꩜ ; sunsetz
"When you go away I still see you."
Aujourd'hui, c'est mon anniversaire. Je n'ai reçu aucun appel, pas une visite.
Les gens m'oublient souvent, même quand j'ai joué un rôle important dans leur vie, se lassent facilement de moi. J'imagine que je ne suis pas si intéressant que ça. Ce n'est seulement qu'en fin de journée que j'ai entendu la sonnette de mon appartement retentir. Au début j'ai cru qu'il s'agissait d'un voisin qui a des problèmes de fuites d'eau, d'un livreur de pizza qui s'est trompé d'étage, ou que sais-je...mais personne qui pourrait s'être souvenu de mon anniversaire ou de mon existence même. Pourtant, quand j'ai ouvert la porte, je l'ai vu.
J'ai l'impression de ne pas l'avoir vu depuis des années, alors qu'il vient plus souvent que je ne me rends compte. Ce garçon qui est à la fois le plus beau des cadeaux que j'aurais pu avoir et un cadeau empoisonné. Je n'aurais vraiment jamais cru que Jisung se souviendrait de mon anniversaire. L'année dernière il a oublié, il m'a promis que cette année il ne referait pas la même erreur. Je ne pensais pas qu'il tiendrait cette promesse, c'est bien la première et peut-être même la dernière.
Jisung c'est à la fois tout et rien pour moi. C'est à la fois un souvenir et un cauchemar, un supplice et un miracle. Jisung, c'est celui qui m'a conquis depuis le début de notre adolescence, celui qui m'a fait découvrir l'amour. Celui avec qui je suis resté jusqu'à maintenant, dont je me suis lassé et avec qui j'ai pensé que je resterai pour toujours. Seulement, ces derniers temps, il part sans donner de nouvelles. Puis il revient plein de cadeaux dans les mains, même les fois où ça n'est pas mon anniversaire. Je sais qu'il veut m'acheter, pour s'excuser, mais il vient et repart aussitôt après qu'on ait rattrapé que la moitié de notre temps écoulé.
On n'est plus de ces couples qui se disent je t'aime ou qui se sourient tendrement. Jisung, il fait souvent des faux plans, il peut me lâcher pour tout et n'importe quoi et son excuse c'est toujours que c'est pour mieux me retrouver ensuite. Mais il a tort. Dès qu'il part il me manque, mais dès qu'il revient je le regrette. Je sais même plus vraiment ce qu'on est, c'est parfois pesant entre nous. On ose plus se dire des mots d'amour, c'est toujours moi qui en dit, mais ensuite il garde le silence, alors à présent je me tais.
Parfois, j'aimerais savoir ce qu'il a dans la tête, pourquoi il agit comme ça, pourquoi ne me fait-il plus part de ses inquiétudes, pourquoi est-ce que c'est si compliqué de parler tous les deux. J'imagine qu'il est tout aussi perdu que moi s'il ne me dit rien, il me disait toujours tout autrefois. Mais dans ce cas, quel est le but de persister à rester ensemble ? Je ne veux plus être avec lui, ça me fait trop mal, je le veux uniquement dans de bonnes conditions. Je ne peux pas continuer ainsi, à me voiler la face, à le laisser me mentir et me bercer dans son jeu lâche, qu'il parte pour de bon. Qu'il revienne quand il aura décidé d'être avec moi éternellement. Mais ça j'ai beau le penser, je n'arrive pas à le lui confier, j'essaye simplement de lui montrer.
Et malgré ça, il revient toujours comme une fleur, toujours avec un bouquet de fleurs différent de la fois d'avant d'ailleurs. Il revient que pour des événements, comme si cela parait bizarre qu'il vienne un jour au hasard, comme s'il faut forcément une raison ou un intérêt pour venir me voir. La dernière fois qu'on s'est vu c'était y'a pas si longtemps en réalité, c'était au nouvel an. Pas au réveillon du trente et un décembre, non...le lendemain après-midi, parce qu'il était occupé toute la nuit. Je ne sais pas où, que sais-je, avec qui, comment, pourquoi, je ne veux plus savoir de toute façon. Jisung m'a fait comprendre il y a bien longtemps qu'il ne m'appartient pas. Contrairement à moi qui préfère rester dans ma routine, il a toujours aimé voyager. Il est comme un oiseau qui a besoin de migrer, de changer d'environnement. Ses ailes le conduisent où il veut, et il n'a pas besoin de moi pour ça, bien au contraire. Et c'est peut-être parce que je l'ai retenu trop longtemps dans sa cage qu'à présent il prend son envole et revient me voir que de temps en temps.
Mais là, pour mon anniversaire cette fois, il est revenu avec un semblant de sourire sur le visage, encore avec plein de cadeaux cachés derrière son dos. Dès que je le revois c'est comme si des décennies nous avait séparés, alors que son dernier bouquet fané ne s'est toujours pas complètement décomposé. Quand je le vois je veux rattraper le temps perdu, nous ramener à nos débuts, je me jette à son cou les larmes aux yeux comme si mon deuil n'avait pas encore été fait.
Alors on s'est regardé longtemps, on s'est noyé dans nos regards, on ne s'est presque pas échangé un mot, mis à part le fait qu'il m'a souhaité un joyeux anniversaire. Puis je n'ai pas répondu, pas même un merci, un sourire, rien. J'ai encore oublié les questions que je me pose sans arrêt, je n'ai pas pensé à lui crier ces phrases que je me jure sans arrêt de prononcer la fois prochaine dès qu'il part, que je me suis ressassée. Où étais-tu passé ? Je t'ai manqué ? Tu ne m'aimes plus ? Je t'ai lassé ? Ne m'abandonne pas ! Reviens à moi... Je t'aime. Reste à mes côtés... Et je me dégoute presque en y repensant, à toutes ces fois où je me suis noyé dans mes larmes juste après qu'il soit reparti, parce que c'est absurde, je sais qu'il va revenir, même s'il repartira de nouveau ensuite.
C'est sans trop tarder que nos lèvres se sont liées, que le bouquet s'est retrouvé avec tous les autres fanés, que nos corps se sont fiévreusement enlacés. C'est toujours comme ça que ça se passe à présent, c'est comme ça qu'on rattrape le temps. Et moi qui pourtant aime la routine, j'aimerais que celle-là change. Jisung ne reste que le temps d'un coucher de soleil, on manque de temps. J'ai tellement à lui dire et si peu en réalité. Mais il repart si vite que je n'ai jamais ne serait-ce le temps de savoir par où commencer. Chacun de nos baisers ne sont plus que des injures qu'on s'arrache, mes touchers sont des griffures de vengeances, ses caresses sont des excuses imprononçables. Après qu'on se soit lié, on ne se dit toujours pas un mot, c'est comme si nos corps s'en étaient déjà assez dit.
Il remet immédiatement ses vêtements comme pour se préparer à repartir. Pour ne pas paraître ridicule, je fais pareil, comme si on ne devait pas se montrer nos corps après notre liaison pécheresse, comme si ça allait nous mettre mal à l'aise alors qu'on se connaît par cœur depuis trop longtemps à présent.
Il s'appuie contre la fenêtre juste à côté du lit. On observe le coucher de soleil en silence. Les rayons orangers se reflètent dans ses yeux sombres. Je préfère regarder le crépuscule à travers ses pupilles, ça lui donne cet air innocent et encore naïf. Cet air qu'il avait au début de notre relation, quand il me faisait découvrir de nouvelles choses, quand on passait tout notre temps ensemble et que chaque jour étaient différents.
— T'as tenu ta promesse.
C'est la première phrase que je prononce depuis son retour. Elle est sortie toute seule alors que le soleil s'efface petit à petit dans ses yeux. Il rigole en soufflant simplement du nez, un léger sourire sur ses lèvres, le regard perdu dans le soleil.
— Je suis pas simplement venu pour ça, j'avais juste très envie de te revoir. Disons que ça tombait bien.
Je ne sais pas s'il ment, s'il dit la vérité mais qu'elle me paraît absurde, je ne sais plus. Je devrais peut-être même le remercier de ces efforts qu'il fait, ça doit être dur pour lui de revenir me voir à force. C'est vrai qu'en cette période de fête on s'est vu plus souvent que tout l'été. Mais est-ce que c'est vraiment parce que je lui ai manqué ou par intérêt ? J'ai l'impression de ne plus vraiment le connaître, de ne plus le discerner correctement.
— T'étais occupé ce matin ?
— Je me suis réveillé tard parce que j'ai veillé à pas d'heure hier soir.
— T'es allé en boîte ?
— Pas vraiment, j'ai juste traîné avec des potes...enfin des gens que je connais pas vraiment.
— Fais attention à toi...
Avant c'est tout les deux qu'on traînait, maintenant j'imagine bien qu'il prend n'importe quels inconnus pour ça. Ça ne m'étonnerait pas. Jisung il est pas vraiment sociable avec les gens mais la nuit il se débrouille toujours pour sympathiser avec autrui. C'est bien comme ça qu'on s'est rencontré alors qu'on était encore que des adolescents en quête de liberté. Seulement lui, il en est toujours un dans sa tête, il refuse de grandir, ça lui fait peur. Moi, j'aimerais commencer à prendre des responsabilités, et j'ai voulu le faire avec lui mais ça ne s'est pas passé comme prévu.
On est encore jeunes, mais notre amour, il commence à se faire vieux. Il se fragilise de plus en plus, comme une bougie dont la flamme tremble, persistant à subsister. Il n'a fallu que d'un souffle pour qu'elle perde sa vivacité, il n'a fallu que d'une phrase pour que tout parte en vrille. Parfois je m'en veux d'avoir prononcé ces mots, d'avoir osé parler du futur alors qu'on est encore jeunes et censés être insouciants, vivant au jour le jour. Mais carpe diem n'est qu'un euphémisme de nos jours perdus que nous avons mal cueillis et qui sont comptés depuis mes mots prononcés, des fleurs qu'il m'a offert qui ont fanées comme son sourire.
Depuis que je l'ai interrogé sur le futur de notre relation, il a fait passer n'importe quels plans avant moi. Même quand il n'en avait pas, il trouvait des excuses, des moyens de m'éviter, puis il a dû trouver de nouvelles fréquentations avec qui passer la majeure partie de son temps, il n'a plus eu besoin de chercher bien loin. Je crois que c'est le mot mariage qu'il a ressenti comme un ravage. Jisung, avec ces mots, il a eu peur que je lui retire sa liberté que je l'oblige à tout partager, faire tout ensemble sachant qu'il n'est pas une si bonne fréquentation. Jisung j'ai bien peur que ce soit le nom de celui que je ne cesserai d'aimer mais avec qui je ne pourrais jamais être lié pour l'éternité. Le futur lui fait peur, le passé lui voler des pleurs, le présent c'est tout ce qui jusqu'à maintenant le rassurait.
Dehors il fait plus sombre, le soleil s'est complètement couché. Les yeux de Jisung sont de nouveau sombres et presque glaçants. Il se tourne vers moi et une panique étrangère s'empare de moi.
— Je descends, j'vais fumer une clope et j'dois rappeler quelqu'un.
Je sais très bien c'que ça veut dire ça. Je m'approche de lui pour l'embrasser frénétiquement puis il se relève.
— Tu peux rester là...ça me dérange pas, tu sais.
Je lève la tête pour l'observer se diriger vers la porte d'entrée où il est resté figé.
— Non mais je vais enfumer ton appart et ça va puer après...
Puis il ouvre la porte et part. Je me penche sur le rebord de la fenêtre pour l'observer sortir de l'immeuble et s'appuyer sur le mur à côté de l'entrée. Il descend toujours en bas de l'immeuble pour s'allumer une clope une fois le soleil couché. Je regarde, à travers la fenêtre et la fumée de sa cigarette s'envolant dans les rues de Paris, sa silhouette éclairée d'un simple lampadaire sous le ciel à présent obscure.
L'histoire de fumée dans l'appart c'est qu'une excuse en réalité, parce que ça sens jusqu'ici. C'est qu'une excuse pour repartir sans problème. Il m'a déjà dit qu'il allait faire un tour puis il n'est pas revenu, il a juste regagné sa bagnole et s'est cassé en douce rejoindre ses nouveaux amis. Une fois il est descendu comme à son habitude et j'ai voulu l'accompagner pour l'empêcher de partir, mais en arrivant en bas il s'était déjà éclipsé dans l'obscurité. Je me suis senti ridicule, tout seul dans la rue sombre et silencieuse.
J'entends sa voix résonner seule dans la ruelle ainsi que deux autres voix au bout du fil, celle d'un homme et d'une femme qui semble un peu plus loin, mais je ne comprends pas ce qu'ils se disent. Ce doit être ses nouvelles connaissances, ses nouvelles fréquentations. L'appel se finit sur un simple "à tout de suite" de la part de Jisung.
Je le fixe du haut de ma fenêtre, il s'est tourné vers moi comme pour
vérifier si j'avais entendu leur conversation et me regarde aussi, en silence.
— Je sens ta fumée d'ici, j'te signale.
Il hausse les épaules en apportant son fichu mégot à ses lèvres pécheresses et souriant faussement. Il me prend vraiment pour un con parfois. On se regarde quelque temps dans les yeux sans dire un mot, comme s'il attendait que je rajoute quelque chose pour briser le silence car il ne sait quoi dire.
— Bah alors...qu'est-ce que tu attends ?
Un rire lui échappe ainsi qu'un semblant d'air d'incompréhension. Mon regard noir lui a certainement fait deviné que ma question est plus serieuse qu'elle ne le parait, on dirait qu'il l'a attendu impatiemment.
— Pour quoi ? me répond-il en souriant légèrement.
Il sait très bien de quoi je parle, il joue bêtement comme pour faire passer
le courant entre nous mais ça ne marche plus à présent. Il me regarde en silence, au milieu de la rue vide, son visage légèrement caché par la fumée relevé vers ma fenêtre.
— Pour partir, Jisung. D'ici. De ma vie. Définitivement.
Ma voix a résonné et s'est faite suivre d'un long silence. Un air mélancolique prend place sur son visage. Son sourire a disparu, il ne répond plus, il n'a plus rien à répondre. Il crache la fumée dans l'air et
reprend le mégot entre ses lèvres. Quand il fume comme ça devant moi avec ce regard j'ai l'impression qu'il veut enlever une partie de moi sur ses lèvres et à chaque souffle de fumée que je vois se disperser c'est comme une rafale de vent sur la dernière flammèche de notre amour avant qu'il reparte une nouvelle fois.
— Je suis sérieux, j'veux des réponses, insisté-je fermement, mes doigts se resserrant sur le rebord de la fenêtre. Réponds moi au moins...Mens moi même si ça te chante !
Il baisse la tête comme un enfant à qui l'ont fait la morale. Au fond il sait très bien qu'il est immature, il refuse de l'admettre car son existence n'a de sens que s'il s'amuse et se fiche de tout, comme les gamins. Ses bras sont étendus le long de son corps, sa cigarette émet de la fumée, se vide toute seule, s'envolant avec les paroles que j'ai prononcées dans le néant.
— Pourquoi est-ce que c'est si dur de te faire parler ces derniers temps ?
J'ai l'impression que mes yeux ne vont pas tarder à se remplir de larmes, mes mains se resserrent davantage sur la rambarde. J'aimerais qu'il me dise la vérité, qu'il m'avoue tout maintenant.
— Jeongin, je...
Il réfléchit sûrement à une excuse encore, maintenant que le sujet est posé il ne peut plus revenir en arrière, il doit regretter d'être venu, d'avoir tenu sa promesse, il doit regretter de m'avoir fait croire que je lui ai manqué. Je ne crois pas un mot de ce qu'il dit, même s'il dit la vérité, il ne me la montre pas suffisamment.
Les sentiments que je ressens sont partagés, je ne sais pas si je suis en colère contre lui et qu'il ait agi ainsi, contre moi d'être aussi naïf avec lui, si je suis triste parce que je regrette tous nos moments ou parce que je veux l'oublier à tout jamais. Je ne sais plus. Et je ne veux même plus savoir honnêtement.
— Tu sais quoi ferme-là, en fait je veux pas t'entendre !
Un sentiment de rage s'empare de moi. Je saisis un des bouquets de fleurs et le jette par la fenêtre. Puis un livre qu'il m'a prêté que j'ai lu un nombre incalculable de fois en pensant à lui, un bijoux encore dans sa boite, que je n'ai osé porter que quelques fois quand on se voyait, qui doit valoir un smic, et j'ignore bien comment il a fait pour se le procurer.
Ces mots qui étaient jusqu'à maintenant enfouis dans ma gorge noués sortent enfin.
— Où est-ce que tu vas et avec qui de plus important que moi ? Un bouquet de roses passe par la fenêtre. Je t'ai réellement manqué ? Un porte clé souvenir de son voyage la première fois qu'il a disparu sans prévenir. Pourquoi est-ce que tu ne m'aimes plus ? Une première larme s'enfuit à ses côtés. Dis le moi simplement, je t'ai lassé ? Une lettre d'amour au papier jauni qu'il m'avait envoyée quand on venait de se mettre ensemble, que j'ai toujours laissé sur ma table de chevet. Ne m'abandonne pas ! Un air désolé sur son visage. Reviens... Une deuxième larme. Je t'aime, tu ne vois pas ? Des mots qui n'ont jamais été prononcés si douloureusement. Reste à mes côtés... Ma tête se baisse contre la rambarde, entre mes poings serrés, épuisé. Part à tout jamais, cette fois je ne compte plus, ça explose, arrête de te foutre de moi, Jisung... mes sanglots étouffent mes mots. Va t'en, maintenant, part.
Je ne le regarde plus, ma tête est contre le rebord de la fenêtre et tout ce que je vois sont le noir et le floue de mes yeux dont les larmes ne cessent de couler. Je ne sais pas s'il est encore en bas, s'il est parti, je ne l'entend plus, il ne me répond pas. Le connaissant, il a dû déjà partir pour de bon. Jisung, il n'insiste jamais pour rester. Il a dû comprendre que c'est ce qui est le mieux pour moi, de partir à tout jamais, même sans dire au revoir. Ça m'aurait sûrement fait encore plus mal. Finalement j'aurais préféré ne pas avoir de cadeau pour mon anniversaire. J'aurais préféré qu'il m'oublie et ne tienne pas sa promesse.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro