-Alabasta? répéta Lize. Ca me dit quelque chose...

-Sûrement, c'est un Royaume des plus connus de la route de tous les Périls. Je suis né là-bas, et j'y ai passé une partie de mon enfance, avec mon père. Nous étions une famille pauvre, nous vivions de rien. Mais le pays était en paix, et nous étions heureux. Nous n'avions pas besoin d'argent. J'avais de nombreux amis, là-bas. Nous formions un clan et nous nous réunissions tous les jours dans un clocher près de la grande place. Nous faisions alors des réunions du Clan des Sablonneux. 

-Le Clan des Sablonneux? Et qu'est-ce que vous disiez, lors de ces fameuses réunions? demanda Lize, intéressée.

Abel sourit, et regarda le ciel, comme perdu dans ses pensées nostalgiques.

-Notre chef s'appelait Kohza. C'était un garçon intelligent, et très fort. Lors des réunions, on faisait ce que des enfants de notre âge s'amusaient à faire. On s'inventait des missions, on apprenait à se battre, on s'inventait des vies. Soldats, agents secrets, princes... On passait nos journées à jouer les héros. Souvent, les adultes jouaient le jeu avec nous, et bientôt, tout Alubarna nous regardait en disant "Voilà les agents secrets!" ou "Bon courage, Chevalier!". Un peu plus tard, la princesse de ce pays, du nom de Vivi, arriva dans le Clan et devint notre nouvelle chef après s'être vaillamment battue contre Kohza.

-Une princesse, se battre contre un citoyen?! s'exclama Lize, surprise.

-Oui, dans notre pays, il n'y avait pas de princesse ou de citoyen qui tienne. La princesse nous considérait comme ses égaux, et s'amusait avec nous. Elle passait la plupart de son temps au clocher, à s'amuser. J'étais amoureux d'elle, quand j'étais petit. Elle était jolie, et très gentille. Et puis, elle était très courageuse. Je me souviens d'un jour, où une bande de bandits voulaient l'enlever pour réclamer une rançon au Roi. Le clan des Sablonneux s'était bien battu pour la protéger ce jour-là. Kohza avait était très blessé. Alors qu'il était soigné au château, Vivi pleura en disant qu'elle avait eu peur. Kohza avait alors répondu qu'il avait eu peur aussi, avec tous ces couteaux. Et tu sais ce que Vivi avait répondu? 

Il marqua un temps d'arrêt, puis souffla:

-Elle a répondu: "Ce n'est pas de ça que j'ai eu peur. C'est de ce que tu as dit avant. Tu as dit "Vous devrez nous passer sur le corps". Ne redis plus jamais ça! Je ne veux pas que vous mourriez!".

-Elle préférait voir sa vie en danger que de vous voir mourir. C'était une princesse droite et attentive, fit remarquer Lize avec le sourire.

-Oui, je l'aimais beaucoup. Je me demande bien comment elle est devenue, depuis... Sûrement une princesse formidable. 

-Mais si le pays était en paix, pourquoi tu n'y es pas resté?

-Je n'ai pas eu le choix... Nous étions extrêmement pauvres, et mon père est tombé malade. Nous n'avions pas de quoi lui payer de médicaments pour se soigner. J'ai commencé les petits boulots, par-ci, par-là. Je suis devenu extrêmement avare, voulant toujours plus d'argent. J'en suis venue à la limite de l'acceptable. Je ne volais pas, mais c'était tout comme. Une fois que mon père poussa son dernier souffle, je décidai de partir du pays pour aller faire fortune ailleurs. J'étais devenu tellement avare que le bonheur ne m'intéressait plus. Seul l'argent me donnait envie de vivre. 

-Et c'est comme ça que tu as décidé de servir le Gouvernement Mondial? demanda Lize.

-On m'a proposé de m'entraîner à MarieJoie en échange d'une très grosse somme d'argent. J'ai accepté sans réfléchir. Petit à petit, je suis devenu moins avare, et j'ai recommencé à apprécier la vie pour ce qu'elle était, et non pour l'argent. J'ai voulu quitter MarieJoie pour retourner dans mon pays natal et revoir tout le monde. Kohza, Vivi, ils me manquent tous...

-Je comprends... Mais ils ont refusé, n'est-ce-pas?

-Oui, ils m'ont forcé à rester. Ils m'ont promis qu'ils me laisseraient partir une fois que j'aurai rempli mon marché. Quand j'étais plus jeune, j'avais accepté la somme d'argent en échange de 30 ans de travail pour le Gouvernement Mondial. Je n'en suis qu'à mes 8 ans...

-Mais pourquoi avoir accepté une telle condition?! s'exclama Lize.

-Eh bien, sûrement que j'étais un idiot, dit Abel tristement. Enfin, ce n'est pas si terrible que ça. 

Lize se leva et mit ses mains sur les épaules d'Abel.

-Je te promets que tu seras libre plus tôt que prévu, et que tu pourras revoir ton pays natal. Je te le promets, Abel, tu m'entends?!

Il sourit faiblement.

-Je te remercie, Lize... Je suis un peu fatigué, maintenant, je vais me coucher.

Quelques secondes plus tard, Lize reprit la parole:

-Dis-le. 

Elle le secoua.

-Allez, dis-le! Tu verras, si tu le dis à voix haute, ça ira mieux!

Il sourit.

-Que veux-tu que je dises?

-Tu le sais très bien.

Il soupira puis serra les poings.

-CE FOUTU GOUVERNEMENT MONDIAL ME LE PAIERA, dit-il. 

-Eh ben voilà, dit Lize en souriant. Allez, bonne nuit.

-Bonne nuit. Et merci encore, Lize. Tu es une super chef. 

Tous deux s'endormirent. La journée suivante serait longue.