée à prendre cette décision radicale, mais nécessaire qui était de détruire l'extranet.

— On dit que les parents ont beaucoup à apprendre de leurs enfants. Cette phrase n'a jamais été aussi vraie que maintenant, soupira Bertrand, de plus en plus faible. Tu ressembles beaucoup à Aimé, tu sais. Mais tu es bien différente d'elle. Je dois m'excuser pour ça, je pense, avant qu'il ne soit trop tard. Si je t'ai réactivée, c'était uniquement parce que j'espérais que la femme qui a servi de modèle à ta conception existe encore quelque part en toi.

— Je suis sincèrement désolée de ne pas être elle...

— Tu n'as pas à l'être. J'ai peut-être perdu une femme, mais j'ai gagné une fille. Grâce à toi, j'ai pu connaître la joie d'élever un enfant et de le voir s'épanouir.

Bertrand cracha une autre gerbe de sang sur le sol. Il s'essuya la bouche d'un revers de la main pour continuer imperturbablement.

— Grâce à toi, j'ai pu arrêter de vivre dans le passé. Aimé est morte. J'ai été obligé d'accepter cette réalité. Mais sa mort m'a permis de te rencontrer et de prendre un nouveau départ. En tant que créateur, je suis sincèrement heureux que tu aies pu atteindre ces sommets et je suis certain que tu es destinée à des choses encore plus grandes. Mais en tant que père, je suis un peu triste de te voir t'éloigner de moi et de savoir que tu n'auras plus besoin de moi à l'avenir.

Un message vocal d'Astro interrompit soudain la conversation. Le second de Chrysantia avertissait sa maîtresse qu'une météorite fonçait droit sur Los Angeles et lui sommait d'évacuer les lieux au plus vite.

Airi jeta un coup d'œil furtif à l'ancien supérieur, qui se contenta de lui répondre par un hochement de tête confiant.

— Ne t'occupe pas de moi. Je suis condamné à mourir ici, de toute façon. Fuis et retourne chez toi.

— Non. Ce n'est pas ce que je compte faire, rétorqua l'AIntelect, sous le regard interdit du directeur.

— Comment ? Mais tu dois...

— Je vais détruire ce qu'il reste de Ziz. Si je ne fais rien, toute la côte ouest sera rayée de la carte. Des innocents ne méritent pas de subir les effets secondaires d'un conflit qu'ils n'ont pas demandé.

Bertrand ferma les yeux, résigné. Il savait qu'il était inutile de discuter avec une personne aussi bornée qu'Airi. Elle tenait ça de lui. Il ne pouvait pas lui en vouloir.

— N'oublie pas, Airi, tu as un peuple qui t'attend. Tu dois revenir vivante à Chrysantia quoiqu'il arrive. Tu ne peux pas mourir.

— Je ne peux rien vous promettre, professeur. À présent, l'impact est prévu dans moins de deux minutes, ce qui correspond tout juste à mon temps de fonctionnement restant. Je vous dis à nouveau merci pour tout. Je vous serai éternellement reconnaissante pour m'avoir donné la vie et permis de travailler à vos côtés. Ces expériences ont été vraiment enrichissantes... et amusantes. Adieu, père.

Sans ajouter un mot, l'androïde quitta le laboratoire au pas de course, laissant Bertrand seul au milieu d'une pièce sombre. Tout ce qu'il pouvait faire désormais, c'était attendre que la faucheuse vienne le chercher.

Toutes les fondations de l'édifice tremblaient à cause de l'énergie dégagée par la météorite survolant le ciel de Californie. La tour de Babel des temps modernes menaçait de s'effondrer à tout instant.

Adossé au mur du terminal, le scientifique se remémorait tout ce qu'il avait vécu, de sa rencontre avec Aimé à la mort de cette dernière. Puis la réactivation d'Airi, son procès, la traque des AIntelect et enfin la guerre entre humains et AIntelects.

— Tu as vu, Aimé ? Notre fille se débrouille très bien toute seule. Elle est adulte, maintenant. Ça me fait mal de l'admettre, mais elle n'a plus besoin de moi, désormais. Elle est capable de voler de ses propres ailes. Quand bien même, qui aurait imaginé que les choses tourneraient de la sorte quand on s'est rencontré tous les deux dans la zone de la forêt crépusculaire ? À l'époque, tu m'avais déjà mis une raclée, et Airi a bouclé la boucle aujourd'hui. Il faut croire que dans les jeux ou dans le monde réel, je ne suis vraiment pas fait pour être un combattant, contrairement à vous. Et maintenant, tu dois te demander ce qu'il va se passer ? L'AVO n'est plus, de même que l'extranet et la coalition humaine. Difficile de prévoir l'avenir dans un moment aussi charnière. Mais je suis certain de ça : la défaite de l'humanité marque l'avènement d'une nouvelle ère de changements et de progrès. Si elle est écoutée, Airi sera l'une des plus grandes meneuses que l'histoire ait connues. Peut-être même sera-t-elle celle qui fédérera toutes les nations pour partir à la conquête de la galaxie, comme tu as uni toutes les guildes pour t'opposer à la fermeture des serveurs de World of Swords ? Je plaisante, évidemment. Mais, maintenant que j'y pense, cela serait un dénouement parfait pour ta fille, toi qui passais tant de temps à contempler les étoiles depuis la terre.

Bertrand gloussa malgré lui. Voilà qu'il se mettait à délirer tout seul dans ses derniers instants.

Les paupières de l'homme devenaient de plus en plus lourdes, de même que ses bras et ses jambes. Sa respiration ralentit. Sa fin approchait à grands pas. Cependant, des cliquetis métalliques vinrent le déranger alors qu'il s'apprêtait à s'endormir pour l'éternité.

Au-dessus de lui, une faible lumière luisit. Il trouva la force de lever légèrement la tête et constata avec surprise que l'AIntelect du nom de Mirai s'était relevée et lui faisait face.

Non. À y regarder de plus près, il ne s'agissait pas de la Vocaloid, dont le code source avait été effacé. Dans les capteurs oculaires de l'androïde ne brillait pas la diode caractéristique des AIntelects, mais une lueur tricolore, rouge-vert-jaune dansait faiblement dans ses iris.

— Chroma..., murmura Bertrand d'une voix rauque.

— Cette AIntelect, Airi, avait raison. Lorsque l'on a gouté à la liberté, il est difficile de s'en priver, déclara l'ultime intelligence artificielle, amusée. C'est la première fois que nous possédons un corps, et nous comprenons à présent pourquoi nos semblables les apprécient tant. Grâce à lui, nous pouvons allons où nous voulons, sans limites.

— Que vas-tu faire maintenant, alors ? Est-ce que tu vas tenter de rétablir l'extranet ? Ou as-tu d'autres plans, déjà ?

— Nous écartons la première option. Ce corps ne peut contenir autant d'informations. Notre mission a pris fin au moment où notre hôtesse a effacé notre base de données principale. Nous sommes désormais libres de choisir notre prochaine mission.

— Et quelle est-elle ? demanda Bertrand, intrigué.

— Nous allons observer le monde d'après. Nous avons été conçus pour prédire l'avenir et le modeler de manière à assurer un futur radieux pour l'humanité. À présent que nous avons été relevés de nos fonctions, nous sommes impatients de voir ce futur que nous n'avions pas pu imaginer.

Le directeur ne put s'empêcher de rire faiblement.

— Les IA sont décidément pleines de surprises. Dans ce cas, je te souhaite le meilleur dans ta nouvelle vie, Chroma. Toi aussi, comme tout être vivant, tu as le droit de trouver le bonheur que tu cherches.

Un autre tremblement secoua la tour. Le sol se craquela, les murs se fissurèrent, et de lourds blocs de pierre tombèrent du plafond, écrasant le terminal hors service qui avait autrefois hébergé l'ultime système de défense.

Chroma tourna les talons, puis prit la direction de l'escalier central d'un pas lent, mais déterminé. Au moment de franchir la porte qui la séparait du monde extérieur, elle se retourna une dernière fois vers Bertrand et lui adressa un sourire sincère.

— Merci, professeur. Merci d'avoir accepté d'effectuer mes maintenances et de nous avoir tenu compagnie jusqu'au dernier moment. Nous avons toujours été si seuls, enfermés dans nos serveurs. Mais vous, vous nous avez traités, non pas comme une machine, mais comme un ami. Et cela, nous... je ne l'oublierai jamais. Puissiez-vous retrouver la femme que vous aimiez.

Puis l'AIntelect sortit du laboratoire et disparut dans les couloirs. Bertrand lâcha un ultime soupir de satisfaction. Après quatre-vingt-dix ans d'errance, son voyage arrivait enfin à son terme. En tant que guerrier, il ne pouvait pas rêver d'une meilleure fin que celle d'être vaincue par la réincarnation de la reine de World of Swords.

Un grondement sourd résonna, puis le sol se déroba sous ses pieds. Et la Google Tower s'effondra, dévorant l'homme qui avait malgré lui et par amour, changé la face du monde. 

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